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Tenèbres
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet Westphal

Obscurité. Les ténèbres étaient sur la face de l’abîme (Genèse 1.1-2), c’est-à-dire le chaos était plongé dans des ténèbres épaisses, parce que la lumière n’était pas encore créée. La plaie des ténèbres dont Moïse frappa l’Égypte est une des plus terribles. Elles étaient si épaisses, qu’elles étaient comme palpables, et que personne ne pouvait dérouvrir aucun objet ; si horribles, que nul n’osa se remuer de sa place ; et si longues, qu’elles durèrent trois jours et trois nuits (Exode 10.21-22). L’auteur du livre de la Sagesse les décrit ainsi « Les Égyptiens étaient liés par une chaîne de ténèbres et d’une longue nuit, et renfermés dans leurs maisons, ils y languissaient en cet état, malgré les efforts qu’ils faisaient pour s’en délivrer… Le cachot où ils étaient enfermés ne les défendait pas de là crainte, parce qu’il s’élevait des bruits qui les effrayaient, et qu’ils voyaient paraltre des spectres affreux qui les remplissaient d’épouvante. Il n’y avait point de feu si ardent qui leur pût donner aucune clarté, et les étoiles les plus brillantes ne pouvaient éclairer cette horrible nuit. Il leur paraissait tout d’un coup des feux qui les remplissaient de frayeur, et étant épouvantés par ces fantômes, qu’ils ne faisaient qu’entrevoir, tous ces objets leur en paraissaient encore plus effroyables (Sagesse 17.2-4) ».

Les ténèbres arrivées à la mort de notre Sauveur commencèrent à la sixième heure du jour, c’est-à-dire à midi, et ne finirent qu’à la neuvième-heure c’est-à-dire-à trois heures après midi. Ainsi, elles durèrent pendant presque tout le temps que Notre-Seigneur fut à la croix, ayant été crucifié un peu avant la sixième heure, et étant mort un peu après la neuvième. Comparez saint Matthieu (Matthieu 27.45), à saint Jean (Jean 19.14), et à saint Marc (Marc 15.25), et voyez les commentateurs et les auteurs des Concordances sur ces endroits. Origène sur saint Matthieu, Maldonat, Erasme, Valable et plusieurs autres ont cru que ces ténèbres n’avaient couvert que la Judée, qui est quelquefois désignée, sous le nom de toute la terre. Saint Chrysostome, Euthyme, Théophylacto et quelques autres prétendent qu’elles s’étendirent sur tout notre hémisphère, ou au moins sur sa plus grande partie. Origène enseigne qu’elles étaient causées par un brouillard épais, qui déroba aux hommes la vue du soleil ; et certes on ne peut guère les concevoir autrement, puisque la lune étant alors dans son plein, l’éclipse du soleil était naturellement impossible.

Cependant Jules Africain, Eusèbe et saint Jérôme dans leurs chroniques, ont rapporté au temps de la mort de Notre-Seigneur une éclipse du soleil, dont parle Phlégon, qui est, dit cet auteur, la plus grande qu’on eût encore vue, puisqu’à l’heure de midi on distinguait des étoiles au ciel. Cette éclipse arriva la quatrième annéede la cent deuxième olympiade, qui est celle de la mort de Jésus-Christ. Tertullien renvoie les païens aux archives publiques, pour y trouver les ténèbres arrivées en plein midi le jour de la mort de Jésus-Christ. L’auteur connu sous le nom de Denys l’Aréopagite dit qu’étant en Égypte, et voyant l’éclipse qui arriva alors contre toutes les règles d’astronomie. Allophanes, qui étudiait alors avec lui, s’écria : Ce sont là, mon cher Denys, des changements surnaturels et divins. Suidas fait dire à saint Denys lui-même dans cette occasion : Ou la Divinité souffre, ou elle compatit à celui qui souffre. On peut voir sur cet événement les commentateurs sur saint Matthieu (Matthieu 27.45), les historiens ecclésiastiques, comme Baronius, M. de Tillemont, et notre dissertation sur les ténèbres arrivées à la mort de Notre-Seigneur, imprimée dans le nouveau recueil de nos dissertations.

Les ténèbres se mettent quelquefois pour la mort. La terre des ténèbres (Job 10.22) est le tombeau. Ceux qui sont assis dans les ténèbres, et dans l’ombre de la mort (Psaumes 106.10) sont les trépassés. Les faux dieux des païens sont semblables aux morts, qui sont jetés dans l’obscurité du tombeau, dit Baruch (Baruch 6.70).

Les ténèbres, la nuit, l’obscurité, marquent aussi très-souvent les plus grands malheurs, les disgrâces. Ce jour fut un jour de ténèbres (Esther 11.8), un jour malheureux. Que ce jour soit changé en nuit (Job 3.4-5), que l’obscurité le cache ; qu’il soit compté parmi les jours infortunés. Je me suis trouvé enveloppé de ténèbres (Psaumes 54.6). Le soleil s’est couché pour eux en plein midi : je couvrirai le soleil de ténèbres. Le soleil sera couvert de ténèbres, et la lune changée en sang (Joël 2.31). Toutes ces expressions ne marquent autre chose que de très-grandes calamités.

Les ténèbres, dans le sens moral, marquent le péché. Les enfants de lumière, opposés aux enfants de ténèbres, désignent les justes, par opposition aux méchants ; les fidèles, par opposition aux incrédules et aux infidèles. Vous étiez autrefois ténèbres, mais à présent vous étes lumière ; marchez comme des enfants de lumière (Éphésiens 5.8-11). Dieu nous a appelés des ténèbres, dans son admirable lumière (1 Pierre 2.9).

Les ténèbres marquent aussi le règne du démon, qui est appelé l’ange des ténèbres ; et Jésus-Christ appelle l’exercice du pouvoir du démon (Luc 22.53 Colossiens 1.13), potestas tenebrarum. Les œuvres dé ténèbres (Romains 13.12 ; Éphésiens 5.11) sont les œuvres du démon ; le péché, les actions honteuses.