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Brebis

La langue hébraïque possède un mot, Tsôn, qui signifie ce que nous appelons en général menu bétail (Genèse 27.9 ; Lévitique 10), mais qui cependant désigne dans son acception ordinaire la brebis et son espèce (Genèse 31.10 ; 1 Samuel 25.2). Le menu bétail constituait, dans les anciens temps, comme encore de nos jours, la richesse des peuples nomades. Un seul animal de cette espèce, sans égard à l’âge ni au sexe, s’appelle Zèh (Exode 22.1 ; Deutéronome 14.4). Talèh désigne l’agneau qui boit encore le lait de sa mère, Kèbès l’agneau d’un an et au-dessus. Car l’agneau qui est assez fort pour aller paître seul, Misctmim (1 Samuel 15.9), paraît désigner les agneaux qui, après la première année, ont perdu les deux dents de devant à la mâchoire inférieure, et commencent à devenir forts. Ayil désigne le bélier, et Rahhel la brebis proprement dite, qui a des petits (Genèse 31.38 ; 32.14) ; cependant ce dernier mot, comme celui de brebis chez nous, se trouve aussi employé dans un sens plus étendu, s’appliquant à toute l’espèce (Ésaïe 33.7 ; Cantique 6.6). On voit, par ces distinctions, que l’élèvage de ces animaux était assez développée parmi les Hébreux. La couleur des brebis en général était la même que dans nos contrées (Psaumes 147.16 ; Ésaïe 1.18 ; Daniel 7.9 ; Genèse 30.32-35 ; 31.10-12).

Il y a en Orient deux espèces de brebis : les unes semblables aux nôtres, mais plus grandes, plus hautes, plus maigres, et couvertes d’une laine qui a plus de rapport avec le poil, ce qui est très probablement l’effet du climat ; les autres se distinguent par une queue large et grande, assez grasse et quelque peu recourbée à l’extrémité. Cette queue est une masse d’une substance qui tient le milieu entre la graisse et la moelle, et ressemble, pour le goût, au beurre, qu’elle sert aussi à remplacer : elle pèse de 5 à 15 kg. On sait que les bergers, pour préserver la queue de ces brebis, la placent sur un petit char auquel la brebis est attachée ; cette pratique est si ancienne, qu’Hérodote en parle déjà. Il paraît que les Israélites possédaient aussi de ces brebis, car dans leurs sacrifices la queue est toujours nommée parmi les graisses qu’il fallait brûler (Lévitique 3.9 ; 7.3 ; 8.25 ; 9.19).

Les contrées de la Palestine les plus favorables à la bonne tenue du menu bétail étaient la plaine de Saron (Ésaïe65.10), le mont Carmel, le pays de Galaad (Michée 7.14) ; Basan (Deutéronome 32.14 ; Ézéchiel 39.18).

Les peuples voisins des Israélites s’adonnaient comme eux à l’élève des brebis ; les Moabites payaient à Joram en tribut annuel la laine de cent mille agneaux et d’un nombre égal de béliers (2 Rois 3.4), et plus tard un tribut pareil aux rois de Juda (Ésaïe 16.1). De nos jours encore, les plaines qu’habitèrent les Moabites sont riches en troupeaux de brebis. Les Édomites (Ésaïe 34.6), les tribus arabes de Kédar, et les Nabatéens (Ésaïe 60.7), s’occupaient de nourrir et d’élever ces animaux, et leurs contrées fertiles en herbes salées leur étaient tout à fait favorables. L’artifice que Jacob employa pour augmenter son salaire en favorisant la naissance de brebis marquées de certaines couleurs (Genèse 30.37-43), prouve les progrès qu’avait faits dans ce temps l’art de soigner les troupeaux. Nous rappelons ici que le célèbre Buffon s’accorde avec l’Écriture sainte à reconnaître que dans aucune race d’animaux, l’imagination de la mère n’a autant d’influence sur sa progéniture, que dans celle des brebis.

La chair et le lait des brebis servaient à la nourriture des Israélites (Deutéronome 32.13-14 ; Ésaïe 7.21-22 ; Ézéchiel 34.3 ; 1 Corinthiens 9.7) : cette viande est encore pour les Arabes, les Perses, et les Orientaux en général, une nourriture très estimée. Déjà dans les anciens temps, il se faisait un commerce de laines très actif ; les marchands de Damas en portaient aux marchés de Tyr une grande quantité, soit blanche, soit brune, soit rougeâtre et luisante. Quant à cette dernière espèce, le voyageur Tavernier rapporte que dans les montagnes du Kerman en Perse, il y a une espèce de brebis qui jette sa laine au printemps, au point de paraître tondue ; que cette laine est d’un brun léger et quelquefois grisâtre, et que les Guèbres qui habitent ces montagnes, en fabriquent des étoffes, des habits, et autres travaux, dont ils font un trafic considérable.

La coutume d’apprivoiser les brebis de manière à les rendre aussi familières que des chiens, coutume à laquelle a fait allusion le prophète Nathan (2 Samuel 12.3), dans l’apologue par lequel il a convaincu David de son péché, existe encore de nos jours chez les arabes. Les bergers donnaient aussi quelquefois à leurs brebis des noms que ces dernières connaissaient si bien qu’elles ne manquaient pas d’y répondre en accourant lorsqu’elles étaient appelées (Théocrite, Idyl. V, 102, 103) ; c’est à cet usage que se rapportent les paroles de notre Sauveur (Jean 10.3).

Comme le bélier marche presque toujours en tête du troupeau, et lui sert en quelque sorte de guide, il a été pris pour le symbole de la royauté, ou du souverain des peuples ; et dans la fameuse vision de Daniel (8.3-4, 20), le roi de Perse est représenté par cet animal. Les mots chef (d’une nation), et bélier, sont même devenus complètement synonymes en hébreu (cf. Ésaïe 14.9 ; Zacharie 10.3), dans l’original. Nous ajouterons que l’historien Ammien Marcellin raconte que lorsque les rois de Perse se mettaient à la tète de leurs troupes pour entrer en campagne, ils portaient en guise de diadème une tête de bélier en or, et ornée de pierreries ; de même sur les colonnes de Persépolis le signe de la royauté est un bélier.

La brebis, le bélier et l’agneau servaient aux divers sacrifices des Israélites : le bélier annonçait le conducteur du troupeau dont le sang devait couler pour le rachat des siens, la brebis et l’agneau étaient les symboles de l’humilité et de la soumission patiente, parce qu’ils sont d’un caractère doux, patient, et lent à la colère ; on assure cependant qu’une fois irrités, ils le sont tellement qu’on ne peut plus les apaiser. Cela explique pourquoi la Bible a pris cet animal pour le symbole de l’humilité et de la patience en général, et de Christ en particulier (Jean 1.29) ; mais cela explique aussi l’expression de la « colère de l’agneau » (Apocalypse 6.16), cette haine de Dieu contre le mal, et ce courroux lent à s’allumer, mais qui s’allumera devant l’endurcissement prolongé, et qui ne cessera plus de consumer ses adversaires.

Buffle  

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