Vent mortel dont Dieu se servit peut-être pour détruire l’armée de Sennachérib devant Jérusalem. Voyez Sennachérib. M. de Lamartine a donné, dans le 3° volume de son Voyage en Orient, le récit du séjour de Falala Sayeghir chez les Arabes errants du grand désert ; on y trouve, pages 193-195, une description du samoun, et nous allons la rapporter ici.
Fatala Sayeghir était alors à Darkisch, capitale des Wahabis, où régnait Ebn Sihoud, qui avait une grande vénération pour Napoléon, et pouvait réunir dans ses États quinze cent mille Bédouins capables de porter les armes.
En quittant Darkisch,« nous prîmes, dit Fatale Sayeghir, le chemin du pays de Heggias, couchant chaque nuit dans les tribus qui couvraient le désert. Le cinquième jour, après avoir passé la nuit sous les tentes de El-Henadi, nous nous levâmes avec le soleil, et sertîmes pour seller nos dromadaires, qu’à notre grand étonnement nous trouvâmes la tête enterrée dans le sable d’où il nous fut impossible de les faire sortir. Nous appelâmes à notre aide les Bédouins de la tribu, qui nous apprirent que l’instinct des chameaux les portait à se cacher ainsi pour éviter le simoun ; que c’était un présage de ce terrible vent du désert qui ne tarderait pas à éclater, et que nous ne pouvions nous mettre en route sans courir à une mort certaine. Les chameaux, qui sentent deux ou trois heures à l’avance l’approche de ce terrible fléau, se tournent du côté opposé au vent, et s’enfoncent dans le sable. Il serait impossible de leur faire quitter cette position pour manger ou boire, pendant toute la tempête, durât-elle plusieurs jours. La Providence leur a donné cet instinct de conservation qui ne les trompe jamais. Lorsque nous apprîmes de quoi nous étions menacés, nous partageâmes la terreur générale, et nous hâtâmes de prendre toutes les précautions qu’on nous indiqua. Il ne suffit pas de mettre les chevaux à l’abri, il faut encore leur couvrir la tête et leur boucher les oreilles, autrement ils seraient suffoqués par les tourbillons d’un sable fin et subtil que le vent balaye avec fureur devant lui. Les hommes se rassemblent sous les tentes, en bouchent les ouvertures avec un soin extrême, après s’être pourvus d’eau qu’ils placent à portée de la main ; ensuite ils se couchent par terre, la tête couverte de leur machlah, et restent ainsi tout le temps que dure l’ouragan dévastateur.
Ce matin-là, tout fut en tumulte dans le camp, chacun cherchant à pourvoir à la sûreté de son bétail, et se retirant ensuite précipitamment sous sa tente. Nous avions à peine abrité nos belles juments nedgdis que la tourmente commença. Des rafales furieuses amenaient des nuages d’un sable rouge et brûlant qui tourbillonnait avec impétuosité et renversait tout ce qui se trouvait sur son passage ; s’amoncelant en collines, il enterrait tout ce qui avait la force de lui résister. Si dans ces moments-là quelques parties du corps se trouvent atteintes, la chair s’enflamme comme si un fer chaud l’avait touchée. L’eau qui devait nous rafraîchir était devenue bouillante ; et la température de la tente surpassait celle d’un bain turc. La tempête dura dix heures dans sa plus grande furie, et diminua ensuite graduellement pendant six heures ; une heure de plus, et nous étions tous suffoqués. Lorsque nous nous hasardâmes à sortir de nos tentes, un affreux spectacle nous attendait : cinq enfants, deux femmes et un homme gisaient morts sur le sable encore brûlant, et plusieurs Bédouins avaient le visage noirci et entièrement calciné comme par la bouche d’une fournaise ardente. Lorsque le vent de simoun atteint un malheureux à la tête, le sang lui coule à flots par la bouche et les narines ; son visage se gonfle, devient noir, et bientôt il meurt étouffé. Nous remerciâmes le Seigneur de n’avoir pas été nous-mêmes surpris par ce terrible fléau au milieu du désert, et d’avoir été ainsi préservés de cette mort affreuse. »