Roi d’Hésébon, qui commandait aux, Amorrhéens de delà le Jourdain, Moïse (Nombres 21.21 Deutéronome 2.26) ; voulant faire passer : les Israélites par le pays de Sélion, lui envoya des députés pour lui dire : Permettez-nous de passer par vos terres ; nous irons par le grand chemin, sans nous écarter dans les champs ni dans les vignes ; nous achèterons tout ce qui sera nécessaire pour notre nourriture, nous paierons même l’eau que nous boirons ; permettez-nous donc de traverser votre pays (comme, nous l’ont permis les enfants d’Ésaü qui habitent en Séïr, et les Moabites qui demeurent à Ar sur l’Arnon), jusqu’à ce que nous soyons arrivés au bord du Jourdain, où est la terre dont le Seigneur doit nous mettre en possession. Mais Séhon leur refusa le passage et assembla une puissante armée, parce que le Seigneur avait endurci son cœur. Alors le Seigneur dit à Moïse : Je vais commencer à exécuter les promesses que j’ai faites à mon peuple, en lui livrant Séhon et toute son armée. Ce roi, à la tête de ses troupes, s’avança jusqu’à Jasa et livra la bataille aux Israélites, qui le battirent, taillèrent toute son armée en pièces, et se rendirent maîtres de ses États, depuis le torrent d’Arnon ; jusqu’à celui de Ja bock, en firent passer tous les habitants au fil de l’épée, et s’y établirent comme dans un pays conquis, et qui leur avait été livré par le Seigneur.
Observations de Folard sur la défaite de Séhon par les Israélites (Nombres 21.23, Deutéronome 2.31) et suivants Un général habile, qui a dans la tête une entreprise importante, qu’il ne peut exécuter qu’en traversant un pays neutre, n’a garde d’abord d’en envoyer demander la permission ; trop de civilité le ferait soupçonner de crainte ; il doit commencer par y entrer, faire toute la diligence possible, et envoyer vers le souverain pour le prier de trouver bon qu’il traverse son pays ; c’est là la bonne politique. Mais Moïse en use autrement : il envoie d’abord des ambassadeurs au roi des Amorrhéens lui porter ces paroles de paix : Nous ne demandons qu’a passer par vos terres, nous marcherons par le grand chemin, nous ne nous détournerons ni à droite ni à gauche. Vendez-nous tout ce qui nous sera nécessaire pour manger, donnez-nous aussi de l’eau pour de l’argent ; afin que nous puissions boire, et permettez-nous seulement de passer par votre pays.
Après des propositions si justes, si Séhon ne voulait pas laisser passer les Israélites par son pays, il devait se contenter de leur refuser le passage ; il ne paraît pas que ceux-ci eussent tenté ni menacé de passer malgré lui, et, comme disaient les Grecs, les piques basses. Si donc il n’eût voulu que les empêcher d’entrer dans son pays, il devait seulement se camper sur la frontière et se tenir sur la défensive, au cas qu’on l’eût voulu forcer ; mais se croyant le plus hardi et le plus fort, apparemment parce qu’il était chez lui, il se met à la tête de son armée et marche à eux pour les combattre. Cette guerre est des plus injustes, et même contraire au droit des gens ; aussi Séhon fut-il bien puni de sa témérité et de son injustice, puisqu’il lui en coûta la vie.
L’auteur sacré n’entre dans aucun détail de cette grande journée qui décida du royaume de Séhon ; Josèphe n’en rapporte guère davantage. Il semble même couvrir l’injustice de Séhon, en disant que les Israélites prirent les armes avec joie, se mirent en bataille et marchèrent contre les ennemis. Cependant l’Écriture (Nombres 21.13) dit positivement qu’ayant assemblé son armée, il marcha au-devant d’Israël dans le désert, vint à Jasa, et livra la bataille. Nous ignorons quelles étaient les forces et le nombre des troupes de l’armée de Séhon ; nous ne sommes pas mieux instruits de celles des Israélites, à moins qu’on ne s’arrête au dénombrement qui en est fait dans les Nombres (Nombres 26), et qui se monte à plus de six cent vingte-quatre mille hommes ; alors il paraîtra presque impossible que Séhon eût eu des forces assez considérables pour oser attaquer une armée aussi nombreuse. Ainsi nous ne pouvons donner que des conjectures touchant la disposition des troupes des deux armées. Nous connaissons la tactique des peuples de l’Asie : les Juifs, qui sortaient de l’Égypte, se rangeaient en phalange ; en vain chercherait-on l’origine de cette manière de combattre ; elle est trop avant dans les siècles passés ; mais il est certain que la phalange des Juifs était distinguée par grands corps sur une très-grande profondeur, chaque corps plus ou moin gros, selon la force et la puissance des tribus, chacune fournissant son contingent.
La phalange des Grecs, lorsque Philippe la porta à son plus haut degré de perfection, était de seize mille hommes d’infanterie, pesamment armée ; ce nombre composait une armée, la cavalerie non comprise ; Philippe partagea cette phalange en quatre corps, chacun de quatre mille hommes, et chaque corps s’appelait phalange. Cette division ne se remarque pas chez les peuples de l’Asie, et leur discipline militaire n’était pas à beaucoup près si parfaite que celle des Grecs ; ils se rangeaient comme ceux-ci, mais ils laissaient plusieurs petits intervalles pour laisser passer ceux qui portaient les ordres du général, et pour que les blessés pussent se retirer pendant le combat.
L’armée de Séhon se rangea donc en phalange selon la coutume ordinaire de ces temps-là. À l’égard de la cavalerie, comme l’Écriture n’en dit rien, je n’en suppose que par conjecture ; quant aux Juifs ils n’en eurent pas beaucoup, et ce ne fut que fort tard ; car je n’en vois point dans le commencement de la conquête de la terre promise. Ici finissent les observations de Folard.
Cette guerre arriva la dernière année de la vie de Moïse, et quelques mois avant l’entrée des Israélites dans la terre promise, l’an du monde 2553, avant Jésus-Christ 1447, avant l’ère vulgaire 1451. Moïse remarque que Séhon avait conquis la meilleure partie du pays qu’il possédait, sur les Moabites, et qu’il s’y était établi en leur place ; et c’est pour cela que du temps de Jephté (Juges 11.12-14), les Ammonites et les Moabites répétaient le pays que les Israélites avaient autrefois conquis sur Séhon, prétendant qu’il devait leur être rendu. Mais Jephté leur répondit que Moïse les Hébreux l’ayant pris sur Séhon, qui en était alors paisible possesseur, et l’ayant pris en bonne guerre, il appartenait à Israël, et que ni Moab ni Ammon n’avaient rien à y prétendre.
Ou Sichon ou Sihon (Jérémie 48.45), ville qui est la même que Hesebon, capitale des Moabites, nommée au même endroit.