(Ce mot a diverses significations dans l’Écriture ; il désigne :
1° La mer (Genèse 7.7 ; Psaumes 104.6).
2° Les vapeurs et rosées de la terre (Genèse 49.25).
3° De grandes et terribles calamités (Psaumes 42.8).
4° De grandes richesses (Amos 7.4).
5° Enfin tout ce qui est profond et d’une étendue incommensurable).
Ce terme se dit, dans l’Écriture, de l’enfer (Luc 8.31 ; Romains 10.7 ; Apocalypse 9.1 ; 11.7) et des lieux les plus profonds de la mer (Genèse 7.11 ; Exode 15.5), et du chaos qui était couvert de ténèbres, au commencement du monde, et sur lequel l’Esprit de Dieu était porté (Genèse 1.2). Les anciens Hébreux, de même que la plupart des Orientaux, encore à présent, croyaient que l’abîme, la mer, les eaux, environnaient toute la terre ; que la terre était comme plongée et flottante sur l’abîme, à-peu-près, disent-ils, comme un melon d’eau nage sur l’eau et dans l’eau qui le couvre dans toute sa moitié ; ils croyaient de plus que la terre était fondée sur les eaux (Psaumes 33.7 ; 135.6) ou du moins qu’elle avait son fondement dans l’abîme. C’est sous ces eaux et au fond de cet abîme que l’Écriture nous représente les géants, qui gémissent et qui souffrent la peine e leur crime (Job 25.5) ; c’est là où sont relégués les Réphaïm, ces anciens géants qui, de leur vivant, faisaient trembler les peuples (Proverbes 2.18 ; 9.18 ; 21.16). Enfin, c’est dans ces sombres cachots que les prophètes (Isaïe 14.9 ; Ézéchiel 28.10 ; 31.18 ; 32.19) nous font voir les rois de Tyr, de Babylone et d’Égypte, qui y sont couchés et ensevelis, mais toutefois vivant et expiant leur orgueil et leur cruauté.
Ces abîmes sont la demeure des démons et des impies : Je vis, dit saint Jean dans l’Apocalypse (Apocalypse 9.1-2, 11), une étoile qui tomba du ciel, et à qui l’on donna la clef du puits de l’abîme. Elle ouvrit le puits de l’abîme, et il en sortit une fumée comme d’une grande fournaise, qui obscurcit le soleil et l’air ; et de cette fumée, sortirent des sauterelles qui se répandirent sur toute la terre… Elles avaient pour roi, à leur tête, l’ange de l’abîme, qui est nominé exterminateur. Et ailleurs (Apocalypse 2.7), on nous représente la bête qui sort de l’abîme, et qui fait la guerre aux deux témoins de la divinité. Enfin, l’ange du Seigneur descend du ciel (Apocalypse 20.1-3), ayant en sa main la clef de l’abîme, et tenant une grande chaîne ; il saisit le dragon, l’ancien serpent, qui est le diable et Satan, le lia et le jeta dans l’abîme, pour y demeurer pendant mille ans, et ferma sur lui le puits de l’abîme, et le scella, afin qu’il n’en pût sortir de mille ans, etc.
Les fontaines et les fleuves, au sentiment des Hébreux, avaient, toutes leur source dans l’abîme ou dans la mer (Ecclésiaste 1.7) ; elles en sortent par des canaux invisibles, et s’y rendent par les lits qu’elles se sont formés sur la terre. Au temps du déluge, les abîmes d’en bas, ou les eaux de la mer, rompirent leur digue, les fontaines forcèrent leurs sources (Genèse 8.11), et se répandirent sur la terre, dans le même temps que les cataractes du ciel s’ouvrirent et inondèrent tout le monde. L’abîme qui couvrait la terre au commencement du monde, et qui était agité par l’Esprit de Dieu ou par un vent impétueux (Genèse 1.2), cet abîme est ainsi nommé par anticipation, parce qu’il composa dans la suite la mer, et que les eaux de l’abîme en sortirent et se formèrent de son écoulement, ou, si l’on veut, la terre sortit du milieu de cet abîme, comme une île qui s’élève au milieu de la mer, et qui paraît tout d’un coup à nos yeux, après avoir été longtemps cachée sous les eaux.