Il est parlé si souvent dans l’Écriture des dieux de l’Égypte, qu’on ne peut guère se dispenser de dire ici quelque chose d’Isis, qui était la principale de ces déités. Isis, selon la théologie des Égyptiens, était la même qu’Io, que Jupiter avait aimée, et qui, ayant été métamorphosée en vache par la haine de Junon, se retira en Égypte, où Jupiter lui rendit sa première forme. Elle y épousa Osiris, roi du pays : Osiris et Isis gouvernèrent avec tant de sagesse et de douceur, et rendirent de si grands services à l’Égypte, que les Égyptiens leur rendirent les honneurs divins. On dit qu’elle leur enseigna l’art de filer la laine et de la mettre en œuvre, l’art de cultiver la terre, de recueillir le blé, et d’en faire du pain ; elle leur donna des lois et les poliça.
D’autres disent qu’Osiris était le frère et le mari d’Isis, de même que Junon était sœur et épouse de Jupiter, Eusèbe avance qu’Osiris était époux, frère et fils d’Isis. Lactance et Minutius Félix soutiennent qu’Osiris était fils d’Isis. Quant au père d’Isis, ceux qui la confondent avec Io disent qu’elle était fille d’Inachus roi d’Argos d’autres lui donnent Neptune pour père, et pour mère Callirhoë ; d’autres la font fille d’Argus et d’Ismène : d’autres lui donnent pour père Mercure, ou Prométhée. Hérodote dit que les Égyptiens prenaient Isis pour Cérès, et lui donnaient pour fils Apollon et Diane. Que Latone avait été leur nourrice et leur libératrice. Apollon était appelé en langue égyptienne Orus ; Cérès, Isis, et Diane, Bubastis.
Si l’on veut recueillir les sentiments de tous les auteurs qui ont écrit sur Isis et Osiris, on trouvera que ces deux déités renferment tous les dieux du paganisme. Isis est, selon eux, Cérès, Junon, la Lune, la Terre, ou la Nature, Minerve, Proserpine, Thétis, la Mère des dieux ou Cybèle, Vénus, Diane, Bellone, Hécaté, Rhamnusia. En un mot, on lui donnait le surnom de Myrionima, c’est-à-dire, la déesse à mille noms. Un ancien marbre de Capoue la qualifie, déesse Isis, qui êtes toutes choses ; et dans la ville de Sais on voyait, au rapport de Plutarque, sur le pavé d’un temple de Minerve, qui est la même qu’Isis, ces paroles : Je suis tout ce qui a été, ce qui est, et ce qui sera, et nul d’entre les mortels n’a encore levé mon voile.
Apulée fait parler Isis en ces termes : Je suis la Nature, mère de toutes choses, maitresse des éléments, le commencement des siècles, la souveraine des dieux, la reine des mondes, la première des natures célestes, la face uniforme des dieux et des déesses. C’est moi qui gouverne la sublimité lumineuse des cieux, les vents salutaires des mers, le silence lugubre des enfers ; ma divinité unique, mais à plusieurs formes, est honorée avec différentes, et sous différents noms. Les Phrygiens m’appellent la Pessinontienne, mère des dieux ; les Athéniens, Minerve Cécropienne ; ceux de Cypre, Vénus de Paphos ; ceux de Crète, Diane Dyctienne ; les Siciliens, ce peuple qui parle trois langues, Proserpine Stygienne ; les Eleusiens, l’ancienne déesse Cérès ; d’autres, Junon ; d’autres, Bellone ; quelques-uns, Hécaté ; plusieurs m’appellent Rhamnusia ; les Éthiopiens orientaux, les Ariens, ceux qui sont instruits de l’ancienne doctrine, je veux dire, les Égyptiens, m’honorent avec des cérémonies qui me sont propres, et m’appellent de mon véritable nom, la reine Isis.
Les Égyptiens représentaient Isis avec une tête de vache, ou du moins avec des cornes, ou avec le croissant sur la tête ; et entre les cornes du croissant, on met d’ordinaire un globe qui désigne le monde. On la représente aussi ayant sur la tête un oiseau qu’on croit être l’ibis. Souvent on la voit avec une clef, avec la croix, avec un fouet à la main. Son culte était fameux dans toute l’Égypte, mais principalement à Bubaste, à Copte et à Alexandrie.
Les anciens Germains adoraient aussi Isis ; mais leur Isis était différente de celle des Égyptiens. On tenait qu’elle avait été femme de Mannus, fils de Thuiscon, dont les Germains prétendaient tirer leur origine. Quelques savants ont prétendu que sous les noms de Mannus et d’Isis ces anciens peuples voulaient marquer Adam et Ève. Mannus en allemand signifie l’homme, de même qu’Adam en hébreu ; et Isis est le même nom que Ischa, ou Ischet, qui est le nom que le premier homme donna à Ève : en hébreu, Ischa. On a cru la même chose d’Isis et d’Osiris, adorés chez les Égyptiens.
La question à présent est de savoir si les Israélites ont adoré Isis, et quel nom ils lui donnaient. Il est bon premièrement
1° De remarquer que les Hébreux n’ont point de nom pour signifier une déesse.
2° Que puisqu’on représentait Isis avec une tête et des cornes de bœuf, il est assez croyable que c’est elle que les livres saints appellent le Veau d’or, ou, comme lisent les Septante, les Génisses d’or. Plusieurs Pères, parlant de l’adoration du veau d’or, ont dit que les Israélites adorèrent une tête de veau.
3° Comme les Juifs ont adoré le Soleil et la Terre sous différents noms, comme de Gad, de Meni, de Baal, d’Astaroth, du roi et de la reine et de toute la milice du ciel, il est à croire qu’ils ont rendu leurs honneurs à Isis et à Osiris, sous ces différents noms. [Voyez Dagon].