Le terrain foncier, les biens-fonds, sont la plus grande richesse d’un peuple adonné à l’agriculture, comme l’étaient les Israélites. D’après la constitution du pays, chaque individu, à l’exception des membres de la tribu de Lévi, avait droit à une portion du sol de la terre sainte, qui était partagée au peuple comme une propriété de l’Éternel, et ce terrain appartenait à sa famille en propriété inaliénable (Lévitique 25.23). Le propriétaire pouvait cesser un moment d’en être le possesseur ; il pouvait la vendre, l’aliéner pour éteindre des dettes, mais il conservait toujours le droit, lui ou ses plus proches parents, de la racheter quand il le voulait (Lévitique 25.25 ; cf. Jérémie 32.7), et en outre elle rentrait de droit dans sa famille l’année du jubilé, sans qu’il eût à en payer le rachat, voir Année. Ce principe prévenait dans le pays, d’un côté la mendicité, de l’autre l’aristocratie des richesses, la noblesse des terres avec ses suites économiques et politiques ; il maintenait, ou ramenait bientôt l’égalité des citoyens, il stimulait et favorisait l’agriculture, il détournait le peuple de l’industrie et du commerce avec les nations voisines.
Le trop grand morcellement des propriétés, qui devait être la suite de leur division et subdivision entre les descendants du propriétaire primitif, pouvait être retardé, du moins pour un certain temps, par le fait que lors du premier partage, il resta dans le pays une quantité de terres encore incultes qui, ne pouvant être travaillées par une population moins nombreuse, purent être cultivées plus tard, et partagées entre les descendants des premiers propriétaires. Cet inconvénient même n’aurait pas existé si, comme Hug le prétend, les aînés héritaient seuls de la propriété foncière, mais ce n’est qu’une hypothèse qui ne s’appuie sur aucun texte, et qui semble combattue par Deutéronome 21.47. Il pouvait arriver aussi des translations forcées d’une famille à une autre famille, lorsqu’un homme mourait sans enfants, ou ne laissait que des filles qui, en se mariant faisaient nécessairement passer sous un autre nom, et sans retour, la possession de leurs ancêtres. Et de toute manière, si l’on tient compte surtout de la fécondité hébraïque, cette institution devait à la longue entraîner bien des inconvénients, et finir par tomber en désuétude. Les privilèges accordés au premier né, qui obtenait la part de deux (Deutéronome 21.17), mesure qui tendait à conserver à la famille sa possession, allaient d’un autre côté à l’encontre du but du législateur en rompant l’égalité de richesse, et ils contribuèrent pour leur part à l’abandon du principe constitutif de la propriété.
Aussi voit-on déjà dans l’Ancien Testament des possessions acquises ou abandonnées, la suite des héritiers de familles rompue, les riches entassant propriété sur propriété, joignant maison à maison, approchant un champ de l’autre (Ésaïe 5.8 ; Michée 2.2 ; cf. Néhémie 5), et les rois eux-mêmes s’appropriant par des confiscations, judiciaires ou arbitraires et violentes, les propriétés des particuliers (1 Rois 21.16 ; cf. 2 Samuel 16.4 ; Ézéchiel 45.9 ; 46.18). Après l’exil, après qu’un grand nombre de familles eurent par leur séjour prolongé dans la terre de leur captivité, renoncé de fait à leurs droits sur la terre d’Israël, après que les limites des tribus elles-mêmes, et bien plus encore celles des héritages de familles, eurent été effacées, oubliées, transposées, les lois relatives à la fixité des possessions devinrent en plusieurs lieux impossibles, partout difficiles à exécuter ; elles furent presque généralement abandonnées, des métiers s’établirent, l’industrie rapportée de Babylone s’éleva à côté de l’agriculture, et de nombreux mendiants couvrirent le pays. Pour plusieurs détails, voir encore Héritages, Lévirat, Vœux, etc.