Ces termes, dans l’Écriture, ne doivent pas toujours se prendre dans le sens odieux qu’on leur donne communément. Assez souvent ils ne signifient que boire autant qu’on peut et qu’on doit dans un repas d’amis, où le vin n’est pas épargné. Par exemple, il est dit (Genèse 43.34) que les frères de Joseph s’enivrèrent avec lui, la seconde fois qu’ils le virent en Égypte, et ne sachant pas encore qu’il était leur frère ; il n’est pas croyable que dans cette occasion ils se soient oubliés jusqu’au point de manquer à la bienséance et au respect qu’ils devaient à un homme de la considération de Joseph.
L’Épouse, dans le Cantique (Cantique 5.1), dit à ses amis : Venez, mes amis, buvez, enivrez-vous ; c’est-à -dire, buvez, mangez, faites bonne chère. Et Aggée : Vous avez semé beaucoup, et vous avez recueilli peu ; vous avez bu, et vous ne vous êtes pas enivré (Aggée 1.6) ; c’est-à -dire, vous n’avez pas recueilli assez de vin pour vous mettre dans l’abondance. Et le Sage (Proverbes 11.24) : Celui qui enivre, sera enivré à son tour ; l’homme libéral et bienfaisant sera libéralement récompensé. Et dans l’Évangile (Jean 2.10) : Tout homme sert d’abord le bon vin, et lorsque les conviés sont enivrés il leur sert le moindre. Croira-t-on que Jésus-Christ ait attendu que ces conviés fussent ivres pour faire en leur faveur le miracle qu’il fit a Cana ? Et saint Paul (1 Corinthiens 11.22) : l’un est dans le besoin, et l’autre dans l’abondance.
L’yvresse se prend quelquefois pour l’accablement et l’affliction (Isaïe 51.21) : Paupercula et ebria non a vino, dit Isaïe ; vous qui avez été enivrée du calice de la colère de Dieu. Voyez Calice.
Absumat ebria sitientem, dit Moïse par une espèce de proverbe (Deutéronome 29.19) : Celle qui est ivre dévorera celle qui a soif. Le riche consumera le pauvre : le fort accablera le faible. Le même (Deutéronome 32.42) : J’enivrerai mes flèches de sang. Et le Psalmiste (Psaumes 54.11) : La terre sera enivrée de pluie. Et Isaïe (Isaïe 49.26) : Je rassasierai tes ennemis de ta chair, je les enivrerai de ton sang. Et Ézéchiel (Ézéchiel 23.33) : Ebrietate et dolore repleberis. Et encore (Ézéchiel 39.19) : Bibelis sanguinem in ebrietatem : Vous vous enivrerez du sang de ma victime.