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Haig
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

Ce nom ne se trouve point dans la Bible ; mais, suivant les historiens de l’Arménie, il tient de fort près à des noms bibliques. Dans notre addition au mot Arménie, Haïg est déjà présenté comme le fondateur de cette nation ; ce qui en a été dit est dû à M. Eugène Boré, et c’est encore à ce savant orientaliste que nous allons emprunter ce qu’on va lire ici.

Vingt-deux siècles avant notre ère, dit-il, Haïg, fils de Thaglath, qui est le même que Thorgom, fils de Japhet, sortit de la Babylonie, et vint, à la tête d’une colonie nombreuse, se fixer dans les plaines qui avoisinent le mont Ararát. Il prit possession de ce territoires et voulut en être le maître indépendant ; mais Bélus, roi d’Assyrie, dont il avait fui la domination arbitraire, et qui voyait avec peine ce chef de tribu échapper à son autorité, voulut le soumettre, et il vint lui présenter bataille près du lac de Van. La cause juste triompha ; Bélus fut tué de la main d’Haïg, et la nouvelle colonie resta maîtresse du pays. Mais écoutons l’historien Jean nous raconter ces mêmes événements, qu’il résume, avec le mérite qui le distingue, dans la première partie de son travail.

« Le troisième patriarche, après Japhet, engendra trois fils, Askanaz, Riphad et Thorgom ; et, comme il possédait en propre et personnellement le pays des Thraces, il jugea convenable de partager en trois lots ce royaume et ses autres possessions, pour les donner en héritage à ses trois fils ; testament qui reçut son exécution. Ainsi il donna la Sarmatie à Askanaz, qui d’abord avait imposé son nom à notre nation ; Riphad reçut le pays des Saramades ; et quant à Thorgom, s’étant approprié par la suite l’Arménie et en étant devenu le souverain, il conserva le nom de sa dynastie à ce royaume, qui portait jusqu’alors celui d’Askanaz. Ainsi retenez bien que nous descendons à la fois d’Askanaz et de la maison de Thorgom ; c’est le moyen de croire à l’authenticité des traditions concernant les premiers chefs de notre nation, bien que quelques-uns adoptent sur ce point une opinion différente. »

Les saintes lettres gardent un silence absolu jusqu’aux temps antérieurs à Thorgom, et, pour la suite, elles n’ont pas jugé convenable de faire connaître l’origine, la succession et l’état de ses descendants, ni de nous énumérer tous les rois d’Arménie, ou de nous dire comment elle fut régie ultérieurement par des satrapes.

Mais un certain homme, Syrien de nation, nommé Maribas Catina, fut, par l’ordre de notre roi Vagarschag, visiter les archives des rois de Perse. Étant plein d’intelligence et de sagacité, et versé dans les lettres chaldéennes et grecques, il y découvrit, après de longues recherches, un livre authentique, qu’Alexandre, fils de Nectanèbe, avait fait traduire du chaldéen en grec. Bien qu’il renfermât beaucoup de renseignements sur l’histoire de plusieurs autres peuples, Mar-Abbas les laissa de côté, comme étrangers à son travail, et, recueillant uniquement ce qui concernait notre nation, il vint le présenter à Vagarschag.

Grâce à lui, notre histoire a été connue et a acquis une authenticité indubitable. Ainsi nous apprenons que le beau et vaillant héros Haïg, à la stature gigantesque, était fils de Thorgom, qu’il fat le premier chef et le père de notre nation l’histoire nous enseigne encore que, de concert avec la race primitive des géants, il travailla à la construction de la tour, monument colossal de l’orgueil, que les hommes, dans leurs pensées extravagantes, imaginaient pouvoir achever ; mais, suivant le récit des saintes Écritures, un vent terrible souffla, par la permission de Dieu, contre cette tour et la renversa, mettant ainsi à nu l’impuissance de leur travail.

Peu après, Nembrod, qui est le même personnage que Bel, homme fier et entreprenant, veut, en s’élevant démesurément, dominer sur toute la race des géants.

Mais notre robuste Haïg ne courbe pas la tête, et se soustrait à son obéissance. Il marche rapidement vers notre pays avec Armenag, son fils, qu’il avait eu à Babylone, et suivi de ses filles, de ses petits-fils, de ses domestiques et des autres étrangers attachés à sa personne. Or Nembrod, ou autrement Bel, le suivait avec ses soldats, hommes habiles à tirer l’arc et à manier l’épée et la lance. Ils se rencontrèrent dans une vallée vaste et unie, comme deux torrents furieux qui se précipitent avec fracas ; aussi leur duel jetait-il dans toutes les âmes le tremblement et une terreur profonde. Mais du long arc de notre Haïg part un trait au fer triangulaire, qui transperce la cuirasse d’airain de Nembrod au défaut de l’épaule, et va s’enfoncer ensuite dans la terre. Haïg, ayant donc tué Bel, régna sur le pays que lui avaient légué ses pères, et, de son nom, il l’appela Haik. Il s’occupa de régler ses États, et, après avoir vécu encore plusieurs années, il mourut, transmettant son royaume à son lits Armenag.

Or Armenag, unique et paisible possesseur de l’Arménie, fixa sa résidence dans une plaine, d’un aspect agréable, laquelle était environnée d’une muraille de hautes montagnes à la cime neigeuse, et qui était arrosée par des rivières dont les eaux murmurantes la coupaient en s’infiltrant dans les terres, et la traversaient dans toute sa longueur. S’étant ensuite bâti une ville près de la montagne située au nord, il l’appela de son nom Arakadj ; et la plaine qui s’étend à ses pieds prit celui d’Arakadzoden. Il eut pour fils Armaïs ; et, après avoir encore vécu quelques années, il mourut.

C’est dans cette même plaine, où se trouve une petite colline près des bords de l’Araxe, qu’Armaïs bâtit une ville et un palais, ouvrage qui fut admirablement exécuté avec des pierres d’une grande solidité. Il appela la ville Armavir. Les autres anciens historiens ont suffisamment raconté tous les exploits de sa bravoure. Il était déjà assez avancé en âge lorsqu’il engendra Amasia ; et après il vécut encore quelque temps, et mourut.

Amasia s’établit dans cette même ville d’Armavir, et fit des constructions au pied de la montagne située au midi, qu’il appela de son nom Masis ; toute la plaine qui s’étend alentour prit celui de Masisoden. Après, quelques années, il engendra Kegham, puis il termina ses jours.

Kegham vint s’établir sur le côté nord-est d’un petit lac ; et, y ayant bâti des villages et des fermes, il appela de son nom la montagne Kegham ; et le bord du lac où il avait fait ces établissements prit le nom de Kerarkouni. Il eut deux fils, Harma et Sisag. Il assigna Armavir pour résidence à son fils Harma, lequel fut chargé de l’administration du royaume de son père. Quant à Sisag, il eut pour sa part le pays qui s’étend du bord du lac au sud-est, jusqu’à la plaine que traverse l’Araxe, dont les eaux rapides et tournoyantes se précipitent avec fracas par l’ouverture étroite et resserrée d’une caverne ; d’où vient que plusieurs ont nommé ce lieu Karavagh. Kegham bâtit ensuite un bel et vaste édifice, qui, d’abord nommé Keghami, fut appelé ensuite Quarni par le prince Quarnig, puis il mourut. Son fils Harma engendra Aram, et mourut aussi.

« On raconte d’Aram un grand nombre de faits glorieux. Sa valeur guerrière recula les frontières de l’Arménie dans toutes les directions ; et c’est à cause des actions illustres de ce héros que les nations voisines nous appellent de son nom Arméniens. Ce prince ne s’empara pas seulement des pays dont la conquête était facile, mais encore de la Cappadoce, qu’il soumit de vive force. »

Les Assyriens ne renoncèrent pas à leurs prétentions ; et la conquérante Sémiramis vint plus tard faire valoir ses droits l’historien Moïse de Khoren, dont nous avons déjà parlé, nous a transmis, sur cette expédition et sur les travaux exécutés par cette reine, des renseignements fort curieux que nous chercherions vainement chez tout autre auteur ancien. Bien que ce récit romanesque semble un fragment détaché de quelque ancien poème, nous avons cru qu’il pourrait intéresser le lecteur, à qui il donnera en même temps une idée de l’exposition historique et du style des meilleurs écrivains de l’Arménie.

Araméen : sa mort dans un combat contre sémiramis (Moïse de Khoren)

« Peu d’années avant la mort de Ninus Ara régit en maître sa patrie, obtenu de ce prince la même faveur qu’il avait accordée à son père Aram. Mais l’impudique et voluptueuse Sémiramis, qui depuis longues années avait entendu parler de sa beauté, brûlait de s’emparer de sa personne, sans toutefois rien oser entreprendre ouvertement. Or, après la mort ou plutôt après la fuite de Ninus dans l’île de Crète, comme je le crois, Sémiramis, donnant un libre cours à sa passion,  envoya près du bel Ara des messagers chargés de dons et de présents, et qui devaient employer la prière et la menace pour l’engager à venir à Ninive, soit pour l’épouser et régner sur tout le pays qu’administrait Ninus, soit seulement pour satisfaire son amour, et retourner ensuite paisiblement dans ses États, avec de, riches cadeaux. Comme les messages se répétaient sans qu’Ara donnât son consentement, Sémiramis entre en fureur, met fin aux négociations, et, à la tête de forces considérables, elle atteint, par ses marches forcées, le prince en Arménie. À en juger par les apparences, son intention n’était point de tuer ou de poursuivre Ara, mais bien de le soumettre et de l’amener par la force à consentir à ses impurs désirs l’ardeur de sa passion était telle, que, lorsqu’on parlait de lui, elle tombait dans le délire, comme si elle le voyait. Elle arrive donc précipitamment dans la plaine nommée Ararad, du nom d’Ara ; et, après avoir rangé ses troupes en bataille, elle recommande à ses généraux de prendre tous les moyens possibles pour conserver la vie au prince. Mais, lorsque le combat fut engagé, l’armée d’Ara fut battue, et il périt dans la mêlée de la main d’un des enfants de Sémiramis. Dans sa victoire, elle envoie sur le champ de bataille des hommes chargés de dépouiller les morts pour chercher, au milieu des autres cadavres, celui de son cher amant. Ils trouvèrent Ara parmi les braves qui avaient succombé, et elle fit porter son corps dans son palais. Comme les troupes des Arméniens, désireuses de venger la mort d’Ara, étaient venues attaquer la reine dans un second combat, elle dit :J’ai commandé aux dieux de lécher ses blessures et de le ressusciter. Plusieurs fois l’excès de sa passion la porta à recourir aux enchantements de la sorcellerie pour le rappeler à la vie. Lorsque le cadavre tomba en putréfaction, elle le fit jeter et cacher dans une grande fosse. Puis, tenant en secret un de ses favoris paré comme Ara, elle répandit ce bruit : Les dieux ont léché les plaies d’Ara ; il est ressuscité, et ils ont mis le comble à mes désirs. C’est pourquoi ils méritent désormais de recevoir les plus grands honneurs, puisqu’ils se sont montrés si propices à nos vœux. Elle éleva une nouvelle statue aux dieux, et l’honora en lui offrant beaucoup de victimes, voulant faire croire à tous que les dieux avaient ressuscité Ara. C’est en répandant ce bruit dans l’Arménie, et en l’accréditant parmi le peuple, qu’elle apaisa la guerre. »

La victoire de Sémiramis consolida la domination assyrienne ; et, jusqu’au renversement de cette grande monarchie, l’Arménie resta tributaire et dépendante. Lorsque Varbag, gouverneur de Médie, lequel n’est que l’Arbacès des Grecs, se souleva contre Sardanapale, Baroïr, souverain de l’Arménie, entra dans cette conspiration, et le fruit qu’il en retira fut de rendre à son pays sa première indépendance. Tigrane 1 Premier, contemporain de Cyrus, était un prince puissant ; et Xénophon nous dit que l’assistance qu’il prêta au fondateur de la nouvelle monarchie des Perses contribua directement à sa victoire sur Astyages, roi des Mèdes. Son fils Vahakn fut tellement renommé par sa force et ses exploits, qu’il occupe, dans les anciens chants nationaux, la place de l’Hercule des Grecs. Ses successeurs, jusqu’à Vahé, continuèrent d’administrer le pays, en reconnaissant la suzeraineté des rois de Perse. Mais les conquêtes d’Alexandre changèrent cet état de choses.

Hai
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