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Ou Asiongaber, ville de D’Idumée, ou de l’Arabie Déserte, sur le bord de la mer Rouge, et sur un golfe de cette mer, appelé le golfe d’Elan. Les Israélites, après avoir été quelque temps à Hébrona, vinrent à Esiongater ; de là ils allèrent au désert de Sin, où est la ville de Cadès (Nombres 33.35). C’est au port d’Esiongaber que Salomon équipait ses flottes pour aller à Ophir (1 Rois 9.26). On peut voir ce que nous avons dit ci-devant sur Elath, ville située sur le golfe Elanitique. Josèphe dit qu’Esiongaber est la même que Bérénice, fameuse ville sur la mer Rouge (Antiquités judaïques, livre 8 p. 269, f). Mais il y a beaucoup d’apparence qu’il a confondu Bérénice, qui est sur le bord occidental de la mer Rouge, tirant vers l’Éthiopie, avec la ville d’Esiongaber, située sur le golfe Elanitique et sur le bord opposé [Suivant dom Calmet, Esiongaber est tantôt le trente-quatrième, et tantôt le trente-neuvième campement des Israélites ; tantôt il reconnaît qu’ils sont venus d’Hébrona à Esiongaber, et tantôt il imagine qu’après avoir campé à Hébrona, ils campèrent à Elath, puis vinrent à Esiongaber. Voyez sa Table chronologique, au tome 1 pages 15, col. 2, et le mot campements. Barbié du Bocage, le géographe de la Bible de Vence et M. Léon de Laborde se rencontrent à ce point du voyage des Israélites : c’est, disent-ils, leur trente-deuxième station ; et j’admets ce sentiment.
M. de Laborde a suivi pas à pas les Israélites ; il a observé, étudié, expliqué leurs marches et leurs campements. Je n’hésite pas à rejeter tous les travaux qui ont été faits sur ce sujet pour ne m’en tenir qu’au sien, qui réunit toutes les conditions propres à lui mériter tous les suffrages. Voyez Marches et campements.
Hébrona est le campement qui précéda celui d’Esiongaber. M. de Laborde commentant ce texte des Nombres (Nombres 33.35) : Les Israélites campèrent à Esiongaber, donne des explications dont nous allons extraire quelques passages.
La route suivie par les pèlerins de la Mecque, dit-il (Commentaire sur l’Exode et les Nombres, page 123, col. 2)., nous servira à mieux préciser celle des Israélites. Ils descendirent par le ravin à pente rapide qui s’appelle par cette raison El-Aka bah, et ils s’approchèrent de Cadès [trente-troisième campement], où les espions [partis de Rethma, quinzième campement] devaient les rencontrer… » L’auteur annonce ensuite qu’il va examiner quelle était la position d’Elath et d’Esiongaber, ces deux villes maritimes qui jouent un rôle important aussi bien dans l’histoire sainte que dans l’histoire générale ; il donne la carte du golfe et continue en ces termes (pages 124) :
« Elath, Eziongaher et le mont Séir, paraissent comme trois points voisins, qui tiennent les uns aux autres, dans le plus ancien document où ces trois noms se trouvent mentionnés (Deutéronome 2.8).
Le mont Séir, comme nous l’avons démontré, doit s’entendre de toute la montagne des Édomites (Genèse 26.9). C’est le Djebel-Scherra, qui s’étend depuis Ouadi-Getoun jusqu’aux anciennes possessions des Moabites. À côté de cette montagne s’élevaient donc deux villes qui ne pouvaient être que très-voisines puisque le chemin de la mer Rouge que nous avons-reconnu être la Ouadi-Araba, est en même temps appelé le chemin d’Elath et d’Eziongaber (Deutéronome 2.8).
Des renseignements postérieurs qui, toutefois, datent encore du règne de Salomon, nous apprennent qu’Eziongaber était un port de mer (1 Rois 9 et 1 Rois 10), et nous savons par les Pères de l’Église, ainsi que par les géographes arabes et les historiens des croisades, qu’Elath, dont le nom s’est conservédans Allah, se retrouve aujourd’hui dans Hale, ainsi que dans Akabah-Aila, et que cette ville est également située sur le bord de la mer, à l’extrémité septentrionale du golfe de l’Akabah.
Nous avons donc une position qui nous est connue et une autre position qu’il faut chercher, sans qu’il nous soit permis de nous éloigner d’un voisinage très-rapproche. » Il n’y a pas assez d’espace dans l’extrémité du golfe pour placer deux villes, deux ports de mer, deux industries rivales. Aila y a conservé ses ruines ; cherchons plus loin Eziongaber.
Eziongaber, selon Bochart, aurait une signification : il exprimerait une côte hérissée de rochers, un rocher s’élevant dans la mer en forme de dos, et contre lequel les vagues viennent mugir (Geographia sacra, 1640, pages 764). Rien ne répond mieux à cette description qu’une île, qui, comme celle de Graie (Emrag, Djezireth Pharaon), s’élève dans la mer.
Près d’Ailah, nous apprend Makrizi, s’élevait autrefois une grande et belle ville du nom d’Asioun, et Seetzen a trouvé, dans l’ouvrage géographique de Murack Mackmed, fils d’Ackmed, un passage qui se rapporte à celui-là : Près d’Ailah (Eloth) était une ville du nom d’Azioum, où se trouvaient beaucoup de palmiers, de fruits et de champs cultivés (Monet Correspondances 1809, sept. 18 pages 239 et 307). Les noms d’Azioum et d’Esiongaber offrent, sans doute, beaucoup de ressemblance, si, comme Eusèbe et saint Jérôme, on écrit le dernier Atia. Au nord de l’île de Graie et du golfe où les vaisseaux trouvent un abri contre les vents, on rencontre des ruines qui s’étendent en forme d’enceinte et de buttes de décombres. Il y a de l’eau, des palmiers, des acacias et une plaine qu’une industrie persévérante peut avoir cultivée. Je vois là cet Azioum qui répond à la partie d’Eziongaber située sur la côte, au faubourg d’approvisionnement de l’île et du port.
Ce port est bien protégé contre les vents d’ouest et du nord. L’île le défend contre ceux de l’est. Aujourd’hui, si la Syrie acquérait le même genre de sécurité que l’Égypte, ce serait une question de savoir si les quarante-cinq lieues qui séparent l’Akabah de El-Arisch ne seraient pas plus rapidement parcourues que le détour de Suez au Caire et du Caire à Alexandrie.
Cherchons dans le texte si, malgré sa concision, nous ne trouverons pas quelque trait descriptif qui convienne â cette localité. Salomon, engagé par l’adresse du roi de Phénicie dans des goûts de luxe et des entreprises qui pouvaient lui donner des moyens de les satisfaire, fit une expédition sur la mer Rouge. Le roi Salomon fit construire aussi des vaisseaux à Asiongaber, qui est près d’Elath, sur le bord de la mer Rouge (1 Rois 9.26 ; 2 Chroniques 8.16). Dans les expéditions, Eziongaber ressort comme le point important, tandis qu’Ailah ne semble pas avoir été utilisé dans cette entreprise. Plus tard, cette dernière ville n’est même plus citée, Eziongaber est seul indiqué comme l’endroit où se construisent les vaisseaux qui doivent naviguer sur cette mer. Josaphat ayant fait alliance avec Ochosias, il convint avec lui qu’ils équiperaient une flotte pour aller à Tharsis. Ils firent donc bâtir des vaisseaux à Eziongaber (2 Chroniques 20.36). Mais ces vaisseaux ne purent y aller, parce qu’ils furent brisés à Eziongaber (1 Rois 22.49). Ce fait peut nous servir à mieux déterminer la nature du lieu. Il laisse supposer un abri pour les vaisseaux, qui n’offre pas toute sûreté, qui devient même dangereux sous l’influence de certaine direction du vent, puisque les vaisseaux se brisent sur sa côte, hérissée de rochers. Tout ici Convient encore à l’île de Graie et à la position de l’Azioum des Arabes, où descaravanes nombreuses et armées déposaient les matériaux de construction et les marchandises précieuses, qui une fois transportés dans l’île, étalent les uns transformés en vaisseaux, les autres mises en magasin ou à l’abri des peuplades environnantes, dont il eût été difficile, autrement que par l’isolement, de contenir longtemps l’avidité.
Les vaisseaux, une fois construits, étaient amarrés à l’île et tenus au large par des ancres. Ils étaient à l’abri, par l’élévation du rocher, du vent de nord-est et de nord-nord-est, qui règne presque toute l’année et souffle avec violence dans ce golfe [pages 125, col. 1]. Mais un changement subit au sud-ouest ou au nord-ouest portait les vaisseaux sur l’île et les brisait contre les rochers.
D’après ces courtes citations nous pouvons nous représenter un peuple conquérant, établi sur cette côté et protégé par ses armes, bâtissant et équipant des vaisseaux, les envoyant au loin, puis abandonnant ces entreprises par la difficulté de se maintenir dans un pays toujours en révolte, et laissant aux peuples indigènes une exploitation dont ils leur avaient fait connaître les avantages et appris les moyens. Mais aussi de ce moment, en mémé temps que la suite des documents s’interrompt le nom d’Eziongaber disparaît à jamais. Ce changement opéré ainsi, sans raisons évidentes, s’explique facile-lient. Du moment que le conquérant étranger disparaît de ses côtes, la position qu’il avait choisie perd tous ses avantages. Les indigènes, tranquilles sur leur sol, n’ont pas besoin de l’isolement que l’île assurait, et entre les villes d’Eziongaber et d’Elath ils choisirent de préférence la seconde située plus près du territoire qu’ils parcouraient et offrant plus de ressources. Cette ville d’Elath est encore citée deux fois dans l’Écriture (2 Rois 14.22 ; 16.6) ; puis son nom passe dans toutes les traditions et vient s’intercaler, plus ou moins altéré, dans les ouvrages grecs, latins et arabes, sous la forme de Eloth, Elath, Ailath (saint Jérôme : la dixième légion était à Elath. Onomast., et Notitia dignitatum). Œla, Œlas, Œlat, Œlana (Josèphe, Histoire 8.6 ; 9.19 ; Pline, Histoire nat., 5.12) ; Ailana (Diodore de Sicile) ; Ailanon (Étienne de Byzance, de Urb.) ; Ailas (Procope, de Bello Pers.) ; Eita, Eilat, Eilana, Leana, Elas (Notitix antiquce) ; Elana (Strabon, livre 16 ; Ptolémée, Georg. Min.), et chez les Arabes. Allah, Ailat, Akabah Aila, Akbet Aileh, Hoele, etc.
M. Léon de Laborde présente ensuite ses recherches sur Elath ; c’est son histoire depuis le temps de Mahomet, qui lui laissa une lettre de franchise et sou manteau. Et revenant à Esiongaber, il termine en ces termes (p. 126, col. 2, et 127, col. 1) :
La position d’Eziongaber, à l’extrémité du golfe Elanitique, n’est pas admise généralement. Ainsi, Pococke (Descr de l’Orient, ed angl., 1.137) ; Montagu (Account of his Journey, mars 1766) ; Sicard (Missions du Levant, tome 5 pages 396) ; Shaw (tome 2 page 46) ; Gosselin (Recherches, golfe Arabique, page 99) ; Büsching (Erdbeschr von Asien), le placent dans le fond du port de Cherm, qui est beaucoup trop au sud ; on se demande pourquoi des vaisseaux se seraient arrêtés ainsi sur la côte de la Péninsule, quand ils avaient la mer devant eux et des abordages meilleurs et plus près de leur but, à Dahab, à Noebe, à l’île de Graie et près de l’Ackabah ; enfin, pourquoi débarquer si loin de si riches marchandises, quand il est impossible de faire passer une caravane sur le littoral depuis Cherm jusqu’en Syrie. Danville (Mémoires sur l’Égypte, pages 238) en supposant à l’extrémité du golfe une bifurcation, avait placé commodément chacune de ces villes aux extrémités des deux pointes ; mais le golfe n’a qu’une pointe et Eziongaber, placé près d’Elath sur cet espace rétréci, ne s’explique pas, quand on se rappelle que ces deux villes avaient le même genre d’industrie. L’opinion de Bochart (Geographia sacra, page 764) et celle de Calmet (Lister. Comment in Exodum) se trouvent ainsi coin-battues, et il est inutile de discuter celle de Josèphe l’historien, qui prétendait que Eziongaber se nominait, de son temps, Bérénice ; car, comme il nous dit que Salomon fit construire dans le golfe d’Égypte les vaisseaux qu’il envoyait à Ophir, il est probable qu’il confondait ensemble les deux golfes et des sites entièrement différents.
Il faut un certain temps avant que les découvertes prennent leur place dans le domaine public et soient acceptées généralement. J’en citerai, pour exemple, la carte que M. Arundale vient de publier en 1837, From the best authorities, et celle de M. de Gerambe, qui a paru depuis elle ; toutes deux sont copiées sur les anciennes cartes de la Syrie et de l’Arabie Pétrée avec le golfe fourchu et les chaînes de montagnes qui se croisent entre la mer Morte et la mer Rouge, tels qu’on les représentait il y a quarante années. Voyagez donc, Burckhart, Seetzen, etc., etc., pour qu’après vingt années on prenne ce souci de la publication de vos découvertes !
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