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Canaan

Le plus jeune des fils de Cam, petit-fils de Noé. Nous avons dit à l’article de Cam, quelques mots sur la malédiction divine qui frappa Canaan pour la faute de son père. Rien n’est plus hors de contestation que la parfaite justice de Dieu, comme rien n’est plus évident que la punition des pères sur les enfants. L’histoire des Cananéens vient à l’appui de cette double vérité, et, en l’étudiant, nous ne pouvons pas oublier que Dieu est juste quand il punit.

Il est probable que Canaan, descendu des hauteurs de l’Ararat, vécut et mourut dans le pays qui porta son nom, et qui devait échoir à l’une des branches de la postérité de Sem. Ses descendants furent en grand nombre. Les Sidoniens, les Tyriens, les Héthiens, les Jébusiens, les Amorréens, les Guirgasiens, les Héviens, les Harkiens, les Siniens, les Arvadiens, les Tsemariens, les Hamathiens, les Phérésiens et les Cananéens proprement dits, furent tout autant de tribus issues d’une même souche (Genèse 10.15 ; 1 Chroniques 1.15). Sept d’entre elles peuplèrent dans l’origine la terre promise ; les autres occupèrent la Phénicie et une portion de la Syrie. Selon la coutume d’alors, elles formèrent une multitude de petits royaumes, chaque ville ayant son monarque. Moïse en subjugua deux, Jo-sué trente et un, et Adonibézek soixante et dix ; d’où il résulte que les Cananéens étaient divisés en plus de cent royaumÉsaïe C’était une race impie et dépravée ; les habitants de Sodome, de Gomorrhe, d’Adama, de Tseboïm et de Tsohar en faisaient partie, et l’on sait à quel degré d’immoralité ils en étaient venus. Kedor-Lahomer, roi d’Élam, se les rendit tributaires vers l’an 2078.Après douze années d’asservissement, ils se révoltèrent, furent repoussés de nouveau par le roi d’Élam et se virent à deux doigts de leur ruine. Abraham les délivra en fondant sur les rois alliés qui avaient emmené prisonnier son neveu Lot. Mais seize années s’étaient à peine écoulées, que l’Éternel les frappa, eux et toute leur contrée, d’une entière destruction : Tsohar seule fut épargnée, en considération de Lot (Genèse 9 ; 10 ; 14 ; 18 ; 19 ; Ézéchiel 16.49-50).

Environ l’an 2514, les Cananéens des frontières du sud, assistés par les Amalécites, firent dans le désert éprouver aux Hébreux, révoltés contre l’Éternel, une terrible défaite en Hormah. Trente-huit ans après, les royaumes florissants de Og et de Sihon, sur la rive orientale du Jourdain, ayant refusé le passage aux Israélites, furent complètement défaits par Moïse (Nombres 21.21-31). À l’ouest du Jourdain, Josué en détruisit plus tard trente et un, sans compter les Gabaonites, qui se soumirent ; on peut voir leurs noms (Josué 12.9-24). Tout ce territoire fut alors partagé entre les tribus d’Israël. Après la mort de Josué, les tribus de Juda et de Siméon achevèrent d’expulser ou de réduire les Cananéens demeurés de reste dans leurs cantons ; celles d’Éphraïm et de Manassé en firent à peu près autant ; mais dans la plupart des autres tribus, les Cananéens restèrent en possession de plusieurs villes considérables, d’où ils purent souvent diriger des attaques contre les Israélites, en même temps que, par leur mélange avec eux, ils leur donnaient l’exemple de l’idolâtrie et de l’immoralité. Après de pénibles luttes, la plupart des tribus finirent cependant par se les assujettir tout à fait ; mais dans la partie septentrionale de la terre promise, un résidu de ces malheureux Cananéens parvinrent à former un royaume puissant, celui de Hatsor, et vers l’an 2720, leur roi Jabin sut tenir pendant vingt années les Hébreux dans la sujétion. Débora et Barac délivrèrent leur patrie et portèrent à ce royaume cananéen un tel coup, que l’on n’en entendit plus parler dans la suite.

Plus tard, deux cent quarante ans après environ, David acheva presque la conquête du pays, et prit Jébus ou Jérusalem, une des fortes places qui fussent demeurées entre les mains des Cananéens. Pharaon roi d’Égypte, réduisit Guézer, et la donna à Salomon son gendre. Salomon employa plus de 150000 Cananéens à la construction du Temple, et frappa de lourds impôts tous ceux qui restaient de cette race. Jamais, d’ailleurs, ce peuple ne jouit d’aucune liberté parmi les Israélites, au milieu desquels il en subsista toujours un très grand nombre, même après la captivité.

Les Guirgasiens, et peut-être encore quelques autres tribus cananéennes, fuyant devant l’épée de Josué, se retirèrent dans le nord de l’Afrique, et furent suivies par un grand nombre d’autres qui émigrèrent de Tyr. Là, sous le nom de Carthaginois, ils jetèrent autour d’eux un certain éclat, mais qui dura peu ; dès lors, et pendant près de deux mille ans, ce pays a été le théâtre des plus tristes événements, successivement réduit en servitude et dévasté par les Romains, les Vandales, les Sarrasins et les Turcs. Les Cananéens de Tyr, de Sidon, et autres lieux de la Phénicie, qui s’établirent sur les rivages de la Méditerranée, n’ont pas eu un meilleur sort. Ceux enfin qui échappèrent aux armes du roi David, les Héviens, etc., s’enfuirent dans la Béotie au sud de l’Europe, où ils ne purent échapper non plus à la terrible malédiction de servitude qui pesait sur leurs têtes.

Cependant Canaan, cet enfant maudit, a donné son nom à la portion la plus bénie de l’ancien monde. Canaan qui réveille dans le cœur la pensée de la désolation, réveille aussi celle de la promesse ; sur le même nom se rencontrent la paix et l’extermination ; d’abord l’idolâtrie et les turpitudes du péché, puis le règne du Messie avec l’alliance de grâce. Il fallait que la prophétie de Noé fût accomplie en tout point, que Canaan fût le serviteur de ses frères, qu’après avoir baigné de ses sueurs une terre fertile, il la livrât ainsi travaillée, à la postérité bénie de Sem, et qu’après l’avoir défrichée comme un homme libre, il l’abandonnât comme un esclave ; il fallait que le nom du premier possesseur demeurât à cette terre, afin que ses nouveaux habitants comprissent et se rappelassent toujours qu’elle avait appartenu d’abord à une race maudite, et que cette malédiction seule, venant de l’Éternel, les en avait rendus les maîtres.

Une description détaillée de la terre de Canaan ne saurait être donnée ici : nous nous bornerons à indiquer les traits généraux ; quant aux détails, on peut voir les articles spéciaux ; v. aussi la Palestine de Raumer, et en français la Description de la Terre Sainte de Rougemont, et le Journal d’un Voyage au Levant, t. m.

Canaan avait près de 400 kilom. du nord au midi, et près de 200 de l’est à l’ouest dans sa plus grande largeur ; il présentait une surface d’à peu près 30000 km2 ; et comme le peuple hébreu comptait 601730 hommes de guerre lors de la conquête, il y avait pour chacun d’eux environ 5 hectares. Ce pays est compris entre le 31e et le 34e degré de latitude nord, et s’étend du 32e au 34e degré de longitude est (Paris). La mer Méditerranée le borne à l’ouest, le Liban et la Syrie au nord ; l’Arabie déserte, Ammon, Moab et Madian à l’est, l’Idumée et le désert de Paran au sud, enfin l’Égypte au sud-ouest.

C’était le pays dont la possession avait été promise aux Hébreux, et dont il leur avait été ordonné de s’emparer (Nombres 34.1-12 ; Josué 11.13-21 ; Juges 1) ; mais il faut y ajouter les contrées sur lesquelles ils pouvaient dominer, qu’ils pouvaient avoir l’espérance de conquérir un jour, celles dont la possession leur était permise plutôt qu’ordonnée, depuis l’Euphrate au nord-est jusqu’au Nil vers le sud-est (Genèse 13.18-21 ; Exode 23.31 ; Deutéronome 11.24 ; Josué 1.3-4). Et, en effet, les tribus transjourdaines chassent devant elles les peuplades arabes, et poussent jusqu’à l’Euphrate (1 Chroniques 5.9-18-23). David, plus tard, soumet la Syrie, Damas, Ammon, Moab, l’Idumée (2 Samuel 8.2-6, 12, 13 ; 10 ; 12.26ss ; 1 Chroniques 18.6-13 ; 19.20). Salomon fait bâtir Tad-mor bien à l’orient de Damas, construit une flotte à Hetsion-Guéber sur la mer Rouge, possède Thiphsak sur l’Euphrate, et Hamath sur le versant septentrional du Liban (1 Rois 4.24 ; 9.18-26 ; 2 Chroniques 8.3-4, 17).

Tout le territoire de Canaan proprement dit, est actuellement sous la malédiction à cause de l’incrédulité de l’Israël moderne ; il est presque abandonné, sans culture, en sorte qu’on ne pourrait juger de ce qu’il fut jadis, par ce qu’il est maintenant. Il n’en est pas moins vrai qu’il n’y eut point anciennement de contrée plus riante et plus fertile. Le Jourdain, coulant du nord au sud, forme sur son chemin les lacs de Mérom et de Génézareth ; une multitude de ruisseaux et de torrents viennent s’y jeter, traversant le pays dans tous les sens. Des vallées et de charmants coteaux, moins heureux aujourd’hui, embellissaient jadis et variaient le paysage. Des pâturages nombreux et féconds produisaient en abondance de l’herbe pour les troupeaux, des fleurs pour les abeilles ; le lait et le miel y coulaient et répondaient aux vœux de l’avide habitant des campagnes. D’après le témoignage d’Hécatée, très ancien auteur ; la terre labourable formait le tiers du territoire, et donnait sur les coteaux de magnifiques moissons, des figues, des grenades, la vigne avec ses raisins, l’olivier avec son huile. Au sommet du Liban, des cèdres magnifiques ; dans le sein des montagnes, des mines considérables de fer et de cuivre. On conçoit que lorsque l’Éternel y envoyait des pluies et les saisons fertiles, ce pays cultivé par des mains laborieuses, ait pu nourrir les millions d’habitants qui le peuplaient autrefois (Deutéronome 11.11 ; 6.10 ; 8.7-9).

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