Fils d’Helcias ou de Chelcias, naquit à Babylone, durant la captivité. Il était, selon les uns, de la race des prêtres ; et, selon les autres, de la tribu de Juda, et de la famille royale. Ceux qui soutiennent le premier sentiment se fondent sur un passage des Machabées (2 Machabées 1.18-21), où il est dit que le prêtre Néhémie offrit des sacrifices. Et dans (Néhémie 10.1-10), il est encore compté au nombre des prêtres.
Mais ceux qui croient qu’il était de la race des rois de Juda, disent :
1° Que Néhémie ayant gouverné la république des Hébreux assez longtemps, il y a toute apparence qu’il était de la tribu qui avait jusqu’alors donné des rois aux Juifs.
2° Néhémie nomme ses frères Hanani et quelques autres Juifs qui arrivèrent à Babylone pendant qu’il y était, et qui lui racontèrent le triste état où était leur patrie.
3° La qualité d’échanson du roi de Perse que possédait Néhémie, est encore une preuve qu’il était d’une naissance illustre.
4° Enfin il s’excuse d’entrer dans l’intérieur du temple, apparemment parce qu’il n’était que laïque (Néhémie 6.11) : Un homme comme moi, dit-il, entrera-t-il dans le temple, sans qu’il lui en coûte la vie ?
Quant à ce que l’on a rapporté des Machabées, où il est nommé prétre, on répond que le texte grec ne porte pas le nom de prétre, mais seulement que Néhémie ordonna aux prêtres de faire leurs fonctions (2 Machabées 1.21). Quant à ce qu’on dit qu’il signe avec les prêtres, on répond qu’il le fait en qualité de chef et de gouverneur des Juifs ; ce qui lui donnait un rang ou égal, ou presqu’égal à celui des prêtres. Enfin on ne trouve le nom de Néhémie dans aucun catalogue, ni dans aucune généalogie des prêtres hébreux.
L’Écriture lui donne souvent le nom d’Athersata (Esdras 2.63 Néhémie 7.65), c’est-à-dire, l’Echanson, parce qu’il possédait cet emploi dans la cour du roi Artaxerxès à la longue main. Il avait pour la patrie de ses pères une très-grande tendresse, quoiqu’il ne l’eût jamais vue ; et un jour quelques Juifs, qui étaient venus de Jérusalem, lui ayant rapporté l’état où cette ville était réduite ; que ses murs étaient abattus et ses portes brûlées, et que les Juifs étaient l’opprobre des nations, il en fut très-sensiblement affligé ; il jeûna, il pria, il s’humilia devant le Seigneur, afin qu’il lui plût favoriser le dessein qu’il avait de demander au roi la permission de rebâtir Jérusalem (Néhémie 1.1-3). Le temps de son service étant arrivé, il présenta, selon sa coutume, la coupe au roi avec un visage morne et inquiet. Le roi en conçut du soupçon et craignit qu’il n’eût quelque mauvais dessein. Mais Néhémie lui ayant exposé le sujet de sa douleur, Artaxerxès lui accorda la permission d’aller à Jérusalem, et d’en réparer les murs et les portes ; à condition toutefois qu’il reviendrait à la cour dans un certain temps marqué. On lui fit expédier des lettres adressées aux gouverneurs de delà l’Euphrate, avec ordre à eux de lui fournir les bois nécessaires pour couvrir les tours et les portes de la ville, et la maison de Néhémie, qu’on établissait gouverneur de la Judée.
Néhémie arriva à Jérusalem (Néhémie 3.11-13) avec ces lettres et ces pouvoirs, et y fut trois jours sans rien dire à personne du sujet de son voyage. Mais la nuit du troisième jour, il fit le tour de la ville, et visita les murailles, pour savoir en quel état elles étaient. Après cela il assembla les principaux du peuple, leur montra ses pouvoirs et ses lettres, et les exhorta à entreprendre le rétablissement des portes et des murs de la ville. Il trouva tout le monde disposé à lui obéir ; et aussitôt on commença l’ouvrage. Les ennemis des Juifs, jaloux de ces heureux commencements, s’en raillèrent d’abord : mais enfin voyant que les principales brèches étaient réparées, ils employèrent et les ruses, et les menaces, pour détourner Néhémie de son entreprise, et même pour le faire périr. Les Juifs qui demeuraient au dehors en avertirent Néhémie ; et pour se tenir toujours en garde contre leurs attaques, il fit poster une partie de ses gens en armes derrière les murs, pendant que les autres travaillaient ayant leurs armes auprès d’eux, afin d’être tout prêts, en cas d’alarmes, pour se mettre en défense (Néhémie 4.7-8). Ses ennemis, voyant leur dessein découvert, n’osèrent employer la force ; mais ils mirent en œuvre la ruse, et tâchèrent de l’attirer dans une embuscade à la campagne, où ils disaient qu’ils voulaient terminer leurs différends à l’amiable (Néhémie 6.1-3). Mais Néhémie leur fit dire que l’ouvrage qu’il avait commencé, demandant nécessairement sa présence, il ne pouvait les aller trouver. Il fit la même réponse à quatre députations de suite qu’ils lui firent sur le même sujet.
Sanaballat, le principal des ennemis des Juifs, lui écrivit avec ses associés, que le bruit s’était répandu qu’il ne faisait rebâtir les murs de Jérusalem, que dans la vue d’en faire une forteresse, pour y soutenir sa révolte ; et qu’on disait aussi qu’il apostait de faux prophètes favorables à ses desseins, qui publiaient parmi le peuple qu’il fallait l’élire pour roi du pays : que pour arrêter le cours de tous ces mauvais bruits, ils lui conseillaient de les venir trouver, pour en conférer ensemble, et pour prendre les mesures convenables. Néhémie, sans se troubler, répondit que toutes ces accusations étaient fausses et inventées à plaisir. Il découvrit presqu’en même temps qu’un faux prophète nommé Séméias, était gagné par ses ennemis, et que quelques-uns des principaux de la ville avaient des liaisons secrètes avec eux. Tout cela ne fut pas capable de le décourager. Il continua son ouvrage, et l’acheva heureusement cinquante-deux jours après qu’on eut commencé à y travailler (Néhémie 6.8-15).
Alors il fit la dédicace des murs, des tours et des portes de Jérusalem, avec la solennité et la magnificence que cette action demandait ; il sépara les prêtres, les lévites et les princes du peuple en deux bandes, dont l’une marchait du côté du midi, et l’autre du côté du septentrion, sur les murs. Les deux bandes devaient se rencontrer dans le temple. La marche était accompagnée de voix et du son de toutes sortes d’instruments de musique. Lorsque tout le monde fut arrivé au temple, on y lut la loi, on y offrit des sacrifices, et on y fit de grandes réjouissances. Et comme la fête des Tabernacles se rencontra dans le même temps, on la célébra avec grande solennité. Néhémie ayant remarqué que l’enceinte de la ville.était trop grande pour le nombre d’habitants qui y étaient, il ordonna que les principaux de la nation y fixeraient leur demeure, et fit tirer au sort, pour y faire établir aussi la dixième partie de tout le peuple de Juda (Néhémie 11). Alors il s’appliqua à corriger les abus qui s’étaient glissés dans la république : il réprima la dureté des riches qui tenaient en esclavage les fils et les filles des plus pauvres et des plus malheureux, et qui gardaient leurs champs, que ces misérables avaient été obligés de leur engager ou de leur vendre (Néhémie 5.1-3)
Un autre abus qu’Esdras avait déjà tâché, mais inutilement, de corriger, était celui des mariages contractés avec des femmes étrangères et idolâtres. Néhémie réussit à les faire rompre, et à renvoyer les femmes que l’on avait prises contre la disposition de la loi (Néhémie 9). Ayant aperçu que les prêtres et les lévites, ne recevant plus les revenus ordonnés par la loi, pour leur entretien, et subsistance, avaient été obligés de se retirer chacun où ils avaient pu, ce qui était cause que le ministère du temple ne se faisait plus avec la décence et la majesté convenables, il obligea les peuples à payer exactement aux ministres du Seigneur ce qui leur était dû, et ordonna aux prêtres et aux lévites de se trouver dans le saint lieu, pour y faire leurs fonctions (Néhémie 13.10-11). Il rétablit l’observation du sabbat, qui avait été fort négligée à Jérusalem, et empêcha les étrangers d’y venir vendre, en tenant les portes de la ville fermées ce jour-là (Néhémie 13.15-16). Et pour perpétuer, autant qu’il serait possible, le bon ordre qu’il avait rétabli dans Juda, il engagea les principaux de la nation à renouveler solennellement l’alliance avec le Seigneur. La cérémonie s’en fit dans le temple, et on en dressa un acte qui fut signé des principaux des prêtres et du peuple (Néhémie 9 ; Néhémie 10).
On lit dans les livres des Machabées (2 Machabées 1-19-21) que Néhémie envoya chercher le feu sacré, que les prêtres, avant la captivité de Babylone, avaient caché dans un puits sec et profond ; mais que n’y ayant trouvé, au lieu de feu, qu’une eau boueuse et épaisse, il la fit répandre sur l’autel ; que le bois qui avait été arrosé de cette eau, s’enflamma aussitôt que le soleil commença à paraître, et que ce miracle étant venu à la connaissance du roi de Perse, ce prince fit fermer de murailles le lieu où le feu avait été caché, et accorda aui prêtres beaucoup de grâces et de grands priviléges. On voit, dans les mêmes livres (2 Machabées 2.13-14) que Néhémie amassa une bibliothèque, où il mit tout ce qu’il put trouver de livres des prophètes de David et des princes, qui avaient fait des présents au temple ; enfin il retourna à Babylone, ainsi qu’il l’avait promis au roi Artaxerxès, vers la trente-deuxième année de ce prince (Néhémie 5.14 ; 13.6). De là il revint à Jérusalem, où il mourut en paix, après avoir gouverné le peuple de Juda pendant environ trente ans.
Le second livre, qui est dans les bibles latines sous le nom d’Esdras, porte dans l’Hébreu celui de Néhémie. Cet auteur y parle presque toujours en première personne ; et d’abord, en le lisant, il paraît qu’il l’écrivait, pour ainsi dire, jour par jour, et qu’il y mettait tout ce qui lui arrivait. Mais quand on lit ce livre avec réflexion, on y remarque diverses choses qui n’ont pu avoir été écrites par Néhémie. Par exemple, on y cite des mémoires où étaient écrits les noms des prêtres du temps de Jonathan, fils d’Eliasib, et même jusqu’au temps de Jeddoa ou Jaddus, qui vivait sous Darius Codomanus et sons Alexandre le Grand. Il y a donc beaucoup d’apparence que Néhémie écrivit des mémoires de son gouvernement, lesquels sont cités dans le second livre des Machabées (2 Machabées 2.13) : lnferebantur autan in descriptio-vibus et Cominentariis Nehentice hcec eadem ; et que c’est de ces mémoires que l’on a tiré ce qui fait le gros de ce livre. Voyez notre Préface sur le second livre d’Esdras, où nous examinons tout cela dans un plus grand détail.
Fils d’Azboc, citoyen considérable qui contribua largement à la reconstruction de Jérusalem, au retour de la captivité (Néhémie 3.16).