1 Ainsi donc, nous aussi, puisque nous sommes entourés d’une si grande nuée de témoins, ayant rejeté tout fardeau et le péché qui nous enveloppe aisément, poursuivons avec persévérance la course qui nous est proposée, 2 les regards arrêtés sur Jésus, le chef et le consommateur de la foi ; qui, en vue de la joie qui lui était proposée, a souffert la croix, ayant méprisé la honte, et s’est assis à la droite du trône de Dieu. 3 Considérez en effet Celui qui a souffert de la part des pécheurs une si grande contradiction contre lui-même, afin que vous ne vous laissiez pas abattre, étant découragés dans vos âmes.
4 Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang, en combattant contre le péché. 5 Et vous avez oublié l’exhortation qui vous dit comme à des fils : Mon fils, ne méprise pas la correction du Seigneur, et ne perds point courage, lorsqu’il te reprend. 6 Car celui que le Seigneur aime, il le corrige, et il frappe de verges tout fils qu’il reconnaît pour sien. 7 C’est pour être corrigés que vous souffrez ; c’est comme des fils que Dieu vous traite, car quel est le fils qu’un père ne corrige pas ? 8 Mais si vous êtes exempts de la correction à laquelle tous ont part, vous êtes donc des enfants illégitimes, et non des fils. 9 D’ailleurs, puisque nos pères selon la chair nous corrigeaient et que nous les respections, ne serons-nous pas beaucoup plutôt soumis au Père des esprits, et nous vivrons ! 10 Car eux nous corrigeaient pour peu de jours, comme ils le trouvaient bon ; mais lui le fait pour notre profit, afin que nous participions à sa sainteté. 11 Toute correction, il est vrai, semble au premier moment non un sujet de joie, mais de tristesse ; mais plus tard elle rapporte à ceux qui ont été exercés par elle un fruit paisible de justice. 12 C’est pourquoi redressez les mains languissantes, et les genoux fléchissants ; 13 et faites à vos pieds des sentiers droits, afin que ce qui est boiteux ne se dévoie pas, mais que plutôt il soit guéri. 14 Recherchez la paix avec tous, et la sanctification, sans laquelle personne ne verra le Seigneur ; 15 veillant à ce que personne ne soit dépourvu de la grâce de Dieu ; à ce qu’aucune racine d’amertume poussant des rejetons ne produise du trouble, et que par elle le grand nombre ne soient souillés ; 16 à ce que personne ne soit fornicateur ou profane comme Ésaü, qui, pour un seul mets, vendit son droit d’aînesse. 17 Car vous savez que, même après cela, voulant hériter de la bénédiction, il fut rejeté : car il ne put trouver la place d’un changement d’idée quoiqu’il le recherchât avec larmes. 18 Car vous ne vous êtes pas approchés de quelque chose qu’on pût toucher, ni d’un feu brûlant, ni de l’obscurité, ni des ténèbres, ni de la tempête ; 19 ni du son de la trompette, ni de la voix des paroles, telle que ceux qui l’entendirent prièrent que pas une parole de plus ne leur fût adressée ; 20 car ils ne supportaient pas ce qui était ordonné : Si même une bête touche la montagne, elle sera lapidée. 21 Et si terrible était ce qui apparaissait, que Moïse dit : Je suis épouvanté et tout tremblant. 22 Mais vous vous êtes approchés de la montagne de Sion et de la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste, et des myriades d’anges, assemblée de fête, 23 et de l’Église des premiers-nés qui sont inscrits dans les cieux, et d’un juge qui est Dieu de tous ; et des esprits des justes parvenus à la perfection, 24 et de Jésus, médiateur de la nouvelle Alliance, et du sang de l’aspersion, qui prononce quelque chose de meilleur que le sang d’Abel.
25 Prenez garde de refuser d’entendre Celui qui parle ; car si ceux-là n’ont point échappé, ayant refusé d’entendre Celui qui se révélait sur la terre, combien moins échapperons-nous, si nous nous détournons de Celui qui se révèle du haut des cieux, 26 lui, dont la voix alors ébranla la terre, et qui maintenant a promis disant : Une fois encore j’ébranlerai, non seulement la terre, mais aussi le ciel. 27 Or ces mots : Une fois encore, indiquent le changement des choses ébranlées, comme ayant été créées, afin que celles qui ne sont point ébranlées subsistent. 28 C’est pourquoi, recevant un royaume inébranlable, ayons de la reconnaissance, par laquelle nous rendions à Dieu un culte qui lui soit agréable, avec respect et avec crainte ; 29 car aussi notre Dieu est un feu dévorant.
La course du chrétien dirigée par Jésus
Environnés de cette grande nuée de témoins, courons avec persévérance dans la carrière ouverte devant nous, après nous être débarrassés des entraves du péché, les regards sur Jésus, le chef et le consommateur de la foi, qui, considérant la joie qui l’attendait, a souffert la croix et s’est assis à la droite de Dieu. L’exemple de la contradiction qu’il a endurée nous empêchera de perdre courage (1-3).
La discipline salutaire de la souffrance
Les lecteurs de l’épître n’ont pas encore résisté jusqu’au sang en luttant contre le péché. Ils ont oublié la parole qui présente l’épreuve comme une correction paternelle. L’épreuve est un signe que Dieu les traite comme ses enfants légitimes. Puisque nous avons accepté les châtiments que nous infligeaient nos parents, à plus forte raison devons-nous accepter ceux que nous dispense le Père des esprits, car nos parents nous punissaient selon leur jugement, mais lui nous châtie pour nous faire participera sa sainteté. Sujet de tristesse d’abord, la correction porte ensuite un fruit paisible de justice (4-11).
Grec : Ayant, placée autour de nous une si grande nuée de témoins.
Il s’agit ici des témoins de la foi que l’auteur a rappelés dans le chapitre précédent et de tant d’autres encore qui ont glorifié Dieu par leur constance dans les épreuves. Ils sont une grande nuée, une multitude, quoique, à chaque époque, le peuple de Dieu peu nombreux.
Cette pensée est fort encourageante (comparez Apocalypse 7.9) et c’est en effet pour affermir ses frères dans leur foi que l’auteur leur rappelle ce fait. Veut-il dire que ces témoins nous entourent réellement de leur présence invisible et sont les spectateurs de notre course ? La comparaison de la vie chrétienne avec la course dans le stade donne à le penser.
Grec : Courons avec persévérance la course (la lutte à la course) placée devant nous (comparer Hébreux 10.36).
On retrouve ici l’image favorite de l’apôtre Paul, la vie chrétienne représentes comme une de ces courses dans le stade auxquelles les Grecs se livraient avec passion dans leurs jeux publics (comparer 1 Corinthiens 9.24 ; 1 Corinthiens 9.25, note ; Philippiens 3.14, note, 1 Timothée 6.12 ; 2 Timothée 4.7).
Une « nuée de témoins » entourait alors les concurrents et les encourageait de ses applaudissements. Pour le chrétien, ce sont tous ceux qui ont déjà combattu et vaincu. Ceux qui couraient dans la lice avaient grand soin de se débarrasser de tout fardeau qui aurait pu entraver la vitesse de leur course.
Que de choses, même permises, que d’attachements, que de soucis, même légitimes, peuvent devenir pour le croyant une entrave ! Mais il est une chose qui arrêterait absolument sa course et que l’auteur nomme sans figure : c’est le péché.
L’épithète appliquée au péché et qu’on peut rendre par ces mots : qui enveloppe (ou circonvient) aisément, ne se trouve qu’ici. L’image qu’elle renferme a été entendue soit de gens qui entourent le coureur et l’arrêtent dans sa course, soit d’un vêtement flottant qui gêne sa marche. Cette dernière comparaison est la plus naturelle et la plus généralement admise aujourd’hui. Telle est l’action du péché s’il n’est absolument rejeté ! (Romains 7.21).
En poursuivant notre course, nous devons (grec) détourner nos regards du monde pour les tenir arrêtés sur Jésus, notre Sauveur, vainqueur avant nous dans la même course, dans le bon combat de la foi et qui nous conduit à la victoire.
C’est pourquoi il est appelé ici le chef et le consommateur de la foi. Les anciens interprètes entendaient ce mot de la foi du chrétien, dont Jésus serait « l’auteur » qui la crée dans le cœur et le consommateur qui l’amène à son plein développement.
Chrysostome disait :
C’est lui qui a déposé en nous le premier germe de la foi, comme il dit à ses disciples : « Ce n’est pas vous qui m’avez élu, mais c’est moi qui vous ai choisis » (Jean 15.16), ou, comme Paul s’exprime : « Je connaîtrai comme j’ai été connu » (1 Corinthiens 13.12). Or, si c’est lui qui a opéré le commencement, il accordera aussi la fin
On peut objecter à cette explication que le mot grec ne signifie pas auteur, dans le sens de créateur, mais chef, conducteur et que Jésus n’est pas appelé chef de notre foi, mais de la foi.
Aussi les interprètes récents entendent-ils par la foi, celle dont Jésus vivait lui-même et le sens serait alors : « Il est le chef qui nous précède en donnant l’exemple de la foi, de cette foi qu’il a portée jusqu’à la perfection ».
Cependant on peut se demander si c’est là tout ce que l’auteur a voulu exprimer. Le titre qu’il donne à Jésus, s’il ne signifie pas proprement « auteur », prend le sens de promoteur, instigateur. Quand il caractérise le rôle de Jésus dans l’œuvre du salut, il ne le présente pas seulement comme le modèle du croyant en donnant l’exemple de la vie divine, Jésus est devenu « Prince de la vie », il la communique à ceux qui le suivent (comparer Hébreux 2.10 ; Hébreux 5.8 ; Hébreux 5.9 ; Actes 3.15 ; Actes 3.5-31).
Les mots : en vue (ou, grec au lieu) de la joie qui lui était proposée (grec la joie placée devant lui) ont été expliqués de trois manières différentes :
Ainsi l’entendent la plupart des interprètes modernes et c’est le sens qui paraît le plus en harmonie avec les termes du texte. Jésus, homme, notre frère a combattu comme nous tous jusqu’à la victoire, dont le prix lui était proposé et pour l’obtenir, il (grec) a soutenu (Hébreux 10.32), ou enduré la croix, méprisant la honte qui s’y attachait. Cette honte n’existait qu’aux yeux des hommes ; la croix, devant Dieu, était une gloire, suivie de la gloire éternelle.
Pour Jésus la croix était en effet, le chemin du trône de Dieu, à la droite duquel il s’est assis (comparer Hébreux 1.3).
Il ne résulte point de cette pensée que Jésus ait ainsi souffert par une recherche de lui-même et de sa propre joie. Car cette joie n’est si grande pour lui, le Sauveur, que parce qu’elle glorifie Dieu (voir la même pensée dans Philippiens 2.5-11) et parce qu’elle devient le partage d’êtres qui étaient voués à une éternelle misère (Matthieu 25.21 ; Jean 4.36 ; Jean 15.11 ; Jean 17.13).
Mais il ne faut pas perdre de vue le but de l’auteur, qui est de montrer aux chrétiens la source intarissable de leur courage et de leur force. Ils la trouvent dans l’exemple et la communion de leur Sauveur, en le suivant sur la voie qui l’a conduit où il est (Hébreux 12.3). La même pensée est exprimée ainsi par Paul : « Si nous souffrons avec lui, nous serons aussi glorifiés avec lui » (Romains 8.17).
La contradiction, dont Jésus fut l’objet durant toute sa vie, ne consista pas seulement en paroles : ce fut surtout la révolte et l’inimitié dont le monde le poursuivit jusque sur la croix. Ainsi fut accomplie à la lettre la prophétie de Siméon : « Celui-ci sera… un signe auquel on contredira » (Luc 2.34).
Si tel fut le Maître, à quoi doivent s’attendre les disciples ? Quel motif (en effet) de regarder à Jésus !
Une variante de Codex Sinaiticus D, versions, Pères, porte : « Une si grande contradiction de la part des pécheurs contre eux-mêmes ».
Cette leçon est adoptée par Westcott et Hort. Elle donnerait au passage ce sens : « En rejetant Jésus, les pécheurs se contredisent eux-mêmes, leur conscience comme leur intérêt supérieur » (Matthieu 23.37). Cette pensée paraît étrangère au contexte et la variante doit être rejetée.
Les lecteurs de l’épître n’avaient point encore souffert de persécution jusqu’au sang dans leur combat contre le monde (comparez toutefois Hébreux 10.33 et Introduction) : pourquoi donc seraient-ils découragés (Hébreux 12.3 ; Hébreux 12.5), eux qui peuvent regarder à la croix sanglante de Christ, ou même aux souffrances des témoins de l’ancienne Alliance (Hébreux 12.1) ?
Proverbes 3.11, d’après les Septante.
Il y a dans l’hébreu : « Car celui que l’Éternel aime, il le frappe, et cela, comme un père le fils qu’il chérit ». Comparer Apocalypse 3.19.
Ces paroles présentent les afflictions sous leur jour le plus consolant (comparer Romains 5.3 ; Romains 8.28).
Sans doute, la souffrance est dans notre humanité un effet du péché, un châtiment que Dieu inflige dans sa justice ; mais pour ceux qui, en Christ, sont devenus des fils de Dieu, elle se transforme en un signe de l’amour du Père (Hébreux 12.7-10).
Le sentiment de cet amour ôte à la souffrance son aiguillon, l’amertume et la malédiction du péché. La croix que nous portons avec Christ et qui nous rend semblables à lui (Philippiens 3.10), est une preuve spéciale de la grâce. Par elle, Dieu consomme ses enfants de la manière dont Jésus fut consommé (comparer Hébreux 2.10 ; Hébreux 5.9).
Tel est le sens de cette image d’un père qui corrige son fils, tout en l’aimant et parce qu il l’aime.
Nous traduisons par corriger et correction, les termes que d’autres rendent par châtier et châtiment, parce qu’ils impliquent l’idée d’une action pédagogique exercée par Dieu.
Le grec porte littéralement : En correction vous souffrez.
D’autres traduisent par l’impératif : « Souffrez la correction ». Le texte reçu (minuscule) porte : « Si vous endurez la correction ».
Les derniers mots du verset sont traduits par plusieurs interprètes : qui est un fils, un vrai fils, que le père ne corrige pas ?
Grec : Dont tous sont devenus participants.
L’auteur pense-t-il aux croyants énumérés à Hébreux 11 ? Ou le mot tous reprend-il simplement l’affirmation de Hébreux 12.6 « Il frappe tout fils qu’il reconnaît pour sien » ?
Ce n’est pas là seulement un argument a fortiori, signifiant : puisque nos pères selon la chair nous ont corrigés et que nous les avons respectés, ne serons-nous pas soumis, à bien plus forte raison aux corrections de Dieu, qui est infiniment plus sage et plus saint que nos pères ?
La comparaison a, dans la pensée de l’auteur, une portée plus profonde. Les pères de notre chair, que nous avions eus pour correcteurs ou éducateurs (ainsi porte le grec), ces auteurs de notre vie naturelle, après nous l’avoir donnée ne pouvaient rien faire de plus ; avec quelque soin qu’ils s’appliquassent à notre éducation, ils ne pouvaient nous communiquer la vie de l’âme.
Mais le Père des esprits (Nombres 16.22), celui de qui procède toute vie spirituelle, atteint un tout autre but par le moyen éducateur de l’épreuve : il fait vivre, vivre de la vie véritable, éternelle, ceux qui se soumettent, comme ses enfants, à la discipline de son amour et de son Saint-Esprit (Hébreux 12.10 ; comparez Romains 8.13).
L’auteur considère ce précieux fruit de l’éducation divine par l’épreuve comme un fait incontestable : et nous vivrons (comparer Hébreux 10.38) !
L’auteur confirme (car) la certitude de l’espérance qu’il vient d’exprimer (Hébreux 12.9), en relevant un nouveau contraste entre la correction des pères selon la chair et celle de notre Père céleste.
La première, à supposer que ces pères ne suivissent que leurs sentiments naturels, n’avait lieu que selon leurs vues faillibles, souvent erronées (comme ils le trouvaient bon), de plus, leurs corrections s’exerçaient pour peu de jours, pour aussi longtemps que dure l’enfance, la première jeunesse.
Mais Dieu, dans sa sagesse et son amour, nous corrige durant tout le cours de la vie, et cela, pour notre profit pour un profit éternel, puisqu’il ne s’agit de rien moins que de nous rendre participants de sa sainteté (Lévitique 11.44).
L’auteur a dit déjà comment ce but est atteint (voir Hébreux 12.6, note, Hébreux 12.9, note).
On a proposé de voir dans ce peu de jours la durée de notre existence terrestre (Genèse 47.9), qui est tout le but de l’éducation naturelle tandis que l’éducation que Dieu fait de nous, nous rend participants de sa sainteté et par là même de la vie éternelle. Il n’est pas certain que cette antithèse fût dans la pensée de l’auteur.
L’auteur ne veut rien exagérer ; il convient que l’épreuve produit au premier moment (grec pour le présent) non de la joie, mais de la tristesse (l’Évangile est si humain !), toutefois, sans s’arrêter trop aux premières impressions douloureuses, il faut regarder au résultat final.
Et ce résultat, c’est un fruit paisible de justice.
Le fruit de justice, c’est la sainteté (Hébreux 12.10) dont Dieu veut nous rendre participants par l’épreuve ; et c’est aussi la seule source de la vraie paix (Ésaïe 32.17 ; voir encore, sur le fruit de l’épreuve : Romains 8.28 ; 2 Corinthiens 4.17 ; 1 Pierre 4.13 ; Jacques 1.2 et suivants).
Prendre courage
Fortifiez-vous, suivez la voie droite, afin que le mal ne s’aggrave pas, mais soit guéri (12-13).
La tâche du chrétien dans l’Église
Rechercher la paix et la sanctification nécessaire pour voir Dieu ; veiller à ce que nul n’abandonne la foi, et, de la sorte, ne trouble l’Église et ne se perde, comme Ésaü, irrémissiblement (14-17).
Ésaïe 35.3. Les commentateurs récents pensent que ces termes sont plutôt empruntés au livre apocryphe de Jésus fils de Sirach (25.23), avec lequel notre texte concorde exactement, tandis qu’il diffère de celui des Septante dans Ésaïe.
Redressez, d’autres traduisent : « relevez, fortifiez ».
Cette parole d’encouragement (Hébreux 12.12-17) est la conséquence naturelle (c’est pourquoi) que l’auteur tire des grandes vérités qu’il vient d’exposer sur le but de l’épreuve.
Plusieurs interprètes pensent que l’exhortation est adressée à l’Église dans son ensemble ; l’auteur se la représenterait sous l’image d’un corps (comparez 1 Corinthiens 12.12) ; les mains languissantes, les genoux fléchissants figureraient les membres faibles de l’Élise, qu’il faut affermir par une sage et paternelle discipline. Cette explication nous paraît peu naturelle.
Les paroles de Hébreux 12.12 ; Hébreux 12.13, en tout cas, s’appliquent à chaque chrétien pris individuellement. Même le but indiqué : « Afin que ce qui est boiteux ne se dévoie pas… » peut s’entendre de la vie personnelle du croyant (comparez la note suivante) ; mais on peut aussi admettre que l’expression : « ce qui est boiteux », désigne des membres chancelants de l’Église ; c’est ce que font la plupart des commentateurs à cause de l’invitation de Hébreux 12.15.
Cela n’empêche nullement d’appliquer aux individus les versets Hébreux 12.12 ; Hébreux 12.13, l’auteur invoquerait seulement, à l’appui de son exhortation, la solidarité qui unit les chrétiens dans l’œuvre de la sanctification et dans la lutte qu’ils ont à soutenir : fortifiez-vous, afin de fortifier les faibles !
Comparer Proverbes 4.25 ; Proverbes 4.26.
Ce que sont, pour la vie du corps, des mains affaiblies, des genoux fléchissants (Hébreux 12.12) qui rendent tout l’homme boiteux, impotent (Hébreux 12.13), c’est ce qu’est pour la vie de l’âme un relâchement général de la piété, des doutes, qui obscurcissent et paralysent la foi, des infidélités dans la conduite, qui éloignent de la communion de Dieu ; en un mot, un état d’âme qui menace de devenir une rechute totale.
Pour les hommes sincères chez lesquels la conscience parle encore, il y a un remède à ce mal redoutable. Mais il doit être appliqué sans retard ; c’est celui que conseille ici l’auteur : faites à vos pieds des sentiers droits, c’est-à-dire, ôtez de votre chemin les pierres et tout ce qui serait pour vous occasion de chute (comparer Ésaïe 40.3).
Soumettez votre âme à une discipline vigilante. Sans cela, il y a danger qu’étant déjà boiteux, avançant avec difficulté (selon d’autres, partagés entre Dieu et le monde, 1 Rois 18.21), vous ne sortiez tout à fait du droit chemin ; alors le mal serait sans remède (Hébreux 12.17).
La traduction : « Suivez avec vos pieds des voies droites », est condamnée par les interprètes les plus autorisés.
Les dissensions entre chrétiens sont un des plus grands dangers pour la vie spirituelle ; la paix, la communion fraternelle, au contraire, est tout ce qu’il y a de plus propre à raffermir les âmes affaiblies.
De là, le rapport que l’auteur laisse entrevoir ici entre la paix et la sanctification.
Il faut (grec) poursuivre l’une et l’autre, l’une par l’autre.
Quel motif pour des chrétiens d’avancer dans la sanctification ! Dieu étant la sainteté même, nul ne le verra (Matthieu 5.8 ; 1 Jean 3.2), c’est-à-dire ne pourra s’approcher de lui pour être en communion avec lui, sans la sanctification (1 Pierre 1.15 ; 1 Pierre 1.16 ; comparez Matthieu 5.48).
Nous ne sommes pas sauvés par la sanctification ; nous le sommes « par la grâce, par la foi » (Éphésiens 2.8) ; mais la grâce et la foi, si elles sont vivantes en nous, ont pour résultat nécessaire la sanctification.
Ce sérieux avertissement : que nul ne soit dépourvu de la grâce de Dieu (le verbe grec signifie être en arrière de, manquer de ; comparez Hébreux 4.1 ; Ecclésiaste 6.2), l’auteur en fait ressortir l’importance en montrant d’abord le mal que peut faire celui qui abandonne la foi. Il l’établit par une allusion à Deutéronome 29.18, où l’infidélité du cœur et l’idolâtrie sont comparées à une « racine qui produit du fiel et de l’absinthe ».
Un manuscrit des Septante porte : « une racine d’amertume qui produire du trouble ». L’auteur avait probablement cette leçon sous les yeux. Il ajoute qu’il faut veiller à ce que, par cette racine, le grand nombre (grec les plusieurs) ne soient souillés.
L’exemple d’Ésaü (Genèse 25.29 et suivants) qui, pour une jouissance charnelle, livra ses droits de premier-né par lesquels il était héritier de la bénédiction promise à Abraham et à sa postérité, montre l’effrayante gravité de la chute contre laquelle l’auteur met ses lecteurs en garde.
Quiconque demeure dans une condition morale où il est « privé de la grâce de Dieu » (Hébreux 12.15) est, comme Ésaü, fornicateur, au sens religieux du mot et profane, c’est-à-dire charnel, terrestre, animé d’un esprit opposé à la sanctification (Hébreux 12.14). Le péché d’Ésaü méprisant la promesse et s’excluant ainsi de l’Alliance de Dieu est caractérisé comme une fornication, un adultère suivant l’image fréquemment employée par les prophètes qui assimilent aux relations conjugales les rapports que le peuple élu ou l’âme croyante ont avec Dieu (Jérémie 2.2 ; Jérémie 3.6-9 ; Jérémie 3.19-20 ; comparez Apocalypse 2.22 ; Apocalypse 14.8).
D’autres prennent fornicateur au sens propre ; ce serait un avertissement spécial (comparez Hébreux 13.4 ; 1 Corinthiens 5.9 et suivants) ; après ce précepte, l’auteur en donnerait un second concernant l’esprit profane dont Ésaü fit preuve. Cette interprétation méconnaît l’unité de la pensée dans ce morceau.
Ce verset soulève diverses questions concernant la construction et le sens.
Les uns entendent ces mots du sentiment d’Isaac, comme Osterwald, qui paraphrase : « Il ne put trouver le moyen de le faire changer de résolution ». Ceux qui soutiennent cette interprétation se fondent sur le récit de la Genèse, qui ne parle que des vains efforts d’Ésaü pour fléchir son père.
Les autres prouvent par l’exemple de Melchisédek (Hébreux 7), que notre auteur ne craint pas d’amplifier les simples narrations de l’Ancien Testament, qu’il n’est pas question d’Isaac dans ce qui précède, mais uniquement d’Ésaü ; que le mot de repentance serait impropre pour exprimer un changement de résolution chez Isaac ; que le but de l’auteur est de montrer que lorsque le pécheur s’est « privé de la grâce de Dieu » (Hébreux 12.15), il vient un moment où il ne la désire même plus parce que son cœur endurci n’est plus capable de la recevoir ; c’est ce qui ressortait de l’exemple effrayant d’Ésaü qui ne put trouver lieu de repentance, qui ne parvint plus à modifier ses dispositions morales (comparer Hébreux 6.4 et suivants ; Hébreux 10.26 et suivants).
Cette interprétation attribue à Ésaü un endurcissement dont le récit de la Genèse (Genèse 27.33-40) ne parle pas et dont l’idée n’est pas expressément énoncée dans notre texte. Celui-ci ne caractérise pas les sentiments intimes d’Ésaü.
Le mot que l’on traduit par repentance peut indiquer un simple changement d’idée. Ésaü regrette ce qu’il a fait ; il aimerait mieux, après coup, la bénédiction d’Isaac que le plat de lentilles ; mais l’occasion était perdue : il ne trouva plus place pour son changement d’idée, c’est-à-dire pour un choix différent, quoiqu’il le recherchât avec larmes. Ce qu’il rechercha avec larmes, ce n’est pas la bénédiction (dans la phrase grecque, ce mot est trop éloigné pour que cette relation soit naturelle), mais le changement d’idée.
L’expression est ici légèrement impropre ; Ésaü rechercha plutôt les effets de son changement d’idée. Nous disons de même d’un enfant qui revient sur son choix : il voudrait bien changer d’idée, mais c’est trop tard. En réalité, l’enfant a changé d’idée ; il est trop tard seulement pour exécuter son idée nouvelle.
C’est un tel revirement et non la repentante au sens religieux, que la Genèse et notre auteur après elle, nous montrent chez Ésaü. Il regretta sa décision amèrement, avec larmes, mais ces larmes, il les versa sur les suites amères de ce péché et non sur son péché lui-même, comme le prouve clairement sa haine contre son frère (Genèse 27.41).
C’était là une fausse repentance, sans humiliation sans changement du cœur, sans retour à Dieu : « tristesse du monde » et « non selon Dieu » (2 Corinthiens 7.10)
Tels furent les sentiments de Caïn (Genèse 4.13), de Judas (Matthieu 27.3 et suivants), de tous les réprouvés, dont Jésus-Christ décrit si souvent les stériles tourments, causés par la vue des jugements de Dieu et non par la douleur de l’avoir offensé (Matthieu 7.22-23 ; Matthieu 8.12 ; Luc 13.24-29 ; Luc 16.24 ; Luc 23.29-31)
Si des exemples pareils sont propres à effrayer salutairement les cœurs profanes, légers ou endurcis, « dépourvus de la grâce de Dieu » (Hébreux 12.15), il n’en reste pas moins vrai que jamais aucune âme éprouvant une sincère et humble repentante ne recourt en vain à la miséricorde de Dieu. La parole du Sauveur demeure : « Je ne mettrai dehors aucun de ceux qui viendront à moi ».
Leurs privilèges
Leur responsabilité
Dans un parallèle plein de grandeur et d’éloquence entre la fondation de l’ancienne Alliance sur le Sinaï et le but glorieux et bienheureux que la nouvelle Alliance propose aux croyants (Hébreux 12.22 et suivants), l’auteur fait vivement sentir à ses lecteurs combien ils seraient insensés et coupables d’abandonner ces douces et précieuses espérances de l’Évangile pour se placer de nouveau sous les terreurs de la loi.
C’est là, au fond, le résumé de toute son épître et ces deux tableaux, mis en contraste l’un avec l’autre, sont un puissant argument (car, Hébreux 12.18) en faveur de l’exhortation qui précède.
La description de l’appareil terrible au milieu duquel fut donnée la loi (Hébreux 12.18-21 ; comparer Exode 19.12-19 ; Exode 20.18 ; Exode 20.19), devait rappeler aux lecteurs que ces symboles de la sainteté et de la justice de Dieu ôtaient au pécheur l’espoir d’être sauvé par les œuvres de cette loi qui le condamne, ailleurs est son recours ! (Hébreux 12.22-24)
En parlant de quelque chose qu’on pût toucher de la main (Hébreux 12.18), l’auteur indique dès l’abord qu’il s’agissait là d’une économie terrestre, visible et par là même symbolique ; tel est le caractère de tous les signes extérieurs qui suivent (Hébreux 12.18-20 ; comparez Deutéronome 4.11 ; Exode 19.16).
Le texte reçu porte : « d’une montagne qu’on pût toucher » ; ce mot manque dans Codex Sinaiticus, A, C, versions ; il a été introduit conformément à Hébreux 12.22.
« La voix des paroles » était d’après Deutéronome 4.12, la voix de l’Éternel parlant du milieu du feu et publiant les dix commandements. Quant à la prière de ceux qui l’entendirent, voir Deutéronome 5.22 et suivants.
Le verset Hébreux 12.20 porte une citation très abrégée et libre de Exode 19.12 ; Exode 19.13.
Moïse lui-même reçut une impression terrible des scènes du Sinaï, surtout au moment où la colère de Dieu s’embrasa contre le peuple, qui venait de violer le second commandement en faisant le veau d’or. L’auteur met dans la bouche de Moïse (Hébreux 12.21) des paroles empruntées au récit que ce dernier fit du trouble qu’il ressentit à la vue du crime d’Israël (Deutéronome 9.19). Cette expression de sa crainte ne se trouve pas en effet dans le récit de la promulgation de la loi.
La montagne de Sion est opposée au Sinaï. Sur elle Jérusalem était bâtie ; et cette ville elle-même, centre de la vie religieuse du peuple d’Israël, devient, dans le Nouveau Testament, le symbole de la vraie Église universelle ; elle est la cité du Dieu vivant, le lieu de sa demeure, la théocratie du ciel. Ésaïe 2.1-5 ; Psaumes 48.3 ; Psaumes 50.2 ; Psaumes 110.2 ; Joël 3.17 ; Michée 4.1 ; Michée 4.2 ; Galates 4.26 ; Apocalypse 3.12 ; Apocalypse 21.2.
En entrant ici-bas dans l’Église visible, les Hébreux sont devenus habitants de cette cité céleste, la foi leur en garantissant l’accès. Ils sont par elle unis aux myriades d’anges qui forment une assemblée solennelle, un chœur, et à l’Église des premiers-nés.
Mais qui sont, dans la pensée de l’auteur, ces premiers-nés ?
Parmi les nombreuses réponses faites à cette question, il n’en est que deux de probables : ce sont ou les premiers chrétiens morts en Christ et peut-être surtout les premiers martyrs nés, avant tous les autres, à la vie du ciel ; ou ceux qui ont cru en Christ, qui, nés à la vie spirituelle, étaient encore ici-bas dans l’Église militante lorsque l’auteur écrivait.
Peut-être applique-t-il ce beau titre aux uns et aux autres, sans distinction de temps car premier-né est le titre réservé par Paul à Christ (Romains 8.29 ; Colossiens 1.15) et il est probable que notre auteur l’attribue à ceux qui, par la foi, sont unis à Christ, pour indiquer qu’ils sont assurés de l’héritage céleste (Romains 8 ; 17).
Dans le droit israélite l’héritage paternel était conféré au premier-né à l’exclusion des autres enfants. L’expression dont l’auteur se sert lui aura été suggérée par le terme de « droit d’aînesse » (grec primogéniture) qu’il a employé en Hébreux 12.16, en rappelant l’exemple d’Ésaü.
L’Église des premiers-nés est donc l’assemblée de tous ceux qui croient en Christ, au ciel et sur la terre, de tous ceux qui ont droit de cité (Philippiens 3.20) dans la Jérusalem céleste.
Cette dernière pensée est exprimée par les mots : qui sont inscrits dans les cieux, dont les noms sont portés sur le livre de vie, ce qui est une garantie de leur salut. Psaumes 69.29 ; Psaumes 139.16 ; Daniel 12.1 ; Luc 10.20 ; Philippiens 4.3 ; Apocalypse 13.8 ; Apocalypse 20.12 ; Apocalypse 21.27.
Cette assurance leur est d’autant plus précieuse qu’ils se sont approchés d’un juge qui est Dieu de tous, des hommes et des anges.
Mais pourquoi désigner Dieu par ce titre redoutable de juge dans un passage où tout doit décrire les attraits de l’alliance de grâce ? Peut-être pour rappeler, d’une part, aux croyants que l’Évangile nous place en présence de celui qui est le juste juge, mais qui, en même temps, est le Dieu de tous (Hébreux 8.10 ; Hébreux 11.16), leur Père miséricordieux ; et, d’autre part, à ceux qui étaient tentés d’abandonner cet Évangile pour retourner au judaïsme, qu’ils ne trouveraient plus en Dieu que le Juste juge.
La traduction : de Dieu, le juge de tous, est moins exacte et plus difficile à expliquer.
En s’approchant de Dieu, le père de tous les esprits, les croyants de la nouvelle Alliance se sont unis aux esprits des justes qui sont parvenus à la perfection (grec qui sont consommés). Ceux-ci ne sont pas seulement les fidèles de l’ancienne Alliance, puisque l’auteur a déclaré (Hébreux 11.40, note) que Dieu n’avait pas voulu « qu’ils parvinssent à la perfection sans nous ».
D’autre part, cette expression : les esprits des justes, montre qu’il s’agit de croyants défunts ; ce sont donc les justes des deux alliances, qui ont été amenés à la perfection, consommés par l’œuvre rédemptrice de Jésus (Hébreux 12.24). Ils sont consommés en tant qu’ils ont vaincu par leur foi, qu’ils sont en communion avec leur Sauveur (comparer Philippiens 1.23 ; Philippiens 1.24, note ; 2 Corinthiens 5.6-9, note ; Luc 23.43, note).
Enfin, l’auteur fait mention du Médiateur de la nouvelle Alliance ; ses lecteurs se sont approchés de lui le tout premier, car c’est lui seul qui, par son sacrifice, leur a ouvert l’accès auprès de Dieu et de ceux qui entourent son trône et constituent son peuple. Ils sont venus à ce Jésus, dont le nom est si doux à prononcer et qui, par son sang, inspire à toute conscience angoissée la confiance et la joie du salut.
Ce sang, dont il est fait aspersion sur les pécheurs, prononce (selon le texte reçu) de meilleures choses ou (selon la leçon des majuscules) une meilleure chose (d’autres, prenant le comparatif neutre comme un adverbe, traduisent : parle mieux) que le sang d’Abel (grec qu’Abel), qui est censé parler lui-même dans son sang, car le sang d’Abel appelle la justice divine le sang de Christ proclame l’éternelle miséricorde de Dieu.
Mais ce sang doit parler aussi à nos cœurs de reconnaissance et de fidélité, en retour de tant d’amour.
L’auteur ajoute au parallèle qu’il vient de tracer entre les deux Alliances (Hébreux 12.18-24), un avertissement pressant, comme il en a déjà fait entendre ailleurs (Hébreux 2.2 et suivants ; Hébreux 10.27 et suivants).
Cette exhortation est fondée sur la pensée que la responsabilité des chrétiens est plus redoutable encore que celle des Israélites, ainsi que le montre le contraste de Celui qui se révélait (grec avertissait divinement, Hébreux 8.5) sur la terre et de Celui qui se révèle du haut des cieux.
La présence terrible de Jéhova sur le Sinaï aurait pu, jusqu’à un certain point, excuser le peuple qui refusa de l’entendre (Hébreux 12.19).
Mais quelle excuse auront ceux à qui Dieu se fait entendre de la céleste cité, et cela, par Jésus le Médiateur, qui nous en a ouvert l’accès, après avoir tout accompli pour notre salut ?
Il ne faut pas traduire, comme nos anciennes versions : « Prenez garde de mépriser Celui qui parle ; car si ceux qui méprisèrent… » Ce ne fut pas par mépris, en effet, qu’Israël refusa d’entendre Dieu (Hébreux 12.19) ; ce fut au contraire par crainte, mais par une crainte servile, qui provenait de son incrédulité.
Or, l’auteur emploie le même verbe qu’à Hébreux 12.19 : prier, supplier, mais supplier dans une intention négative, pour qu’une chose ne soit pas, ce que nous rendons dans le texte par refuser.
La plupart de ceux qui ferment leur cœur à l’Évangile de Jésus-Christ le font, non parce qu’ils le méprisent, mais au contraire parce que l’Évangile leur paraît trop élevé, trop saint et qu’il exige d’eux le sacrifice du cœur et de la vie.
L’auteur donne, dans ces Hébreux 12.26 ; Hébreux 12.27, le motif principal de son exhortation : la crise finale approche ; la condition de ceux qui repoussent le salut va devenir définitive.
Celui dont la voix ébranla alors la terre, c’est-à-dire le mont Sinaï lors de la promulgation de la loi (Exode 19.18), a promis de l’ébranler une fois encore et l’auteur insiste sur ce dernier terme.
Le passage cité est Aggée 2.6 ; le prophète annonce un ébranlement des cieux et de la terre avant la conversion des peuples à l’Évangile du Messie. Sous cette image, l’écriture annonce fréquemment les bouleversements politiques et religieux qui accompagnent l’établissement du règne de Christ sur la terre.
Toutefois, l’image elle-même deviendra un jour une réalité, les cieux et la terre actuels, toutes les choses faites, créées passeront pour faire place à la pleine manifestation du règne de la gloire divine (2 Pierre 3.7 ; 2 Pierre 3.13, comparez Romains 8.22, note) ; c’est ce que l’auteur déclare positivement en se fondant sur le passage d’Aggée).
Il le cite d’après la version inexacte des Septante. L’hébreu porte : « Encore un temps et il sera court et j’ébranlerai les cieux et la terre ». De plus, notre auteur intercale dans le texte des Septante les mots : non seulement, mais encore et il met la terre avant le ciel.
Le passage ainsi transformé annonce le bouleversement final de l’univers et le remplacement de toutes les choses ébranlées de ce monde par celles qui ne peuvent être ébranlées et qui subsisteront à toujours.
Conclusion pratique des affirmations qui précèdent : c’est pourquoi, parce que nous avons un royaume inébranlable, comme il ressort, indirectement, de ce qui vient d’être dit (Hébreux 12.27) ; parce que ce royaume existe et que nous pouvons déjà le recevoir, le posséder. Ce royaume n’en était encore qu’à ses commencements sur la terre lorsque l’auteur parlait ainsi mais la foi rend l’avenir présent et voit l’invisible.
Codex Sinaiticus porte : « nous avons de la reconnaissance » et « nous rendons un culte ». Le subjonctif qui se lit dans la plupart des documents est plus conforme à l’exhortation.
Le mot de reconnaissance est le même, en grec, que l’on traduit habituellement par grâce.
Aussi plusieurs anciens interprètes ont-ils admis la version aujourd’hui rejetée par tous : « retenons la grâce ». Ce qui condamne cette traduction, c’est que le verbe avoir ne signifie pas retenir et que l’article manque devant le mot grâce ou reconnaissance.
La reconnaissance qui nous permet de rendre à Dieu un culte (le mot grec désigne le service dans le sanctuaire comparez Hébreux 9.9 ; Hébreux 9.14 ; toute la vie du chrétien doit être un culte, Luc 1.74, note) qui lui soit agréable, n’exclut point le respect religieux ni la crainte ; car le Dieu qui est amour n’en est pas moins le Dieu saint.
L’auteur exprime cette pensée par les termes énergiques de Deutéronome 4.24, qu’il cite librement. Le texte de l’Ancien Testament porte : « L’Éternel ton Dieu est un feu dévorant, un Dieu jaloux », c’est-à-dire un Dieu qui ne souffre en ceux qui veulent lui appartenir ni idole ni souillure, parce qu’il veut les posséder seul et tout entiers.
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