Festin des noces. Les Hébreux se servent d’ordinaire du nom mischteb, Nuptiœ, convivium, qui vient du verbe schatala, boire, pour signifier en général un festin, et en particulier une noce, ou un festin des noces. Les Grecs emploient dans le même sens le terme gamos, qui signifie le mariage, la noce et le festin qui l’accompagne. Quelquefois ce terme paraît être mis pour un festin en général Voyez Luc (Luc 12.36 ; 14.8).
Comme nous avons remis en cet endroit de traiter du mariage, il en faut parler avec une juste étendue. Nous ne traiterons point cette matière en jurisconsulte, ni même bout à fait en théologien. On peut voir sur cela Selden. Uxor Hebraica, pour ce qui regarde les Juifs, et les auteurs chrétiens qui ont traité des sacrements en général, et du mariage en particulier, pour ce qui concerne les questions théologiques qui se font sur le mariage des chrétiens. Nous avons déjà dit quelque chose de la répudiation sur l’article Divorce, et nous l’avens traitée au Iong dans une Dissertation imprimée à la tête de notre Commentaire sur les Nombres. De sorte qu’il ne nous reste proprement à traiter ici que ce qui a rapport aux cérémonies des mariages des anciens Hébreux. Nous avons déjà examiné cette matière assez au long dans une Dissertation faite exprès, et imprimée à la tête du Commentaire sur le Cantique des cantiques, et nous nous contenterons d’en donner ici le précis.
Les Hébreux se mariaient de bonne heure. Les rabbins veulent que les hommes soient mariés à dix-huit ans. Quiconque n’est pas marié à cet âge-là pèche contre le précepte que Dieu donna aux premiers hommes, en disant (Genèse 1.28) : Croissez et multipliez. Ils peuvent prévenir ce temps, mais il ne leur est pas permis de le différer. Dès qu’ils ont treize ans accomplis, ils peuvent se marier, et ils ne croient pas qu’un homme puisse vivre dans le célibat sans péché, ou au moins sans danger de péché. Pour les filles, on les fiance de fort bonne heure ; mais pour l’ordinaire on ne les marie que lorsqu’elles ont ce qu’ils appellent l’âge de puberté, c’est-à-dire, douze ans accomplis. De là viennent ces expressions (Joël 1.8 Malachie 2.14), l’épouse de la jeunesse, c’est-à-dire, celle qu’on a épousée dans sa jeunesse ; et (Proverbes 2.17) le conducteur de la jeunesse, pour marquer un époux.
Suivant ces principes, il est aisé de comprendre pourquoi le célibat et la stérilité étaient un opprobre dans Israël, et pourquoi la fille de Jephté va faire le deuil de sa virginité (Juges 11.27), c’est-à-dire, déplorer son sort de ce qu’elle mourait sans avoir été mariée, et sans laisser des héritiers à son père qui fissent revivre son nom dans Israël. De là le soin qu’ils avaient de faire épouser au frère du mari mort sans enfants, la veuve qu’il avait laissée, et la honte dont était chargé celui qui refusait de la prendre, et de bâtir la maison de son frère, en lui donnant des héritiers (Genèse 38.8 Ruth 4.5). De là ces menaces du Seigneur par Isaïe (Isaïe 4.1) : Les hommes seront si rares dans Israël, que sept femmes en rechercheront un seul en mariage, et lui diront : Nous nous nourrirons et nous nous habillerons ; recevez-nous seulement pour épouses, délivrez-nous de l’opprobre, et que voire nom soit invoqué sur nous. Que nous puissions dire : Nous avons un tel pour époux, et qu’on ne nous regarde plus avec mépris. Voyez aussi (Jérémie 31.22) : Les femmes rechercheront les hommes en mariage ; et (Ca. 8.1) : Que je sois délivrée de la honte du célibat.
Les filles, avant leur mariage, ne paraissaient point d’ordinaire en public. Elles étaient appelées alma, vierge, cachée, enfermée. Souvent la demande s’en faisait sans qu’elles eussent vu ceux qui les recherchaient. Tandis qu’une fille est cachée, dit Jésus fils de Sirach (Ecclésiaste 42.9), elle est pour son père un sujet de peines et d’inquiétudes continuelles, qui lui ravissent le sommeil. Il craint qu’elle ne soit pas mariée à temps, ou qu’elle ne tombe dans quelque faute contre son honneur. Voyez aussi saint Paul (1 Corinthiens 7.36). C’est une espèce de honte à un père, lorqu’il n’a pas marié sa fille à temps.
L’on voit la manière dont on demandait une fille en mariage, dans ce que fit Hémor, père de Sichem, et Sichem lui-même, en demandant Dina à Jacob (Genèse 34.8-9) : L’âme de mon fils a conçu une violente passion pour votre fille ; donnez-la lui pour femme. Que nous trouvions grâce devant vous. Augmentez la dot que vous souhaitez qu’on lui donne, demandez quels présents il vous plaira, je les donnerai volontiers, pourvu que vous vouliez la lui donner pour épouse. Voyez aussi (Genèse 24.33) et suivants, la manière dont Eliézer fait la demande de Rébecca pour Isaac ; et (Tobie 7.10, 11), la demande que le jeune Tobie fait de Sara, fille de Raguel, pour sa femme ; et enfin (Cantique 8.8) : au jour qu’on lui parlera afin d’avoir son consentement pour le mariage ?
Le mari donnait la dot à sa femme. C’était en quelque sorte un achat que l’homme faisait de la personne qu’il voulait épouser.
Avant les fiançailles, on convenait de la dot que le mari lui donnerait, et des présents qu’il ferait au père et aux frères de l’épouse. Nous venons de voir qu’Hémor, père de Sichem, dit à Jacob et à ses fils de lui demander quelle dot et quels présents ils voudront, et qu’il les donnera volontiers, pourvu qu’ott lui accorde Dina. Jacob s’engage à servir sept ans pour Rachel, et sept autres années pour Lia (Genèse 29) ; et ces deux sœurs, quelques années après, se plaignent que Laban, leur père, s’est approprié leur dot (Genèse 31.15). Saül ne donna sa fille Michol à David que pour cent prépuces de Philistins. Quand on lui parla qu’il deviendrait le gendre du roi, il répondit qu’il n’était pas assez riche pour prétendre à cet honneur ; mais on lui répliqua que le roi n’avait que faire de douaire pour sa fille, qu’il ne lui demandait que cent prépuces des Philistins, pour se venger de ses ennemis (1 Samuel 18.25). Osée achète sa femme pour le prix de quinze pièces d’argent et d’une mesure et demie d’orge (Osée 3.2). Les rabbins enseignent toutefois que le père avait accoutumé de donner à sa fille certains présents pour ses ajustements. Ils ont fixé cela à cinquante zuzims, qui était une pièce de monnaie de la valeur d’environ huit sous.
Les fiançailles se faisaient ou par un écrit, ou par une pièce d’argent que l’on donnait à la fiancée, ou par la cohabitation et le commerce charnel. Voici la formule de l’écrit qu’un dressait dans ces occasions : Un tel jour, de tel mois, de telle année, N. fils de N. à N. dit à N. fille de N. Soyez mon épouse suivant la loi de Moïse et des Israélites, et je vous donnerai pour la dot de votre virginité la somme de deux cents zuzims, qui est ordonnée par la loi. Et ladite N. a consenti de devenir son épouse sous ces conditions, que ledit N. a promis d’exécuter au jour du Mariage. C’est à quoi ledit N. s’oblige, et pourquoi il engage tous ses biens, jusqu’au manteau qu’il porte sur ses épaules. Promet de plus d’accomplir tout ce qui est ordinairement porté dans les contrats de mariage en faveur des femmes israélites. Témoins N.N. N.
La promesse par une pièce d’argent, et sans écrit, se faisait en présence de témoins ; et le jeune homme disait à sa prétendue : Recevez cet argent pour gage que vous devien drez mon épouse. Enfin l’engagement par la cohabitation était, selon les rabbins, permis par la loi (Deutéronome 24.1) ; mais il avait été sagement défendu par les anciens, à cause des abus qui pouvaient en arriver, et à cause des inconvénients des mariages clandestins. Les fiançailles donnaient aux jeunes gens la liberté de se voir, ce qui ne leur était pas permis auparavant (I). Si, durant ce temps, la fiancée tombait dans quelque faute contre la fidélité qu’elle devait à son fiancé, elle était traitée comme adultère. Ainsi la sainte Vierge, qui était fiancée à saint Joseph lorsqu’elle conçut Jésus-Christ, aurait pu, selon la rigueur des lois, être punie comme adultère, si l’ange du Seigneur n’eût informé saint Joseph du mystère qui se passait en elle. Les docteurs Juifs enseignent que, si les fiancés abusaient de la liberté qu’ils avaient de se voir, ils étaient condamnés à la peine du fouet. Souvent, entre les fiançailles et les épousailles, il se passait un assez long temps, soit à cause du bas âge des fiancés, au pour d’autres raisons de nécessité ou de bienséance.
Lorsque les parties étaient d’accord sur les conditions du mariage et sur le temps de le célébrer, on en dressait le contrat de la manière suivante.
Formule des contrats de mariage des hébreux.
Un tel jour, de tel mois, de telle année, sur un tel fleuve ; car d’ordinaire ils se mariaient en plein air et sur le rivage d’une rivière, N. fils de tel, a dit à N. fille de N. : Soyez ma femme suivant le rite de Moïse et des Israélites. Et moi avec l’aide de Dieu, je vous honorerai, sustenterai, vétirai, nourrirai suivant l’usage des autres maris de ma nation, qui honorent, sustentent, nourrissent et revétent leurs épouses comme ils le doivent. Je vous donne pour la dot et prix de votre virginité, deux cents zuzims d’argent, qui vous sont dûs suivant la loi. Outre cela, je m’engage à vous fournir les habits et les aliments convenables, comme aussi de vous rendre le devoir conjugal suivant l’usage de toutes les nations.
Et ladite N. a consenti de devenir son épouse. De plus ledit époux a promis par forme d’augmentation de dot, de donner outre la somme principale, celle de N. Et ce que ladite épouse a apporté, est estimé la valeur de N. Ce que ledit époux reconnaît avoir touché, et en être chargé, et nous en a fait la déclaration suivante. J’accepte et reçois sous ma garde et garantie tout ce qui a été mentionné ci-dessus, tant pour la dot que pour quelque autre cause que ce soit ; et m’oblige, moi ou mes héritiers et ayant cause, sous le cautionnement de tous mes biens, meubles et immeubles, présents et à venir, jusqu’au manteau que je porte sur mes épaules, de tenir compte et rendre fidèlement à madite épouse tout ce qu’elle a apporté en dot, ou en quelque manière que ce soit, pendant ma vie, ou à ma mort. Ce que je promets d’exécuter suivant la forme et teneur des contrats ordinaires de mariage, usités parmi les enfants d’Israël, et suivant les règles de nos rabbins de pieuse mémoire. En foi de quoi nous avons soussigné, etc.
Léon de Modène dit que l’usage des Juifs est de choisir pour la célébration du mariage un mercredi ou un vendredi, si c’est une fille ; ou un jeudi, si c’est une veuve. La veille de la cérémonie, la fiancée va au bain, et se plonge tout le corps dans l’eau. Elle est accompagnée de plusieurs femmes, qui la mènent au bain, au son de plusieurs instruments de cuisine, afin que tout le voisinage, sache qu’elle va se marier. Il y a de la diversité entre Selden, Buxtorf, et Léon de Modène, sur le sujet des cérémonies du mariage ; ce qui fait juger que les usages varient sui vaut les lieux et les personnes. On pare l’épousée de tout ce que l’on peut trouver de plus beau et de plus riche ; puis on la conduit dans un lieu découvert, sur un fleuve, dans une cour ou dans un jardin. Quelquefois cela se fait dans une salle parée exprès. L’époux et l’épouse sont placés sous un dais, ayant l’un et l’autre un voile noir. On leur met sur la tête un autre voile carré, d’où pendent aux quatre coins quatre houppes : C’est ce voile que les Hébreux appellent taled.
Alors le rabbin du lieu, ou le chantre de la synagogue, ou le plus proche parent du marié, prend une tasse pleine de vin, et ayant prononcé cette bénédiction : Soyez béni, Seigneur, qui avez créé l’homme et la femme, et ordonné le mariage, etc., il présente le vase à l’époux, puis à l’épouse, afin qu’ils en goûtent. Ensuite l’époux met au doigt de son épouse en présence de deux témoins, un anneau, en disant : Par cet anneau, vous êtes mon épouse suivant l’usage de Moïse et d’Israël. Buxtorf dit que cet anneau doit être d’or massif et sans aucune pierre enchâssée ; et que l’époux prend à témoin la compagnie qu’il est de bon or et de valeur convenable : Après cela on fait lecture du contrat de mariage, que l’époux remet entre les mains des parents de l’épouse. Alors on apporte de nouveau du vin dans un vase de matière fragile, ou récite six bénédictions, on présente à boire aux mariés ; puis on jette le reste à terre en signe d’allégresse. L’époux prend le vase, et le jette avec raideur contre terre ou contre la muraille et le met en pièces en mémoire, dit-on, de la désolation du temple.
Les rabbins enseignent qu’avant la ruine du temple de Jérusalem, l’époux et l’épouse portaient des couronnes dans la cérémonie de leurs noces ; mais que depuis ce temps, on n’en a plus porté : Dans l’Écriture, on voit distinctement la couronne de l’époux mais non pas celle de l’épouse. Aussi la coiffure des femmes n’était nullement propre à porter la couronne. Isaïe (Isaïe 61.10) :Je me réjouirai au Seigneur comme un époux orné de sa couronne, et comme une épouse parée de ses ornements. Et dans le Cantique (Cantique 3.11) : Filles de Jérusalem, venez voir le roi Salomon orné de la couronne que sa mère lui a mise au jour de son mariage. Les Juifs d’aujourd’hui en quelques endroits, ont coutume de jeter sur les mariés, et particulièrement sur l’épouse, du froment à pleines mains, en disant : Croissez et multipliez. Dans d’autres endroits, ils y mêlent quelques pièces d’argent, qui sont ramassées par les pauvres.
On voit par l’Évangile (Jean 3.29), qu’on donnait à l’époux un paranymphe que Jésus Christ, appelle l’ami de l’époux. Un nombre de jeunes gens l’accompagnaient aussi par honneur pendant les jours de la noce, et des jeunes filles de même tenaient compagnie à la mariée durant tout ce temps. Les compagnons de l’époux sont bien marqués dans l’histoire de Samson (Juges 14.11), et dans le Cantique des cantiques (Cantique 5.1 ; 8.13) ; et les compagnes de l’épouse dans le même Cantique (Cantique 1.4 ; 2.7-8, 16 ; 3.5 ; 8.4)., et dans le psaume (Psaumes 44.8-13, 15). Le devoir du paranymphe était de faire les honneurs de la noce en la place de l’époux, et d’exécuter ses ordres. Celui qui a l’épouse, est l’époux dit saint Jean-Baptiste en parlant de Jésus-Christ ; mais l’ami de l’époux, qui est debout, et qui obéit à la voix de l’époux, se réjouit d’obéir à sa voix (d). Quelques-uns croient que l’architriclinus, dont il est parlé dans les noces de Cana (e), où Jésus-Christ se trouva avec sa très-sainte mère, est le paranymphe ou l’ami de l’époux, qui présidait aux tables, et qui avait soin qu’il ne manquât rien aux conviés. Les amies et les compagnes de l’épouse chantaient l’épithalame à la porte de l’épouse le soir de ses noces. Le psaume 44 est un épithalame, intitulé : Cantique de réjouissance des bien-aimées.
La cérémonie de la noce se passait avec beaucoup de bienséance, les jeunes gens de l’un et de l’autre sexe n’étant point ensemble péle-mêle. Ils étaient dans des appartements séparés, et mangeaient à différentes tables, et se divertissaient de manière que les jeunes filles étaient avec les jeunes filles, et les garçons avec les garçons. La réserve des Orientaux envers les femmes exigeait cela. On en voit des preuves dans l’histoire du mariage de Samson, dans celui d’Esther, dans le Cantique des cantiques. Les jeunes hommes prenaient leur plaisir quelquefois à proposer des énigmes (Juges 14.12), et l’époux proposait des prix à ceux qui les expliqueraient. On sait l’histoire de Samson, et l’énigme qu’il proposa aux jeunes Philistins qui l’accompagnaient dans cette fête.
La cérémonie de la noce durait ordinairement sept jours pour une fille, et trois jours pour une veuve. Jacob ayant épousé Rachel, et Laban lui ayant substitué Lia, lorsque Jacob s’en plaignit, Laban lui dit que ce n’était point la mode dans ce pays-là de marier les plus jeunes filles avant les aînées ; qu’il ne refusait pas de lui donner aussi Rachel, après qu’il aurait passé avec Lia les sept jours de son mariage (Genèse 29.27). La cérémonie des noces de Samson dura aussi sept jours entiers (Juug 14.17-18). de même que celle du jeune Tobie (Tobie 12.3). Les rabbins enseignent que ce terme de sept jours était d’obligation pour les maris. Ils devaient faire sept jours de noces à chacune des femmes qu’ils prenaient, quand même ils en auraient épousé plusieurs en un seul jour. Dans ce cas, ils faisaient les noces autant de semaines de suite qu’ils avaient épousé de femmes. Ces sept jours de réjouissance se faisaient d’ordinaire dans la maison du père de la fille, et après cela on conduisait en solennité l’épouse dans la maison du marié.
Cette conduite se faisait d’ordinaire avec grande pompe, suivant les facultés et la condition des personnes. Souvent on choisissait le temps de la nuit. D’où vient que dans la parabole des dix vierges qui allèrent au-devant de l’époux et de l’épouse, il est dit que ces vierges s’endormirent (Matthieu 25.1), et que s’étant éveillées au bruit de l’arrivée de l’époux, les vierges imprudentes se trouvèrent sans huile pour entretenir leurs lampes ; et pendant qu’elles allaient en acheter chez los marchands, l’époux et sa suite passèrent, et elles demeurèrent devant la porte, exclues du festin de la noce. On lit dans les livres des Machabées (1 Machabées 9.37), que les fils de Jambri ayant fait des noces magnifiques à Médaba, ville au-delà du Jourdain, comme ou amenait en grande solennité l’épouse au logis de l’époux, et que les parents et les amis du marié venaient au-devant d’elle avec des instruments de musique et des armes, les Machabées tombèrent sur eux et les dissipèrent.
Les Hébreux dans la cérémonie du mariage, se vantent d’imiter principalement ce qui se fit dans celui du jeune Tobie, qu’ils regardent à bon droit comme un modèle du mariage le plus régulier et le plus heureux. Toutefois les cérémonies que nous venons de voir sont assez différentes de celles qui se pratiquaient alors. D’abord Raguel accorde sa fille au jeune Tobie. En même temps il met les mains de Tobie dans celle de Sara sa fille, et leur donne sa bénédiction. Voilà la cérémonie essentielle du mariage. Après cela Raguel se fait apporter du papier, écrit le contrat, et le fait signer par les témoins ; puis on commence le festin, qui dure deux semaines (Tobie 8.23) ; quoique selon les lois marquées par les rabbins, il ne dût durer que trois jours, puisque Sara était veuve de sept maris.
Lorsque les mariés et la parenté sont entrés dans la maison, on s’assied à table, et l’époux commence à chanter le plus mélodieusement qu’il lui est possible une bénédiction assez longue en hébreu. Après le repas, le plus honorable de la compagnie prend l’époux par la main ; ensuite tous les autres se mettant en rondeau, commencent à danser tous ensemble. Les femmes de leur côté font la même chose, séparées des hommes. Cette danse est d’une très-ancienne tradition parmi eux ; ils l’appellent la danse du commandement, prétendant qu’elle a été commandée de Dieu pour la cérémonie du mariage.
La conduite de l’épouse dans la chambre nuptiale est, au jugement des rabbins, ce qui achève le mariage ; car ni la bénédiction, ni les autres cérémonies qui précèdent, ne sont point censées donner à cet acte toute sa perfection. La fille porte le nom d’épouse parfaite, aussitôt qu’elle est entrée dans cette chambre, quand même le mariage n’aurait pas été consommé ; comme il arrive quand la personne est dans le temps des incommodités ordinaires à son sexe, pendant lequel il est défendu à l’homme de s’en approcher, sous peine de la vie (Lévitique 20.18). Avant que de coud uire l’épouse dans la chambre miptiale, on récite cette bénédiction en présence de dix personnes d’âge et libres : Soyez béni, Seigneur notre Dieu, roi du monde, qui avez créé toutes choses pour votre gloire. Soyez béni, Seigneur notre Dieu, créateur de l’homme. Soyez béni, Seigneur notre Dieu, qui avez créé l’homme à votre image et ressemblance, et qui lui avez préparé une compagne pour toujours. Soyez béni, Seigneur notre Dieu ; créateur de l’homme. Celle qui était stérile se réjouira, en rassemblant ses enfants dans son sein. Béni soyez-vous. Seigneur notre Dieu, qui réjouissez Sion dans la multitude de ses enfants. Comblez de joie ces deux époux, comme vous en avez comblé l’homme et lu femme dans le jardin d’Éden. Soyez béni, Seigneur notre Dieu qui répandez le plaisir sur l’époux et sur l’épouse, et qui avez créé pour eux la joie, les chants, l’allégresse, les tressaillements, l’amour, l’amitié, la paix, la tendresse fraternelle. Faites au plutôt, Seigneur, que l’on entende dans les villes de Juda et dans les places de Jérusalem, les chants de joie, la voix de l’époux et la voix de l’épouse, la voix de l’autour mutuel des époux, et la voix des enfants qui chantent. Soyez béni, Seigneur notre Dieu, qui comblez de joie l’époux et l’épouse [Les Juifs n’épousaient que très-rarement des femmes d’une autre tribu. Aussi quand ils votilaient indiquer la tribu dont une femme était issue, ils se contentaient le plus souvent de nommer celle de son époux. Quand l’Évangéliste veut faire connaître l’origine de la très-sainte humanité de Jésus-Christ, il donne la généalogie de saint Joseph, l’époux de Marie, de laquelle est né Jésus].
Quant au mariage des chrétiens, Jésus-Christ l’a rappelé à s.a première perfection, en condamnant absolument la polygamie, et en ne permettant le divorce que dans le cas d’adultère (Matthieu 5.32 Luc 16.18) ; ne laissant pas même aux parties ainsi séparées, la liberté de se marier ; ce qui est fort différent de ce que la loi tolérait. Le Sauveur a béni et sanctifié le mariage, en assistant aux noces de Cana (Jean 2.1-2). Saint Paul (Éphésiens 5.32) relève l’excellence du mariage chrétien, en disant que les époux doivent aimer leurs épouses comme leur propre corps ; comme Jésus-Christ aime l’Église ; parce lue nous sommes les membres de son corps, formés de sa chair et de ses os. C’est pourquoi l’homme abandonnera son père et sa mère, pour s’attacher à sa femme, et de deux qu’ils étaient, ils deviendront une même chair. Ce sacrement est grand, je dis en Jésus-Christ et en l’Église. L’union de l’homme et de la femme est un mystère, qui représente l’union et le managé Sacré et Spirituel de Jésus-Christ avec son Église. Le même apôtre (Hébreux 13.4) veut que le mariage soit traité de tous avec honnéteté, et que le lit nuptial soit sans tache ; car Dieu condamnera les fornicateurs et les adultères.
Les livres sacrés du Nouveau Testament ne prescrivent aucune cérémonie particulière pour le mariage : mais il est certain que dans l’Église on a toujours donné la bénédiction aux mariés, et que pour élever le mariage au rang des sacrements de l’Église, il a dû être célébré au nom de Jésus-Christ, et avec des cérémonies sacrées, lesquelles ont assez varié selon les temps et les lieux. On voit par Tertullien, qu’on mettait un voilé sur les mariés, et qu’à l’imitation de Tobie et de Sara, ils se donnaient la main. Saint Ambroise dit que le mariage doit être Sanctifié par le voile et par la bénédiction dti prêtre. Saint Ignace le martyr veut que les mariages se fassent de l’avis de l’évêque, afin qu’ils soient selon Dieu, et non selon la cupidité ; et Tertullien ne loue que le mariage que l’Église unit, que l’offrande du sacrifice confirme, dont les anges annoncent à Dieu l’accomplissement, et que Dieu ratifie. Les fiançailles sont très-anciennes, comme on le voit par différents conciles, et par saint Augustin. Autrefois les mariés dans plusieurs Églises, communiaient le jour de leurs noces, et s’abstenaient la nuit suivante de l’usage du mariage. Cette pratique est encore en usage dans quelques lieux, comme je l’ai appris.