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Tibériade

Ville célèbre de Galilée, située à l’extrémité méridionale et sur le bord occidental du lac de Génézareth, autrement nommé mer de Tibériade. On croit que son nom ancien était Cinnéreth, ou Chammath, ou Emath, ou Raccat, ou Recchath ; mais M. Reland montre assez bien que cela est fort douteux, et n’est fondé que sur ce que la mer de Cinnéreth fut depuis nommée mer de Tibériade, ce qui ne prouve point du tout que Chinéreth et Tibériade soient la même chose. De plus il remarque que le lot de Nephtali ne commençait, du côté du midi, qu’à Capharnaüm, qui est plus septentrionale que Tibériade ; et toutefois Cinnéreth, Emath et Reccath sont du lot de Nephtali. Tibériade n’en peut donc pas être, puisqu’on sait qu’elle était tout au midi du lac de Tibériade.

Josèphe nous apprend que cette ville fut bâtie en l’honneur de Tibère, par le roi Hérode Agrippa. Il y avait assez près de là des bains d’eau chaude ; et elle était située dans un lieu où il y avait quantité de tombeaux et de corps morts, ce qui était tout à fait contraire aux usages des Juifs. Tibériade était à trente stades d’Hippos, à soixante de Gadare, à cent vingt de Scythopolis, et à trente de Tarichée.

Hérode, qui avait bâti cette ville, la combla de bienfaits. Sa situation avantageuse la rendit bientôt une ville considérable ; elle devint la métropole de toute la Galilée. Agrippa, obligé de quitter Rome, s’y retira avec Hérode, son oncle. L’empereur Claude la lui donna dans la suite, c’est pourquoi elle porte le nom de Claudia Tiberias dans les médailles. Josèphe s’en empara pendant la guerre des Juifs, et elle chargea de coups l’officier qui venait lui offrir la paix de la part des Romains. Vespasien voulait faire passer au fil de l’épée tous ses habitants ; mais Agrippa, à qui elle appartenait, obtint qu’il se contentât d’abattre une partie de ses murailles. Tibériade était remplie de pécheurs et de matelots, d’où vient qu’on voit une barque sur le revers de quelques médailles qui furent frappées dans cette ville. Dans une autre médaille qui fut frappée sous Trajan, on voit la déesse Santé ceinte d’un serpent et assise sur une montagne d’où sort une grande abondance d’eau, pour montrer que Tibériade était célèbre par ses bains d’eaux chaudes, dont les malades tiraient de grands secours pour leur santé.

Ce fut dans cette ville que se rassemblèrent, après la ruine de Jérusalem par les Romains, quelques Juifs et quelques-uns de leurs plus savants sacrificateurs, et y jettèrent les fondements d’une académie qui devint célèbre par la composition de la Misne, par le célèbre ouvrage des Massorètes, auteurs des points voyelles, et par la réputation des docteurs qui y tinrent leurs écoles ; c’est dans la même ville que résidait le patriarche de toute leur nation.

Saint Épiphane remarque que le comte Joseph découvrit, du tems du grand Constantin, dans les archives ou dans le trésor de Tibériade, l’Évangile de saint Jean et les Actes des apôtres traduits en hébreu, et qu’avant ce temps, il n’était permis à aucun chrétien de demeurer à Tibériade, ni à Capharnaüm, ni à Nazareth, ni à Diocésaréc, et que le comte Joseph, ayant obtenu de Constantin la permission d’y bâtir une égrise au nom de Jésus-Christ, il se servit d’un grand temple nommé Adrianeum, qui n’avait jamais été achevé ni consacré. Il le fit achever et consacrer pour l’usage des chrétiens. Lampride nous apprend que les empereurs Alexandre, Sévère et Adrien avaient eu dessein de mettre Jésus-Christ au rang des dieux et de lui consacrer des temples, d’où vient qu’encore aujourd’hui, dit cet auteur, on voit dans toutes les villes des temples sans statues, que pour cette raison on appelle des Adriens [M. de Lamartine était parti de Nazareth et visitait la Galilée ; il voulait voir Tibériade et son lac ou sa mer, qu’il appelle la mer de Jésus-Christ (Voyage en Orient., tome 1, pages 327), à cause des actions que le divin Sauveur a faites sur ses rives et sur ses eaux].

Les bords de la mer de Galilée, de ce côté de la Judée, dit l’illustre voyageur (pages 334-336), n’étaient, pour ainsi dire, qu’une seule ville. Ces débris multipliés devant nous, et la multitude des villes, et la magnificence des constructions que leurs fragments mutilés témoignent, rappellent à ma mémoire la voute qui longe le pied du mont Vésuve, de Castellamare à Portici. Comme là, les bords du lac de Génésareth semblaient porter des villes au lieu de moissons et de forêts. Après deux heures de marche ; nous arrivâmes à l’extrémité d’un promontoire qui s’avance dans le lac, et la ville de Tibériade se montra tout à coup devant nous comme une apparition vivante et éclatante d’une ville de deux mille ans. Elle ouvre la pente d’une colline noire et nue, qui s’incline rapidement vers le lac. Elle est entourée d’une haute muraille carrée, flanquée de quinze à vingt tours crénelées. Les pointes de deux blancs minarets se dressent seules au-dessus de ces murs et de ces tours, et tout le reste de la vice semble se cacher de l’Arabe à l’abri de ces hautes murailles, et ne présenter à l’œil que la voûte basse et uniforme de ses toits gris, semblables à l’écaille découpée d’une tortue.

Tempête sur le lac, que je désirais voir. Eau verte comme les feuilles de jonc qui l’entourent. Ecume livide et éblouissante. Vagues assez hautes et très-pressées. Grand bruit des lames sur les cailloux volcaniques qu’elles roulent, mais point de barques en péril ni en vue. Il n’y en a pas une seule sur le lac. Entré à Tibériade par un orage et une pluie du midi. Réfugié dans l’église latine. Fait apporter du feu allumé au milieu de l’église déserte, la première église du christianisme.

Tibériade ne vaut pas même, pour l’intérieur, ce coup d’œil rapide. Assemblage confus et boueux de quelques centaines de maisons, semblables aux cahutes arabes de boue et de paille. Nous sommes salués en italien et en allemand par plusieurs juifs polonais ou allemands, qui, sur la fin de leurs jours, lorsqu’ils n’ont plus rien à attendre que l’heure incertaine de la mort, viennent passer leurs derniers instants à Tibériade, sur les bords de leur mer, au cœur même de leur cher pays, afin de mourir sous leur soleil et d’être ensevelis dans leur terre comme Abraham et Jacob. Dormir dans la couche de ses pères. Témoignage de l’inextinguible amour de la patrie. On le nierait en vain. Il y a sympathie, il y a affinité entre l’homme et la terre dont il fut formé, dont il est sorti. Il est bien, il est doux de lui rapporter à sa place ce peu de poussière qu’on lui a empruntée pour quelques jours. Faites que je dorme aussi, Ô mon Dieu, dans la terre et auprès de la poussière de mes pères.

Neuf heures de marche sans repos nous ramènent à Nazareth par Cana, lieu du premier miracle du Sauveur… 

M. Gillot de Xerhardène avait visité Tibériade avant M. de Lamartine. Lévitique 23 septembre 1829 il écrivait à M. Michaud (Correspondances d’Orient, lettr. 134, tome 5 pages 455) : Tibériade est située sur la rive occidentale du lac ; la ville moderne n’est pour l’étendue que le tiers de la ville bâtie par Hérode en l’honneur de Tibère ; elle a la forme d’un carré long. Ses murailles, bâties par les croisés, ont été reconstruites par le cheick Duher, vers le milieu du siècle dernier.

Comme j’ai peu de choses à vous dire de cette cité dépeuplée et tombée en ruines, je veux vous entretenir des lieux célèbres qui l’environnent. Parti de Tibériade le 19 septembre, je gravis d’abord la colline par où l’on monte vers Nazareth ; je m’arrêtai, et tournai le dos au soleil, qui mettait en feu le mont Thabor, je promenai mes yeux sur Tibériade et sur le lac, dont le bassin se déployait à mes pieds comme un tapis de diamants. Ces murailles flanquées de tours qui environnent une enceinte dont la moitié n’est qu’un désert, ces flots étincelants qui se jouaient sur les rives en reflétant la lumière, cette fontaine et cette montagne de la multiplication des pains qui apparaissait vers la gauche sur les hauteurs du lac, ces monts bizarres de la décapote dont les sommets arrondis semblaient des masses de nuages lumineux, tout cela formait un tableau que je ne me lassais point de contempler, et dont mes yeux s’enivraient comme d’une vision ou d’un mirage. Après avoir joui de cet immense panorama, je repris le chemin de Cana.

Tibériade fut prise par les croisés, ayant Tancrède à leur tête ; elle tomba ensuite au pouvoir de Saladin. Dans son voisinage furrent livrés une multitude de combats. Elle fut détruite par un tremblement de terre. Voyez Michaïm, Histoire des croisades. Longtemps après, les Français reparurent sur ce grand théâtre de la valeur de leurs pères. En 1799, le gand vizir ayant fait une démonstration offensive, Bonaparte s’avança contre lui avec moins de cinq mille hommes, et le battit en vue du Thabor. Notre cavalerie poursuivit les Turcs jusqu’à Tibériade, qui lui ouvrit ses portes, et de là jusqu’au pont de Jacob, où elle acheva de les disperser. Voyez Béatitudes (Montagne des).

Lac de Tibériade, étang de Tibériade, mer de Tibériade, c’est la même que le lac de Génésar ou Génésareth, ou la mer de Cinéreth ou de Cennéreth, ou simplement la mer de Galilée. [Il vient d’en être parlé à propos de, la ville de Tibériade]. Voyez ci-devant Cénéreth [et Génésareth].

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