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Cozar
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

Les historiens orientaux racontent que Cozar ou Khozar, le septième des fils de Japhet, s’étant séparé de ses frères qui s’établirent en différents endroits des pays qui sont compris dans la grande Tartarie, arriva sur le bord du fleuve Volga et y bâtit une ville à laquelle il donna son nom, et fit semer à l’entour du millet, qui est le seul grain qui croit dans ce pays-là. Le pays a retenu le nom de Chozar, et les habitants sont connus sous le nom de Chozariens : il est situé au septentrion de la mer Caspienne et s’étend depuis le Volga en tirant vers le levant ; il a donné son nom à la mer Caspienne, qus les Persans appellent la mer de Chozar.

Les auteurs juifs prétendent que Chozar ou Khozar était petit-fils de Japhet par Thogorma, qu’il fonda le royaume de Chozar dont la ville de Thogorma est une des principales du pays. Le rabbin Petachia assure qu’il a demeuré huit jours dans ce royaume qu’une veine de la mer sépare de la Tartarie, que des frontières de ce royaume sortent sept grands fleuves, qu’il y a deux mers séparées l’une de l’autre d’une journée de chemin l’une est si puante que tous ceux qui y naviguent sont tués par sa mauvaise odeur. La ville de Thogorma est située sur les montagnes d’Ararat : on y suit la loi de Mahomet ; de là on arrive à Nisibe, qui en est éloignée de huit jours de marche : on y voit trois synagogues.

Un autre voyageur juif, curieux de savoir si le sceptre subsistait encore dans Juda et s’il se trouvait encore quelque pays au monde où les Juifs jouissent des droits de la royauté, apprit d’un Juif qui était médecin d’un prince, que dans le royaume de Chozar le roi faisait profession de la loi de Moïse, et il se confirma dans ce sentiment, lorsqu’il vit les lettres de Joseph, roi de Chozar, à un rabbin espagnol.

Abulfarage écrit que les Chozariens sont les mêmes que les Géorgiens, et Eutychius, patriarche d’Alexandrie, écrit que l’empereur Héraclius obtint du roi des Chozariens un grand secours contre les Persans, et que, pour récompense, il leur promit un trône, c’est-à-dire une séance honorable dans les assemblées de son palais impérial. Edrissi écrit dans sa Géographie que, chez les Chozariens, chacun suit la religion qui lui paraît la meilleure et qu’on y a une liberté entière de conscience, qu’il y a des musulmans, des chrétiens et des Juifs mêlés parmi eux. On assure que le calife Abdalmelech fit la guerre aux Chozariéns dans l’Arménie, qu’il les brûla dans leurs églises, qu’il les défit aux Portes de Fer, et que ceux qui restèrent se firent chrétiens.

Malgré tous ces témoignages, il y a encore des savants qui doutent qu’il y ait un royaume de Chozar, ou plutôt qui soutiennent qu’il est évident qu’il n’y en a point et que tout ce qu’on en dit n’est fondé que sur des fables, et que ni les Juifs ni les chrétiens n’ont encore pu marquer sa situation. J’aimerais mieux dire que ce pays est aujourd’hui inconnu à nos géographes sous le nom de Chozar ; mais après les témoignages que nous avons produits des auteurs orientaux, peut-on douter que ce pays ne subsiste et ne leur soit connu ?

Quoi qu’il eu soit, on raconte que, vers l’an de Jésus-Christ 740, un roi de Chozar voulant, en suite d’un songe qu’il avait eu, s’instruire de toutes les religions, pour savoir laquelle était la meilleure, il fit venir un philosophe, un chrétien, un mahométan, il entra en dispute avec chacun d’eux et ne fut point touché de leurs raisons ; il fit ensuite appeler un Juif, nommé Sangari, qui réussit à lui persuader que la religion juive était la seule véritable.

Nous avons la prétendue conférence de Sangari avec Cozri, où certainement on lit des choses très-peu propres à convaincre un Infidèle ; mais enfin Cozri, s’étant converti, fit confidence de son secret au général de ses armées : l’un et l’autre partirent secrètement de Chozar et arrivèrent heureusement dans des montagnes où des Juifs célébraient le sabbat. Le roi et son général y reçurent la circoncision, firent profession du judaïsme, et étant retournés dans la capitale, ils engagèrent le peuple du pays à prendre le même parti. Si la lettre de Joseph, roi de Chozar au rabbin espagnol Chasdaï était véritable, il faudrait dire que le judaïsme subsista dans le royaume de Chozar, au moins jus., qu’à la fin du quatorzième siècle, puisque ce rabbin vivait vers l’an 1394.

Mais et cette lettre du roi Joseph et la conversion prétendue du roi de Chozar sont très-douteuses : il y a beaucoup d’apparence que le livre nommé Cozri, dont les Juifs font un si grand cas, qu’ils voudraient qu’on l’apprît par cœur ; que ce livre, dis-je, qui renferme l’histoire de cette conversion et les raisons du rabbin Sangari, est un pur roman l’auteur juif du livre hébreu intitulé Meorenaïm, doute qu’il y ait jamais eu un tel roi des Chozariens, qui ait embrassé la religion des Juifs. Cet aveu est remarquable dans un auteur de cette nation, en une chose de cette conséquence.