Les Hébreux emploient le mot de jouer pour marquer toutes sortes de divertissements, comme la danse, les jeux d’exercices, les badineries et les amusements propres à délasser l’esprit et à donner du plaisir. Le même terme hébreu zachak (a), qui signifie jouer, se prend aussi communément pour rire, se divertir, moquer, insulter. Sara ayant vu Ismaël qui se jouait avec son fils Isaac en fut indignée. C’était un jeu de moquerie, ou d’insulte, ou même de batterie, de même qu’au second livre des Rois (2 Samuel 2.14) : Que des jeunes gens, des soldats se lèvent et se jouent en notre présence, qu’ils se battent comme par manière de jeu. Mais la suite fait voir qu’ils se battirent très-sérieusement, puisqu’ils se tuèrent tous.
On voit une autre sorte de jeu dans l’Exode, lorsque les Israélites, ayant élevé le veau d’or, commencèrent à danser autour et à se divertir (Exode 22.6). Samson ayant été livré par Dalila entre les mains des Philistins, ils lui crevèrent les yeux, le mirent eu prison, et quelque temps après le firent paraître en leur présence, afin qu’il les divertit par les niches qu’ils lui feraient, et par les mouvements qu’il se donnerait pour les éviter, et pour se parer de leurs insultes (Juges 16.25).
Les femmes qui vinrent au-devant de David et de Saül victorieux après la mort de Goliath dansaient et jouaient des instruments, et témoignaient leur joie de mille manières (1 Samuel 18.6-7). David, dans la cérémonie du transport de l’arche de la maison d’Obédédom dans son palais, dansait de toutes ses forces, jouait des instruments, et témoignait sa joie devant le Seigneur (2 Samuel 6.5-22). Et lorsque Michal lui reprocha qu’il n’avait pas gardé la gravité et la bienséance convenables à son rang, il lui répondit : Je jouerai, et je paraîtrai vil à mes propres yeux.
Sara, fille de Raguel, répandant son cœur devant le Seigneur, lui dit : Je ne me suis jamais mêlée avec celles qui jouaient (Tobie 3.17). Et Jérémie (Jérémie 15.17) : Je ne me suis pas trouvé dans l’assemblée de ceux qui se divertissaient et qui jouaient. Et le même prophète parlant à la fille de Sion, lui dit que le temps viendra qu’elle sera rebâtie de nouveau, et qu’elle ira se divertir dans les danses avec ses pareilles (Jérémie 31.4).
Salomon représente la Sagesse qui se joue devant le Seigneur, et qui prend son plaisir à vivre parmi les hommes (Proverbes 8.30-31). Baruch semble désigner le divertissement de la chasse de l’oiseau sous le nom de jeu (Baruch 3.17) : Où sont les princes des nations qui dominent sur les bêtes de la terre, et qui se jouent avec les oiseaux du ciel ?
Je ne vois dans l’Écriture aucune sorte de jeux particuliers, ni jeux de hasard, ni jeux de représentations sur les théâtres, ni de courses de chevaux ou de chariots, ni de combats d’hommes ou d’animaux. Salomon, qui avoue qu’il ne s’était refusé aucun plaisir, parle de rien de semblable : il ne parle que de beaux bâtiments, de jardins, de vignes, de vergers, de réservoirs d’eaux, de bonne chère, d’amas d’or et d’argent, de musiciens et de musiciennes etc. Dans la description d’une prospérité et d’une paix profonde, il ne parle ni de jeux ni de spectacles, mais seulement d’une terre bien cultivée et bien féconde, où chacun est en repos sous son figuier ou sous sa vigne, jouissant en assurance du fruit de ses travaux ; où les vieillards, assis dans les places publiques délibéraient sur les affaires communes, et où les jeunes gens se revêtaient d’habits de gloire et d’ornements propres à la guerre. Les Israélites étaient un peuple laborieux et belliqueux, qui bornaient presque tous leur jeux et leurs divertissements aux plaisirs champêtres, et à ceux qu’ils goûtaient dans les solennité du Seigneur, dans leurs voyages de religion et dans les repas qu’il prenaient dans le temple.
Je parle des temps où la loi était observée, et des anciens temps de la république des Hébreux, car lorsqu’ils se déréglaient, ils donnaient dans tous les plus grands excès des nations idolâtres, et se livraient à leurs jeux et à leurs divertissements impies et honteux.
Depuis le règne des Grecs, je veux dire depuis la mort d’Alexandre le Grand et la domination des rois de Syrie dans la Judée, ils commencèrent à prendre goût aux jeux d’exercices des Grecs. On vit dans Jérusalem des gymnases et des places où l’on s’exerçait dans toutes les sortes d’exercices des Grecs : la lutte, la course, le palet, etc. (1 Machabées 5.16 ; 2 Machabées 4.13-15), et les Romains ayant succédé aux Grecs, Hérode bâtit des théâtres et des amphithéâtres dans les villes de Palestine, et y fit représenter des jeux de toutes les sortes. On peut voir Josèphe et Vangenseil.