1 Au maître chantre. Sur Guitthith. Psaume des fils de Koré. 2 Que tes tabernacles sont aimables, Éternel des armées ! 3 Mon âme se consume et languit après les parvis de l’Éternel ;
Mon cœur et ma chair crient vers le Dieu vivant. 4 Le passereau même a trouvé une demeure,
Et l’hirondelle un nid, où mettre ses petits…
Tes autels, ô Éternel des armées !
Mon Roi et mon Dieu ! 5 Heureux les habitants de ta maison !
Ils peuvent te célébrer toujours.
(Jeu d’instruments). 6 Heureux l’homme dont la force est en toi !
Ils trouvent dans leur cœur des chemins tout tracés. 7 Passant par la vallée de Baca, ils la changent en fontaines,
Et la pluie d’automne la couvre de bénédictions. 8 Ils vont de force en force,
Pour se présenter devant Dieu en Sion. 9 Éternel, Dieu des armées ! Écoute ma prière ;
Prête l’oreille, Dieu de Jacob !
(Jeu d’instruments). 10 Toi qui es notre bouclier, vois, ô Dieu !
Et regarde la face de ton oint ! 11 Car mieux vaut un jour dans tes parvis que mille ailleurs.
J’aime mieux me tenir sur le seuil de la maison de mon Dieu
Que d’habiter dans les tentes des méchants. 12 Car l’Éternel Dieu est un soleil et un bouclier,
L’Éternel donne la grâce et la gloire,
Il ne prive d’aucun bien ceux qui marchent dans l’intégrité. 13 Éternel des armées ! Heureux l’homme qui se confie en toi !
Le troisième livre des Psaumes se termine par un groupe de quatre psaumes des fils de Koré, au milieu desquels est intercalé un psaume de David (86) et que suit le cantique d’Ethan (89). Notre Psaume 84, qui ouvre cette seconde série de cantiques des Fils de Koré, se rapproche singulièrement des Psaumes 42 et 43, qui sont en tête de la première série. Comme eux, il exprime avec un accent pénétrant de vérité le soupir de l’âme après le Dieu vivant. L’auteur, ainsi que c’était le cas de celui des psaumes que nous venons de citer, est éloigné du sanctuaire. Israélite pieux, il souffre d’un tel exil plus que de toute autre privation car les parvis de l’Éternel sont pour lui le gage de la présence de Dieu et de toutes les bénédictions dont elle est la source. Cependant la note de la tristesse, sans être absente de ce psaume, n’y domine pas comme dans le Psaume 42. C’est plutôt la joie d’un prochain retour qui s’exprime ici. Au verset 10, le psalmiste identifie sa cause avec celle de son roi, l’oint de l’Éternel. Nous nous le représentons partageant à Mahanaïm l’exil de David (2 Samuel 17.24) et voyant, les événements se dérouler de manière à rendre probable une prochaine restauration de la royauté légitime. Et il y a encore des obstacles à surmonter, mais ils le seront, par la puissance de la foi (versets 6 à 8). Aussi le cantique se termine-t il par l’expression d’une confiance sereine et même triomphante (versets 12 à 13).
Ce psaume est de ceux que tout fidèle applique immédiatement à ses propres circonstances, et cela, par le fait même que la situation du psalmiste est l’emblème de celle du chrétien. Bourgeois des cieux, l’enfant de Dieu est privé ici-bas des manifestations glorieuses de la présence du Seigneur ; des vallées de Baca (de larmes) le séparent du but à atteindre, mais sa force est en Dieu (verset 6) ; il sait qu’elle lui sera donnée et même augmentée d’étape en étape, jusqu’à ce qu’il se présente devant Dieu, dans la cité céleste (verset 8).
Le psaume comprend trois strophes :
Le dernier vers de chaque strophe prépare la strophe suivante ; ainsi la pensée du verset 5 : Heureux !… est reprise, quoique modifiée, dans la deuxième strophe ; la prière du verset 9 éveille en quelque sorte celle qui remplit la dernière strophe. Le psaume s’ouvre et se termine par l’invocation : Éternel des armées ! et le premier, comme le dernier verset, offrent la particularité de n’avoir qu’un seul stiche.
Les noms de Jéhova (Éternel) et d’Elohim (Dieu) se trouvent presque en nombre égal dans ce psaume (voir Introduction). Il clôt le groupe des psaumes élohistes, mais en annonçant, le groupe jéhoviste, qui occupe la fin du recueil entier des Psaumes.
Guitthith : voir Psaumes 8.1, note.
Fils de Koré : voir Psaumes 42.1, première note.
Mon âme languit après les parvis de l’Éternel !
Éternel des armées ! Cette invocation ne se trouve pas moins de quatre fois dans le psaume. L’exilé a besoin de se rappeler que son Dieu commande aux armées célestes. C’est là ce qui l’encourage et c’est aussi ce qui lui fait aimer si ardemment les tabernacles où le fidèle se rencontre avec un Dieu si digne d’être adoré.
Les parvis. Le Tabernacle du désert n’avait qu’un parvis ; il est probable que, déjà avant la construction du temple, les installations provisoires de David, en Sion, comprenaient deux cours successives ; de là l’habitude de parler des parvis au pluriel. Cette expression, du reste, pour l’Israélite qui n’avait pas le droit de pénétrer plus loin que le parvis, désignait tout l’ensemble des bâtiments consacrés au culte.
Mon cœur et ma chair crient… L’être tout entier est dominé par l’ardent, désir d’être là où se manifeste la présence du Dieu vivant. Comparez Psaumes 35.10.
Le passereau même… Ce passage ne dit pas, comme on l’entend parfois, que les petits oiseaux nichent dans les parvis de Dieu. Le sens est celui-ci : Le sanctuaire est pour le psalmiste ce qu’est pour l’oiseau son nid ; être éloigné des autels de Dieu, c’est donc pour lui être moins bien partagé que le plus insignifiant des passereaux. Il se peut cependant que, sans l’exprimer positivement, l’auteur se représente les oiseaux animant de leur vol et de leur chant les cours sacrées. M. Félix Bovet, décrivant une mosquée du Caire, parle des oiseaux qui pénètrent dans la cour et y font leurs nids. En voyant, dit-il, voltiger les hirondelles dans la mosquée, ces paroles d’un de nos psaumes me revinrent en mémoire :
Hélas ! Seigneur, le moindre oiseau,
L’hirondelle, le passereau
Trouveront chez toi leur retraite ;
Et moi, dans mes ennuis mortels,
Je languis loin de tes autels…
Tes autels… Plus d’un commentateur s’est ingénié à compléter cette phrase inachevée, dans la supposition que le texte primitif a été altéré. Telle qu’elle est, cette parole, qui est un soupir plutôt qu’une phrase proprement dite, nous semble plus expressive que tous les compléments que l’on pourrait y ajouter.
Heureux les habitants de ta maison : ceux qui ont pu et dû, malgré, le malheur des temps, rester au sanctuaire. Ainsi, lors de la fuite de David, Tsadok, Abiathar et nombre de Lévites avaient reçu l’ordre de rester avec l’arche à Jérusalem (2 Samuel 15.25-29).
En marche vers Sion !
Heureux l’homme… Le psalmiste n’en reste pas à un soupir impuissant. Il y a du bonheur en réserve pour celui qui est décidé à surmonter tous les obstacles, pour arriver en Sion.
Dont la force est en toi. Avec cette force-là, qu’est-ce qui serait impossible ?
Des chemins tout tracés. Les difficultés sont surmontées à l’avance par la foi qui est dans leur cœur.
La vallée de Baca. D’après la tradition juive, ce nom signifierait : vallée des pleurs. S’agit-il d’une vallée portant réellement ce nom et redoutée pour son aridité ou pour toute autre cause ? La suite du verset fait penser à des lieux arides, que l’espérance et la foi du fidèle transforment en lieux de délices. C’est la pensée développée dans le Psaume 63, qui se rapporte à la fuite de David dans la partie la plus desséchée du désert de Juda. Peut-être y a-t-il ici allusion à quelque incident de cette fuite : la vallée qui, à ce moment-là, a été celle des pleurs, sera transformée, au retour, en vallée de sources rafraîchissantes. Les hébraïsants modernes font remarquer que Baca diffère trop du mot hébreu signifiant : pleurs (beki ou beké), pour pouvoir être pris dans cette acception. Ils y voient le nom d’un arbre qui ne croît que dans des lieux arides. Cette explication elle aussi nous ramène à l’idée d’une contrée où l’eau fait défaut.
Ils la changent… Les circonstances les plus défavorables deviennent, pour le fidèle qui marche avec Dieu, autant de moyens de bénédiction. Dans ce cas-ci une pluie rafraîchissante vient aider aux voyageurs à franchir ce mauvais pas.
La pluie d’automne : voir Jérémie 3.3-5, note.
Ils vont de force en force et non de fatigue en fatigue, car plus ils approchent du but, plus leur joie augmente. Comparez Ésaïe 40.31.
Écoute ma prière. C’est ici l’invocation que les fidèles, arrivés en Sion, adressent à Dieu. Le jeu d’instruments complète la pensée, qui n’est qu’indiquée.
Le psalmiste revient à sa position actuelle, mais avec la certitude qu’elle changera ; il parle déjà des biens sans pareils que le fidèle trouve auprès de l’Éternel.
Vois, ô Dieu : considère notre position. Le mot vois est employé ici sans complément dans un sens absolu, comme dans le passage Lamentations 3.50.
Regarde la face de ton oint. Ce n’est pas assez que Dieu soit le bouclier des siens ; il faut que, regardant la face de son oint, il établisse entre cet oint et lui-même une complète communion de pensée et de vie. Un tel regard de bienveillance, de la part de l’Éternel, est déjà un exaucement, une délivrance. Qui pourrait arrêter dans sa marche vers Sion celui avec lequel Dieu s’est mis ainsi directement en relation ? Comparez Nombres 6.25, note ; Psaumes 4.7 ; Psaumes 44.4. Remarquons qu’ici la personne du psalmiste s’efface complètement derrière celle de son roi ; il ne s’agit pas en effet de ses propres désirs, si purs qu’ils puissent être, mais bien de la cause de l’oint de l’Éternel, qui est en définitive celle de Dieu lui-même.
Car mieux vaut un jour… Cette intervention divine est nécessaire, car à quoi servirait une longue vie, loin du sanctuaire, c’est-à-dire loin de Dieu ? Elle n’aurait aucun sens. Appelé à choisir entre un jour là et mille ailleurs, entre la moindre place sur le seuil de la maison de Dieu et la meilleure dans les tentes des méchants, le fidèle n’hésitera pas un instant.
Car l’Éternel Dieu… Ces deux noms justifient, à eux seuls, le choix du psalmiste. Le Dieu de la grâce (Jéhova), qui est aussi celui de la création (Elohim), est un soleil, source de vie, de lumière et de force pour le cœur du croyant, un bouclier qui le protège contre tout mal venant du dehors et par là le dispensateur de la grâce sous tous les rapports, du pardon, des délivrances journalières et enfin de la gloire.
Il ne prive d’aucun bien… Il ne peut pas me refuser à toujours la grâce après laquelle je soupire, celle de me trouver de nouveau en sa présence, dans le sanctuaire.
Vous êtes actuellement sur une version optimisée pour mobile, si vous souhaitez basculer sur la version complète suivez le lien suivant : Le livre des Psaumes 84