En hébreu Bath-Kol ou fille de la voix. C’est le nom que les auteurs Juifs (Talmud Sotha chapitre 9 p. 48) donnent à la révélation que Dieu a faite de sa volonté au peuple choisi, depuis que la prophétie verbale a cessé dans Israël ; c’est-à-dire, depuis les prophètes Aggée, Zacharie et Malachie. C’est sur cette fille de la voix qu’ils fondent la plupart de leurs traditions, et des usages de leur nation. Ils prétendent que Dieu les a révélés à leurs anciens, non par une prophétie articulée, ni par une inspiration secrète, mais par une révélation qu’ils appellent la fille de la voix.
Les rabbins reconnaissent dans leur nation trois manières de prophéties. La première par le moyen de l’Urim et Thummim, qui faisait entendre sa voix du fond du sanctuaire, ou du pectoral du grand-prêtre : la seconde par l’esprit de prophétie qui inspira les prophètes, tant avant la Loi, que depuis Moïse : la troisième par la fille de la voix, Bath-Kol.
La première a duré, selon eux, depuis la construction du tabernacle jusqu’à celle du temple. La seconde depuis le commencement du monde, jusqu’à la mort de Malachie, le dernier des prophètes, sous le second temple, quoique son usage le plus fréquent ait été sous le premier temple. La troisième commença après Malachie, et a subsisté jusqu’aujourd’hui dans leur nation.
Ils prétendent que la fille de la voix est une voix du ciel, qui se fait entendre d’une manière articulée, de même à-peu-près que la voix qui appela le jeune Samuel, lorsque Dieu lui révéla ce qui devait arriver au grand-prêtre Héli et à sa famille : Dieu l’appela par une voix articulée jusqu’à trois fois (1 Samuel 2.4-5). Samuel répondit comme il aurait fait à un homme ne sachant pas encore distinguer la voix du Seigneur ; ou la fille de la voix ressemble à celle qui sortait du sanctuaire, lorsque Dieu parlait à Moïse, ou qu’il répondait au grand-prêtre qui le consultait par l’Urim et Thummim. Ces deux sortes de voix étaient comme la mère de cette autre voix qui lui succéda, et qu’on appela Bath-Kol, fille voix, ou fille de la voix, parce qu’elle était comme la fille de cette première voix : c’était une manière d’inspiration bien moins parfaite, mais néanmoins aussi certaine que la première.
Mais il y aurait de l’erreur à s’imaginer que la révélation de Bath-Kol se fit toujours par une voix articulée venue du ciel, et entendue distinctement par ceux à qui Dieu faisait connaître ses volontés par ce canal. On ne peut pas même assurer que les anciens prophètes entendissent des voix articulées, lorsque la parole de Dieu se faisait entendre à eux. Il suffit de croire que c’était une parole intérieure, une inspiration, un mouvement, une lumière qui les pénétrait, et leur faisait connaître d’une manière vive et lumineuse ce que Dieu voulait qu’ils annonçassent aux hommes. Ainsi à proportion lorsque Dieu manifestait ses volontés par la fille de la voix, ou il le faisait par une voix articulée et entendue distinctement, ou par une vive impression dans l’imagination ou dans l’esprit, ou enfin par une voix entendue au hasard, et que l’on prenait comme un oracle venu du ciel.
En voici un exemple tiré du Talmud. Deux rabbins ayant envie d’aller voir leur ami, le rabbin Samuel, docteur de Babylone, dirent : Suivons ce que nous en dira Bath-Sol ; en passant près d’une école, ils entendirent un jeune garçon qui lisait ce passage du premier livre des Rois (1 Samuel 25.1) : Et Samuel mourut. Ils en conclurent que Samuel était mort : l’événement justifia ce qu’ils avaient pronostiqué, car on trouva alors que le rabbin Samuel, de Babylone, était décédé. On pourrait en citer plusieurs autres exemples de même espèce, répandus dans les livres des Juifs. Ces oracles casuels et bizarres étaient considérés comme des voix envoyées de Dieu, de même à-peu-près que pendant plusieurs siècles on s’est servi dans l’Église des premières paroles qui se lisent dans un livre ouvert à l’aventure, pour en tirer des présages pour l’avenir.