Le droit criminel des Israélites reconnaissait comme l’ont fait toutes les législations, la distinction entre le meurtre proprement dit et l’homicide involontaire, quoiqu’elle se servît du même nom pour désigner l’un et l’autre (cf. Nombres 35.25ss). Le meurtre entraînait toujours après lui la peine de mort sans possibilité de commutation (Lévitique 24.17) ; la loi n’était ainsi que l’écho de la première institution de cette peine, lorsque Dieu dit à Noé au sortir de l’arche, « quiconque aura répandu le sang de l’homme, son sang sera aussi répandu » (Genèse 9.5-6).
L’homicide involontaire pouvait aussi quelquefois amener la mort pour le meurtrier, en vertu de l’ancienne coutume qui abandonnait aux membres de la famille du mort le droit de la vengeance du sang ; le coupable était innocent devant la loi, mais, à cause du sang et de la terre qui en était souillée, les parents pouvaient poursuivre le meurtrier ; la justice refusait de sévir, mais laissait libre cours aux ressentiments privés ; l’institution des villes de refuge était la seule garantie que la loi donnât dans ce cas à l’homicide innocent (Nombres 35.25 ; Deutéronome 19.5). Quand le meurtre avait été commis par un animal, par un bœuf, par exemple, l’animal était mis à mort, et son propriétaire, rendu responsable par la loi, devait une indemnité à la famille du défunt, et si la famille du défunt ne se contentait pas de cette réparation, elle avait le droit de vengeance comme dans le cas de l’homicide involontaire (cf. Exode 21.28-30).
Mais s’il y avait eu meurtre volontaire, ou même simplement intention de donner la mort, accompagnée de voies de fait et de violences sur la personne d’un homme libre, la peine capitale était inévitablement prononcée (Exode 21.12 ; Nombres 35.16 ; Deutéronome 19.11-12). Il pouvait même ne pas y avoir intention de donner la mort, mais coups portés par haine et suivis accidentellement de la mort par un faux mouvement de celui qui était menacé ; la loi par sa sévérité pressentait dans ce cas cette belle maxime du Messie : « Celui qui hait est un meurtrier » ; le coupable était considéré comme assassin. Le meurtre d’un voleur surpris pendant la nuit en flagrant délit n’était pas punissable ; mais si le soleil était levé, il était considéré comme un meurtre ordinaire, et puni comme tel (Exode 22.2-3) ; pendant la nuit, en effet, deux circonstances pouvaient excuser l’homicide qui se trouvait dans ce cas : le soin de sa propre défense, à laquelle il doit pourvoir seul, puisque chacun dort autour de lui ; puis l’incertitude de ses coups, qu’il ne peut pas diriger comme il le voudrait dans l’obscurité, et du funeste résultat desquels il ne saurait être justement rendu responsable.
La mort d’une femme enceinte, lorsqu’elle était produite, involontairement sans doute, dans une rixe entre deux hommes, était cependant vengée par la mort du meurtrier, parce que dans ce cas il y avait double meurtre, et que la cause de la mort n’était pas un accident, mais un esprit de querelle qu’en elle-même déjà mérite un châtiment, et qui doit être responsable du mal dont il est la cause (Exode 21.22-23). Il n’est pas sûr que la peine de mort fût prononcée contre le propriétaire d’une maison dont le toit, non garni d’une balustrade, aurait occasionné la chute et la mort d’une personne (Deutéronome 22.8). Certains penchent pour l’affirmative, d’autres croient, au contraire, que le législateur se borne à mettre cette responsabilité sur la conscience du propriétaire.
Lorsqu’un esclave frappé par son maître mourait sous les coups, le maître était puni ; rien n’indique de quelle nature était ce châtiment, mais on peut croire qu’il était sévère, puisque pour une dent ou pour un œil l’esclave était affranchi ; les rabbins pensent que le maître était puni de mort, mais ils ne s’appuient sur aucune raison suffisante ; si cependant l’esclave survivait de quelques jours à ces mauvais traitements, la loi, tenant compte du droit de frapper, devenait impuissante, et la perte de l’esclave était considérée comme une peine assez forte pour qu’il ne fallût pas l’aggraver par une condamnation spéciale « c’est son argent » (Exode 21.20-21). Enfin, dans le cas d’un meurtre inconnu (Deutéronome 21.1-9), le lieu le plus proche de l’endroit où le délit avait été commis était chargé de la responsabilité, et les anciens de la ville sacrifiaient en expiation, dans une vallée solitaire et abrupte, une jeune génisse à laquelle on coupait le cou comme on l’aurait fait au criminel, au lieu de la mettre à mort suivant l’usage ordinaire.
La constatation d’un meurtre ne pouvait avoir lieu que sur la déposition d’au moins deux témoins (Nombres 35.30) ; le faux témoignage en pareille matière était puni de mort par la loi du talion (Deutéronome 19.16-20). Les témoins, dans le cas de lapidation, devaient les premiers jeter la pierre au condamné ; lorsqu’il y avait décapitation, c’était, semble-t-il, au vengeur du sang de remplir l’office de bourreau (Nombres 35.19-21). On peut voir (2 Samuel 14), l’exemple d’un cas où les rois d’Israël se sont arrogé le droit de grâce à l’égard de meurtriers reconnus ; mais on ne peut pas généraliser la conclusion tirée de ce cas particulier.
La loi ne renferme aucune disposition relative à l’infanticide, et ce crime paraît avoir été inconnu des Israélites, les causes qui l’amènent dans nos sociétés modernes n’existant pas chez eux, où tout tendait à le prévenir. Il n’est rien dit non plus du parricide. Les Juifs postérieurs ont appliqué à l’empoisonneuse ce qui est dit de la sorcière (Exode 22.18), et ils punissaient de mort ceux qui préparaient des poisons, alors même qu’on ne s’en était pas servi.
Enfin, il n’y a rien dans la loi qui soit relatif au suicide ; Josèphe le condamne dans une digression théologique, et l’on trouve des exemples de cas de ce genre : Saül se perce de son épée ainsi que son écuyer (1 Samuel 31.4-5) ; Achitophel s’étrangle (2 Samuel 17.23) ; Judas se fait justice à lui-même (Matthieu 27.5 ; Actes 1.18-19).