Angelus. Ce nom est emprunté du grec et formé d’Angelos, qui signifie un messager, et qui répond à l’hébreu Maleac. Rien n’est plus fréquent dans l’Écriture que les apparitions, et les missions des anges, tant bons que mauvais. Dieu les envoie pour annoncer ses volontés, pour corriger, pour punir, pour enseigner, pour reprendre, pour consoler. Dieu donna la loi à Moïse (Actes 7.30-53 Galates 3.19), et apparut aux anciens patriarches (Hébreux 13.2), par le moyen des anges, qui le représentaient et qui parlaient en son nom (2).
Avant la captivité de Babylone, les Hébreux ne connaissaient le nom d’aucun ange : au moins on n’en trouve aucun de nommé dans les livres écrits avant cet événement. Les Talmudistes disent qu’ils rapportèrent ces noms de Babylone. Il est vrai que l’on en trouve un grand nombre appelés par leurs noms dans le livre d’Hénoch ; mais on sait que cet ouvrage est supposé, et qu’il est postérieur à la captivité dont on vient de parler. Tobie est le premier qui ait désigné un ange par son nom propre. Il nomme Raphael (Tobie 3.25 ; 11.14), celui qui conduisit le jeune Tobie en Médie. On croit que Tobie vivait à Ninive quelque temps, avant la captivité de Juda. Daniel, qui vivait à Babylone quelque temps après Tobie, nous a enseigné les noms de Michel et de Gabriel (Daniel 10.21 ; 8.16 ; 9.21). Le quatrième livre d’Esdras parle d’Uriel et de Jérémiel ; mais ce livre est nouveau. L’auteur a vécu apparemment depuis Jésus-Christ.
Les Juifs cabalistes donnent pour précepteurs aux patriarches, certains anges qu’ils désignent par leurs noms. Par exemple, ils disent que le précepteur d’Adam s’appelait Raziel ; celui de Sem, Jéphiel ; celui d’Abraham, Zédékiel ; celui d’Isaac, Raphael ; celui de Jacob, Séliel ; celui de Joseph, Gabriel ; celui de Moïse, Métatron ou Métator, comme qui dirait celui qui marque le camp ; celui d’Élie, Malushiel ; et celui de David, Cerviel. Ils croient aussi qu’il y a soixante et dix anges qui portent dans eux-mêmes le nom de Dieu, selon cette parole de l’Exode (Exode 20.11-21) : Est nomen meum in illo. Dans le Nouveau Testament, nous ne remarquons les noms que de deux anges, Gabriel (Luc 1.19-26) et Michel (Jude 1.5 ; Apocalypse 12.7).
On dispute sur le temps de la création des saints anges. Les uns croient qu’ils ont été créés en même temps que le ciel, et que Moïse les a compris sous le nom de ciel, en disant : Au commencement Dieu créa le ciel. D’autres ont conjecturé qu’il avait voulu les exprimer sous le nom de la lumière, que Dieu créa au premier jour. D’autres enfin ont prétendu qu’ils avaient été créés avant le monde sensible ; et Job semble favoriser cette opinion, en disant (Job 38.7) : Où étiez-vous quand je posais les fondements de la terre,… et que tous les enfants de Dieu étaient dans des transports de joie ? Les Hébreux croient que Dieu les créa le second jour du monde, et que c’est les anges qu’il consulta, en disant (Genèse 1.26) : Faisons l’homme à notre image et ressemblance.
Plusieurs anciens Pères, trompés par l’autorité du livre d’Hénoch et par un passage da la Genèse qui est mal traduit, et où il est dit (Genèse 6.2) que les anges voyant les filles des hommes qui étaient belles, prirent pour femmes celles d’entre elles qui leur plurent, ce sont imaginés que les anges étaient corporels et sensibles aux plaisirs des sens et aux attraits de la volupté. Il est vrai qu’ils les nomment esprits et spirituels ; mais c’est dans le même sens que l’on nomme le vent esprit, et que les odeurs, les vapeurs, etc sont spirituelles. Mais d’autres Pères en grand nombre ont soutenu que les anges étaient purement spirituels, et c’est aujourd’hui le sentiment commun de nos écoles. On peut voir notre Dissertation sur les bons et les mauvais anges, à la tête du commentaire sur saint Luc.
On attribue des anges aux empires, aux nations, aux provinces, aux villes et aux personnes particulières. Saint Michel est reconnu pour le protecteur du peuple d’Israël : Michael princeps vester (Daniel 10.21), dit l’ange Gabriel, en parlant au prophète Daniel. Le même ange Gabriel parle aussi de l’ange protecteur de la Perse (Daniel 10.13), selon la plupart des interprètes, lorsqu’il dit que le prince des Perses lui a résisté vingt-un jours. Saint Luc dans les Actes (Actes 16.9) dit qu’un homme macédonien apparut à saint Paul durant la nuit, et lui dit : Passez en Macédoine, et venez nous aider ; ce que l’on entend communément de l’ange de la Macédoine, qui l’invitait à venir prêcher Jésus-Christ dans la province qui lui était confiée. Enfin les Septante dans le Deutéronome (Deutéronome 32.8) disent que Dieu a fixé les limites des nations, selon le nombre des anges de Dieu. Ce qui est entendu par les Pères et par les rabbins, du gouvernement de chaque pays et de chaque nation que Dieu a confié à ses anges. Saint Jean, dans l’Apocalypse, écrit aux anges des sept églises chrétiennes de l’Asie mineure (Apocalypse 2.1-8,12) ; ce qui ne doit pas seulement s’entendre des évêques de ces églises, mais aussi des anges que Dieu leur a donnés pour les protéger, selon plusieurs Pères.
À l’égard des anges gardiens, ils sont assez clairement marqués dans l’Ancien Testament. Jacob (Genèse 48.16) parle de l’ange qui l’a toujours conduit dans tous ses voyages, et qui l’a délivré de tous les dangers. Le Psalmiste dans plus d’un endroit, parle des anges protecteurs des justes (Psaumes 33.8 ; 90.11). C’était le sentiment commun des Juifs du temps de Notre-Seigneur. Lorsque saint Pierre sorti de prison, vint frapper à la porte de la maison où étaient les autres disciples, ils crurent que ce n’était pas lui, mais son ange qui heurtait (Actes 12.15). Jésus-Christ dans l’Évangile (Matthieu 18.10), nous avertit de ne pas mépriser aucun des petits, parce que leurs anges voient sans cessé la face du Père céleste. Les Pères ont été uniformes sur cet article. Les Juifs et les païens mêmes ont cru que les anges étaient attachés à nos personnes, et avaient soin de nous conduire et de nous protéger. Hésiode, le plus ancien, ou du moins un des plus anciens écrivains de la Grèce, dit qu’il y a sur la terre de bons anges envoyés par Jupiter pour la protection des hommes, et pour considérer le bien et le mal qu’ils font. Platon dit que chacun de nous a deux démons, ou deux génies ; l’un qui nous porte au mal, et l’autre qui nous porte au bien. Apulée ne parle que d’un démon assigné à chaque homme par Platon [Les Musulmans croient aussi aux anges gardiens. Suivant eux, chaque mortel, à sa naissance, est reçu par deux anges qui se placent l’un à sa droite et l’autre à sa gauche. Ils sont chargés de veiller constamment sur lui et d’enregistrer chacune de ses actions. Quand il en fait une bonne, ils prient le Tout-Puissant de faire qu’il persévère dans la bonne voie ; et quand il en fait une mauvaise, ils prient Dieu d’étendre sa miséricorde sur le coupable, de lui inspirer le repentir de sa faute et de lui pardonner (Voyez ci-après Ange de mort). Le livre des anges gardiens sera lu au jour du jugement dernier ; toutes les actions qui y sont consignées seront pesées avec soin, et c’est d’après elles que le jugement sera prononcé].
L’apôtre saint Paul nous donne à connaître qu’il y a dans le ciel parmi les anges une subordination de divers chœurs des anges, qui diffèrent les uns des autres ou par leurs fonctions, ou par les degrés de gloire qu’ils possèdent. Mais les Pères, qui ont interprété les paroles de l’Apôtre, ne sont pas d’accord entre eux sur le nombre, ni sur l’ordre de la céleste hiérarchie. Origène a cru que saint Paul n’avait rapporté qu’une partie des chœurs des anges, et qu’il y en avait plusieurs autres dont il n’avait rien dit : sentiment qui se remarque dans plusieurs anciens Pères qui l’ont suivi. D’autres ont compté dans saint Paul neuf chœurs des anges ; et c’est le sentiment qui est aujourd’hui communément reçu dans nos écoles de théologie. L’auteur qui est communément cité sous le nom de Denys l’Aréopagite, admet trois hiérarchies et trois ordres d’anges dans chaque hiérarchie. Dans la première sont les séraphins, les chérubins et les trônes ; dans la seconde, les dominations, les vertus et les puissances ; dans la troisième, les principautés, les archanges et les anges.
Dans quelques endroits de l’Écriture, est insinué qu’il y a sept anges principaux dans la cour céleste, qui sont toujours devant le Seigneur. Raphael dit au jeune Tobie (Tobie 12.15), qu’il est un des sept anges qui se tiennent en la présence de Dieu. Saint Michel dit à Daniel qu’il est un des premiers princes de la cour du Tout-Puissant (Daniel 10.13) : Daniel, unas de principibus. Dans l’Apocalypse, saint Jean voit, sept anges debout devant le Seigneur (Apocalypse 8.2-5). Dans le Testament des douze patriarches, livre très-ancien, on les appelle les anges de la face ; et dans la vie de Moïse, les yeux du Seigneur. Ces dénominations sont apparemment imitées de ce qui se voyait dans la cour des rois d’Assyrie, de Chaldée et de Perse, où il y avait sept eunuques ou sept grands officiers, qui étaient au-dessus de tous les autres et qui étaient toujours auprès du prince.
Le nombre précis des anges n’est marqué en aucun endroit de l’Écriture ; mais il y est toujours représenté comme très-grand, comme innombrable. Daniel (Daniel 7.1) dit que s’étant approché du trône de l’Ancien des jours, il en vit sortir un fleuve de feu ; et que mille milliers d’anges le servaient, et dix mille millions assistaient en sa présence. Et saint Jean, dans l’Apocalypse (Apocalypse 5.11), dit qu’il vit autour du trône de l’Agneau des millions de initiions et des milliers de milliers d’anges. Et Jésus-Christ, dans l’Évangile (Matthieu 26.53), dit que son Père céleste pourrait lui donner plus de douze légions d’anges, C’est-à-dire, plus de soixante-douze mille anges. Le Psalmiste dit que le char du Seigneur est accompagné de dix mille anges (Psaumes 67.18). Plusieurs Pères pour donner une idée de la multitude des anges, comparée à celle des hommes, leur appliquent la parabole des quatre-vingt-dix-neuf brebis que le père de famille laisse dans les montagnes, pour aller chercher la centième qui s’était égarée. Les quatre-vingt-dix-neuf brebis marquent les anges qui sont demeurés fidèles dans le ciel. La brebis égarée marque l’homme qui est déchu de sa justice et de sa félicité originelle. D’autres Pères ont inféré que le nombre des anges était infiniment plus grand que celui des hommes, de ce que la terre est infiniment plus petite que le ciel. Or, il est naturel de juger de la multiude des habitants d’un lieu, par la grandeur et l’étendue de leur demeure ; L’auteur, publié sous le nom de Denys l’Aréopagite, dit que le nombre des anges est tel, qu’il n’y a rien qui l’égale dans la nature. Ceux qui seront curieux de voir avec plus d’étendue ce qui concerne les anges, pourront consulter notre Dissertation sur ce sujet à la tête de l’Évangile de saint Luc.
Les Saducéens niaient l’existence des anges (Actes 23.8) et de tous les esprits. D’autres juifs leur rendaient un culte superstitieux (Colossiens 2.18). L’auteur du livre de la Prédication de saint Pierre, ouvrage très-ancien, cité dans saint Clément d’Alexandrie, dit que les Juifs rendent un culte religieux aux anges et aux archanges, et même aux mois et à la lune. Celse leur faisait à-peu-près les mêmes reproches. Tertullien assure que Simon et Cérinthe préféraient la médiation des anges à-celle de Jésus-Christ. Josèphe et après lui Porphyre, disent que les Esséniens dans leur profession s’engagent par serment à conserver fidèlement les noms des anges et les livres de leur secte. Pour le culte des anges parmi les Juifs et, les chrétiens, on peut voir notre Commentaire sur Coloss. 2.18, et la Dissertation sur les anges, page 46. 67.
Sous le nom d’Anges du Seigneur, on entend souvent dans l’Écriture des hommes de Dieu, des prophètes ; par exemple (Juges 2.1) : L’ange du Seigneur vint de Galgal au lieu nommé des Pleurs, et dit aux enfants d’Israël : Je vous ai tirés de l’Égypte et je vous ai fait entrer dans le pays que j’ai promis à vos pères, et je me suis engagé par serment à conserver l’alliance que j’ai jurée avec eux, à condition que vous ne feriez pas d’alliance avec les habitants de ce pays ; mais vous ne n’avez point voulu ouir. Et comme l’ange du Seigneur leur parlait, ils élevèrent leur voix et commencèrent à pleurer, et ils immolèrent, des victimes au même lieu, et Josué renvoya le peuple. Il y a toute apparence que cet ange est Josué lui-même ou le grand-prêtre, ou quelque prophète. Plusieurs interprètes croient que c’est le même Josué qui est désigné dans Moïse (Exode 23.20-23) sous le nom d’ange du Seigneur, qui doit introduire les Israélites dans la terre promise. Il est certain que dans l’Écriture les prophètes sont quelquefois nommés les anges du Seigneur (Aggée 1.13) : Voici ce que dit Aggée, l’ange du Seigneur, d’entre les anges du Seigneur. Malachie le dernier des douze petits prophètes est nommé par plusieurs Pères sous le nom d’Ange de Dieu, et c’est en effet ce que son nom signifie en hébreu. Il y en a qui croient que c’est Esdras, qui est désigné sous le nom de Malachie ou d’ange du Seigneur. Eupoléme parlant du prophète Nathan qui parla à David, et lui fit connaître son péché, l’appelle un ange, ou un envoyé du Seigneur Manué, père de Samson (Juges 13.2), appelle indifféremment ange et homme de Dieu, celui qui apparut à sa femme, jusqu’à ce que s’étant évanoui avec la fumée de l’holocauste, il fût certain que c’était un ange. Quelquefois dans l’Écriture on donne aux anges le nom de Dieu. L’ange qui apparut à Moïse dans le buisson (Exode 3.2 Actes 7.30-53 ; Galates 3.19), qui lui donna la loi, qui lui parlait et qui conduisait le peuple dans le désert, est perpétuellement nommé du nom de Dieu, et le Seigneur dit de lui (Exode 23.21) : Est nomen meum in illo. Les anges qui ont apparu aux saints patriarches (Hébreux 13.2 Genèse 18.3 ; 19.2), sont aussi nommés du nom de Dieu. C’est qu’ils agissaient en son nom, qu’ils étaient ses ambassadeurs, et qu’ils étaient les dépositaires de sa puissance et les interprètes de ses ordres. On leur donne non-seulement le nom d’Elohim ou d’Adonai, qui est quelquefois attribué même aux juges et aux princes, mais aussi celui de Jéhovah, qui n’appartient qu’à Dieu seul, dont ils représentent la majesté.
Le sentiment qui attribue aux royaumes, aux provinces, aux nations, des anges tutélaires, est fondé dans l’Écriture et adopté chez les Chrétiens et chez les Juifs. Le passage de Daniel, où Michel est nommé le prince du peuple de Dieu (Daniel 10.21), Michael princeps vester ; et celui des Actes (Actes 15.8), où un ange sous la forme d’un homme Macédonien, invite saint Paul à passer en Macédoine ; ces passages paraissent exprès pour ce sentiment.
Mais il y a difficulté sur un autre passage de Daniel ; que l’on cite pour la même chose ; c’est celui où il est dit : que (Daniel 10), le prince des Perses a résisté à l’archange Gabriel pendant vingt-un jours ; car ce prince des Perses, au jugement de plusieurs bons commentateurs, est Cyrus roi de Perse, qui fut vingt-un jours avant que de se rendre aux inspirations de Gabriel.
L’autre cassage est celui du Deutéronome (Deutéronome 32.8), ou il est dit que quand le Seigneur partagea les hommes, il les partagea selon le nombre des anges de Dieu. C’est ainsi que lisent les Septante. Lorsque le Seigneur divisa les enfants d’Adam, il fixa les bornes des nations, suivant le nombre des anges de Dieu ; au lieu que l’Hébreu et la Vulgate portent : Il fixa les limites des nations, suivant le nombre des enfants d’Israël. De quelque manière qu’on lise, il y aura toujours difficulté sur le nombre des nations dispersées à la tour de Babel ; car premièrement est-on bien sûr que ce passage regarde la division arrivée a Babel ? En second lieu, est-on certain que chaque particulier qui concourut à cet édifice, forma une nation ; et l’écrivain sacré n’aurait-il pas voulu marquer en cet endroit toutes les nations qui se sont formées et qui se formeront dans la suite des siècles ? et certes, si l’on veut qu’elles aient toutes leurs anges tutélaires, il faudra bien l’entendre ainsi, en suivant la leçon des Septante.
Que si l’on suit celle de l’Hébreu et de la Vulgate, il sera question de savoir quelle époque Moïse a voulu marquer dans l’histoire de la nation d’Israël ; car au temps de la tour de Babel, il n’y avait point encore d’Israélites. Si Moïse a fait attention à son temps, comme le nombre des Israélites était déjà très-grand, il faudra dire aussi que le nombre des nations qui devait sortir des bâtisseurs de Babel, être excessif ; car quand on ne prennait dans la nation d’Israël que les hommes capables de porter les armes, comment trouver dans le monde six cent mille nations ?
La plupart se sont fixés à soixante-dix ou soixante-douze peuples, fondés sur des raisons assez faibles ; comme que dans le chapitre 10 de la Genèse, où Moïse donne le dénombrement des enfants de Sem, Cham, et Japhet, il y nomme soixante-douze personnes, d’où l’on croit que sont sortis soixante-douze peuples. Mais si l’on ôte les trois patriarches, Sem, Cham et Japhet, qui n’y doivent pas entrer, puisqu’on y met tous leurs enfants, et si l’on n’y comprend pas les treize fils de Jectan, qui ne naquirent apparemment qu’après la dispersion, le nombre en sera fort diminué. Je ne parle pas de Cainan, qu’on lit dans les Septante, au verset 24, ni d’Eliza et Cozar, qu’on donne pour fils à Japhet. Si on veut les admettre par-dessus le nombre marqué dans l’Hébreu et dans la Vulgate, avec les Philistins et les Caphtorims du verset 14, on trouvera 76 peuples, au lieu de 72. Ainsi ce fondement n’est pas certainement d’une grande solidité.
D’autres prennent ce nombre de soixante-dix peuples, de celui des enfants de Jacob qui entrèrent avec lui en Égypte (Genèse 46.26-27. Dans la rigueur il n’y eut que soixante-six personnes qui vinrent en Égypte, comme Moïse le remarque expressément au verset 26. Pour accomplir le nombre de soixante-dix, il y faut mettre Jacob, Joseph et ses deux fils : or, si l’on y met tous les fils de Jacob, il est inutile de l’y mettre lui-même, puisque Moïse dit expressément que Dieu divisa les nations ou les fils d’Adam, selon le nombre des enfants d’Isaraël. D’ailleurs les Septante en plus d’un endroit (Genèse 26.27 Exode 1.5 Deutéronome 10), et saint Étienne dans les Actes, lisent soixante-quinze personnes, au lieu de soixante-dix. Voilà encore de nouvelles difficultés contre ce nombre précis de soixante-dix ou soixante-douze peuples sortis des enfants de Noé, et par conséquent contre ce même nombre d’anges députés pour la garde des différents peuples.
De tout ceci on peut conclure que la tradition certaine de l’Église juive et de la chrétienne, est que chaque nation a son ange tutélaire. Mais pour le nombre des nations et par conséquent des anges qui sont députés pour les protéger, il n’est nullement certain. Ce nombre même a nécessairement varié, selon que le nombre des nations et des peuples s’est multiplié ou est diminué ; car il est certain que depuis la tour de Babel jusqu’aujourd’hui, on a vu dans le monde une infinité de révolutions, qui ont causé la ruine de plusieurs peuples ; et sans sortir de l’Écriture, que sont devenus les Amalécites, les Philistins, plusieurs peuples de Chanaan, les Emim, les Zomzornim, etc.
Tous ces termes signifient le démon et ses suppôts, les mauvais anges, ministres de la colère et de la vengeance de Dieu. Dieu frappa l’armée de Sennachérib par l’épée de l’ange exterminateur (2 Rois 19.35). Il fit mourir les Israélites, sujets de David, en punition de la vaine complaisance de ce prince, par le glaive de l’ange de mort : l’ange de Satan frappait saint Paul (2 Corinthiens 12.7), et tendait des pièges à sa pureté : le même ange accusait le grand-prêtre Jésus devant le Seigneur et contestait avec l’archange saint Michel pour avoir le corps de Moïse (Zacharie 2.1-2). L’ange de l’abîme (Jude 1.9), ou l’ange roi de l’abîme, comme l’appelle saint Jean dans l’Apocalypse (Apocalypse 9.11), est le même que le prince des démons, l’ange exterminateur. Nous parlerons de l’ange exterminateur qui fit périr l’armée de Sénnachérib, sous l’article de Sennachérib.
L’Ange de mort est celui à qui Dieu a donné la commission de séparer l’âme du corps. Les Juifs, les Arabes, les Turcs et les Persans reconnaissent cet ange de mort. Les Perses le nomment Mordad ou Asuman ; les rabbins et les Arabes lui donnent le nom d’Azrael ; et les paraphrastes chaldéens celui de Malk-ad-Mousa. D’autres, comme le livre de l’Assomption ou de la Mort de Moïse, l’appellent l’ange Samaël, prince des démons. Ce dernier livre raconte que l’heure de la mort de Moïse étant arrivée, le Seigneur dit à Gabriel de faire sortir l’âme de Moïse ; mais il s’en excusa : saint Michel s’en exempta de même, comme fit aussi l’ange Zinghiel qui dit, qu’ayant été le précepteur de Moïse, il ne pouvait se résoudre à lui ôter la vie. Samaël s’approcha pour faire sortir l’âme du corps de ce chef du peuple de Dieu ; mais frappé par l’éclat de son visage et par la vertu du nom de Dieu écrit sur la verge dont Moïse se servait pour faire des miracles il fut obligé de se retirer ; de manière que Dieu lui-même vint tirer l’âme de son prophète, en lui donnant le baiser.
Les rabbins tiennent que l’ange de mort ayant frappé un homme, lave son glaive dans l’eau de la maison et lui communique par là une infusion mortelle ; d’où vient qu’ils répandent toute l’eau dans la rue. Cet ange de mort se trouve, disent-ils, au chevet du moribond, tenant en main une épée nue à l’extrémité de laquelle pendent trois gouttes d’une liqueur de fiel. Le malade n’a pas plutôt aperçu cet ange, que saisi de frayeur, il ouvre la bouche : alors l’ange de mort y coule ces trois gouttes mortelles ; l’une lui donne une prompte mort, l’autre le rend pâle et livide, et la troisième le dispose à être prompternent réduit en poussière dans le tombeau.
Ils croient de plus que l’homme souffre encore une seconde mort dans le tombeau ; que lorsqu’un Juif est enterré, l’ange de mort va s’asseoir sur la fosse et qu’en même temps l’âme vient aussi s’y réunir et le fait tenir sur ses pieds. Alors l’ange prenant une chaîne de fer dont la moitié est glacée et l’autre moitié brûlante, il en frappe le corps et en sépare tous les membres. Il le frappe une seconde fois et en écarte tous les os ; enfin il le frappe une troisième fois et le réduit tout en cendres. Après cela les bons anges viennent, ramassent et réunissent toutes ces parties et replacent le corps dans son tombeau. Ils tiennent néanmoins que les personnes pieuses et qui font de grandes aumônes, seront exemptes de ce supplice.
Les Musulmans (Voyez Ange) et les Perses reconnaissent aussi un ange destiné de Dieu à donner la mort et à séparer l’âme du corps des créatures. Ils tiennent de plus que quand le mort est enterré, deux mauvais esprits d’un regard affreux et de couleur noire, font asseoir le mort dans son cercueil et lui font son procès s’il se trouve innocent, ils le font recoucher et se reposer tranquillement ; sinon, ils le frappent de grands coups de marteau entre les deux oreilles, ce qui lui cause des douleurs incroyables et lui fait jeter des cris terribles.
Il est parlé de l’ange de mort dans le grec du livre de Job en plus d’un endroit (Job 33.23).
Quand il y aurait autour du juste mille anges de mort préts à lui ôter la vie, aucun d’eux ne le frappera, s’il rentre en lui-même et pense à retourner au Seigneur ; s’il découvre à un homme son propre péché et s’il lui confesse sa folie, l’ange l’empêchera de tomber dans la mort. Et ailleurs (Job 20.85) : Les richesses injustement amassées seront vomies avec horreur, et l’ange l’arrachera de sa maison. Et encore (Job 36.14) : Que l’âme de l’hypocrite meure dans sa jeunesse et que sa vie soit arrachée par les anges. Et Salomon (Proverbes 17.11) : Le méchant cherche toujours des querelles et l’ange cruel sera envoyé contre lui. C’est cet ange cruel, cet ange de mort qui fut envoyé contre les premiers maris de Sara, fille de Raguel (Tobie 3.8), et qui les fit mourir lorsqu’ils voulurent s’approcher d’elle. C’est l’ange Asmodée ou destructeur qui est relégué et enchaîné dans le désert par l’ange Raphael (Tobie 8.3). Enfin, c’est le mauvais ange dont parle le Psalmiste (Psaumes 34.5-6) : Qu’ils soient comme la poussière dissipée par le vent, et que l’ange du Seigneur les froisse et les fasse périr ; que leur voie soit environnée de ténèbres, et que l’ange de Dieu les poursuive sans cesse.
L’Ange de Satan qui donnait des soufflets à saint Paul (2 Corinthiens 12.7), est le ministre du démon, son envoyé. On considère dans l’Écriture le démon comme un prince qui exerce sa domination sur d’autres démons d’un moindre rang et d’une moindre puissance. C’est en ce sens que dans l’Évangile on parle du règne de Satan (Matthieu 12.16) : Si Satan est partagé contre lui-même, comment son empire subsistera-t-il ? Si le démon chasse les démons des corps qu’il possède, il détruit sa propre domination.
Jésus-Christ est venu en ce monde pour ruiner la puissance de Satan ; et au jour du jugement, il enverra les réprouvés au feu éternel qui est préparé au démon et à ses anges (Matthieu 25.41), à ses ministres, à ses suppôts qui sont de même nature et condamnés aux mêmes supplices que lui.
L’ange de Satan donne donc dis soufflets à saint Paul, ou en lui suggérant des pensées honteuses, ou en lui causant des infirmités corporelles, ou en lui suscitant des adversaires qui s’élevaient contre lui et s’opposaient à ses bons desseins ; comme l’ouvrier en cuivre, et Démètre, orfévre d’Éphèse, et Hyménée et Philète dont il parle dans sa première épître à Timothée. Enfin, il y en a qui croient que l’ange de Satan persécutait sensiblement saint Paul, le frappait et lui tendait des pièges, comme saint Athanase raconte que les démons frappaient et persécutaient quelquefois saint Antoine, et que plusieurs saints ont souvent été maltraités par les démons jaloux des progrès qu’ils faisaient dans le bien et enragés du renversement du règne de Satan qu’ils détruisaient.
Voyez Langue.
Nous appelons anges de lumière les bons anges dont la demeure est dans le ciel, dans la région de lumière, qui sont revêtus de lumière et de gloire, qui assistent devant le trône du Très-Haut, et qui inspirent aux hommes de bonnes actions, des actions de lumière et de justice. Les anges de ténèbres au contraire sont ceux qui sont les ministres du démon dont la demeure est dans l’enfer, dans la région des ténèbres, dans les noirs cachots où sont renfermés les méchants. Saint Paul dit que Satan se transforme quelquefois en ange de lumière (2 Corinthiens 11.14), de même que Jésus-Christ dit dans l’Évangile (Matthieu 7.15) que les loups prennent quelquefois des vêtements de brebis pour séduire les simples ; mais on les reconnaît enfin par leurs œuvres ; ils se déclarent tôt ou tard, et on les distingue par les œuvres de ténèbres auxquelles ils engagent ceux qui les suivent.
Montagne dont il est parlé dans le texte latin de Judith (Judith 2.12) ; car il n’en est pas fait mention dans le Grec. Le texte dit que cette montagne est à la gauche de la Cilicie. Nous croyons que c’est le mont Argée, situé à la gauche ou au nord de la Cilicie d’est la plus haute montagne de tous ces quartiers-là. Strabon assure qu’elle est toujours couverte de neige, et que ceux qui peuvent parvenir à son sommet, ce qui n’arrive que très-rarement et très-difficilement, voient, quand l’air est serein, les deux mers, savoir : le Pont-Euxin et la mer de Cilicie. [Voyez ci-après Bectileth Voyez aussi Tirin, Vatable et Grotius, cités à propos de cette montagne, Judith, 11.12 dans le Cours complet d’Écriture sainte, tome 12 col. 845 et 846, et Serarius, ibid., col. 859 et suivants]