Ce personnage n’est mentionné que dans l’Évangile de Jean. C’est un pharisien de marque (Jean 3.1), membre du Sanhédrin (cf. Jean 7.50), savant, d’un certain âge (Jean 3.4), et certainement riche (Jean 19.39). À trois reprises il se trouve en relations, volontaires ou fortuites, directes ou indirectes, avec Jésus.
Jean 3.1 et suivants. Pharisien consciencieux, il est frappé par les miracles de Jésus, et avec quelques-uns de ses collègues il voit en lui » un docteur venu de Dieu ». Il va trouver Jésus de nuit, peut-être par timidité curieuse ou souci de ne pas se compromettre : c’est ainsi qu’on peut le mieux expliquer le rappel de ce fait chaque fois qu’il est question de lui (Jean 3.2 ; Jean 7.50 ; Jean 19.39), et le rapprochement avec Joseph d’Arimathée « disciple de Jésus mais en secret parce qu’il craignait les Juifs » (Jean 19.38). Nous n’avons qu’une partie de la conversation entre Jésus et Nicodème ; elle porte sur les conditions d’entrée dans le Royaume de Dieu : Jésus veut lui montrer la fragilité de la position superficielle du pharisien et la nécessité d’une « nouvelle naissance ». Le résultat de l’entretien n’est pas indiqué, et il n’est même pas sûr que les déclarations de Jésus soient reproduites jusqu’au verset 21, les versets 17, 21 pouvant être à la rigueur un commentaire de l’évangéliste (voir Jean [Évangile de], III,1). La fin de ces déclarations, avec l’annonce précise de l’élévation de la croix (verset 14 et suivants), semble anticiper sur la fin du ministère, époque où d’après les Évangiles synopt. Jésus se mit à prédire sa mort ; on s’est demandé si le 4e Évangile ne groupe pas ici dans une même note tout ce qui concernait les rapports entre Jésus et Nicodème (Westphal, Jésus de Nazareth d’après les témoins de sa vie)
Jean 7.50 et suivants. Il intervient au Sanhédrin pour obtenir qu’on ne condamne pas Jésus sans l’entendre ; il le fait en s’abritant derrière un principe général de droit. Rien ne prouve qu’il soit déjà un disciple secret.
Jean 19.39 Après le crucifiement il ne craint plus de se compromettre, peut-être par honte de sa lâcheté, et s’occupe d’assurer au corps de Jésus une sépulture décente ; mais un homme de son rang social, Joseph d’Arimathée, lui a donné l’exemple du courage (cf. Marc 15.43). Nicodème est sans doute un de ces timides inquiets, conservateurs, qui, bien qu’attirés vers l’enseignement de Jésus, auront craint de son vivant d’être entraînés dans une aventure religieuse, mais qui auront été finalement conquis par le spectacle de son amour et de son sacrifice. Calvin appelle « faux Nicodémites », et plus souvent « Nicodémites », les gens qui de son temps n’osaient pas prendre parti pour l’Évangile tout en l’adoptant en secret ; ce surnom fut appliqué fréquemment dans les Cévennes aux Huguenots qui gardaient les apparences du catholicisme.
Une tradition veut que Nicodème ait été baptisé plus tard par Pierre et Jean ; une légende sans aucun fondement en fait un sculpteur, à qui serait due entre autres une statue du Christ. Pour l’« Évangile de Nicodème », voir Évangiles apocryphes.
Le nom de Nicodème, de langue grecque (de nikeïn = vaincre, et démos = peuple), était alors aussi bien porté par les Juifs, — comme le rabbi Bunaï ben Gorion dont parle le Talmud, qui était surnommé Nicodème, et qui fut témoin de la ruine de Jérusalem en 70, — que par les Grecs, comme l’ambassadeur d’Aristobule à Pompée dont parle Josèphe.
Numérisation : Yves Petrakian