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Le Nouveau Testament contient trois lettres dont la tradition attribue la composition à l’apôtre Jean.
On chercherait vainement dans 1 Jean le plan nettement tracé qu’on trouve dans certaines épîtres de Paul (Romains, 1 Corinthiens, Galates). Il est sans doute possible d’y discerner un certain nombre de thèmes, et plusieurs critiques se sont appliqués à grouper les exhortations contenues dans ce livre autour des trois suivants : Dieu est lumière (1 Jean 1.5), Dieu est juste (1 Jean 2.29), Dieu est amour (1 Jean 4.8). L’idée peut se défendre ; mais force est bien de reconnaître, lorsqu’on lit l’épître, que ces trois sujets sont constamment ramenés l’un à l’autre et que les mêmes certitudes et les mêmes devoirs sont rappelés, sous ces trois chefs, en termes souvent identiques. De toute évidence, l’auteur n’est point un logicien et ne se préoccupe nullement d’exposer sa pensée de façon suivie et systématique ; il parle plutôt qu’il ne rédige et procède par association d’idées plutôt que par raisonnement. Même en distinguant, dans sa lettre, un plus grand nombre de morceaux qu’on ne le fait d’habitude, nous constaterons que ces morceaux sont à bien des égards parallèles et non successifs, qu’ils reprennent les mêmes affirmations, et qu’il est plus facile d’en extraire les idées principales que d’en faire un véritable résumé.
L’épître, tout comme l’Évangile, a son prologue (1 Jean 1.1-4), où l’auteur, parlant peut-être au nom d’un groupe d’amis qui l’entourent, se présente, sans se nommer, comme un témoin qui a vu de ses yeux, entendu de ses oreilles et touché de ses mains la Parole de vie qui s’est incarnée en Jésus ; il écrit pour que ses lecteurs, ayant la même foi, soient, comme lui et avec lui, en communion avec le Père et avec le Fils et pour que leur joie soit parfaite. Puis il passe au message ou à la nouvelle (v.7) qu’il est chargé d’apporter.
Premier morceau : (1 Jean 1.5-2.17) Le croyant et le péché
Dieu est lumière, c’est-à-dire sainteté. Donc, ne vivons pas dans le péché. Ne nous berçons pas non plus de l’illusion que nous sommes sans péché. Confessons plutôt nos fautes ; et, si nous marchons dans la lumière, si nous cherchons sincèrement à faire le bien, l’œuvre expiatoire de Jésus-Christ couvrira nos manquements. Connaître Dieu, au vrai sens de ce terme, c’est garder ses commandements ; demeurer en Christ, c’est vivre comme il a vécu. Rappeler ces choses, ce n’est que répéter ce que les lecteurs ont entendu dès le commencement ; elles sont pourtant nouvelles en ce sens que les temps, qui avancent, nous obligent chaque jour davantage à y prendre garde et à nous redire que marcher dans la lumière, c’est aimer ses frères, et que les haïr, c’est se plonger dans les ténèbres. Les destinataires de la lettre peuvent comprendre ce message parce que tous, jeunes et vieux, ils ont fait l’expérience du pardon et remporté la victoire sur le mal. Que cette victoire soit toujours plus complète. Séparons-nous d’un monde destiné à périr avec tout ce qu’il renferme.
Deuxième morceau (1 Jean 2.18-29) Les Antéchrists
La dernière heure est venue. Nous le reconnaissons au fait que des antéchrists se sont élevés du milieu des croyants, parmi lesquels ils étaient dissimulés, faux docteurs qui nient que Jésus soit le Christ et ne reconnaissent pas en lui l’authentique Fils de Dieu. L’onction divine que nous avons reçue, le Saint-Esprit, qui nous éclaire et nous dirige, nous permet de les discerner et nous pousse à les éviter.
Troisième morceau : (1 Jean 3.1 ; 1 Jean 3.24) Enfants de Dieu
Voilà la dignité à laquelle Dieu nous a promus, dignité présentement voilée, mais qui sera bientôt mise en pleine lumière. C’est pourquoi, vivons conformément à notre vraie nature. Fuyons le péché ; car pécher, c’est désobéir à Celui que nous appelons notre Père, c’est transgresser sa loi, c’est se séparer de lui ; quiconque pèche se range du côté du diable ; quiconque est véritablement né de Dieu ne peut, moralement, s’opposer à lui. Et surtout, aimons nos frères, enfants de Dieu comme nous ; n’imitons pas Caïn, le meurtrier ; suivons plutôt l’exemple de Celui qui s’est donné pour nous ; ne nous contentons pas de bonnes paroles et accomplissons des actes de véritable charité. Nous saurons par là que nous sommes dans la vérité, qu’aucune barrière ne nous sépare de Dieu, que nous pouvons regarder à lui avec une pleine confiance et tout lui demander.
Quatrième morceau : (1 Jean 4.1 ; 1 Jean 4.8) Les faux docteurs
L’auteur revient à son deuxième thème. Il y a dans l’Église de faux docteurs ou de faux prophètes, reconnaissables à ceci qu’ils ne confessent pas Jésus-Christ et nient l’incarnation. Ils sont du monde et le monde les écoute ; le croyant, né de Dieu et qui connaît Dieu, refuse de les suivre.
Cinquième morceau : (1 Jean 4.7-21) Aimons-nous
L’amour est pour le croyant le devoir suprême, car Dieu est amour ; il l’a prouvé en envoyant son Fils ici-bas en victime expiatoire pour nos péchés. C’est bien ce que nous avons compris comme croyants et ce qui nous donne une pleine assurance en Dieu, assurance qui n’est fondée que si, en apprenant à aimer Dieu, nous avons appris aussi à aimer nos frères.
Sixième morceau : (1 Jean 5) La foi en Jésus
Croire que Jésus est le Christ, c’est être né de Dieu ; c’est avoir appris de lui à garder ses commandements, à aimer ses frères et à éviter le péché. Ce Christ, venu à la fois avec l’eau du baptême et le sang de son sacrifice, est, en nous, l’objet d’une attestation divine, qui nous le fait reconnaître et nous engendre à la vie éternelle. Forts de cette assurance, prions, intercédons pour nos frères, surtout pour ceux que le péché met en danger ; tenons-nous à l’écart du péché, auquel nous avons définitivement renoncé ; restons en relation étroite avec Jésus, la véritable, l’unique source de la vie, et « gardons-nous des idoles ».
Et d’abord, est-ce bien une lettre ? Elle n’en a pas les caractères habituels, puisqu’elle ne porte ni adresse, ni signature, ni salutations et qu’on n’y remarque aucune de ces allusions personnelles ou familières qui sont le trait distinctif du genre épistolaire. Plusieurs savants, frappés de l’absence de ces indices, en ont conclu qu’il fallait voir dans cet écrit une sorte d’homélie ou de manuel pratique destiné à accompagner et à compléter l’Évangile, ou même un traité polémique dirigé contre les erreurs morales ou doctrinales qui commençaient à se répandre dans l’Église. Mais la liberté et la simplicité du langage, l’emploi répété d’expressions comme : Je vous écris, Je vous ai écrit, la fréquence des appels et surtout l’intimité des rapports qui existent, on le sent, entre l’auteur et les lecteurs, font plutôt penser à une lettre. Il y a, du reste, toutes sortes de lettres ; et celle-ci paraît avoir été adressée moins à un groupe d’individus dont chacun eût été personnellement connu de l’écrivain qu’à l’ensemble des chrétiens d’une région où l’Évangile devait avoir fait déjà d’assez nombreuses conquêtes. Sans remonter nécessairement à une très haute antiquité, l’appellation d’épîtres catholiques (voir ce mot), ou générales, sous laquelle on rangea longtemps les lettres de Jacques, de Pierre, de Jean et de Jude et que la version d’Ostervald a continué à reproduire jusqu’à une époque toute récente, correspondait pleinement à la réalité.
Où devons-nous chercher la collectivité chrétienne à laquelle 1 Jean fut tout d’abord destiné ? Le fait que l’épître est écrite en grec ne nous est d’aucun secours pour répondre à cette question, puisqu’au Ier siècle de l’ère chrétienne la langue grecque était comprise dans la plupart des provinces du vaste empire romain. Mais l’étroite parenté qui existe indubitablement entre l’Évangile et l’épître a fait conclure d’une façon toute naturelle que celle-ci fut, elle aussi, écrite en Asie Mineure et, selon toute vraisemblance, à Éphèse, l’Asie Mineure étant, au surplus, à la fin du Ier siècle, la seule région où la population chrétienne eût déjà une certaine densité. C’est, du reste, dans un écrit originaire d’Asie Mineure, la lettre aux Philippiens de Polycarpe, évêque de Smyrne, que nous percevons le premier écho de 1 Jean : « Quiconque ne confesse pas Jésus-Christ venu en chair est un antéchrist » (Polycarpe, ad Php 7, cf. 1 Jean 4.3). On sait aussi par Eusèbe (Histoire ecclésiastique, III, 39) qu’un contemporain de Polycarpe, Papias, évêque d’Hiéra-polis, faisait usage du témoignage des lettres de Jean et de Pierre. Enfin, et ceci nous paraît un indice des plus certains, tout porte à croire que l’hérésie combattue dans l’épître était celle d’un certain Cérinthe, qui habitait à Éphèse à la fin de l’âge apostolique et que, s’il faut en croire la tradition, l’apôtre Jean aurait redouté à l’égal d’un ennemi personnel (voir article précédent, paragraphe II).
Une question plus importante pour l’intelligence de l’épître est celle de l’état spirituel et moral et des besoins de la collectivité chrétienne en vue de laquelle elle a été écrite. Les exhortations de l’auteur nous permettent de nous en faire une idée assez précise et les points suivants nous paraissent mériter d’être relevés.
Il ne se nomme nulle part, pas plus que les lecteurs ne sont désignés comme habitants de telle ou telle ville ou de telle ou telle province. Mais il se révèle, lui aussi, par un certain nombre de traits qu’il est assez facile de dégager.
Au reste, les négations ou les hésitations auxquelles nous venons de faire allusion sont de date récente ; l’antiquité chrétienne n’a jamais mis en doute l’origine johannique de cette lettre, qu’Eusèbe (IVe siècle) et Jérôme (Ve siècle), les deux hommes les mieux informés sur ces sujets dans l’ancienne Église, rangent sans hésiter parmi les livres reconnus de tous ; elle a sa place dans toutes les versions antiques, et l’important document connu sous le nom de canon de Muratori, qui énumère les livres dont la lecture publique était autorisée dans l’Église de Rome vers l’an 170, la mentionne expressément comme l’œuvre de Jean et reconnue, à ce titre, par l’Église dans son ensemble. La date de la composition ne peut être déterminée avec précision ; nous ne nous écartons sans doute pas de la vérité en la plaçant entre l’an 80 et l’an 90.
L’épître de Jean, dans sa brièveté, est un des livres capitaux du Nouveau Testament. En dépit de quelques passages obscurs qui font le tourment des exégètes (1 Jean 2.8 : « Ce qui est vrai en lui et en vous », 1 Jean 2.19 ; 1 Jean 3.20 ; 1 Jean 5.7 ; 1 Jean 5.16), elle expose avec une lumineuse simplicité et une chaleur persuasive les éléments essentiels de la piété chrétienne. Elle nous rappelle, d’abord, que celle-ci est, dans son principe, une vie, que cette vie naît du rapport personnel qui s’établit entre nous et le Christ par la foi, et qu’elle s’entretient dans la mesure où, par une obéissance de tous les instants, nous demeurons dans la communion de notre Sauveur et de Dieu, son Père et notre Père (cf. Évangile Jean 20.17). Elle nous remet en mémoire, en second lieu, qu’il y a en Dieu deux aspects fondamentaux, l’amour et la sainteté, aspects que l’homme est toujours tenté de séparer, mais qui, en Dieu, sont indissolublement unis. Dieu est amour : de toutes les déclarations frappantes que contient cette épître, celle-ci est assurément la plus connue et la plus fréquemment citée. Elle nous introduit réellement au cœur même de l’Évangile : ce n’est pas nous qui avons cherché Dieu et l’avons aimé les premiers : « c’est lui qui nous a aimés et a envoyé son Fils en victime expiatoire pour nos péchés » ; (épître 1 Jean 4.10) croire à l’amour de Dieu, voilà notre privilège et notre premier devoir. Mais la prédication de l’amour de Dieu peut être mal comprise ; et elle devient dangereuse dès qu’elle a pour effet de diminuer notre vigilance et de nous bercer de l’espoir que le pardon finira toujours par nous être accordé. C’est pourquoi l’apôtre ne cesse de rappeler que le Dieu amour est aussi le Dieu lumière, c’est-à-dire sainteté, qu’il s’oppose à tout ce qui est mal et ne peut tolérer chez les siens aucun compromis avec le péché. Aussi, pas de sécurité illusoire, pas d’assurance en dehors d’une obéissance fidèle aux commandements de Dieu ; quiconque demeure volontairement dans le péché se sépare de Dieu et se replace sous la condamnation. L’épître nous redit, en troisième lieu, que le rapport qui nous unit à Dieu, rapport qui, considéré psychologiquement/du point de vue humain, s’appelle la foi et, considéré du point de vue divin, s’appelle le don ou l’onction du Saint-Esprit, a pour effet de nous séparer des autres hommes et aussi de nous unir à eux : de nous séparer d’eux, et de la façon la plus radicale, dans la mesure où ils sont eux-mêmes opposés à Dieu et appartiennent à un monde qui lui résiste et le combat ; de nous unir à eux, et de la façon la plus étroite, parce que, malgré tout, Dieu les aime et, quand il s’agit de croyants, parce qu’ils sont devenus nos frères et sont entrés comme nous dans la famille des enfants de Dieu ; nous les aimons non seulement en paroles, mais en effet et en vérité (1 Jean 3.18), et l’intercession est la manifestation suprême de l’intérêt que nous leur portons (1 Jean 5.16 et suivant). Il découle de là — et c’est la quatrième leçon que l’épître nous inculque — que les deux attributs fondamentaux du Père, l’amour et la sainteté, doivent se retrouver chez ses enfants. Ceci ne signifie pas seulement qu’amour et sainteté constituent l’idéal vers lequel nous tendons théoriquement, mais qui, pratiquement, nous demeure inaccessible ; Jean ne se lasse pas de répéter que la vie chrétienne est une vie de victoire, victoire sur l’égoïsme ou, comme il dit dans son langage absolu, la haine, victoire sur le monde et ses convoitises. « Tout ce qui est né de Dieu est victorieux du monde ; et la victoire par laquelle le monde est vaincu, c’est notre foi » (1 Jean 5.4). « Quiconque aime, est né de Dieu et connaît Dieu » (1 Jean 4.7). « Quiconque est né de Dieu ne pèche point ; mais celui qui est né de Dieu se garde lui-même et le Malin ne le touche point » (verset 18). Ces déclarations massives ne signifient du reste pas qu’aux yeux de Jean le péché soit mort en nous et que toute rechute soit impossible ; (cf. 1 Jean 1.8-2.2) elles affirment seulement, mais elles affirment avec une grande force, que l’empire du péché est brisé en nous et que nous pouvons lutter contre lui avec la certitude de le vaincre.
Nous n’avons pas épuisé par là les enseignements de l’épître ; ce qui précède suffit cependant à justifier l’assertion de l’apôtre que, sans apporter à ses lecteurs autre chose que ce qu’ils ont entendu dès le commencement, il leur communique pourtant quelque chose de nouveau. Il ne dit que ce qu’ils ont entendu de la bouche de ceux qui leur ont annoncé l’Évangile (Saint Paul, en particulier) ; mais il le dit sous une forme rajeunie, avec d’autres termes et un autre accent, de manière à donner à son message un aspect original et nouveau. C’est ce qui fait que nous aussi, après dix-neuf siècles de christianisme et après avoir entendu Pierre, Jacques et Paul, nous avons tout intérêt à prêter l’oreille au témoignage à la fois ancien et nouveau de Jean.
Notons en terminant que les éditions récentes du Nouveau Testament omettent dans 1 Jean 5.7 et suivant l’énumération des trois témoins célestes : le Père, la Parole et l’Esprit (voir une ancienne traduction). Ces mots sont une glose introduite dans l’épître pendant les luttes christologiques du IVe siècle.
Nous réunissons ces deux épîtres, que l’on a appelées avec raison des épîtres jumelles et que nous ne pourrions traiter séparément sans nous répéter.
Est un billet adressé par « l’Ancien » à « la dame élue » (grec Kyria, l’élue) et à ses enfants, qu’il aime d’une affection sincère et dont la fidélité à l’Évangile le remplit de joie. L’auteur désire, d’une part, rappeler à ses lecteurs le commandement de l’amour fraternel, qui vient du Père et qu’ils ont reçu dès le commencement, et, plus encore peut-être, les mettre en garde contre des séducteurs qui « ne confessent pas que Jésus-Christ est venu en chair », autrement dit qui ne croient pas à la réalité de l’incarnation ; c’est à ce signe qu’on reconnaît l’Antéchrist ; accepter cet enseignement, c’est quitter le terrain de la foi, c’est se séparer du même coup du Christ et de Dieu ; aussi ne faut-il avoir aucun rapport avec ceux qui propagent cet enseignement ; on ne doit ni les accueillir dans sa demeure, ni même les saluer. L’auteur en dira davantage à sa prochaine visite ; en attendant, il salue la destinataire de sa lettre de la part des « enfants de sa sœur, l’élue ».
Est également un simple message adressé par « l’Ancien » à « Gaïus, le bien-aimé ». L’auteur, en souhaitant à son ami que sa santé prospère à l’égal de son âme, le loue du témoignage qui lui a été rendu par des frères arrivés récemment et qui ne peuvent guère être que des évangélistes itinérants auxquels il a accordé une généreuse hospitalité. L’attitude de Gaïus est heureusement bien différente de celle de Diotrèphe, qui veut être le premier partout, qui sème la défiance à l’égard de l’auteur de la lettre et qui, non content de ne pas recevoir les frères, empêche aussi les autres de le faire. Il faut se garder de suivre un tel exemple. Il n’y a par contre que du bien à dire de Démétrius. Comme dans le billet précédent, l’auteur espère avoir prochainement l’occasion de s’entretenir oralement avec son ami des sujets qu’il vient d’aborder en peu de mots.
Il n’est guère possible de lire ces deux lettres sans être frappé de leur ressemblance -extrême, dans le fond comme dans la forme, et de leur parenté tout aussi grande avec 1 Jean ; la situation générale est la même : l’hérésie et les divisions ont fait leur apparition dans l’Église ; le vocabulaire est identique (connaître la vérité, rendre témoignage, commandement nouveau, Jésus-Christ venu en chair, avoir le Père et le Fils, etc.) ; enfin, le nom que prend l’auteur de 2 et 3 Jean : « l’Ancien », dans le double sens de vieillard et de chef d’une communauté ecclésiastique, correspond pleinement à la position qu’avait l’apôtre Jean parmi les églises d’Asie Mineure.
Mais qui étaient les destinataires de ces deux billets ? C’est surtout à propos de 2 Jean que la question se pose. Le terme Kyria peut être un nom propre, ou un nom commun ayant le sens de dame ; mais ce mot étant le féminin de Kyrios, signifiant : Seigneur, peut tout aussi bien être la désignation symbolique d’un groupe de disciples ou d’une Église ; l’emploi de la 2e personne du pluriel dans les versets 6,12 nous paraît favorable à cette hypothèse ; si l’on s’y range, il faut voir dans « les enfants de ta sœur, l’élue », que mentionne le verset 13, les membres de l’Église où séjourne l’auteur de la lettre. Il y a peut-être entre ces deux écrits le même rapport qu’entre Colossiens et Philémon : le premier s’adressant à la communauté dans son ensemble, le second à l’un de ses membres les plus influents.
En raison de leur brièveté et de leur caractère particulier, ces deux lettres ne se sont répandues que lentement dans l’Église. Eusèbe, au début du IVe siècle, les range tantôt parmi les écrits contestés et tantôt parmi les écrits généralement admis. À notre avis, elles sont inséparables de 1 Jean et procèdent de la même main. Notons cependant que Jérôme parmi les Pères, Érasme au temps de la Réforme et de nombreux critiques contemporains attribuent les deux billets à Jean l’Ancien d’Éphèse dont Papias fait mention. Il faut reconnaître que ces deux courts écrits, si proches de la grande épître par le style et la théologie, en diffèrent par le ton : la grande épître est toute tournée vers le ciel, on y sent l’œuvre d’un vieillard déjà détaché des soucis de la terre, tandis que les deux billets nous ramènent en pleine lutte et nous introduisent dans tous les soucis de la vie ecclésiastique.
AUG. TH.
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