[Il y avait plusieurs espèces de trompettes. « Schophar, qui est traduit dans les Septante par salpinx, ou ceratina, et dans la Vulgate ordinairement par buccina, est aussi appelé yobel (Exode 19.13), qui, selon les rabbins, signifie une corne de bélier. Ce n’est pas que cet instrument dût être réellement une corne de bélier, puisque cette corne n’étant pas creuse, mais solide, ne pouvait servir à former cet instrument ; mais ce pouvait être une espèce de cor qui avait la forme d’une corne de bélier, et en effet, ailleurs on le nomme kerenha-yobel, ou corne de yobel (Josué 6.5). Il est souvent parlé de cet instrument dans l’Écriture. Moïse voulant exprimer le bruit que le Seigneur fit retentir sur le mont Sinaï lorsqu’il y donna sa loi, dit qu’on entendit le son du schophar ou yobel (Exode 19.13). Il donne aussi le même nom de schophar à l’instrument dont on devait se servir pour annoncer l’arrivée du jubilé (Lévitique 25.9) ; et les rabbins prétendent que ce fut du nom même de cet instrument, appelé aussi yobel, que cette année fut appelée yobel ou jubilé (Lévitique 25.10). Les instruments dont on se servit au siège de Jéricho, et au son desquels les murs de cette ville furent renversés, sont appelés schopharoth yobelim ou cornes de yobel (Josué 6.4). Le schophar ne devait pas être rare dans le pays, puisque Gédéon en donna aux trois cents hommes qu’il choisit pour attaquer les Madianites (Juges 7.16). Dans la guerre, on faisait usage du schophar pour assembler les troupes, charger l’ennemi, sonner la retraite (Juges 3.27). Salomon et Jéhu furent proclamés et mis sur le trône au son du schophar (1 Rois 1.24 2 Rois 9.13). Les sentinelles se servaient aussi du schophar pour donner le signal (Ézéchiel 33.2).
Hhatsotserah, que les Septante traduisaient aussi par salpinx et la Vulgate par tuba, est le nom des deux trompettes d’argent que Moïse fit faire dans le désert (Nombres 10.2). C’était avec ces instruments qu’on assemblait le peuple ou les chefs (Nombres 10.2-7), et il n’y avait que les prêtres qui eussent le droit de sonner de ces trompettes (Nombres 10.8). On en usait aussi à la guerre et dans les grands jours de cérémonie, comme aux jours de néoménie et lorsqu’on offrait des sacrifices publics et solennels (Nombres 10.9-10). On ignore si ces trompettes étaient droites ou recourbées, l’Écriture ne nous en dit rien ; et les trompettes des autres peuples, dont on a des descriptions dans les auteurs, ne font rien à notre sujet et ne sont point uniformes. Nous croyons que les hhatsotseroth étaient longues et droites, pour les distinguer des schopharoth, qui étaient recourbées en forme de cornes. Ces deux instruments se trouvent distingués dans Osée : Sonnez du schophar à Gabaa ; et de la hhatsotserah à Rama (Osée 5.8).
L’instrument dont on devait se servir à la fête du septième mois, appelée communément la féte des Trompettes, n’est point nommé dans l’hébreu, il est seulement parlé du son qui doit annoncer cette fête, et l’expression qui désigne ce son ne peut convenir qu’au son (Lévitique 22.24) du schaphar ou de la hhatsotserah. Mais Dieu n’avait, pas encore ordonné à Moïse de faire faire les deux hhatsotseroth (Nombres 10.2) lorsqu’il lui ordonna d’établir la fête du septième mois (Lévitique 23.24). De plus, lorsqu’il lui ordonna de faire faire les deux hhatsotseroth, il dit qu’on s’en servira pour les néoménies, mais il ne dit pas qu’on doive s’en servir pour la fête du septième mois. Il y a donc lieu de croire que la fête du septième mois s’annonçait au son du schophar, de même que l’année du jubilé. » Bible de Vence, Dissert, sur les instruments de musique, tome 9 p. 425 427, cinquième édition.
Le signal de la bataille, dit dom Calmet dans sa Dissertation sur la milice des Hébreux (insérée dans la Bible de Vence, tome 6 page 265-267, 5e édition), se donnait par le son des trompettes, et c’étaient les prêtres qui sonnaient de cet instrument « Les prêtres enfants d’Aaron sonneront de la trompette, dit Moïse, et ce sera une loi perpétuelle dans toutes vos races. Lorsque vous irez à la guerre contre vos ennemis, vous sonnerez de la trompette, et le Seigneur se souviendra de vous pour vous délivrer des mains de vos ennemis. » Parmi les autres peuples comme parmi les Hébreux, surtout parmi les Égyptiens, la trompette était un instrument sacré. L’usage en était réservé aux personnes libres, et souvent les plus distingués en sonnaient eux-mêmes. Dans la guerre contre les Madianites (Nombres 31.6), on envoya Phinéès, fils du grand prêtre Eléazar, avec les instruments sacrés, c’est-à-dire, les trompettes du Seigneur, pour en sonner dans l’armée. Le son de la trompette était comme un gage de la protection du ciel et un signe de la présence du Seigneur. Balaam, envisageant le camp d’Israël, s’écriait : « Il n’y a point d’idole dans Jacob ni de simulacre dans Israël ; le Seigneur son Dieu est avec lui, et on entend au milieu de lui le son de la trompette de son roi (Nombres 23.21). » Abia, roi de Juda, disait aux troupes de Jéroboam, roi d’Israël : « Nous avons avec nous et à notre tête Dieu, et ses prêtres avec les trompettes sacrées, pour en sonner contre vous. Enfants d’Israël, ne combattez point contre le Seigneur Dieu de vos pères (2 Chroniques 13.12). » Les troupes d’Abia, qui étaient bien moins nombreuses que celles de Jéroboam, se voyant enveloppées de tous côtés, commencèrent à crier et les prêtres à sonner de la trompette. En même temps Dieu répandit la terreur dans l’armée de Jéroboam, et Il en fut tué ce jour-là cinq cent mille.
Josaphat, roi de Juda, marchant contre les Moabites, les Iduméens et les Amnhonites, place à la tête de son armée les lévites avec les instruments de musique du temple, comme s’il eût marché au triomphe, parce que le Seigneur lui avait promis la victoire par le prophète Jahaziel (2 Chroniques 20.14-21). Enfin, du temps des Machabées, Jean et Judas, fils du grand prêtre Simon, mirent en fuite l’armée de Cendébée par le seul son des trompettes sacrées (1 Machabées 16.8).
On ne doit pas confondre les trompettes dont on vient de parler, et dont les prêtres seuls avaient droit de sonner, avec les cors dont les généraux se servaient pour assembler leurs troupes et pour donner le signal de la retraite. Aod ayant mis à mort Eglon, roi de Moab, sonna du cor dans les montagnes d’Éphraïm, et, ayant assemblé du monde, voulut fondre sur les Moabites (Juges 3.27). Gédéon se servit du même moyen pour assembler des troupes contre les Madianites(Juges 6.34). Saül sonna du cor, et donna le signal de la guerre contre les Philistins, après que Jonathas eut défait la garnison qu’ils avaient à Gabaa (1 Samuel 13.3). Joab sonna la retraite, et arrêta, par le son du cor, l’impétuosité de ses troupes qui poursuivaient celles d’Abner (2 Samuel 2.28). Il finit de même la bataille contre Absalon (2 Samuel 18.16). Séba, fils de Bachri, excita le peuple à le suivre en sonnant du cor (2 Samuel 20.1). Par ce moyen on pouvait assembler en peu de temps de nombreuses troupes, le son se communiquant aisément et passant de lieu en lieu en peu d’heures, dans un pays fort serré, fort peuplé, où les villages étaient très-près les uns des autres, et le peuple naturellement léger et ami de la nouveauté. On se servit aussi du cor dans deux occasions singulières : lorsque les Israélites furent arrivés devant Jéricho,Dieu ordonna que les Israélites fissent le tour de la ville pendant sept jours, et, qu’au septième, les prêtres sonnassent des sept cors dont on se servait pour annoncer le jubilé, et ce fut au son de ces instruments que les murailles de cette ville furent renversées (Josué 6.4) ; lorsque Gédéon marcha avec trois cents hommes contre les Madianites, il leur donna à tous des cors, et il en tenait un lui-même (Juges 7.16) ; et ce fut au son de ces instruments qu’il mit en déroute l’armée des Madianites.
Le Seigneur ordonne à Moïse (Nombres 10.2-5) de faire deux trompettes d’argent battu au marteau, afin de s’en servir pour assembler le peuple lorsqu’il faudra décamper. Il ajoute : Après que vous aurez sonné de ces trompettes, tout le peuple s’assemblera auprès de vous à l’entrée du tabernacle de l’Alliance. Si vous ne sonnez qu’une fois, les princes et les chefs de la multitude d’Israël viendront vous trouver. Mais si le son de la trompette est plus long et plus entrecoupé, ceux qui sont du côté de l’orient décamperont les premiers. Au second son de la trompette, ceux qui sont au midi détendront leurs tentes ; au troisième coup, ceux qui sont au couchant ; et au quatrième, ceux qui sont au septentrion, décamperont. Mais lorsqu’il faudra seulement assembler le peuple, les trompettes sonneront d’un son plus uni, et plus simple, et non de ce son entrecoupé et serré.
Les prêtres enfants d’Aaron auront seuls le droit de sonner des trompettes, et ce sera pour vous une loi inviolable dans toute la suite de vos générations. Ils en sonneront lorsque vous irez à la guerre contre vos ennemis, et le Seigneur votre Dieu se souviendra de vous secourir. Ils en sonneront aussi lorsque vous ferez des festins de religion, que vous célébrerez vos fêtes solennelles, que vous offrirez vos holocaustes et vos hosties pacifiques, et aux premiers jours du mois.
On se servait aussi principalement de ces trompettes pour annoncer le commencement de l’année civile, le commencement de l’année Sabbatique (Lévitique 23.24 Nombres 29.1), et le commencement du jubilé (Lévitique 25.9-10). Josèphe dit que ces trompettes étaient longues de près d’une coudée, et avaient le tuyau de la grosseur d’une flûte ordinaire. Elles n’avaient qu’autant d’ouverture qu’il en fallait pour les emboucher. Le bout était semblable à celui d’une trompette. Il n’y en eut d’abord que deux dans le camp ; mais ensuite on en fit un plus grand nombre. Dès le temps de Josué (Josué 6.3), il y en avait sept. À la dédicace du temple de Salomon (2 Chroniques 5.12), il y avait jusqu’à six-vingts prêtres qui sonnaient de la trompette. Josèphe veut que ce prince ait, fait deux cent mille trompettes, ainsi que Moïse l’avait ordonné. Je ne sais où il a pris ce grand nombre de trompettes.
Outre les trompettes sacrées du temple, dont l’usage était réservé aux prêtres seuls, même à la guerre et dans les combats, il y en avait d’autres dont les généraux se servaient quelquefois pour assembler leurs troupes. Par exemple, Aod sonna de la trompette (Juges 6.27), pour assembler les Israélites contre les Moabites qui les opprimaient, et dont il venait de tuer le roi Eglon. Gédéon prit en sa main une trompette, et en donna une à chacun de ses gens (Juges 7.8-16), lorsqu’il attaqua les Madianites. Joab sonna de la trompette pour donner le signal de la retraite à ses gens, dans la bataille contre ceux du parti d’Abner (2 Samuel 2.28), et dans celle contre Absalon (2 Samuel 18.16), et enfin dans la poursuite de Séba, fils de Bochri (2 Samuel 20.22). On voit la même chose dans vingt autres endroits de l’histoire des Hébreux.
Fête des Trompettes. Elle se célébrait le premier jour du septième mois de l’année sainte ; qui était le premier de l’année civile. Ce mois s’appelait tizri, et répondait à la lune de septembre. On annonçait le commencement de l’année au son des trompettes (Lévitique 23.2 Nombres 29.1-4). [Voyez Trompette]. Ce jour était solennel ; toute œuvre servile y était défendue ; ou y offrait un holocauste solennel au nom de toute la nation, d’un veau, de deux béliers et de sept agneaux de l’année, avec les offrandes de farine et de vin, que l’on avait accoutumé d’offrir avec ces sacrifices. L’Écriture ne nous dit point la raison de l’établissement de cette fête. Théodoret croit que c’était en mémoire du tonnerre que l’on avait ouï sur le mont Sinaï, lorsque Dieu y donna sa loi. Les rabbins veulent que ce soit pour faire souvenir de la délivrance d’Isaac, en la place duquel Abraham immola un bélier.
Aujourd’hui les Juifs ont coutume ce soir-là de se souhaiter l’un à l’autre une bonne année, de faire meilleure chère qu’à l’ordinaire, et de sonner de la trompette à trente diverses fois. Léon de Modène remarque qu’il y a eu autrefois dispute entre les rabbins sur le temps auquel le monde a commencé, les uns en mettant le commencement au printemps, et les autres en automne ; mais que le sentiment qui le met en automne a prévalu, et que c’est sur cela qu’est fondée la fête des Trompettes, qui se célèbre au commencement de tizri, qui répond au mois de septembre. Pendant cette tête, qui dure pendant les deux premiers jours du mois, le travail et les affaires sont suspendus. Les Juifs tiennent par tradition que ce jour-là Dieu juge particulièrement des actions de l’année précédente, et dispose des événements de l’année où l’on va entrer. C’est pourquoi, dès les premiers jours du mois précédent, ou du moins huit jours avant la fête des Trompettes, la plupart vaquent aux œuvres de pénitence et de mortification, et la veille plusieurs se font donner trente-neuf coups de fouet, par forme de discipline.
Le premier soir qui commence l’année, et qui précède le premier jour de tizri, en revenant de la synagogue, ils se disent l’un à l’autre : Soyez écrit en bonne année. L’autre répond : Et vous aussi. Étant dans leur maison, on sert sur la table du miel et du pain levé, et tout ce qui peut faire augurer une année abondante et douce. Il y en a plusieurs, qui vont, le matin de ces deux fêtes, vêtus de blanc à la synagogue, en signe de pureté et de pénitence. Parmi les Allemands, quelques-uns portent alors l’habit qu’ils ont destiné pour leur sépulture ; et cela dans un esprit de mortification. On récite ce jour-là dans la synagogue plusieurs prières particulières, et plusieurs bénédictions. On y tire solennellement le Pentateuque de l’armoire, et on y lit à cinq personnes le sacrifice qui se faisait ce jour-là. Ensuite on sonne trente fois du cor, tantôt d’une manière fort lente, et puis d’une manière fort brusque. Ils disent que c’est pour faire songer au jugement de Dieu, et pour intimider les pécheurs, et les porter à pénitence. Après quelques prières, ils s’en retournent à la maison, ils se mettent à table, et passent le reste du jour à ouïr quelques sermons, et à d’autres exercices de dévotion. Les deux jours de la fête sont entièrement semblables.
Pour se préparer à la fête des Trompettes ou du commencement de l’année civile, plusieurs Juifs se plongent dans l’eau froide, et à mesure qu’ils s’y plongent ils confessent leurs péchés et se frappent la poitrine. Ils s’y plongent entièrement, afin de paraître entièrement purs aux yeux de Dieu. Ils croient que ce jour-là Dieu assemble son conseil, ou ses anges, et qu’il ouvre ses livres pour juger tous les hommes. On ouvre trois sortes de livres ; le livre de vie, pour les justes ; le livre de mort, pour les méchants ; le livre des hommes qui tiennent le milieu, pour ceux qui ne sont ni tout à fait bons, ni tout à fait mauvais. Il y a dans les deux livres de vie et de mort deux espèces de pages, l’une pour cette vie et l’autre pour l’éternité : car il arrive souvent que les méchants ne sont pas châtiés en cette vie selon leur démérite, et que les justes y sont traités avec rigueur, comme s’ils avaient encouru la colère de Dieu. Cette conduite du Seigneur fait qu’on n’est jamais sûr de son état, et qu’on est toujours dans l’incertitude si l’on est digne d’amour ou de haine. Pour les mitoyens, qui ne sont ni tout à fait bons, ni tout à fait mauvais, ils ne sont écrits nulle part, disent les Juifs ; Dieu attend jusqu’au jour de l’expiation, qui est le dixième de l’année, pour voir s’ils se convertiront. Cantique jour-là il porte contre eux son jugement, ou de vie, ou de mort, selon leur mérite.