Le sommeil apparaissait aux primitifs comme un mystère ; et les songes, phénomènes inexplicables, avaient pour eux une signification spéciale. Avec un commencement de culture, les hommes virent dans les songes des manifestations réelles : le dieu ou esprit visitait positivement le dormeur et les événements rêvés devaient s’accomplir. Aussi, ceux qui rêvaient fréquemment étaient-ils regardés comme des intermédiaires de l’énergie divine, et l’on cherchait à produire ce phénomène par des moyens artificiels (jeûne ou emploi de drogues). Dans la suite, les songes furent envisagés plutôt comme des avertissements divins que comme des faits réels. On pensait aussi pouvoir obtenir des révélations en se livrant au sommeil dans un lieu sacré, par exemple dans les sanctuaires d’Asclépios (Esculape) ou de Sérapis, ou dans la grotte de Trophonius. On admettait encore que les dieux intervenaient parfois spontanément, selon qu’ils voulaient éclairer ou tromper les hommes (cf. Cicéron, De divin., 1.43). Égyptiens, Assyriens, Babyloniens, Arabes accordaient aux songes une très grande importance. Il y avait des interprètes professionnels (Genèse 41.8 ; Daniel 2.2) ; ainsi, les mages de la Caldée et les Esséniens dans le judaïsme postérieur (Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, XVII, 13.3) s’étaient acquis une grande réputation dans ce genre d’exercice ; il existait même des manuels, composés pour diriger ces spécialistes dans leur tâche (cf. onirocritique d’Artémidore d’Éphèse).
La Bible attache une certaine valeur aux songes (Genèse 37.6-9 ; Genèse 41.25 ; Juges 7.13 ; 1 Samuel 28.6 ; Daniel 2.28 ; Daniel 7.1 ; Matthieu 1.20 ; Matthieu 2.13 ; Matthieu 2.19 ; Matthieu 27.19 ; Actes 23.11 ; Actes 27.23).
Mais, à l’époque de l’Ancien Testament, la superstition devait entrer pour une grande part dans l’interprétation de ces phénomènes. Les types de « songeurs » sont Joseph et Daniel, dans la vie desquels les rêves jouent un rôle important.
Les songes étaient parfois accompagnés de visions (voir ce mot) et revêtaient un caractère prophétique (1 Rois 3.5 et suivants, Matthieu 27.19 ; Actes 16.9).
Enfin, le songe est parfois l’image des choses périssables, de la vanité (Job 20.8 ; Psaumes 73.20 ; Psaumes 90.5 ; Ésaïe 29.7).
En résumé, la pensée qui se dégage de l’Ancien Testament est la suivante :
L’étude du rêve ressortit à la fois aux sciences psychiques et au sens commun. Ce phénomène est en relation étroite avec certains états physiques, et son origine psychologique est à rechercher dans le subconscient.
Si certains rêves doivent être regardés comme surnaturels, ce n’est pas à cause de leur processus, mais à cause du message qu’ils apportent. Beaucoup d’autres ne contiennent aucun message ; seule la superstition peut leur conférer de la valeur.
Mais de toute manière, l’interprétation du rêve « appartient à Dieu » ; (cf. Genèse 40.8) la question de savoir s’il s’agit d’un message divin ou non doit être tranchée par la conscience religieuse.
En conclusion, les rêves peuvent être source d’inspiration, mais il est bien rare qu’on puisse y chercher des directions revêtues d’autorité. Il est donc sage, du point de vue religieux, de ne leur accorder qu’une faible et prudente attention.
Voir Sommeil. Alc. R.
Numérisation : Yves Petrakian