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Superstition et Superstitieux.
Ces termes ne se trouvent que dans le Nouveau Testament. Festus, gouverneur [procurateur] de Judée, parlant au roi Agrippa, lui dit que Paul avait quelque difficulté avec les autres Juifs touchant leurs superstitions (Actes 25.19). C’est ainsi que ce païen parlait, ignorant également la religion chrétienne et celle des Juifs. Saint Paul, écrivant aux Colossiens (Colossiens 2.23), leur recommande de ne point écouter les faux docteurs qui ventent les engager à suivre des maximes humaines, qui ont à la vérité quelque apparence de sagesse, dans une superstition et une humilité affectées. Enfin le même apôtre, parlant aux Athéniens (Actes 17.22), leur dit qu’il les trouve superstitieux à l’excès.
Le nom latin superstitio peut venir ou de ce que le superstitieux ajoute quelque-chose au culte ordinaire : Quod superstat et superfluit : ainsi superstitio peut marquer cultus superfluus : ou de ce que le superstitieux regarde Dieu et la religion comme un joug insupportable : Horribili super aspectu mortalibus instans, dit Lucrèce. Les Grecs l’appellent deisidaimonia (terror deorum), terreur des dieux, parce que le superstitieux regarde Dieu comme un maître cruel, et observe avec une exactitude inquiète et tremblante tout ce qu’il croit lui être agréable, de peur d’irriter sa colère et d’attirer ses châtiments. Varron disait que l’homme pieux honorait et craignait Dieu, et que le superstitieux le redoutait et était saisi de frayeur devant lui. Et Maxime de Tyr dit que l’homme vraiment pieux regarde Dieu comme un ami plein de honte, et que le superstitieux le sert avec les sentiments d’une basse flatterie. Il y a une infinité de superstitions défendues dans l’Ancien Testament : toutes les sortes de divinations et d’observations superstitieuses des songes et du vol des oiseaux ; les différentes sortes d’idolâtrie et de culte superstitieux des anges ; les sacrifices d’hosties humaines ; les traditions pharisaïques sur les dîmes, sur l’observation du sabbat, sur les purifications, et une infinité d’autres que Jésus, Christ reproche aux pharisiens dans l’evangile. Saint Paul s’est toujours fortement opposé aux docteurs juifs, qui voulaient introduire leurs superstitions et leurs vaines pratiques dans le christianisme. On peut voir (Romains 14.1-2, 3 ; 1 Corinthiens 8.3-6 ; Colossiens 2.18, 19), etc.
On s’est fait une habitude de présenter la nation israélite ou juive comme la plus superstitieuse du monde. Tacite, je crois, dit ; et Tacite était païen, livré à des superstitions dont les Israélites avaient horreur. On l’a redit aprés Tacite, et cette opinion erronée a traversé les siècles. Toutefois il faut distinguer ; oui, les Juifs ont été trop souvent superstitieux ; mais ils ne l’étaient que par périodes, que quand ils cessaient d’être fidèles à la loi, qui proscrivait jusqu’à ce qui pouvait conduire à la superstition. Mais ordinairement, et en génnéral, il m’est pas vrai que les Israélites aient été un peuple superstitieux : je prétends même que c’était la seule nation qui eût une religion raisonnable (je me sers à dessein de ce mot, quoiqu’il ne rende pas ma pensée). Comparez leurs institutions religieuses avec celles des autres peuples, et jugez : c’est par les institutions qu’il faut apprécier un peuple ; car elles constituent son état normal habituel. Il est évident qu’il ne saurait y avoir deux dieux : les Israélites n’en reconnaissaient qu’un ; tandis que les Grecs elles Romains, qui sont les peuples les plus fameux en admettaient des milliers, sans compter ceux qu’ils fabriquaient de leurs propres mains. Sans doute, les Hébreux, éclairés par les traditions primitives, conservées chez eux plus pures qu’ailleurs, et par les institutions se sont jetés néanmoins à diverses reprises dans les superstitions des peuples qui les avoisinaient ; mais il est vrai de dire qu’ils furent, de quelque manière qu’on les considère sous ce rapport, le peuple le moins superstitieux.
Je me souviens d’une petite anecdote recueillie par Eusèbe, dans sa Préparation évangélique, livre 9 chapitre 4.« Je rapporterai, dit-il, ce qui est raconté par Hécatée d’Abdère, homme également versé dans l’étude de la philosophie et dans le maniement des affaires, au sujet d’un Juif qui faisait partie de l’armée du roi, Alexandre (le Grand) Lorsque je m’avançais vers la mer Rouge, c’est Hecatée qui parle, il avait, parmi les cavaliers juifs qui nous servaient de guides, un certain Mosomane, soldat d’un esprit pénétrant, d’une grande force de corps, et reconnu pour le meilleur archer, tant des Grecs que des barbares. L’armée, qui était en marche, s’arrêtant tout à coup pour consulter le vol des oiseaux, Mosomane demanda pourquoi on s’arrêtait ainsi. Alors le devin, lui faisant apercevoir un oiseau, déclara que si l’oiseau s’arrêtait on devait s’arréter, continuer la route s’il prenait son vol en avant, rétrograder s’il volait en arrière. Le Juif ne répond rien ; mais, saisissant son arc, il lance une flèche qui atteint l’oiseau et le tue. Le devin et plusieurs autres, transportés de fureur, accablent l’archer de malédictions. Malheureux, leur répond Mosomane., d’où vient donc ce délire ? Puis, prenant l’oiseau dans ses mains : Comment, dit-il, n’ayant pas pu pourvoir à sa propre conservation, aurait-il pu révéler quelque chose d’heureux au sujet de notre voyage ? Certes, s’il avait su prévoir l’avenir, il ne serait pas venu dans un lieu où il devait être percé par la flèche du Juif Mosomane.
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