1 Psaume d’Asaph.
Ô Dieu ! Les nations sont entrées dans ton héritage ;
Elles ont profané le temple de ta sainteté,
Elles ont fait de Jérusalem un monceau de pierres. 2 Elles ont donné les cadavres de tes serviteurs
En pâture aux oiseaux du ciel,
La chair de tes fidèles aux bêtes de la terre ; 3 Elles ont répandu leur sang comme de l’eau
Tout autour de Jérusalem,
Et personne pour les enterrer ! 4 Nous sommes en opprobre chez nos voisins,
La risée et le jouet de nos alentours. 5 Jusques à quand, Éternel ! T’irriteras-tu sans cesse,
Et ta jalousie brûlera-t-elle comme le feu ? 6 Répands ta fureur sur les nations qui ne te connaissent pas
Et sur les royaumes qui n’invoquent pas ton nom ! 7 Car ils ont dévoré Jacob
Et dévasté sa demeure. 8 Ne nous impute pas les fautes de nos ancêtres !
Hâte-toi ! Que tes compassions viennent au-devant de nous,
Car nous sommes extrêmement misérables ! 9 Secours-nous, ô Dieu de notre salut,
Par égard pour la gloire de ton nom !
Délivre-nous et pardonne nos péchés,
À cause de ton nom ! 10 Pourquoi les nations diraient-elles : Où est leur Dieu ? Qu’il devienne manifeste à nos yeux parmi les nations
Que tu venges le sang de tes serviteurs, le sang répandu ! 11 Que le gémissement des captifs parvienne jusqu’à toi !
Par le pouvoir de ton bras, sauve ceux qui sont voués à la mort ! 12 Et rends à nos voisins sept fois dans leur sein
L’outrage par lequel ils t’ont outragé, Seigneur ! 13 Et nous, ton peuple, le troupeau que tu pais,
Nous te célébrerons éternellement ;
De génération en génération nous publierons ta louange.
Plusieurs Pères de l’Église ont rapporté ce psaume aux profanations et aux cruautés commises à Jérusalem par Antiochus Épiphane. Il se rapproche en effet beaucoup du Psaume 74, qui nous a paru appartenir à cette époque. On pourrait penser aussi à la prise de Jérusalem par les Chaldéens. Mais le psaume dépeint une persécution, plutôt qu’une guerre suivie d’un désastre ; l’expression : tes fidèles (verset 2), convient mieux aux martyrs du deuxième siècle avant Jésus-Christ qu’à la génération infidèle de l’époque de Jérémie. Tous les traits caractéristiques de la complainte du psalmiste : profanation du temple, dévastation de la ville, sang répandu, blasphèmes contre Jéhova, se trouvent réunis dans le tableau que font les Maccabées des atrocités commises par Antiochus. Comparez entre autres 2 Maccabées 8.2-4.
Le psaume comprend trois strophes, de quatre versets chacune, suivies d’une courte conclusion. La première strophe forme la complainte proprement dite, où sont décrites les profanations commises (versets 1 à 4) ; les deux suivantes sont une prière, où le psalmiste demande la délivrance d’Israël et le châtiment de ses ennemis, tout d’abord en considération même des maux extrêmes du peuple (versets 5 à 8), puis eu égard à la gloire de Dieu, qui serait compromise, si le mal n’était pas réparé et châtié (versets 9 à 12).
Les nations… Il faut conserver ici au mot gojim le sens de : nations idolâtres, par conséquent souillées et indignes d’entrer dans l’assemblée de l’Éternel. Le fait que l’héritage de l’Éternel (la Terre Sainte) est envahi par les païens équivaut presque à la suppression de cet héritage (Deutéronome 23.2-3 ; comparez Lamentations 1.10).
Tes fidèles : voir, pour le sens du mot chasid, Psaumes 4.4 ; Psaumes 50.5, notes.
Rester sans sépulture, à la merci des oiseaux du ciel et des bêtes de la terre, était, pour un Israélite, plus triste encore que la mort. Comparez 2 Samuel 21.10. C’était l’accomplissement de la menace Deutéronome 23.26.
Les versets 2 et 3 sont cités 1 Maccabées 7.17, comme décrivant les événements qui s’accomplirent sous Antiochus.
Comme de l’eau : sans plus de scrupules que si ce n’était que de l’eau.
La risée et le jouet : reproduction textuelle de Psaumes 44.14.
Délivre ton peuple !
Ta jalousie, ou : ton zèle. Il s’agit du zèle de Dieu pour sa cause, qui est celle de la vérité, de la justice et de la sainteté ; ce zèle se transforme en flamme de colère contre tout ce qui compromet une telle cause.
Répands ta fureur… Que celle ardente jalousie se répande sur les païens, dont tu t’es servi jusqu’à présent pour frapper ton peuple. Le fait de ne pas connaître Dieu n’est point pour ceux-ci une excuse, car c’est là une ignorance coupable.
Car ils ont dévoré Jacob. C’est ici le crime qui doit attirer sur eux la colère de Dieu : non contents de ne pas connaître Dieu, ils ont cherché à extirper le seul peuple qui le connût. Les versets 6 et 7 sont une citation de Jérémie 10.25.
Les fautes de nos ancêtres. La génération actuelle ne se sent pas coupale d’infidélités extraordinaires ; le psalmiste se demande si Dieu châtie en elle l’idolâtrie des générations d’autrefois ; de semblables châtiments ont lieu pour ceux qui mettent le comble aux péchés de leurs pères (Matthieu 23.35), mais tel ne semblait pas être le cas des Juifs persécutés par Antiochus. La persécution poussa, il est vrai, un bon nombre d’entre eux à l’apostasie, mais au moment où cette persécution éclata, le peuple semblait être dans une situation religieuse normale, ce qui ne l’empêche pas de demander le pardon de ses propres péchés (verset 9).
Aie égard à ton nom !
Pour la gloire de ton nom…, à cause de ton nom. C’est là le motif qui devient prédominant dans le cœur du croyant, à mesure qu’il prie ; un tel motif donne à la prière une assurance et une force qu’elle chercherait vainement ailleurs. Comparez Joël 2.17.
Qu’il devienne manifeste… que tu venges le sang… Cette requête repose sur la promesse divine : Deutéronome 32.43. Si elle émanait d’un désir de vengeance personnelle, elle témoignerait d’un degré bien inférieur de connaissance religieuse ; mais on a vu que le psalmiste se place ici au point de vue de ce que réclame la gloire de Dieu : elle ne peut laisser impunis d’injustes massacres. C’est là une loi divine dont la grâce peut retarder ou transformer les effets, mais qu’elle ne supprime, pas. On sait quelles rétributions le massacre de la Saint-Barthélemy a attirées sur ceux qui l’ont organisé ou permis et quiconque croit à la justice de Dieu est certain que les crimes commis de nos jours contre le peuple arménien ne resteront pas impunis (Les écrivains de la Bible Annotée ne pouvaient évidemment pas faire ici allusion au génocide de 1915, ils parlent d’un massacre antérieur de plus de 100 000 arméniens perpétré en 1895-1896 sur l’ordre du sultan Abdul Hamid ; note du CR).
Ceux qui sont voués à la mort, hébreu : les fils de la mort, ceux dont la condition est telle, que l’on pourrait croire que la mort a sur eux des droits incontestables.
Le sein : le pli du vêtement dans lequel on verse un don abondamment mesuré. Comparez Ruth 3.15 ; Luc 6.38.
Sept fois : nombre consacré pour désigner une rétribution complète (Genèse 4.15 ; Proverbes 6.31).
Le troupeau que tu pais. Nous retrouvons ici l’image familière aux psalmistes de la famille d’Asaph (Psaumes 84.1 ; Psaumes 77.21 ; Psaumes 78.71 ; Psaumes 80.2, etc.).
Vous êtes actuellement sur une version optimisée pour mobile, si vous souhaitez basculer sur la version complète suivez le lien suivant : Le livre des Psaumes 79