Fille cadette de Laban (Genèse 29.6 ; 46.19). Elle fut la première personne que rencontra Jacob lorsque, fuyant la colère d’un frère, il se rendit en Mésopotamie. La beauté de la jeune fille frappa Jacob, alors âgé de soixante-dix-sept ans ; cousin de Rachel, il songea à une alliance plus intime avec elle, et sept années de service furent le prix auquel Laban la céda à son neveu. Elle n’épousa cependant Jacob qu’après que celui-ci eut épousé d’abord sa sœur Léa, moins belle, et moins aimée ; comme elle ne donnait point d’enfants à son mari, elle essaya de faire à sa sœur, plus heureuse, une étrange concurrence ; Bilha, sa servante, devint la concubine de Jacob, et Rachel adopta les enfants issus de ce commerce illégitime.
Les deux sœurs, souvent aigries l’une contre l’autre, finirent cependant par se rapprocher ; des mandragores cimentèrent la paix, et la naissance de Joseph, fils de Rachel, finit par ôter à l’épouse préférée tout sujet de jalousie et d’irritation. Lors du départ de Chaldée, voyant son mari en butte à de sourdes inimitiés de la part de sa famille, elle n’hésita pas à le suivre, déroba les marmousets ou théraphims de Laban, et les cacha sous le bât de son chameau, quand Laban, pour les retrouver, vint fouiller les tentes de Jacob. Fort avancée dans sa dernière grossesse, elle marchait la dernière avec Joseph, lorsque Jacob attendait avec crainte la rencontre d’Ésaü, et bientôt après, non loin de Bethléem, elle mourut en donnant le jour à Benjamin (35.16 ; 48.7). Jacob éleva sur son sépulcre un monument qui prit son nom, et que l’on connaissait encore aux jours de Saül (1 Samuel 10.2).
Le térébinthe dit de Thabor, qui se trouvait non loin de ce tombeau, porte maintenant, d’après Troïlo, le nom de térébinthe de la sainte Vierge. Le caractère de Rachel n’est pas assez connu pour pouvoir être apprécié bien exactement : Niemeyer la met au-dessous de Léa quant à la bonté du cœur, et il faut avouer qu’elle se montre jalouse, et vive dans la manifestation de sa jalousie ; mais, d’un autre côté, l’offense première était venue de l’intrigante ou trop obéissante Léa, et Rachel pouvait à bon droit n’être pas contente. Quant au reste, elle se montre sous un jour aimable, fille et femme docile, peu riche en ruses, et maladroite quand elle essaie de l’intrigue. On ne comprend pas, en particulier, à quelle intention elle a dérobé les idoles de son père ; ce ne pouvait être pour empêcher Laban de les consulter sur la route de Jacob, car une fois découverte, elle refuse encore de les rendre ; il est difficile de supposer que ce soit par cupidité, car, ces marmousets eussent-ils été d’or ou d’argent, ce qui n’est pas prouvé, ces métaux n’avaient pas alors le prix qu’ils ont de nos jours, et n’eussent ajouté que bien peu de chose à l’immense fortune des fugitifs.
Était-ce pour se venger de l’artifice qui lui avait substitué sa sœur ? mais la faute était vieille de treize ou quatorze ans, et Rachel avait eu bien du temps pour se venger ou pour oublier son offense. Pour détacher son père d’une pratique superstitieuse, en lui enlevant les objets de son culte intérieur ? mais le vol serait un singulier moyen de prosélytisme. Nous croyons plutôt que Rachel ne s’est pas rendu compte de son action, et qu’elle a dérobé les théraphims, cédant à un attachement instinctif et non réfléchi pour les dieux de sa jeunesse, aussi bien qu’à une de ces envies si fréquentes chez les femmes dans sa position. Quant au prétexte qu’elle donne (31.35), pour ne pas se lever, la manière dont on l’entend ordinairement n’aurait pas même eu l’apparence de la plausibilité, et il faut le rapporter plutôt à la grande fatigue du voyage pour une femme qui devait bientôt mourir en donnant la vie à un fils.
Le nom de Rachel est rappelé avec celui de sa sœur dans les vœux que Booz reçut des habitants de Bethléem (Ruth 4.11). Dans le passage Jérémie 31.15. Rachel pleure ses enfants, et refuse d’être consolée ; ce morceau prophétique fut inspiré à l’occasion du séjour de Jérémie à Rama, parmi les captifs que Nebuzar-Adan y faisait passer en revue (40.1). La voix est isolée, mais elle exprime la douleur de bien des mères, de toutes les mères de Bethléem dont les fils sont conduits dans l’exil, de toutes les mères de Benjamin dont Rachel est l’aïeule, et par extension, des deux tribus que Rachel représente pleurant à Rama sur son tombeau, parce que les Juifs de ce royaume sont arrachés du sol que Dieu leur avait donné. Matthieu 2.18, applique ce passage au massacre des enfants de Bethléem, et l’on peut croire que Jérémie lui-même, au milieu des souffrances du moment, pensait aux souffrances de l’avenir, et aux promesses de l’Éternel, quand il s’écrie quelques versets plus loin : « Jusques à quand seras-tu agitée, fille rebelle ? car l’Éternel a créé une chose nouvelle sur la terre, une femme environnant un homme puissant (comme la mère entoure l’enfant qui est dans son sein) ».