Le nom grec Ecclesia signifie assemblée ; il se prend et pour le lieu de l’assemblée, et pour les personnes qui s’assemblent. On le trouve employé pour marquer une assemblée profane, et pour une assemblée sacrée et de religion.
Dans les livres de l’Ancien Testament, Ecclesia se prend quelquefois pour la société des Juifs, par exemple (Nombres 20.4) « pourquoi avez-vous fait venir l’assemblée, le corps, la multitude du peuple de Dieu dans le désert ? » Et ailleurs (Deutéronome 23.1-3) : L’eunuque, le bâtard, l’Ammonite et le Moabite n’entreront pas dans l’Église du Seigneur : on ne les recevra pas dans le pays, on ne pourra ni se marier avec eux, ni leur permettre de demeurer au milieu du peuple ; ou bien, on ne les recevra pas comme prosélytes pour professer la religion du Seigneur. Cela marque un souverain éloignement, un extrême mépris pour ces sortes de gens : on les regarde comme des profanes, avec lesquels on ne veut pas que les Hébreux aient aucun commerce, ni pour le sacré, ni pour le civil.
Mais, à l’égard des Iduméens et des Égyptiens, Moïse leur permet d’entrer dans l’Église du Seigneur après la troisième génération (Deutéronome 23.8) ; c’est-à -dire, si un Égyptien ou un Iduméen s’habitue dans le pays, et y veut être prosélyte de domicile, ses enfants pourront, après la troisième génération, épouser une femme israélite, et participer aux prérogatives des Hébreux ; ou autrement, si un Hébreu épouse une femme iduméenne ou égyptienne, ses enfants ne pourront être regardés comme vrais Israélites qu’à la troisième génération : ils ne pourront épouser une Israélite, et avoir entrée dans le temple et dans les emplois publics.
L’Église se prend aussi pour la communion de société et de prières du peuple de Dieu. Être exclu de l’Église, signifie l’excommunication. Par exemple, il est dit que celui qui, après avoir touché un mort, ou assisté à des funérailles, ne se sera pas purifié avec l’eau lustrale, où l’on jetait de la cendre d’une vache rousse immolée à cet effet (Nombres 19.20-21), sera exterminé de l’assemblée du Seigneur, parce qu’il a profané son sanctuaire : il sera excommunié et exclu de l’assemblée d’Israël ; il sera regardé comme un profane et un incirconcis. Les rabbins entendent cela de la mort du corps, d’une mort prématurée, ou d’une mort violente ; ou de la mort de l’âme, ou de l’un et de l’autre, selon la gravité du crime, et l’importance de la matière.
L’Église se met aussi pour le lieu saint, le tabernacle, le temple, ou la synagogue, où le peuple du Seigneur s’assemblait. Les anciens d’Israël firent leur prière dans l’église, ou la synagogue de Béthulie. Et le Psalmiste (Psaumes 22.25, 26) : Je vous louerai dans l’église ; je publierai vos louanges dans l’église des saints ; dans une grande église, c’est-à -dire dans le temple, où les saints, les Israélites, et enfin tout le peuple s’assemblent.
L’Église se met pour la société des fidèles, qui ont conservé le dépôt de la vraie religion, depuis le commencement du monde jusqu’à aujourd’hui, et qui la conserveront jusqu’à la fin des siècles. Moïse nous a conservé la succession de cette Église, depuis le commencement du monde jusqu’à son temps, et depuis Moïse jusqu’à la venue de Jésus-Christ, nous avons les livres sacrés des Hébreux, et leurs histoires, qui nous apprennent les différentes révolutions qui sont arrivées dans la religion parmi les Israélites. Adam instruisit ses fils de la vraie religion ; mais bientôt la corruption des mœurs se glissa dans sa famille : on vit se former deux Églises, l’une composée des enfants de Dieu descendus de Seth, et l’autre composée des enfants des hommes sortis de la race de Caïn. L’une et l’autre se continua jusqu’au déluge : après le déluge, Noé inspira à ses fils les sentiments de religion dont il était rempli : mais on ne sait jusqu’à quand ils la conservèrent.
Moïse nous conduit depuis Sem jusqu’à Abraham, père des fidèles ; mais il ne nous dit point si la vraie religion se conserva dans les descendants de Cham et de Japhet, ni jusqu’à quel temps elle y subsista. Mais, d’un côté, nous voyons que les aïeux d’Abraham adoraient les idoles dans la Chaldée (Genèse 20.3-5), et de l’autre, nous savons que la crainte du Seigneur n’était pas entièrement bannie de la Palestine et de l’Égypte, lorsque Abraham y arriva, puisque le roi de Gérare craignait le Seigneur, et avait horreur du crime, de même (Genèse 12.17 ; 18) que le roi d’Égypte. Le grand prêtre Melchisédech est encore une preuve de ce que nous venons de dire (Genèse 14.18). Le même Abraham s’imaginait qu’il y avait au moins dix ou vingt justes dans Sodome (Genèse 18.23-25). Depuis Abraham jusqu’à Jésus-Christ on trouve une succession suivie de la vraie Église parmi les Juifs et les autres descendants de ce patriarche ; car il est très-croyable que les fils d’Abraham par Agar et par Céthura conservèrent aussi pendant quelque temps le dépôt de la foi qu’ils avaient reçu de leur père. Job, un des descendants d’Ésaü, et ses amis connaissaient le Seigneur. Les Ammonites et les Moabites, descendus de Loth, ne tombèrent pas apparemment tout d’un coup dans l’idolâtrie, où nous les voyons déjà sous Moïse.
Les Ismaélites, fils d’Abraham et d’Agar, se vantent d’être toujours demeurés attachés au culte du vrai Dieu, et d’avoir étendu sa connaissance dans l’Arabie, comme Isaac dans la Palestine. Nous ne les en croyons pas sur leur parole ; car, il est certain que du temps de Mahomet, et longtemps auparavant, ils avaient quitté la vraie foi ; mais il est impossible de marquer au juste l’époque de leur perversion. Quant aux descendants d’Isaac, on a des preuves indubitables que, malgré tant de révolutions arrivées dans leur nation, malgré les fréquentes prévarications de la plupart de leurs princes, et les infidélités presque continuelles de la plupart des Israélites, le Seigneur a toujours été connu parmi eux, et que Dieu s’y est toujours réservé un bon nombre de vrais adorateurs ; et qu’enfin c’est dans Israël qu’il faut chercher la vraie Église, jusqu’à la formation de l’Église de Jésus-Christ.
Dans les livres du Nouveau Testament on l’emploie d’ordinaire pour l’Église de Jésus-Christ, qui est l’assemblée des fidèles, qui, sous la conduite des pasteurs légitimes, ne font qu’un même corps, dont Jésus-Christ est le chef. On la prend aussi pour les Églises particulières, comme celles de Corinthe, d’Éphèse, de Thessalonique, et ainsi des autres. [Ces églises particulières et primitives ont été, ainsi que plusieurs autres, fondées par les apôtres. Voyez mon addition au mot Apôtre].