Il n’est pas nécessaire d’énumérer la douzaine de termes hébreux ou grecs employés dans ce sens et comportant toute une gamme de nuances souvent difficiles à distinguer : blâme, répréhension, remontrance, menace, condamnation, punition, répression, correction, imposer silence ou réduire au silence, etc. La Révélation du Dieu saint aux pécheurs, recueillie par l’élite croyante d’un peuple religieux et moraliste entre tous, ne pouvait pas manquer de trouver continuellement à « reprendre » dans une humanité pervertie.
Réprimande les coupables (Psaumes 50.21 ; Proverbes 30.6, cf. 2 Pierre 2.15 et suivant) et jusqu’à Satan (Zacharie 3.2 ; Jude 9) ; la Sagesse fait des remontrances en Son nom (Proverbes 1.23 ; Proverbes 1.25 ; Proverbes 1.30 ; Proverbes 10.17) ; il reprend le pécheur pour l’éprouver et le ramener (Proverbes 3.11 ; Hébreux 12.5 ; Apocalypse 3.19). Il épargne les reproches aux croyants (Psaumes 50.8 ; Jacques 1.5) ; ce dernier passage oppose Dieu aux mauvais donneurs d’aumônes qui, tout en exauçant le demandeur, lui font honte et reproche de sa misère (cf. Siracide 18.15-18 ; Siracide 20.15 ; Siracide 41.22).
Réprimande, avec raison, lorsqu’il juge en porte-parole de Dieu et du devoir. Toute la partie négative de la prédication prophétique, de Moïse à Jean-Baptiste, est une incessante réprobation ; voir (Ésaïe 1 ; Jérémie 1.10 ; Ézéchiel 3.17-26 etc.) Prophète. La répréhension individuelle est souvent louée : il faut avoir la fidélité d’en user (Lévitique 19.17 ; Proverbes 19.25 ; Proverbes 27.5 ; Proverbes 29.15 ; Ecclésiaste 7.5 ; Matthieu 18.15; Luc 17.3 etc.), ou la loyauté d’en tirer profit (Proverbes 13.18 ; Proverbes 15.5 ; Proverbes 15.31s etc.). ce sont les méchants oui détestent la réprimande (Amos 5.10 ; Proverbes 9.7 ; Proverbes 15.10 ; Proverbes 15.12 ; Proverbes 29.1 etc.). De nombreux exemples de reproches justifiés pourraient être cités (Genèse 21.25 ; Genèse 37.10 ; 1 Rois 1.6 ; Néhémie 5.7; Luc 3.19 ; Luc 23.40 ; Actes 11.2 ; Galates 2.11 etc.). Aux jeunes pasteurs ses disciples, l’apôtre Paul a plus d’une raison de recommander de savoir reprendre suivant les circonstances (1 Timothée 5.1 ; 1 Timothée 5.20 ; 2 Timothée 4.2 ; Tite 1.13 ; Tite 2.15). Mais il y a des cas où les réprimandes seraient des erreurs ou des fautes : celles des amis de Job (Job 6.25 ; Job 19.5 etc.), celles des disciples cherchant à écarter des gens de leur Maître (Marc 10.13 et parallèle, Marc 10.48 et parallèle), celles de Pierre reprenant Jésus (Marc 8.32 parallèle Matthieu 16.22) ; comparez les pharisiens, lui demandant de reprendre ses disciples (Luc 19.39).
Lui-même, dans la mesure où son ministère était œuvre de prophète, a dû multiplier les reproches et les condamnations ; ce fut une de ses plus grandes souffrances de se trouver en pleine « race incrédule et perverse » (Matthieu 17.17 et parallèle). Voir ses reproches aux villes rebelles (Matthieu 11.20), sa vigoureuse réprimande à Pierre qui vient lui-même de le réprimander et dans les reproches duquel il discerne la voix de Satan (Marc 8.33). De même il arrive que pour guérir un démoniaque (voir Possession démoniaque) il réprimande le démon lui-même qui envoûte le malade (Marc 1.25 ; Marc 9.25) ; même la tempête est personnifiée lorsqu’il impose silence au vent et fait tenir la mer tranquille (Marc 4.39).
Cette expression de l’innocence apparaît surtout comme un idéal, prêché ou recherché (Nombres 32.22, Psaumes 8.24, etc.) ; c’est une préoccupation particulière de saint Paul, qui, pour l’exprimer en différentes occasions, à son sujet et au sujet d’autrui, emploie bien une demi-douzaine de mots grecs empruntés pour la plupart au vocabulaire ordinaire de son temps, notamment à ceux des décrets officiels et des inscriptions funéraires qui célèbrent les irréprochables, les irrépréhensibles, les impeccables : voir les belles applications que l’apôtre en fait à la vocation des chrétiens et des serviteurs de l’Église (Actes 24.16 ; 1 Thessaloniciens 3.13 ; 1 Thessaloniciens 5.23 ; 2 Corinthiens 8.20 ; Philippiens 1.10 ; 1 Timothée 3.2 ; 1 Timothée 5.7 ; 1 Timothée 6.14 ; 1 Timothée 3.10 ; 2 Timothée 2.15 ; Jude 1.24). Dieu même, dans sa justice et sa sainteté, est sans reproche (Psaumes 51.6, etc.).
Il est important de noter que le verbe grec épitimân exprime la simple notion de reproche indépendamment de l’effet que produit la répréhension, soit que celle-ci n’ait pas de raison d’être (Matthieu 16.22 ; Matthieu 19.13 ; Matthieu 20.31), soit qu’elle ne fasse aucune impression quoique justifiée (Luc 23.40) ; tandis que la répréhension qui impose au coupable la conviction de sa faute est désignée par le verbe élegkheïn, qui est généralement traduit par : convaincre (voir ce mot, et le développement de cette distinction dans Trench, Synonymes du Nouveau Testament, paragraphe 4).
Jean Laroche
Numérisation : Yves Petrakian