1 Sentence, parole de l’Éternel contre la terre d’Hadrac. Elle s’arrête sur Damas, car l’Éternel a l’œil sur les hommes et sur toutes les tribus d’Israël. 2 Elle s’arrête aussi sur Hamath, voisine de Damas, sur Tyr, ainsi que Sidon, parce que sa sagesse est grande. 3 Tyr s’est construit une citadelle et a amassé l’argent comme la poussière, et l’or comme la boue des rues. 4 Voici, le Seigneur s’en emparera, il frappera sur mer sa puissance, et elle-même sera dévorée par le feu. 5 Askalon le verra et craindra ; Gaza aussi, et se tordra de douleur ; Ékron également, car son espérance est confondue ; il n’y aura plus de roi à Gaza et Askalon ne sera plus habitée. 6 Une race abjecte demeurera dans Asdod, et je retrancherai l’orgueil des Philistins. 7 J’ôterai son sang de sa bouche et ses abominations d’entre ses dents, et lui aussi sera un reste pour notre Dieu. Il sera comme un chef en Juda et Ékron sera comme un Jébusien. 8 Et je camperai autour de ma maison pour éloigner toute armée, tous les allants et venants, et il ne passera plus chez eux d’oppresseurs ; car maintenant j’ai vu de mes yeux. 9 Tressaille de joie, fille de Sion ! Pousse des cris d’allégresse, fille de Jérusalem ! Voici, ton roi vient à toi ; il est juste et protégé, humble et monté sur un âne et sur un poulain d’ânesse. 10 Je retrancherai d’Éphraïm les chariots et de Jérusalem les chevaux, et l’arc de guerre sera retranché. Il parlera de paix aux nations, sa domination s’étendra d’une mer jusqu’à l’autre, du fleuve jusqu’aux extrémités de la terre. 11 Et pour toi aussi, à cause du sang de ton alliance, je retirerai tes captifs de la fosse sans eau. 12 Revenez au lieu fort, captifs d’espérance ! Encore aujourd’hui, je déclare que je te dédommagerai au double. 13 Car je bande Juda comme un arc et je l’arme d’Éphraïm ; j’exciterai tes fils, ô Sion, contre tes fils, ô Javan, et je ferai de toi l’épée d’un héros. 14 L’Éternel apparaîtra au-dessus d’eux ; sa flèche partira comme l’éclair. Le Seigneur, l’Éternel, sonnera de la trompette et s’avancera, dans les tourbillons du midi. 15 L’Éternel des armées les protégera ; ils dévoreront, ils fouleront aux pieds les pierres de fronde. Ils boiront, ils feront du bruit comme dans le vin et ils seront remplis, comme le bassin des sacrifices, comme les angles de l’autel. 16 Et l’Éternel leur Dieu les délivrera en ce jour-là comme le troupeau qui est son peuple ; car ils seront comme des pierres de diadème, étincelant dans son pays. 17 Car, quelle prospérité que la leur ! Quelle beauté ! Le froment fera croître les jeunes gens et le moût les vierges.
Les anciens savants juifs qui ont formé le recueil des Petits prophètes, ont attribué les deux morceaux prophétiques chapitres 9 à 11 et 12 à 14 au même prophète Zacharie, vivant après la captivité, duquel provenaient les deux morceaux précédents chapitres 1 à 6, puis 7 et 8, soit qu’ils les trouvassent déjà tous réunis en un seul livre, soit qu’ils eussent des raisons qui leur paraissaient suffisantes pour les attribuer tous au même auteur. Mais depuis deux siècles environ, des doutes sérieux se sont élevés sur cette identité d’auteur et l’on a cru trouver, dans les deux derniers morceaux, des indices suffisants pour les attribuer, à deux prophètes vivant, l’un à l’époque d’Osée en Israël et d’Ésaïe en Juda, l’autre beaucoup plus tard, à l’époque de Jérémie, ainsi tous deux avant la captivité de Babylone. De nos jours, une troisième opinion a surgi d’après laquelle le dernier morceau, 12 à 14, serait postérieur à l’époque même de Zacharie, le contemporain de Zorobabel et de Jéhosua et appartiendrait à un prophète contemporain de Malachie ou même de beaucoup postérieur à ce dernier. N’ayant pas le droit d’affirmer l’infaillibilité des anciens savants juifs sur l’opinion desquels s’est formée la tradition généralement reçue chez les Juifs et chez les chrétiens, nous aurons à examiner impartialement, en étudiant ces six chapitres, à laquelle de ces situations convient le mieux leur contenu et à formuler, en terminant, nos conclusions.
Le prophète décrit d’abord le sort des nations voisines de la Palestine (versets 1 à 7), en contraste avec celui d’Israël restauré (verset 8) ; puis la venue du Roi de paix, le Messie, dans sa ville de Jérusalem (versets 9 et 10) ; il annonce ensuite une victoire merveilleuse des Israélites en lutte avec leurs ennemis, en particulier avec les Grecs (versets 11 à 17).
Sentence. On a parfois ponctué après ce mot, comme s’il formait le titre général des trois chapitres suivants. Mais le texte hébreu conduit plutôt à le lier à l’expression suivante : Parole de l’Éternel. C’est une déclaration de Dieu qui a le caractère d’une sentence.
Contre la terre d’Hadrac. Ce mot, qui ne se retrouve nulle part ailleurs et qui avait été expliqué autrefois d’une foule de manières, a reçu aujourd’hui sa vraie interprétation par le moyen d’inscriptions assyriennes. Il est en effet parlé à plusieurs reprises dans celles-ci d’un pays de Ha-ta-ri-ka comme désignant une partie de la Syrie, au nord et nord-est de la Palestine. On comprend ainsi les paroles suivantes : Elle s’arrête sur Damas ; la menace qui atteint le pays, frappe surtout sa capitale.
L’Éternel a l’œil sur les hommes. Non pas, comme on a traduit parfois : Sur l’Éternel sont dirigés les yeux des hommes. Ce qui fait que Dieu frappe les hommes, c’est que lui-même les contemple.
Elle s’arrête aussi sur Hamath. Hamath sur l’Oronte, à 120 kilomètres au nord de Damas, était la ville la plus importante de la Syrie, après la capitale (Ésaïe 10.9, note). Cette menace peut être placée dans la bouche d’un prophète du temps d’Amos et d’Ésaïe (comparez les prophéties semblables de ces deux prophètes, Ésaïe 17.1-14 ; Amos 1.3 et suivants) ; dans ce cas, elle aurait été accomplie lorsque Damas fut prise une première fois par le roi d’Assyrie, Tiglath-Piléser (voir 2 Rois 16.9) et une seconde fois par Nébucadnetsar, peu avant la destruction de Jérusalem. Mais elle peut aussi avoir été prononcée par le prophète Zacharie, après le retour de l’exil. Il faut alors en voir l’accomplissement à l’époque de la conquête de l’empire perse par Alexandre, lorsque la Syrie et Damas, qui en faisaient alors partie, furent occupées par le corps d’armée envoyé par ce souverain sous les ordres de Parménion.
Sur Tyr, ainsi que Sidon. La menace continue à se diriger de l’est à l’ouest ; elle arrive maintenant à la Phénicie, sur la côte de la Méditerranée ; et comme ont été nommées les deux principales villes de Syrie, ainsi sont nommées aussi les deux plus importantes de ce pays. Comparez la note Ézéchiel 28.20-26.
Parce que sa sagesse est grande. Par son habileté, Tyr avait acquis d’immenses richesses et étendu son commerce dans toute la Méditerranée. De là son orgueil extraordinaire qui attire sur elle l’humiliation dont elle est menacée.
Tyr s’est construit une citadelle. Le prophète désigne ainsi, comme l’avait déjà fait Ésaïe 23.4, la nouvelle Tyr, qui avait été bâtie sur une île située à un kilomètre de la terre ferme et que cette situation et sa muraille de 45 mètres de haut rendaient presque imprenable. Elle fut assiégée par le roi d’Assyrie, Salmanasar, auquel elle résista victorieusement pendant cinq ans ; plus tard par Nébucadnetsar, qu’elle arrêta pendant treize ans et dont il n’est pas dit qu’il parvint à la dompter. Alexandre-le-Grand parvint à s’en emparer, après sept mois de siège ; la plupart des habitants furent massacrés ou vendus, la ville fut livrée aux flammes, le môle élevé par ce conquérant pour donner l’assaut ne fut point détruit et Tyr perdit ainsi sa position insulaire et toute son importance commerciale.
On voit que cette menace peut être mise également dans la bouche d’un prophète antérieur à l’exil et à Nébucadnetsar et dans celle du Zacharie d’après l’exil, antérieur à Alexandre-le-Grand.
Le Seigneur s’en emparera. Par le moyen du conquérant, qui lui servira d’instrument.
Il frappera sur mer sa puissance. La puissance de Tyr, qui consistait dans ses flottes, ne pouvait être détruite que sur mer. Il y a une antithèse avec la ville elle-même, qui ne peut être détruite que sur terre. L’accomplissement de cette prophétie sur la destruction de Tyr n’a eu lieu, dans tous les cas, que sous Alexandre et non sous Nébucadnetsar. C’est donc, là un trait plutôt favorable à l’opinion qui place l’auteur de cette prophétie après la captivité.
La sentence divine poursuit sa route en longeant, en quelque sorte, la mer du nord au sud et elle arrive ainsi au pays des Philistins.
Askalon le verra. Littéralement : Qu’Askalon le voie ! Il s’agit du châtiment de la Syrie et de la Phénicie qui vient d’être décrit.
Gaza… Ékron…. Asdod (verset 6). Toutes les capitales de la confédération des Philistins. Gath, qui manque, comme dans Sophonie 2.4, était probablement déjà incorporée à Juda (voir note Sophonie 2.4).
Son espérance : la ville de Tyr, en qui Ékron mettait son espoir de secours.
Plus de roi à Gaza. C’est sur ces mots que l’on se base surtout pour soutenir que cette prophétie ne peut appartenir qu’à une époque antérieure à la conquête de ces contrées par les Assyriens et par les Chaldéens et provient, par conséquent, d’un prophète antérieur à l’exil. Mais les Perses qui, depuis la chute de Babylone, dominaient sur ces pays, avaient l’habitude de laisser aux peuples conquis une certaine indépendance. Nous savons spécialement que, quand Alexandre-le-Grand traversa cette contrée, Gaza avait un chef (selon Denys d’Halicarnasse) ou un roi (selon Hégésias), qui lui opposa une résistance héroïque. Ce prince gouvernait évidemment au nom du roi de Perse. Après une défense de plusieurs mois, la ville fut prise et saccagée. Le prophète n’oppose pas ici un roi tributaire à un souverain indépendant, mais un district ayant son gouvernement propre à un district annexé à la théocratie. Le pays des Philistins rentrera désormais dans cette seconde catégorie.
Une race abjecte demeurera. Le mot que nous traduisons par race abjecte ne se retrouve que Deutéronome 23.2-3, où il désigne un enfant né d’une union illégale. Asdod si fière tombera au pouvoir d’aventuriers.
Je retrancherai l’orgueil. Toute cette confédération philistine, qui avait constamment tenu en échec le peuple d’Israël, sera abaissée.
J’ôterai son sang de sa bouche… Le peuple philistin est personnifié dans ces mots comme un adorateur des faux dieux qui, après leur avoir offert un sacrifice, boit le sang de la victime et mange la chair offerte à l’idole. La menace qui lui est faite de lui arracher ces aliments impurs, se transforme dans les derniers mots en une promesse. Guéri de son idolâtrie, le reste du peuple philistin sera incorporé au peuple de Dieu.
Comme un chef en Juda. Il formera l’un de ces milliers ou groupes de familles gouvernés par un chef et dont chaque tribu israélite renfermait un certain nombre (Michée 5.1, note ; 1 Samuel 23.23) ; mais cela ne s’applique qu’au reste du peuple, de même que les promesses ne sont jamais faites à Israël qu’en vue du reste saint qui subsistera après la purification opérée par le jugement.
Comme un Jébusien. Pour illustrer cette idée de l’incorporation du peuple philistin au peuple de Dieu, Zacharie rappelle ce qui s’était passé sous David à l’égard des anciens habitants cananéens de Jérusalem, les Jébusiens. Après que David eut pris la citadelle (2 Samuel 5.6), ils se fondirent dans le peuple d’Israël, dont ils adoptèrent les mœurs et la religion. Comparez l’histoire d’Arauna, 2 Samuel 24.16 et suivants. Aussi l’Ancien Testament ne les nomme-t-il plus au nombre des peuplades idolâtres de la Palestine.
Si cette prophétie a un champ aussi limité que la Syrie, la Phénicie méridionale et la Philistie, c’est sans doute parce qu’elle est destinée à rappeler les anciennes promesses relatives au domaine normal du peuple de Dieu. Comparez pour la Syrie Genèse 15.18 ; Deutéronome 11.21 ; Ézéchiel 47.15 et suivants. On se demande encore pourquoi il n’est question que des voisins du nord et de l’ouest et non d’Ammon, Moab, Édom, à l’est et au sud. Cela serait bien difficile à expliquer, si notre prophète vivait à la même époque que les anciens prophètes, tels qu’Amos et Ésaïe, qui ont des menaces si sévères pour ces peuples ; tandis qu’après la captivité ils avaient, en quelque sorte, disparu de la scène, après avoir été exterminés à la suite des conquêtes babyloniennes.
En face du jugement qui frappera les pays situés au nord et à l’ouest de Juda, le prophète décrit la protection signalée que Dieu accordera à son peuple.
Je camperai autour de ma maison. Comme l’Éternel avait dit qu’il serait une muraille de feu autour de la nouvelle Jérusalem, il promet ici d’être comme une armée campée autour de sa maison. Si ce mot désigne l’ancien temple, qui, malgré cette promesse, a été détruit par Nébucadnetsar, il faut attribuer, dans ce cas, le non accomplissement de la promesse à l’infidélité d’Israël. Si c’est le Zacharie d’après l’exil qui parle ainsi, la maison est le temple que l’on était occupé à rebâtir en ce moment même et auquel Dieu promettrait sa protection toute spéciale jusqu’à l’époque du Messie. Ce second sens est plus naturel et l’accomplissement plus évident.
Pour éloigner toute armée… les allants et les venants. Dieu promet d’écarter de Jérusalem et du temple toute armée ennemie parcourant, ces contrées et ravageant la Palestine.
Car maintenant j’ai vu de mes yeux. Il y a ici une opposition entre l’avenir et le passé, qui s’explique plus facilement après qu’avant la captivité. Précédemment, dit Dieu, j’ai fermé les yeux et laissé faire, de sorte que mon peuple a été en proie à ses ennemis ; mais maintenant, mes yeux seront ouverts et je garderai mon peuple… Cette expression rappelle celles qu’avait employées Zacharie 3.9 ; 4.10, où les yeux de l’Éternel étaient déjà les emblèmes de sa providence.
Quant à la promesse faite à Jérusalem, on s’étonnerait qu’un prophète du temps d’Ésaïe et d’Amos eût pu promettre une délivrance aussi complète, sans parler en aucune façon du jugement qu’annonçaient les autres prophètes et sans dire que les promesses s’appliquaient, non pas à tout le peuple, mais uniquement au saint reste, à la suite du jugement. En échange l’histoire constate qu’Alexandre-le-Grand, après la bataille d’Issus, suivit avec son armée victorieuse la côte de la Palestine, jusqu’en Égypte, en détruisant Tyr et Gaza et ne faisant aucun mal à Jérusalem. À travers les crises qui suivirent sous les successeurs d’Alexandre, la ville et le temple furent sans doute momentanément occupés par les Syriens ; mais Jérusalem fut préservée de la ruine et devint même, sous les Hérodes, l’une des villes les plus célèbres de l’Orient. Quant aux Philistins, les restes de ce peuple furent incorporés à la théocratie sous les successeurs des Maccabées et ils disparurent en même temps comme nation. Autant il serait difficile de démontrer l’accomplissement de la prophétie, si on la met dans la bouche d’un ancien Zacharie, autant cet accomplissement est manifeste, dès qu’on l’attribue au Zacharie du temps de Zorobabel et de Jéhosua.
Le verset 8 faisait déjà penser à l’époque messianique ; car la protection promise au peuple avait pour but de le maintenir jusqu’à cette époque. Dans les versets 9 et 10, le prophète voit se déployer devant lui l’apparition glorieuse du Messie et la fondation de son règne.
Tressaille de joie ! Comme on le fait en allant au-devant d’un monarque aimé et attendu, qui s’approche enfin.
Ton roi vient. Jérusalem avait eu des rois, mais nul d’entre eux n’était son roi dans le sens vrai de cette expression : le roi promis de tout temps par l’Éternel, celui dont le règne se confond avec le règne de Dieu ici-bas. Cette expression ton roi vient se comprend mieux dans un temps où le trône d’Israël n’était pas occupé qu’à l’époque où il avait un roi visible.
Juste : non pas seulement celui qui a le droit pour lui ou qui est juste dans sa propre manière d’agir, mais, puisqu’il s’agit d’un roi, celui qui fait régner la justice. Comparez Ésaïe 11.1-5.
Protégé. Littéralement, sauvé ou aidé ; on cite même un mot arabe analogue (participe passif comme celui-ci) qui signifie victorieux. En tout cas, il n’est pas possible de traduire, comme on le fait d’ordinaire : Sauveur. Le sens est qu’il sera entouré de la bénédiction divine et, par elle, protégé, aidé, secouru et ainsi mis en état d’écarter de son peuple tout ennemi et de lui procurer toutes les faveurs de Dieu.
Humble : non pas humilié, affligé, comme on a expliqué quelquefois ; une telle expression ne cadrerait pas avec l’invitation du commencement : Réjouis-toi. Le prophète continue à caractériser l’opposition entre ce souverain et les rois de la terre. Non seulement il est juste et puissant en Dieu, mais il est plein de douceur, d’affabilité, de débonnaireté.
Et monté sur un âne et sur un poulain d’ânesse. En Orient, l’âne n’est pas un animal méprisé comme chez nous. Dans les premiers temps de l’histoire d’Israël, c’était la monture des princes et des chefs, Juges 5.10 ; Juges 10.4 ; 2 Samuel 17.23. Ce ne fut que plus tard que le cheval et le mulet furent préférés. L’âne est ici le symbole du caractère pacifique du Roi-Messie, tandis que les oppresseurs, mentionnés au verset 8, étaient censés montés sur des chevaux de guerre. Comparez verset 10, qui est évidemment en rapport d’opposition avec celui-ci. Comparez aussi Deutéronome 17.16 et Ésaïe 2.6-9. Le roi vient faire la conquête du monde, non l’épée à la main, mais par le secours de Dieu, en parlant de paix (verset 10). Les deux expressions âne et poulain d’ânesse n’indiquent pas deux animaux différents ; cette répétition est conforme aux lois du parallélisme en usage dans la poésie hébraïque. Il n’est pas nécessaire d’admettre que Matthieu 21.4-7 exprime une idée différente.
L’accomplissement, de ce tableau prophétique n’a pas eu lieu seulement le jour où Jésus est entré sur un ânon à Jérusalem : sa vie entière a été la réalisation de l’idéal du Roi pacifique tracé à l’avance par Zacharie. Si Jésus a voulu, dans un moment particulier de sa vie, accomplir littéralement la prophétie, c’était dans le but d’ouvrir les yeux aux plus aveugles.
Je retrancherai d’Éphraïm. L’Éternel, par le moyen du Messie, commencera par se former un peuple d’enfants de paix, du sein duquel la force brutale sera bannie. Puis, il travaillera à étendre ce règne de paix à la terre entière. C’est ainsi qu’au Psaume 110 David avait déjà contemplé le Messie faisant la conquête du monde au moyen d’une armée de sacrificateurs, partant de Sion et parcourant la terre dans une sainte pompe (Psaumes 110.2-3).
Comme il s’agit d’Israël restauré et purifié, les restes d’Éphraïm en font partie aussi bien que Juda et cette expression ne peut, par conséquent, rien prouver en faveur de la composition de cette prophétie avant la destruction du royaume de Samarie.
Il parlera de paix. On a entendu ces mots en ce sens : Il commandera la paix, il interdira les hostilités ; mais le mot parler ne peut guère avoir ce sens et signifie plutôt qu’il gagnera par ses paroles les peuples à la paix. Ésaïe 9.5 et Michée 5.4, avaient déjà caractérisé le Messie comme roi de paix.
Du fleuve jusqu’aux extrémités… Cette expression paraît tirée de Psaumes 72.8. Elle est assez obscure. Si l’on veut y trouver l’indication des quatre points cardinaux, il faut voir dans les deux mers les limites occidentale et orientale car les anciens se représentaient la terre comme entourée d’eau. Le fleuve, l’Euphrate, représenterait ici la limite septentrionale et les extrémités de la terre, les pays méridionaux. Mais l’on peut comprendre aussi d’une autre manière. Comme le royaume de Salomon était borné à l’occident par la Méditerranée et à l’orient par l’Euphrate, on peut partir de ces deux limites, de la première pour aller toujours plus à l’occident jusqu’à ce qui on rencontre la seconde mer qui baigne les terres occidentales (l’Océan Atlantique) et du fleuve (l’Euphrate) pour aller du côté de l’orient jusqu’à l’extrémité du continent de l’Asie.
Il est évident que l’accomplissement de cette prophétie embrasse toute la fin des temps, depuis la venue du Messie jusqu’à sa complète domination sur la terre. Israël a été conservé en quelque sorte miraculeusement, avant et après cette venue, avant, pour que le Messie pût naître dans son sein et après, pour qu’il puisse avoir part, lui aussi, à la promesse qui lui avait été faite si spécialement. S’il en est privé, maintenant, c’est par sa faute. Les promesses de Dieu sont conditionnelles et ce n’est pas pour rien qu’il avait dit à son peuple, dans la prophétie précédente : Mais aimez la vérité et la paix !
Et pour toi aussi. Israël est ici interpellé spécialement par le prophète, en opposition à l’ensemble des nations, verset 10.
À cause du sang de ton alliance : l’alliance que Dieu avait contractée avec Israël au Sinaï et qui avait été scellée par le sang d’une victime (Exode 24.8).
Tes captifs : tous les membres du peuple qui ne sont pas encore revenus de captivité au moment où parle le prophète. Évidemment, ce langage convient mieux dans la bouche de Zacharie vivant après l’exil que dans celle d’un prophète qui aurait parlé avant la destruction des deux royaumes. Ce qui est l’avenir pour l’homme qui parle comme le fait ici le prophète, ce n’est pas la captivité, mais la délivrance.
De la fosse sans eau. Image du pays de la captivité, où l’on souffre sans périr. Il semble que le prophète pense au puits au fond duquel fut jeté Joseph (Genèse 37.24). Ce rapprochement paraît d’autant plus naturel qu’il vient de parler d’Éphraïm, la tribu descendant de ce patriarche.
Il invite les captifs à se lever et à rentrer dans leur patrie.
Au lieu fort. Image opposée à celle de la fosse sans eau ; représentant le pays d’Israël, qui, sous le règne du Messie, sera devenu inaccessible aux ennemis du dehors.
Captifs d’espérance. Captifs sur lesquels plane encore une glorieuse espérance, qui ne peut manquer de se réaliser parce qu’elle repose sur les promesses divines.
Encore aujourd’hui. Peut-être y a-t-il allusion à la promesse Ésaïe 61.7, où la même expression est employée pour exprimer la même idée. Ou bien le prophète voudrait-il dire : Même en ce jour où la position misérable du peuple semble si opposée à une si grande espérance.
Je te dédommagerai au double. Le double de bonheur et de gloire, en proportion des souffrances passées, Ésaïe 61.7.
Dès le verset 13, le ton change. Israël n’est. plus un captif qui rentre dans sa patrie ; c’est un héros jouissant, de sa liberté et dont l’Éternel arme le bras pour frapper ses ennemis. Le tableau suivant est un encouragement donné au peuple que l’Éternel a repris sous sa conduite.
Je bande Juda comme un arc… Juda est représenté comme un arc dans la main de Dieu, Éphraïm comme la flèche dont il l’arme. Après avoir ainsi fortifié son peuple, il l’envoie contre un ennemi tout nouveau. Cet ennemi est nommé Javan, c’est-à-dire, d’après le sens de ce mot dans tout l’Ancien Testament, les Grecs. Les Israélites n’avaient eu avec ce peuple aucun contact immédiat dans les temps antérieurs à la captivité. Joël 3.16 parle, il est vrai, de captifs israélites vendus aux Grecs par les Philistins et ceux qui mettent Zacharie chapitres 9 à 14 dans la bouche d’un prophète des temps d’Osée et d’Ésaïe rapportent à ce fait la punition dont Javan est ici menacé. Mais d’abord, cette circonstance n’était-elle pas trop insignifiante pour justifier les menaces contenues dans notre passage ? Les vrais coupables, dans cet acte, n’étaient pas ceux qui avaient acheté, mais ceux qui avaient vendu et qui sont aussi les seuls repris et menacés par Joël (comparez versets 4 avec 7 et 8). En général, Javan, comme ennemi d’Israël, est entièrement en dehors de l’horizon des prophètes d’avant l’exil et rien n’est plus propre à prouver la composition de nos trois chapitres à une époque postérieure à celle de la captivité que cette guerre contre la Grèce, dont l’Éternel lui-même donne à son peuple le signal. C’est après le retour de l’exil que la Grèce prend également, dans les prophéties de Daniel, une place importante dans l’avenir d’Israël.
Description figurée d’une victoire éclatante remportée par les Israélites sur la puissance grecque. L’Éternel apparaît comme un héros, en plein combat. Son intervention est comparée à la venue d’un ouragan. Il combat pour son peuple, qui dévore ses ennemis et s’abreuve de leur sang, de manière à en être enivré, comme la coupe avec laquelle, on fait aspersion sur l’autel des holocaustes est remplie du sang de la victime, comme les angles de cet autel en sont inondés (Exode 29.12). L’autel était aspergé de sang sur ses quatre côtés. Lévitique 1.11 ; 8.15.
Ainsi vainqueur, Israël pourra prospérer librement dans son pays sous le règne de son Roi-Messie.
Comme le troupeau… Zacharie affectionne cette image : 10.2-3 ; 11.4.
Des pierres de diadème. Quelques interprètes opposent cette image à celle de pierres de fronde, verset 15, qu’ils appliquent aux ennemis d’Israël. Il n’est pas besoin de cette opposition pour comprendre ce que veut dire le prophète : chaque Israélite, sur le sol de la Terre Sainte sera semblable à une pierre précieuse qui resplendit sur un diadème.
Ainsi, dans la terre d’Israël, naîtra une génération admirable de sainteté, de force et de beauté.
On se demande ce qui, à la suite du retour de l’exil, a pu attirer l’attention du prophète sur la Grèce. Mais si l’on se rappelle le sens de la vision du chapitre 6, où nous avons vu le jugement divin, sous l’image des deux premiers groupes de chevaux, se diriger vers la Babylonie et vers la Perse, nous comprendrons qu’après la défaite de ces deux ennemis du règne de Dieu en Orient, le regard du prophète se tourne vers l’Occident, où il rencontre Javan comme le principal représentant de l’humanité païenne et hostile au règne de Dieu dans ces contrées. Et s’il avait connaissance de la prophétie, de Daniel sur les quatre monarchies, il devait bien savoir qu’à la suite du lion babylonien et de l’ours persan se lèverait le léopard de Javan. Au moment même où Zacharie parlait, le roi Darius préparait sa grande expédition contre la Grèce ; ce pays devenait ainsi l’un des facteurs les plus importants de l’histoire. En tout cas, l’essentiel est que, désormais, la lutte du règne de Dieu contre la puissance terrestre et le paganisme se présente ici comme dirigée, non plus vers l’Orient, mais vers l’Occident. Et si nous recherchons dans l’histoire l’accomplissement de ce tableau, ne le rencontrerons-nous pas dans cette lutte héroïque d’Israël avec la puissance gréco-syrienne, par laquelle il maintint la religion de Jéhova et la conserva pour le monde, tout en recouvrant son indépendance politique ? Cette époque des Maccabées ne fut pas seulement celle de la lutte d’un peuple avec un autre peuple, mais de la lutte de la religion véritable avec le paganisme. Voilà pourquoi elle a pu être l’objet d’une révélation prophétique, comme celle que nous venons d’étudier. C’est par ce triomphe qu’Israël a montré qu’il était réellement sorti de la captivité de Babylone comme un peuple purifié de l’idolâtrie et identifié avec le monothéisme, digne par conséquent, de recevoir le Messie, dont la venue lui avait été assurée au commencement de cette prophétie. Cette lutte a été à la fois militaire et religieuse et c’est précisément avec ce double caractère qu’elle se présente dans le tableau tracé par Zacharie. Où retrouver quelque chose de pareil dans les temps qui ont précédé soit la destruction du royaume des dix tribus, soit celle du royaume de Juda ?
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