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Ce terme est pris du latin circumcidere, qui signifie, couper tout autour, parce que les Juifs qui donnaient la circoncision à leurs enfants, leur coupaient ainsi la pellicule qui couvre le prépuce. Dieu ordonna la circoncision à Abraham, pour marque de l’alliance qu’il faisait avec lui (Genèse 17.10) : Voici le pacte que vous observerez, dit le Seigneur à Abraham, entre moi et vous, et votre postérité après vous. Tous les mâles qui sont parmi vous seront circoncis, afin que cela soit une marque de l’alliance entre moi et vous l’enfant de huit jours sera circoncis, tant les enfants libres et domestiques, que les esclaves et les étrangers qui seront à vous l’enfant dont la chair ne sera pas circoncise, sera exterminé de son peuple, parce qu’il a rendu inutile mon alliance. En suite de cette ordonnance, Abraham qui était alors âgé de quatre-vingt-dix-neuf ans, se circoncit ; il circoncit aussi son fils Ismaël, avec tous les esclaves de sa maison.
Dieu réitéra le précepte de la circoncision (Exode 12.44-48 Lévitique 12.3) en parlant à. Moïse ; il ordonna que tous ceux qui voudraient participer à la victime pascale, reçussent la circoncision, et que l’on fit cette opération aux enfants nouveaux-nés, au huitième jour après leur naissance. Les Juifs ont toujours été assez exacts à observer cette cérémonie, et il paraît même que, dans l’Égypte, ils ne la négligeaient pas. Mais Moïse étant chez Jétro, son beau-père, à Madian, n’avait point circoncis les deux fils qui lui étaient nés en ce pays-là ; et durant le voyage du désert, on ne donna point la circoncision aux enfants qui naquirent, apparemment à cause du danger de leur vie, parce que le peuple n’était pas fixe dans un seul endroit, et qu’il était obligé de changer très-souvent de demeure.
La loi n’a rien ordonné, ni sur le ministre ni sur l’instrument de la circoncision. Le père, ou un autre parent, ou un chirurgien, ou tel autre que l’on veut choisir, peut faire cette cérémonie. On se sert ordinairement d’un couteau, ou d’un rasoir. Séphora, femme de Moïse, circoncit son fils Eliézer (Exode 4.25) avec une pierre tranchante ; Josué en usa de même envers les Israélites qui n’avaient pas reçu la circoncision dans le désert (Josué 5.3). C’était apparemment de ces pierres faites en forme de couteaux, dont les Égyptiens se servaient pour ouvrir les corps des personnes qu’ils embaumaient. On prétend que ces sortes de couteaux sont bien moins dangereux que ceux de fer ou d’airain, et qu’ils ne causent point tant d’inflammation dans la plaie. Les Galles, qui sont les prêtres de la mère des dieux, se mutilaient avec une pierre tranchante, ou avec un têt de pot cassé, ne pouvant le faire autrement, sans se mettre en danger de leur vie.
Voici les cérémonies que les Juifs d’aujourd’hui observent dans la circoncision : Quand il est né un fils dans une maison, quelques-uns ont accoutumé de mettre sur de petits billets aux quatre coins de la chambre, Adam et Ève : Lilith, hors d’ici (Les Juifs tiennent que Lili Ih est la première femme d’Adam, qui, s’étant séparée de lui, demeure dans les airs, et est ennemie de l’accouchement et des enfants nouveaux-nés). Ils y écrivent aussi les noms de trois anges, afin de garantir l’enfant de tout sortilége. Mais tous n’observent pas ces pratiques superstitieuses.
Le père est obligé de faire circoncire son fils au huitième jour, à moins que la faiblesse ou l’infirmité de l’enfant n’oblige à différer. La nuit qui précède la circoncision se nomme veille, parce que toute la famille ne dort point pour garder l’enfant ; et les amis et amies, visitent le père et la mère, ce qui se passe en civilités et en réjouissances. Les parrains et marraines sont déjà choisis auparavant ; le parrain tient l’enfant pendant la circoncision ; et la marraine le porte à la synagogue. À l’égard de celui, qui donne la circoncision, on choisit qui l’on veut ; le père même de l’enfant peut faire cette fonction, s’il en est capable. C’est un grand honneur parmi les Juifs d’être Mohel, c’est-à-dire, circonciseur : Il n’est pas nécessaire d’aller dans la synagogue pour circoncire l’enfant, on peut le faire dans la maison ; si l’on veut.
On prépare pour cela deux sièges avec deux carreaux de soie : l’un des sièges est pour le parrain qui tient l’enfant, l’autre demeure vide, et il est destiné, disent quelques-uns, pour le prophète Élie, qu’ils croient assister invisiblement à toutes les circoncisions, tant il avait de zèle pour observer la loi. Celui qui circoncit, vient avec un plat, où sont les instruments et les choses nécessaires pour l’opération ; comme le rasoir, les poudres astringentes, le linge, la charpie, et l’huile rosat. Ceux qui sont présents chantent quelques cantiques en atten dant la marraine, qui apporte l’enfant sur ses bras, accompagnée d’une troupe de femmes, mais pas une ne passe la porte de la synagogue ; là elles donnent l’enfant au parrain, et aussitôt tous les assistants crient : Baruch, haba, le bien venu.
Le parrain s’assied sur son siège, et ajuste l’enfant sur ses genoux, puis celui qui doit circoncire développe les langes ; il y en a qui se servent d’une pincette d’argent pour prendre du prépuce ce qu’ils en veulent couper, d’autres le prennent avec les doigts ; puis, tenant le rasoir, celui qui circoncit, dit : Béni soyez-vous, Seigneur, qui nous avez commandé la circoncision. Et en disant cela, il coupe la grosse peau du prépuce ; puis avec les ongles des pouces, il déchire une autre peau plus délicate qui reste ; il suce deux ou trois fois le sang qui abonde et le rend dans une tasse pleine de vin, ensuite il jette sur la plaie de sang de dragon, de la poudre de corail et autre chose, pour arrêter le sang, à quoi il ajoute des compresses d’huile rosat, et enveloppe bien le tout. Après cela, il prend la tasse où il a rendu le sang qu’il a sucé de la plaie, la bénit, bénit aussi l’enfant, lui impose le nom que le père souhaite, en prononçant ces paroles d’Ézéchiel (Ézéchiel 16.6) : Et j’ai dit : Vis en ton sang ; et lui mouille les lèvres de ce vin qui est dans la tasse. Après quoi on récite le Psaume 128 : Bienheureux tout homme qui craint le Seigneur. Cela fait, le parrain rend l’enfant à la marraine, pour le porter au logis et le remettre entre les mains de sa mère. Tous ceux qui ont assisté à la cérémonie, disent au père en s’en allant : Puissiez-vous ainsi assister à ses noces l’enfant est ordinairement guéri de la plaie de la circoncision en vingt-quatre heures. Si l’enfant meurt avant le huitième jour, il y en a qui lui donnent la circoncision après sa mort, en lui coupant le prépuce avec un roseau.
À l’égard des filles qui naissent aux Juifs, comme elles ne reçoivent point la circoncision, voici ce qui s’observe : La mère demeure dans sa maison pendant quatre-vingts jours (Lévitique 12.5-6), après quoi elle va à la synagogue, et le chantre prononce une bénédiction en faveur de la petite fille, et le chantre [sic] lui impose le nom que le père ou la mère désirent. Dans certains endroits, l’on ne porte pas l’enfant à la synagogue ; mais le chantre va faire la cérémonie dans le logis de l’accouchée. Ils ne pratiquent plus ce qui est marqué dans la loi, que la mère qui avait eu un fils ou une fille, allait à la porte du temple, ou du tabernacle, et offrait un agneau et une tourterelle, ou une colombe, pour être immolés au Seigneur. Depuis la ruine du temple, cette cérémonie ne peut plus se pratiquer.
On dispute si la circoncision remettait le péché originel, ou si c’était une simple marque qui distinguait les Juifs des gentils. Les anciens Pères qui ont vécu avant saint Augustin, avaient borné les effets de la circoncision à imprimer aux Hébreux un caractère sensible, qui les distinguât des autres peuples, qui n’étaient point dans l’alliance du Seigneur. C’est le sentiment de saint Justin le martyr, de saint Irénée, de saint Chrysostome, de saint Épiphane, d’Hilaire, diacre, de saint Jérôme, de saint Jean Damascène. Mais saint Augustin a prétendu que la circoncision remettait le péché originel ; fondé sur ce que l’Écriture condamne à l’extermination (Genèse 17.12-14) les enfants qui n’auraient pas été circoncis le huitième jour. Or, de quel autre péché cet enfant pouvait-il être coupable, sinon du péché originel ? Saint Grégoire le Grand, Bède le Vénérable, saint Fulgence, saint Prosper, saint Bernard et plusieurs théologiens ont suivi le sentiment de saint Augustin. On peut voir notre Dissertation sur ce sujet, à la tête du Commentaire sur saint Paul.
La circoncision a été en usage, non-seulement parmi les Hébreux, mais aussi parmi les Arabes, les Égyptiens, les Éthiopiens et les Iduméens. Il y a même des auteurs de réputation, qui ont prétendu que c’était des Égyptiens qu’elle était venue aux autres peuples. Celse et Julien l’Apostat soutenaient qu’Abraham avait appris cette cérémonie dans l’Égypte. Marsham et M. Leclerc, ont adopté ce sentiment. Mais l’autorité d’Hérodote, qui assure que la circoncision n’est connue que des peuples à qui les Égyptiens l’ont communiquée, ne mérite pas d’en être crue sur sa parole, ou plutôt sur celle des prêtres Égyptiens, qui lui eu imposaient, en vantant leur antiquité et leurs cérémonies l’ nous parle de l’institution de la circoncision d’Abraham comme d’une chose toute nouvelle. Elle nous dit que c’est le sceau de l’alliance que Dieu fait avec ce patriarche. Et comment la circoncision aurait-elle été un caractère qui distinguât Abraham et sa race du reste des peuples, si elle eût été commune aux Égyptiens et aux Éthiopiens, aux Phéniciens, et à tant d’autres peuples qui l’ont pratiquée autrefois.
Nous ne sommes pas embarrassés à trouver l’origine de la circoncision chez les Arabes, les Sarrasins, les Ismaélites. Ces peuples sont sortis d’Abraham comme les Hébreux, mais ils n’ont jamais regardé la circoncision comme une cérémonie essentielle, qui les obligeât sous peine d’être retranchés de leur peuple. Ils la prennent plutôt par dévotion que par nécessité. Les Samaritains ou les Chutéens reçurent la circoncision, en prenant la loi de Moïse. Les Iduméens, quoique descendus d’Abraham et d’Isaac, ne se firent circoncire que depuis que Jean Bircan les eut vaincus et les eut forcés à recevoir la circoncision et la loi de Moïse. Ceux qui avancent que les Phéniciens se font circoncire, entendent apparemment sons ce nom les Samaritains, car on sait d’ailleurs que les Phéniciens n’observaient point cette cérémonie.
À l’égard des Égyptiens, la circoncision n’a jamais été chez eux d’une obligation générale et indispensable pour toute la nation. On y obligeait simplement certains prêtres et certaines professions. Philon ne donne que des raisons naturelles ou symboliques de cette pratique. Vesting, fameux médecin, croit qu’il y a des raisons naturelles pour les hommes, et même pour les femmes, en Égypte, de recevoir la circoncision. Artapane, cité dans Eusèbe, assure que ce fut Moïse qui la communiqua aux Égyptiens. Origène croit que ce qui a donné tant de vogue à la circoncision parmi les étrangers, est que l’on croyait qu’il y avait un ange qui mettait à mort ceux qui étaient incirconcis, et qui n’avait aucun pouvoir sur ceux qui avaient reçu la circoncision. Plusieurs estiment que ce fut sous le règne de Salomon que les Égyptiens commencèrent à se circoncire d’autres, comme Bochart, soupçonnent que ce n’est point des Juifs, mais des Arabes que les Égyptiens prirent cette coutume. Enfin la plupart soutiennent que les Hébreux sont les premiers qui l’aient pratiquée. On peut voir Speneer, De Legib. Rituel. 1.I chapitre 4., et notre Dissertation sur l’origine de la circoncision, à la tête du commentaire sur la Genèse.
Quant à la circoncision des femmes, elle n’a jamais été en usage chez les Hébreux, mais seulement chez les Égyptiens et dans quelques endroits d’Arabie et de Perse : Saint Ambroise avance indéfiniment que les Égyptiens donnent la circoncision aux hommes et aux femmes au commencement de la quinzième année. Strabon dit aussi, que les femmes égyptiennes reçoivent la circoncision. Mais les voyageurs et les médecins, qui nous apprennent que cet usage est encore aujourd’hui, commun dans l’Égypte, ne nous disent pas qu’il y soit général, ni d’aucune obligation. Il n’est fondé, cet usage, que sur des raisons naturelles qui n’ont pas lieu dans toutes les femmes de pays-là. Chardin dit qu’elle n’est d’obligation que dans quelques pays d’Arabie et de Perse ; comme vers le golfe Persique et la mer Rouge, où l’on circoncit les deux sexes avec une pareille régularité, mais avec cette différence, que l’on peut circoncire les hommes à cinq, six, neuf, ou treize ans ; mais pour les femmes, on ne les circoncit que quand elles ont passé la jeunesse, parce qu’auparavant il n’y a point d’excroissance pour l’excision.
Réitérait-on quelquefois la circoncision ? On ne la réitérait jamais aux Hébreux, non plus que nous ne réitérons jamais le baptême à ceux qui l’ont reçu comme il faut ; mais quand les Juifs recevaient un prosélyte d’une nation où la circoncision était en usage, comme un Samaritain, un Arabe, un Égyptien, s’il avait déjà reçu la circoncision, on se contentait de lui tirer quelques gouttes de sang du même endroit où l’on donne là circoncision, et ce sang s’appelait le sang de l’alliance. Saint-Épiphane dit qu’on réitérait la circoncision aux Samaritains lorsqu’ils se faisaient Juifs. On en usa ainsi envers Symmaque qui embrassa le judaïsme. Trois témoins assistaient à cette cérémonie afin de la rendre plus authentique ; on y bénissait Dieu et on y récitait cette prière : Ô Dieu, faites-nous trouver dans la loi les bonnes œuvres et votre protection, comme vous avez introduit cet homme dans votre alliance.
Les Juifs qui renonçaient au judaïsme s’efforçaient d’effacer en eux-mêmes la marque de la circoncision, comme on le voit dans le livre des Machabées (1 Machabées 1.16). Les rabbins prétendent qu’Ésaü est le premier qui mit en usage cette manière de déguiser sa circoncision, en abandonnant l’alliance du Seigneur et la religion d’Abraham et de Jacob. Quelques-uns croient que les Israélites, dans le désert, avaient aussi caché la marque de leur circoncision, ce qui obligea Josué à les circoncire une seconde fois (Josué 5.2). On dit que plusieurs Juifs employèrent l’artifice pour faire recroître leur prépuce pendant la persécution qu’ils souffrirent sous les Romains, après la ruine du temple, mais que Barcochebas les fit tous circoncire de nouveau. Il semble que saint Paul craignait que les Juifs convertis au christianisme ne s’avisassent de faire de même (1 Corinthiens 7.18).
Il est vrai que saint Jérôme et quelques autres, après lui, ont prétendu que la marque de la circoncision était tellement ineffaçable, que rien n’était capable de supprimer cette marque dans la chair du circoncis ; et que ce que l’on dit dans les Machabées, doit s’entendre des pères qui ne voulaient pas donner la circoncision à leurs enfants. Origène, dans un endroit, dit de même, qu’il est impossible de faire renaître la peau qui est une fois coupée dans la circoncision : mais ailleurs il reconnaît que plusieurs, pour cacher la difformité de leur circoncision, se mettaient entre les mains des chirurgiens pour retirer la peau.
Saint Épiphane parle de l’instrument dont les médecins se servaient pour cela, et des moyens qu’ils employaient pour faire reprendre la peau qui avait été rompue. Le fameux médecin Cornelius Celsus a fait un chapitre exprès pour cette opération. Galien en parle à-peu-près de même que Celse. Bartolin cite Ægineta et Fallopius qui ont enseigné le secret de couvrir les marques de la circoncision ; et Buxtorf le fils, dans sa lettre à Bartolin, cite un grand nombre de Juifs qui parlent de cette pratique, comme usitée parmi les apostats de leur religion.
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