C’est le nom général que l’Écriture donne au désert et au massif de montagnes, formant une espèce de triangle compris entre le désert de Tsin ou Paran (El Tyh) au nord, et les deux bras de la mer Rouge. Au sud du plateau El Tyh, commencent à s’élever ces montagnes si célèbres de l’ancien monde juif. La crête des hauts sommets court du nord au sud dans la même direction que le Liban ; le Sinaï n’est en quelque sorte que le prolongement de la longue chaîne du Soristan, se précipitant dans la mer Rouge pour y former une presqu’île, et reprenant la hauteur de ses cimes les plus élevées. Ce massif granitique et schisteux a de 64 à 80 km de circonférence ; il comprend au pied de ses sommets escarpés de hautes plaines et des vallées d’une belle végétation, qui produisent des arbres à fruits, orangers, citronniers, amandiers, mûriers, abricotiers, pêchers, oliviers, ainsi que toute espèce de légumes et de plantes odoriférantes. Sur les hauteurs vivent des chèvres et du gibier.
Les côtes sont en plusieurs districts ombragées par de nombreux palmiers. Des sources d’eau vive jaillissent des rochers, même dans les étés les plus chauds, et le versant est, qui descend vers le golfe d’Akaba, et qui est le plus rapide et le plus aride, présente des vallées dont les voyageurs ne peuvent assez louer la beauté. Cependant ce pays a évidemment été plus fertile qu’il ne l’est aujourd’hui, et il devient de plus en plus aride à mesure que les hommes en font disparaître les arbres. Les hauts sommets sont fréquemment entourés de nuages, et le tonnerre retentit d’une manière terrible entre les parois des rochers et dans les vallées profondes (Brœm). Deux ou trois sommets principaux dominent tout le massif, l’Horeb, le Sinaï, et le mont Sainte-Catherine. Le mont Horeb à l’est, faisant face à l’Arabie, est comme le premier étage du groupe ; sur son sommet se trouve le couvent d’Élie, bâti au milieu d’une petite plaine. On y monte en un quart d’heure. De là, après une courte descente, on commence à monter de nouveau pendant une demi-heure (Burckhardt), et l’on atteint un sommet plus élevé, le Djebel Musa, ou mont de Moïse, qui est le Sinaï proprement dit ; son sommet n’a guère que 60 pieds de tour.
En face du Sinaï se trouve le mont Sainte-Catherine, ainsi nommé d’un couvent voisin qui est à 3300 pieds au-dessus de la mer ; son sommet, chauve et nu, est le plus élevé des trois ; pour y arriver, on prend, en redescendant par l’Horeb, une vallée à l’ouest dans laquelle s’élève le monastère d’El Erbaïn. Ruppel a, pour la première fois en 1831, mesuré avec un baromètre la hauteur de ces montagnes : le mont Saint-Catherine a 2814 mètres de haut, le Djebel Musa environ 2470. C’est dans la vallée que domine l’Horeb (Rephidim) que Moïse vit le buisson-ardent, qu’il garda les troupeaux de Jéthro, et qu’il fit jaillir l’eau du rocher (Exode 3.1-2 ; 17.6 ; cf. 19.2). On prétend encore montrer près de là ce rocher miraculeux, un bloc granitique de 4, 48 m2, avec une rigole et quelques stries ou coupures formées par l’écoulement des eaux. C’est peut-être sur l’Horeb aussi que Moïse pria pour le succès des armés de Josué, lors de l’attaque des Amalékites (17.8).
D’après la tradition, ce serait également sur l’Horeb, et non sur le Sinaï, que la loi aurait été promulguée (Exode 20) ; mais divers auteurs chrétiens, d’accord à repousser cette tradition, pensent que cela doit avoir été sur l’un ou l’autre des deux sommets plus élevés, sans que rien puisse trancher la question d’une manière absolue. Aujourd’hui, le nom de Sinaï s’applique d’une manière générale à tout le groupe, et il est possible qu’il en fût de même dans l’antiquité ; Horeb serait alors le nom de la moins élevée des trois cimes principales. Le nom de Sinaï est rappelé (Juges 5.5 ; Psaumes 68.8-17 ; Néhémie 9.13 ; cf. Hébreux 12.18), comme ayant été le théâtre d’une des manifestations les plus solennelles et les plus redoutables de la grandeur divine. La mention faite de cette montagne (Galates 4.25), la circonstance que le Sinaï était appelé Agar par les descendants mêmes de la servante d’Abraham, ce que Paul pouvait avoir appris pendant son long séjour en Arabie, et l’usage que fait l’apôtre de cette circonstance, offrent des difficultés qu’il n’appartient qu’aux commentaires de résoudre.