Nous avons connu et utilisé tant de modes d’éclairage, depuis la lampe rudimentaire à mèche trempant dans un liquide gras (encore employée dans les tranchées pendant la grande guerre) jusqu’aux lampes électriques à arc, à filament et au néon, nous avons vu tant de changements et d’améliorations en quelques décades, que nous avons peine à penser que la lampe dont se servaient nos grands ou arrière-grands-parents : le chaleil, dont on retrouve de nombreux spécimens dans nos campagnes, était à peu près identique à celle du temps d’Abraham et de ses pères. Ainsi, pendant des millénaires, la lampe n’a guère changé : en ont varié seulement la forme, l’ornementation et la matière première (terre ou métal). Elle consistait en une petite coupe à bec allongé, duquel émergeait une mèche de lin, de chanvre ou de jonc décortiqué ; on y brûlait de la graisse fondue ou de l’huile.
Les fouilles pratiquées en Palestine ont mis à jour un si grand nombre de lampes (parfois jusqu’à 300 dans une même tombe) qu’il est possible d’en suivre le développement depuis les temps préhistoriques jusqu’à l’époque byzantine. Dans les grottes de Méguiddo (âge de la pierre polie), de petites lampes étaient disposées sur des niches murales.
C’était d’abord de simples assiettes ou bols d’argile, au fond concave, aux bords supérieurs légèrement rapprochés en forme de coquille pour maintenir la mèche.
Plus tard, à l’époque amoréenne, avant l’arrivée des Israélites en Canaan, les récipients ont un bec plus long et plus étroit, une base plate ou légèrement concave. Aujourd’hui encore on trouve de telles lampes en Syrie.
Beaucoup plus tard enfin, peut-être seulement vers le IIe siècle avant Jésus-Christ, le récipient ouvert à sa partie supérieure est remplacé par le récipient fermé, à deux trous ménagés pour l’introduction du liquide et pour la mèche. Sur les lampes ouvertes, aucun dessin. Sur les lampes fermées, d’abord des dessins linéaires : chevrons, damiers, spirales ; puis représentations de feuilles, fleurs, animaux, figures humaines. L’invention la plus tardive fut l’anse ajoutée à la lampe. L’argile fut toujours la matière le plus communément employée, mais on trouve aussi des lampes de cuivre, de bronze, d’argent et d’or.
La Bible ne renferme aucune description de lampes, à part celle du chandelier (il vaudrait mieux dire : porte-lampe) du tabernacle et du temple (Exode 25.31-35 ; 1 Rois 7.49 ; Zacharie 4.2), dont les lampes et tous les ustensiles étaient d’or pur. Elle parle également de mèche de lin (pichtâh, Ésaïe 42.3 ; Ésaïe 43.17) imbibée d’huile (Exode 25.6) ; nos versions disent : lumignon, ou : lampe (voir Lin). « L’huile pure d’olives broyées » était exigée pour les lampes du temple (Exode 27.20). La Mischna (Schabbath, II, 1ss) mentionne l’usage commun d’autres sortes d’huile (voir ce mot), y compris celle de naphte. Elle indique aussi diverses substances utilisables en guise de mèches, à la place du lin retors.
De tout temps la lampe fut un article de ménage indispensable, aussi bien sous la tente du bédouin que dans la maison du fellah. On la tenait allumée nuit et jour, non seulement pour éclairer l’intérieur généralement très sombre, mais surtout pour avoir toujours du feu à portée de la main. « Dire que la lampe de quelqu’un s’éteint, dans l’Ancien Testament, c’est exprimer proverbialement l’extinction d’une famille.
Les bédouins actuels disent que quelqu’un dort dans les ténèbres quand il est réduit à la mendicité au point de n’avoir plus de quoi s’acheter de l’huile » (Bertholet, Histoire de la civilisation d’Israël, p. 143). Ces deux idées se trouvent dans 2 Samuel 21.17 ; Job 18.6 ; Job 21.17 ; Proverbes 13.9 ; Proverbes 20.20 ; Proverbes 24.20 ; Jérémie 25.10, cf. Apocalypse 18.23.
Inversement, la double notion de durée et de prospérité dans une famille est exprimée avec beaucoup de force par l’image d’une « lampe toujours allumée », qui « sera perpétuellement devant l’Éternel » (1 Rois 11.36 ; 1 Rois 15.4 ; 2 Rois 8.19 ; Psaumes 18.29 ; Psaumes 132.17 ; Proverbes 31.18).
La lampe symbolise encore :
Voir Lumière.
Dans l’Ancien Testament le mot ner désigne toujours une lampe. En divers passages, nos versions le traduisent à tort par : flambeau (ainsi la V sud dans 2 Samuel 21.17 ; 1 Rois 15.4 ; Job 29.3 ; Psaumes 18.29 ; Psaumes 119.105 ; Psaumes 132.17 ; Proverbes 6.23 ; Sophonie 1.12). Le nom hébreu du flambeau (c’est-à-dire torche) est lappîd (cf. l’araméen lampped, cald. lamppad, grec lampas), souvent aussi employé dans l’Ancien Testament (Genèse 15.17, Version Synodale : flammes de feu ; Juges 7.16 ; Job 41.10, Version Synodale : lueurs ; Ésaïe 62.1, Ézéchiel 1.13 ; Daniel 10.6) ; dans Siracide 43.8 c’est le terme de « vase » qui désigne un flambeau.
À l’hébreu ner correspond dans le Nouveau Testament le grec lukhnos pour désigner une lampe (Matthieu 5.15 ; Matthieu 6.22 ; Marc 4.21; Luc 8.18 ; Luc 11.33 ; Luc 11.36 ; Luc 12.35 ; Luc 15.8 ; Jean 5.35 Version Synodale : flambeau ; 2 Pierre 1.19 ; Apocalypse 18.23 ; Apocalypse 21.23, Version Synodale : flambeau ; Apocalypse 22.5).
Et à l’hébreu lappîd correspond le grec lampas, pour une torche ou un flambeau ; ceci, non seulement dans Jean 18.3 et Apocalypse 8.10, mais aussi dans Matthieu 25.1 et suivants (parabole des dix vierges), Actes 20.8 ; Apocalypse 4.5, où presque toutes nos versions s’accordent à tort pour traduire « lampe ». Tous les lexicologues sont pourtant très affirmatifs sur cette distinction (voir Bailly ; Alex. Pillon, Synoptiques grecs, etc.) ; plusieurs inscriptions grecques du temps disent lampas à propos de courses aux flambeaux.
Trench (Synonymes du Nouveau Testament, paragraphe 46) est catégorique : même dans la parabole des dix vierges, il veut que lampades soit rendu par torches, observant « qu’en Orient on alimente d’huile une torche aussi bien qu’une lampe ». En effet, au dehors, en plein vent, la torche convient mieux qu’une simple petite lampe tenue à la main et dont on devrait protéger la flamme tandis que l’autre main est encombrée d’une fiole ou d’une cruche d’huile ; il vaudrait ; donc mieux traduire par : flambeaux, et c’est sans doute ce qu’a voulu suggérer Eug. Burnand dans ses deux dessins illustrant cette parabole. A. E..
Numérisation : Yves Petrakian