Anciens D’Israël
On entend sous ce nom les chefs des tribus, ou plutôt les chefs des grandes familles d’Israël, qui, dans les commencements, et avant que la république des Hébreux fut formée, avaient une espèce de gouvernement et d’autorité sur leur famille et sur tout le peuple. Par exemple, lorsque Moïse fut envoyé en Égypte pour délivrer Israël (Exode 12.16 ; 4.29), il assembla les Anciens d’Israël, et leur dit que le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob lui avait apparu dans le désert, et lui avait ordonné de les tirer de l’Égypte. C’est toujours avec les Anciens d’Israël que Moïse et Aaron traitent comme avec ceux qui représentaient toute la nation.
Lorsque le Seigneur voulut manifester sa gloire à Israël et donner la loi à Moïse, il lui dit (Exode 24.1-11) : Prenez Aaron, Nadab et Abiu, ses fils, et les soixante-dix Anciens d’Israël, et montez vers le Seigneur, jusqu’au pied de la montagne. Ils s’avancèrent jusque-là, ils virent le Dieu d’Israël, et sous ses pieds comme un ouvrage de saphir et comme un ciel lorsqu’il est serein ; mais ils ne montèrent pas sur la montagne, Moïse seul y monta avec Josué, et en partant il leur dit : Attendez-nous ici jusqu’à ce que nous retournions ; s’il survient quelques difficultés, vous avez avec vous Aaron et Hur, vous la leur rapporterez. On voit toujours dans la suite ce nombre de soixante-dix Anciens ; mais il est à croire que comme il y avait douze tribus il y avait aussi soixante-douze Anciens, six de chaque tribu, et qu’on a mis un nombre rond de soixante-dix, au lieu de soixante-douze ; ou plutôt que Moïse et Aaron faisaient les soixante-onze et douzième, et qu’il n’y avait que quatre Anciens de la tribu de Lévi, eux non compris.
Quelques-uns ont cru que ces soixante dix Anciens d’Israël formaient dans l’Égypte une espèce de sénat pour gouverner et juger le peuple sous la dépendance du roi d’Égypte, et que de là est venu ce fameux Sanhédrin dont il est tant parlé dans les écrits des Juifs. Mais il est bien plus croyable que ces Anciens dans les commencements n’exerçaient, chacun sur leur tribu et tous ensemble sur tout le peuple, qu’une juridiction semblable à celle que les pères de famille exercent sur leurs enfants ; une autorité d’amitié, de conseil, de persuasion, fondée sur l’obéissance respectueuse qui est due aux parents, plutôt qu’une autorité de contrainte et de force. Les commis établis sur les travaux des enfants d’Israël dans l’Égypte, ou selon l’Hébreu (Exode 5.14-15), les Sotherim étaient, selon quelques-uns, les mêmes que l’on vient de nommer Anciens d’Israël, qui jugeaient et qui commandaient le peuple. Les Septante traduisent des écrivains, des commissaires qui tenaient le rôle des ouvriers, qui leur partageaient leurs ouvrages, et qui avaient soin de les faire travailler.
Depuis l’arrivée de Jéthro dans le camp d’Israël, Moïse fit un changement considérable dans le gouvernement du peuple. Jusqu’alors, Moïse avait seul jugé tout le peuple, et ce pénible emploi l’occupait tellement, qu’à peine avait-il le temps de respirer. Sur les remontrances de Jéthro, son beau-père (Exode 18.24-25), il établit sur tout Israël des chefs de mille, de cent, de cinquante et de dix hommes, afin qu’ils rendissent la justice au peuple en tout temps, et qu’ils rapportassent à Moïse tout ce qui se rencontrerait de plus difficile ; mais cela ne subsista pas longtemps sans changement ; car à l’occasion du murmure du peuple arrivé dans le campement surnommé les Sépulcres de concupiscence (Nombres 11.24-35), Moïse établit soixante-dix Anciens d’Israël, auxquels Dieu communiqua une partie de l’esprit de Moïse ; ils commencèrent à prophétiser et ne cessèrent plus. Et c’est là, selon la plupart des interprètes, le commencement du fameux Sanhédrin ; mais pour soutenir ce sentiment, il faut faire bien des suppositions, afin de trouver dans Israël ce tribunal toujours subsistant.
Nous croyons que l’établissement des septante Anciens fait par Moïse, subsista non-seulement pendant la vie de ce législateur, mais encore sous le gouvernement de Josué, et même après sa mort, sous les Juges. Les Anciens du peuple et Josué jurent l’alliance avec les Gabaonites (Josué 9.15). Le même Josué, peu avant sa mort, renouvelle l’alliance avec le Seigneur, accompagné des Anciens, des princes, des chefs (Josué 23.2 ; 24.1) et des maîtres. Après la mort de Josué et des Anciens qui lui survécurent (Josué 24.31), le peuple tomba sous diverses servitudes, d’où le Seigneur tes tira par le moyen des Juges. On ne voit pas distinctement quelle autorité avaient les Anciens pendant tout ce temps, et encore moins sous les rois qui leur succédèrent. Voyez notre Dissertation sur la police et sur la justice des Hébreux, et ci-après l’article Sanhédrin.