En latin, mensis ; en grec, men ; en hébreu chodesch ou jerach. Les anciens Hébreux n’avaient pas de noms réglés pour désigner leurs mois ; ils disaient le premier, le second, le troisième mois, et ainsi du reste. Dans Moïse (Exode 13.4 ; 23.15 ; 34.18 ; Deutéronome 16.1) nous trouvons le mois Abib, ou le mois des nouveaux épis, ou des nouveaux fruits, qui est apparemment le nom que les Égyptiens donnaient au mois que les Hébreux appelèrent dans la suite nisan, et qui fut le premier de l’année sainte. Partout ailleurs ce législateur ne désigne les mois que par l’ordre qu’ils tenaient entre eux. Daus les livres de Josué, des Juges, et dans les deux premiers de Samuel, nous voyons le même usage. Sous Salomon (1 Rois 6.1), nous trouvons le mois Sio, ou Sif, qui est le second mois de l’année sainte, et qui répondait à celui qui porta dans la suite le nom de Jiar. Dans le même chapitre (1 Rois 6.8), on lit le mois de Bal, qui est le huitième de l’année sainte, et qui répond à Marschevan, ou octobre. Enfin au chapitre 8 du même livre, on lit le mois Eihanim (1 Rois 8.2), ou le mois des Forts qui répond à Tizri, qui est le septième de l’année sainte.
On n’est pas d’accord sur l’origine de ces noms de mois. Scaliger a cru que Salomon les avait empruntés des Phéniciens, avec qui il fut dans un grand commerce. Grotius croit qu’ils viennent des Chaldéens ; et le père Hardouin les fait venir des Égyptiens. Quoi qu’il en soit, on ne les voit ni avant, ni après Salomon. Mais depuis la captivité de Babylone, ils prirent les noms des mois des Chaldéens et des Perses, cher qui ils avaient demeuré si longtemps. Voici les noms de ces mois, et l’ordre qu’ils tiennent entre eux dans l’année sainte et dans l’année civile.
Noms des mois hébreux suivant l’ordre de l’année sainte.
1. Nisan, qui répond à Mars.
2. Jiar, Avril.
3. Sivan, Mai
4. Thammuz, Juin
5. Ab, Juillet.
6. Elul, Août.
7. Tizri, Septembre.
8. Harschehhon, Octobre.
9. Casleu, Novembre.
10. Thebet, Décembre.
11. Sebat ou Sabat, Janvier.
12. Adar, Février.
Noms des mois hébreux suivant l’ordre de l’année civile.
1. Tizri, qui répond à Septembre.
2. Marschevan, Octobre.
3. Casleu, Novembre.
4. Thebet, Décembre.
5. Sebat, Janvier.
6. Adar, Février.
7. Nisan, Mars.
8. Jiar, Avril.
9. Sivan, Mai.
40. Thammuz, Juin.
11. Ab, Juillet.
12. Elul, Août.
Dans les commencements, les Hébreux suivirent dans leur année et dans leurs mois la disposition qu’ils avaient trouvée en Égypte. Leur année était de trois cent soixante-cinq jours, et de douze mois de trente jours chacun. Cela paraît par le dénombrement des jours que dura l’année du déluge (Genèse 7). Le douzième mois devait avoir trente-cinq jours, et ils n’avaient point de mois intercalaire qu’au bout de cent vingt ans, lorsque le commencement de l’année était dérangé de trente jours entiers.
Depuis la sortie d’Égypte, qui arriva au mois de mars, Dieu ordonna que l’année sainte, c’est-à-dire, l’ordre des fêtes et des cérémonies de la religion, se commencerait au mois de nisan, qui est le septième de l’année civile, à laquelle il ne toucha point, et que les Hébreux ont toujours continué de commencer au mois de tizri, qui revient à septembre. Depuis la captivité de Babylone, les Juifs, qui n’étaient qu’une poignée de monde au milieu des autres peuples qui les environnaient, furent obligés de se conformer aux usages différents et aux manières de partager le temps des peuples qui les dominaient ; premièrement des Chaldéens, puis des Perses, et enfin des Grecs. Ils prirent les noms des mois des Chaldéens et des Perses, et peut-être leur manière de partager l’année et les mois. Nous ne pouvons pas toutefois l’assurer, ne sachant pas précisément quelle était la forme des mois des Chaldéens : mais nous voyons clairement par l’Ecclésiastique (Ecclésiaste 43.6), par les Machabées, par Josèphe et par Philon, que de leur temps ils suivaient la manière des Grecs ; c’est-à-dire, que leurs mois étaient lunaires, et leurs années solaires.
Ces mois lunaires étaient de vingt-neuf jours et demi, ou, pour parler plus intelligiblement, le premier était de trente jours ; et le suivant de vingt-neuf ; et ainsi de suite à l’alternative. Celui qui avait trente jours était appelé plein ; et celui qui n’en avait que vingt-neuf, était nommé vide. La nouvelle lune était toujours le commencement du mois, et ils appelaient ce jour-là Néoménie, c’est-à-dire, selon la force du Grec, nouvelle lune ou nouveau mois. Ils ne la réglaient point par le point où la lune se joint au soleil, mais par le moment où elle paraît ; et pour annoncer ce moment, ils avaient, dit-on, des gens postés sur des lieux élevés, pour en donner avis au Sanhédrin le plus promptement qu’il était possible. Et aussitôt qu’on avait averti, on criait : Fête de la nouvelle lune, fête de la nouvelle lune, et on annonçait le commencement du mois par le son des trompettes ; et dans la crainte de manquer au précepte qui oblige à certaines cérémonies au commencement de chaque mois, on y faisait deux jours de néoménie, dont l’un s’appelait le jour de l’apparition de la lune, et l’autre, le jour de la lune cachée. C’est ce que disent les rabbins. Mais il y a beaucoup d’apparence que si cela s’est jamais pratiqué, ce n’a été que dans les provinces éloignées de Jérusalem ; car dans le temple et dans la capitale, il y eut toujours un calendrier fixé, ou du moins une décision fixe pour les jours de fête, arrêtée par la maison du jugement.
Quand nous avons dit ci-dessus que les mois des Juifs répondaient aux nôtres, de telle sorte que nisan, par exemple, répondait à mars, et jiar à avril, etc., cela ne doit pas s’entendre à la rigueur ; car les mois lunaires ne peuvent jamais revenir parfaitement aux mois solaires. L’équinoxe du printemps tombe entre le 20 et le 21 de mars, selon le cours de l’année solaire ; mais dans l’année lunaire, la néoménie tombera dans le mois de mars, et la pleine lune dans le mois d’avril. Ainsi les mois des Hébreux répondent d’ordinaire à deux de nos mois, et enjambent de l’un dans l’autre.
Les douze mois lunaires ne faisant que trois cent cinquante-quatre jours et six heures, l’année des Juifs était plus courte que la romaine de douze jours. Mais, afin de rattraper le point des équinoxes, dont cette différence de l’année solaire et de la lunaire éloignait la néoménie du premier mois, les Juifs avaient soin de trois en trois ans d’intercaler dans leur année un treizième mois, qu’ils appelaient né-adar, ou le second adar ; et par là leur année lunaire égalait l’année solaire, parce qu’en trente-six mois de soleil, il y en a trente-sept de lune. C’était le Sanhédrin qui réglait cette intercalation, et ce treizième mois se plaçait entre adar et nisan ; en telle sorte que la Pâque fût toujours célébrée la première pleinelune d’après l’équinoxe. On peut voir sur tout cela l’introduction à l’Écriture du R. P. Lami, et notre dissertation sur la chronologie, imprimée au commencement de notre Commentaire sur la Genèse ; et si l’on veut voir les choses traitées plus à fond, on peut consulter Scaliger, de Emendatione temporum, et Calvisius dans son Introduction à la chronologie.