Les Hébreux donnent le nom de proverbes, de paraboles ou de similitudes aux sentences morales, aux maximes, aux comparaisons, aux enigmes proposées d’un style poétique, figuré, concis et sententieux. Les Hébreux appellent mislé, Mischle ; Paraboloe, ces sortes de proverbes. Salomon dit que, de son temps, c’était la principale étude des sages que ces sortes de maximes. Le sage, dit-il (Proverbes 1.6-7) s’appliquera aux paraboles, il étudiera les paroles des sages et leurs énigmes. Et Jésus, fils de Sirach (Ecclésiaste 39.1-3) : Le sage entrera dans les mystères des paraboles, il s’efforcera de pénétrer le sens des proverbes et des sentences obscures, et il se nourrira de tout ce qu’il y a de plus caché dans les paraboles. La reine de Saba vint des extrémités de la terre pour voir Salomon et pour le tenter, en lui proposant des énigmes (1 Rois 10.1). Hiram, roi de Tyr, entretenait, dit-on, commerce de lettres avec Salomon, et lui proposait des énigmes à résoudre, et expliquait celles qui lui étaient proposées par Salomon. Les anciens sages de la Grèce faisaient aussi estime de cette sorte d’exercice. Cléobule avait composé jusqu’à trois mille chants et gryphes, et Cléobuline, sa fille, avait écrit des vers énigmatiques.
Les proverbes de Salomon sont sans contredit le plus important de tous ses ouvrages. Il nous apprend lui-même que c’est le fruit de sa plus profonde méditation et de sa plus excellente sagesse (Ecclésiaste 12.9). On trouve dans ce livre des règles de conduite pour toutes les conditions, pour les rois, les courtisans, les gens engagés dans le commerce du monde ; pour les maîtres, les serviteurs, les pères et mères et les enfants. Quelques-uns ont douté que Salomon fût le seul auteur de ce livre. Grotius croit que ce prince fit faire pour son usage une compilation de tout ce qu’il y avait alors de plus beau en fait de morale, dans les plus anciens écrivains de sa nation ; que, sous Ézéchias, on grossit ce recueil de ce, qui avait été écrit d’utile depuis Salomon. Ce furent, dit-il, Eliacim, Sobna et Joaké (2 Rois 18.26) qui firent alors cette compilation. Mais ces conjectures n’étant soutenues d’aucune preuve, ne doivent point nous faire abandonner le sentiment des Pères et des interprètes, qui attribuent tout ce livre à Salomon.
Il est vrai qu’on y remarque quelque différence de style et de méthode, et que, par exemple, les neuf premiers chapitres, qui ont pour titre Paraboles de Salomon, sont écrits en forme de discours suivi, et peuvent être considérés comme la préface de tout le livre, et qu’au chapitre 10 ou l’on voit de nouveau le même titre, le style change, et que ce sont de courtes sentences, qui ont peu de liaison les unes avec les autres, et qui contiennent pour l’ordinaire des manières d’antithèses. Ceiai continue jusqu’au v. 17 du chapitre 22. En cet endroit on voit régner ur nouveau style, plus semblable à celui des neuf premiers chapitres, et il se soutient jusqu’au v. 23 du chapitre 24. où il y a un nouveau titre en ces termes : Hoec quoque sapientibus. Ceci est encore adressé aux sages : Voici encore d’autres maximes des sages. Le style en est court et sentencieux. Au commencement du chapitre 25 on lit : Voici les paroles qui furent recueillies et compilées par les gens d’Ézéchias, roi de Juda. Et c’est sans doute sur cela que Grotius a avancé que ce recueil était de la façon d’Eliaciml, de Sobna et de Joaké, célèbres sous le règne d’Ézéchias. Ce recueil va jusqu’au chapitre 30.1, où l’on trouve ces mots : Discours d’Agur, fils de Joaké. Enfin le chapitre 31 et dernier a pour titre : Discours du roi Lamuel. [Voyez Agur].
De tout cela, il paraît certain que le livre des Proverbes en l’état où nous l’avons aujourd’hui, est une compilation d’une partie des paraboles de Salomon, faite par plusieurs personnes. C’est pourquoi on n’en peut pas conclure que cet ouvrage ne soit pas de Salomon. Ce prince, inspiré du Saint-Esprit, avait écrit jusqu’à trois mille paraboles (1 Rois 4.32). Diverses personnes en purent faire des recueils. Ézéchias, entre autres, comme il est marqué au chapitre 25.Agur, Isaïe, Esdras, en purent faire de même. De ces différents recueils, on a composé l’ouvrage que nous avons, Rien n’est plus aisé à comprendre que ce système. Il n’est dit en aucun endroit que Salomon ait fait des recueils de proverbes et de sentences. Les titres de Paraboloe Salomonis marquent bien plutôt un auteur qu’un compilateur. Les rabbins tiennent communément que le roi Ézéchias s’apercevant que le peuple abusait de divers odtvrages de Salomon, principalement de ceux qui contenaient les vertus des plantes et les secrets naturels, supprima plusieurs de ces ouvrages, et n’en réserva que ceux que nous avons aujourd’hui.
On ne doute pas de la canonicité du livre des Proverbes. Nous ne connaissons dans l’antiquité que Théodore de Mopsueste, et parmi les modernes, que l’auteur d’une lettre insérée dans les Sentiments de quelques théologiens de Hollande, qui l’aient révoquée en doute, et qui aient prétendu que Salomon avait composé cet ouvrage par une pure industrie humaine. La version grecque de ce livre s’éloigne assez souvent de l’Hébreu, et ajoute un assez grand nombre de versets qui ne sont pas dans l’original. Le Grec de l’édition romaine enferme diverses transpositions de chapitres entiers. Par exemple, après le 22 du chapitre 24. elle insère les quatorze premiers versets du chapitre 30. Puis elle reprend le v. 23 et les suivants du chapitre 24. Après quoi elle remet le verset 15 et les suivants du chapitre 30 puis 1.31 et enfin le chapitre 25 et le suivants jusqu’au chapitre 29 après lequel est le chapitre 31.5-10 et suivants, qui fini le livre. Je ne parle pas des moindres transpositions qui se voient dans le corps du livre. On ne sait d’où viennent ces dérangements. Dans les anciennes éditions latines on voit plusieurs versets ajoutés, que l’on retranchés depuis saint Jérôme. Il en reste néanmoins encore quelques-uns, que l’on a marqués, et supprimés dans le premier tome de la nouvelle édition de saint Jérôme.