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On dispute sur l’inventeur des lettres et de l’écriture. Quelques-uns soutiennent que l’on écrivait dès avant le déluge, et qu’Adam est l’inventeur des lettres ; d’autres croient que Moïse est le premier auteur dont on ait des écrits, et qu’avant lui on n’a aucun monument écrit. Dans toute la vie des patriarches on ne voit aucun vestige d’écriture. Moïse ne cite aucun écrit composé avant lui ; car le livre des guerres du Seigneur, cité dans les Nombres (Nombres 21.14), est un passage ajouté au texte de Moïse, ou c’est un écrit composé de son temps. Il est vrai que l’on parle d’un livre composé par Adam :et d’un autre par Énoch, et qu’on attribue au premier homme et à Énoch certains autres
écrits. [Voyez Livres perdus]. Josèphe parle de certaines colonnes avec des inscriptions faites avant le déluge. On rapporte aussi certains écrits que l’on dit avoir été composés par Abraham ; mais tout cela passe pour fabuleux et apocryphe, au jugement des plus judicieux critiques.
On convient que dans le monde nous n’avons rien aujourd’hui de plus ancien, ni de plus authentique que les livres de Moïse ; mais il ne s’ensuit pas qu’avant lui on n’ait pas écrit. Il paraît au contraire par son récit même que l’écriture était assez commune en ce temps-là, et dans l’Égypte, d’où les Hébreux étaient sortis, et parmi les Israélites. Ceux-ci paraissaient tout accoutumés à cette manière d’exprimer ses pensées et ses sentiments. Les principaux de la nation lurent sans doute les tables de la loi ; Moïse avait été instruit de toute la science des Égyptiens ; il avait donc sans doute appris leur manière d’écrire. Voyez l’article lettres [Voyez sur l’origine de l’Écriture, les Annales des philos chrét., notamment le tome 28, etc].
[Note du relecteur (mai 2007) : Si beaucoup de points qui suivent sont contestables, il nous apparaît intéressant de mentionner la vision catholique du problème, et de reconnaître que la haute critique allemande du 19e siècle, sans fidélité aucune à l’esprit de la Réforme, a en effet commis de grands ravages dans les attaques qu’elle a menées contre la foi].
Ce terme, pris absolument, marque d’ordinaire les livres sacrés de l’Ancien et du Nouveau Testament (Matthieu 21.42). N’avez-vous jamais lu dans les Écritures (Matthieu 16.54) ? Comment s’accompliront les Écritures (2 Timothée 3.16) Toute écriture divinement inspirée est utile à enseigner, à reprendre, à corriger et à instruire dans la justice [Sur l’Écriture considérée comme seule règle de foi et de morale par les protestants, Voyez la 9e conférence de Mgr Wiseman, dans la collection des Démonstrations, tome 15, col. 947-954.
Ce qui suit aurait été mieux placé au mot Bible, mais j’aime mieux le mettre ici que de ne pas le mettre du tout. Le lecteur ne m’en voudra pas.
La réforme a enfanté un grand nombre de versions de la sainte Bible ; elle a traité ce livre divin d’une manière qui a déjà eu de bien déplorables conséquences. Voici un tableau de ses entreprises téméraires et du sort lamentable que le livre par excellence a subi entre ses mains. Nous l’empruntons du premier article sur l’Église romaine et la sainte Bible, par le P. Pitra, nouveau bénédictin, et co-rédacteur de l’Auxiliaire catholique. Ce savant s’exprime en ces termes :
« La réforme se lève à grand bruit, pour rétablir, dit-elle, le règne de la parole de Dieu. L’Évangile sera dégagé des interprétations humaines, le Verbe révélé reprendra son universelle et infaillible omnipotence ; la parole qui a créé le monde va régner seule sur les intelligences. Ainsi parlaient les novateurs qui s’arrogeaient le titre d’Église évangélique. Que resta-t-il de ces promesses ? En quelques années, au sein de cette réforme, la sainte Bible, dépouillée de l’auréole d’inspiration dont l’avaient entourée seize cents ans ou plutôt trente siècles de foi, descend au niveau des œuvres de l’homme. C’est peu : quelques années encore, et, descendue plus bas, elle tombe au-dessous des plus viles productions humaines, elle s’en va en lambeaux sous le sarcasme des philosophes et le scalpel des rationalistes. Les coryphées de la réforme, de leur vivant, purent prévoir cette lamentable humiliation. Luther s’en exprimait avec son amertume ordinaire : « Le plus grand mal, dit-il en parlant de quelques disciples indociles, c’est que, pour soutenir opiniâtrement ce qu’ils ont une fois follement débité, ils consultent les oracles de Dieu pour en patronner leurs erreurs. Eh ! bon Dieu ! Y a-t-il rien qu’ils ne bouleversent, qu’ils ne dépravent, qu’ils ne corrompent, non-seulement pour fléchir, mais pour torturer tout à leur sens. Le poète avait raison de dire : La fureur donne des armes. Est-ce une façon de parler permise que de tourner et retourner les Écritures, pour les assujettir à notre caprice, pour les soumettre à notre sens ? Quelle stupidité ! Ô peste inouïe I pure zizanie de l’homme ennemi, qui veut étouffer la vraie semence. Et nous nous étonnons qu’il y ait tant de sectes entre ceux qui se sont ralliés à l’Évangile et au Verbe de Dieu renaissant ? Le diable, dit-il ailleurs, s’est servi de l’Écriture comme d’une friperie, et a fait surgir une foule de sectes, d’hérésies, de schismes parmi les chrétiens. Et comme chaque secte confisque l’Écriture à son profit et rament. à son sens, il en est résulté que l’Écriture elle-même a reçu différents noms, et qu’elle a été appelée un livre hérétique, parce que toute hérésie en découle, et que chaque hérétique prétend s’autoriser des saintes Écritures. » Ce texte de Luther est si obscur, que nous n’osons garantir que notre traduction soit tout h fait littérale.
Calvin est moins véhément, mais non moins explicite : il blâme sans ménagement les innombrables versions nouvelles qu’enfantait la réforme, « à tel point, dit-il, que, perdant le vrai sens et l’intelligence du Christ, nous nous laissons surprendre par les fantaisies judaïques, comme il est arrivé à tous les interprètes, sans m’excepter moi-même. » La confession ne peut être ni plus claire ni plus édifiante. Voici qui a dû plus coûter au réformateur de Genève : « Décidément, il serait mieux de laisser là l’étude de la langue hébraïque, pour revenir simplement à la vieille version Vulgate usitée jusqu’ici. » qu’on nous permette encore une citation qui pourra surprendre davantage : « Que le monde dure encore, dit le même Calvin, et il s’en va devenir nécessaire derechef, pour sauver dans ce pêle-mêle d’interprétations scripturaires l’unité de la foi, d’accepter les décrets du concile. »
Cependant les excès qui effrayaient les pères de la réforme n’étaient rien au prix des scandales que l’école rationaliste donne au monde depuis le milieu du siècle dernier. Jusque-là, la Bible protestante, bien que mutilée et livrée sans contrôle à la pâture du fanatisme, était pourtant demeurée un livre divin. Déjà, il est vrai, quelques voix isolées préludaient à l’exégèse rationnelle : il est remarquable qu’on trouve encore un juif en tête de cette nouvelle guerre aux livres saints ; c’est le rabbin panthéiste d’Amsterdam, Benoît Spinosa, qui a posé les premiers principes de la nouvelle école : « Tout ce qui est raconté dans les livres révélés s’est passé conformément aux lois établies dans l’univers. J’accepte selon la lettre la passion, la mort, la sépulture du Christ, mais sa résurrection, comme une allégorie. »
Peut-être même faudrait-il remonter plus haut que Spinosa, et jusqu’aux plus vantés des rabbins du moyen âge, sans excepter le célèbre Maimonides, que la nouvelle synagogue appelle le prince de ses interprètes. Au moins faut-il compter pour précurseurs du rationalisme, non-seulement les déistes anglais et les sociniens allemands, qui affichaient l’horreur de toute révélation, mais les plus renommés docteurs de la réforme, un Grotius, un Scaliger, qui ont attaqué tantôt l’un, tantôt l’autre des livres canoniques ; mais les chefs eux-mêmes, Calvin, qui ne pouvait supporter l’Apocalypse ; Luther, qui appelait lettre de paille l’Épître de saint Jacques ; et enfin la réforme entière, qui renouvela l’attentat de la synagogue en retranchant toute une moitié des saints livres sous le titre de deutéro-canoniques. C’était déchirer en deux parts la robe du Christ, ce merveilleux tissu des textes sacrés, son vêtement d’honneur. Faut-il s’étonner qu’il ait été, après cette insulte des scribes et des docteurs, mis en pièces, tiré au sort et vendu à vil prix ?
Aussi, lorsque Semler eut publié, en 1771-1775, son Examen du canon, Toelner, en 1772, son livre sur l’inspiration, ce fut comme le signal d’une débâcle. Les plus indécis s’élancèrent sans ménagement dans la nouvelle exégèse : Michaelis, Rosenmüller, Paulus, Ernesti même, malgré son austère modération, aidèrent cette révolution de tout leur ascendant et formulèrent hardiment ses principes. Eichorn commença par la Genèse la démolition pièce à pièce, Bauer alla presque jusqu’au bout par sa Mythologie de la Bible ; Daub, dans ses Théorèmes de théologie, demandait grâce uniquement pour tout ce qui ne se rapportait ni aux anges, ni aux démons, ni aux miracles. Schleiermacher poussait avec une sorte de délire au développement du mythe, qui envahit en effet la théologie protestante. Les plus vieilles annales du monde, le véritable testament de soixante générations, le pacte d’alliance entre Dieu et les hommes, devenu le jouet d’une critique de pédants, fut traité comme une, épopée, comme un conte oriental. Le Nouveau Testament fut encore plus en butte aux traits de la prétendue Église évangélique. Schleiermacher déclara qu’il n’y avait d’authentique dans l’Évangile araméen de saint Matthieu que des causeries encadrées dans un récit arbitraire par l’interprète grec. Wilke n’admet d’évangile original que saint Marc, et regarde saint Luc et saint Matthieu comme des compilations d’un recueil de Papias. Encore l’Évangile de saint Marc est-il moins un récit fidèle qu’une combinaison de seconde main ; saint Jean est l’œuvre assez récente des prêtres d’Éphèse, plagiaires de Philon. Bruno Bauer, l’un des derniers destructeurs, attaque le fond et la forme, le but et le principe de l’Évangile : Ce n’est qu’une pure tradition, qu’une légende successivement élaborée par les premiers âges, le fruit, sinon de la fraude, au moins de l’hallucination. L’abîme s’élargissait immensément ; Strauss apparut : son livre fameux déchira les derniers voiles, détruisit les dernières illusions, donna le dernier mot de cette exégèse dévorante et de toute la réforme ; ce mot, l’Allemagne protestante elle-même l’a prononcé : c’est le nihilisme. Il ne restait plus qu’à faire l’oraison funèbre du Christianisme, et on dit qu’un professeur de Berlin, Feuerbach, s’en est, acquitté publiquement et officiellement.
Il y aurait bien d’autres funérailles à célébrer, si le rationalisme allemand disposait des destinées du monde. Poussant proche en proche son criticisme dissolvant, il a envahi tout le domaine des connaissances humaines. Après la Bible, les Pères furent mis au creuset. Les premiers siècles, longtemps objet d’une prédilection fanatique, furent les plus maltraités. Semlier entre autres découvrit toute une fabrique d’apocryphes, qu’il plaça au troisième siècle, à Alexandrie, et d’où il vit sortir les fragments de saint Irénée, les Stromates de Clément Alexandrin, les œuvres de saint Hippolyte et plusieurs traités de Tertullien. En Même temps les classiques, à leur tour, s’évanouissaient en traditions vaporeuses : Hérodote et Homère, Tite-Live et Virgile, les épopées, les monuments, les témoignages les plus positifs n’étaient plus qu’allégories menteuses ; le mythe a coulé à plein bord sur le terrain le plus ferme de l’histoire. La philosophie surtout a pris son essor dans les espaces les plus imaginaires ; de théorie en théorie, les écoles rivales de Hégel, de Kant, de Schelling en sont venues à mettre en doute la réalité de la raison, de la pensée, de la vie, l’homme et le monde. La nature même apparaît comme un Protée aux mille formes insaisissables ; la chaîne des êtres, les familles, les genres, la terminologie, tout se confond dans un chaos sans bornes. La plus légère teinture des travaux scientifiques de l’Allemagne, et à certains égards de l’Angleterre elle-même, suffit pour convaincre que tout fondement échappe au protestantisme, emporté dans un abîme sans fond, le nihilisme de Strauss.
Telle est la force invincible qui pousse à cette décadence, que les efforts même en apparence les plus féconds multiplient les ruines. Ainsi, si quelque chose devait en dehors de l’Église conserver le dépôt de la Révélation, ce devait être assurément les sacrifices énormes des sociétés bibliques pour répandre partout les livres saints. Et pourtant qu’a-t-on fait ? On a accepté des rationalistes allemands les recensions du texte sacré les plus téméraires ; on a donné à leurs éditions mutilées et défigurées une publicité immense ; aux fautes calculées on a ajouté les retranchements involontaires, les contresens monstrueux, les interpolations inévitables dues à l’incurie des traducteurs pris sans choix dans toutes les langues du monde. La parole de Dieu a donc été livrée à la confusion de Babel, et dans quelque temps il sera plus aisé de déchiffrer les briques vitrifiées de Sennaar que de comprendre les Bibles que le protestantisme a semées dans le monde.
Heureusement pour sauver la Bible, la foi, la science et le bon sens, il reste à l’humanité, au protestantisme même et au rationalisme, l’Église romaine].
Voyez l’article Canon des Écritures. On attribue communément le canon des Écritures, ou le recueil des Livres sacrés de l’Ancien Testament, à Esdras, qui le rangea dans l’ordre le plus convenable : il le divisa en trois parties : 1° la Loi, 2° les Prophètes, 3° les Ketubim, ou hagiographes ; c’est-à-dire, écrits sacrés. Le Sauveur paraît faire attention à cette ancienne manière de diviser la Bible, lorsqu’il dit (Luc 24.44) : Il fallait que tout ce qui est écrit sur mon sujet dans la loi de Moïse, dans les prophètes et dans les Psaumes, fût accompli. Les Psaumes sont à la tête des hagiographes. Josèphe contre Appion reconnaît la même distribution. Nous n’avons, dit-il, que vingt-deux livres qui soient d’une autorité divine, dont cinq sont de Moïse ; les prophètes qui ont succédé à Moïse en ont composé treize ; les autres quatre sont des hymnes à l’honneur de Dieu, et des préceptes pour la vie humaine. Il faut toutefois remarquer que les Juifs ont varié en la division des livres saints ; et encore aujourd’hui au lieu de vingt-deux livres, ils en comptent vingt-quatre : mais ce n’est qu’une différence de nom ; et quand on dit que le canon fut fixé par Esdras, il faut encore l’entendre avec restriction ; car il n’a pu, par exemple, y mettre Malachie, ni Esther, ni même Néhémie, où il est parlé du grand prêtre Jaddus, et de Darius Condomanus, empereur des Perses, qui n’ont vécu qu’après Esdras [Voyez, au mot Canon, ma note sur le Canon des Juifs].
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