Il est dit dans le quatrième Livre des Rois (2 Rois 18.34 ; Isaïe 37.13), que les Sépharvaïm adoraient Ana et Ava : Ubi est deus Senharvaïm, Ana et Ava ? Et dans (Isaïe 37.13 ; 2 Rois 9.13) : Où est le roi de Sépharvaïm, Ana et Ave ? Je conjecture que ces dieux Ana et Ava sont les mêmes qu’Anamélech et Adramélech, dieux de Sépharvilïm, dont il est parlé (2 Rois 17.31) et que dans les autres passages que nous venons de citer, les rois d’Emath et de Sépharvaïm ne sont autres que les dieux de ces peuples ; car dans le style des Hébreux et des anciens Orientaux, on donnait souvent le nom de rois aux divinités des peuples. Or Anamélech et Adramélech signifient le soleil et la lune. On doit donc conclure qu’Ana et Ava signifient la même chose. Ana-mélech signifie le roi benin ; Adra-mélech, le roi magnifique ; Ara-mélech, le roi inique, ou le dieu pervers. Les Hébreux aimaient à défigurer les noms des dieux des païens. Ils ont mis ici apparemment Ava, iniquus obliquas, perversus, au lieu d’Adra, magnifique ; comme ils mettent Boseth, pour Baal, Miphiboseth, pour Miphibaal ; et Beth-aven, maison d’iniquité, peur Béth-el, maison de Dieu.
D’autres croient que Ana et Ava sont des noms de lieux ou de provinces. Ils traduisent (2 Rois 18.34) : Où est le Dieu de Sépharvaim, d’Ana et d’Ara ? Ce qui est confirmé par (2 Rois 19.13), où il est dit : Ubi est Rex civitalis Sepharvaïm, Ana et Ara ? Ce qui est encore répété dans (Isaïe 37.13). S’il avait voulu désigner des rois ou des dieux sous les noms d’Ana et d’Ava, il n’aurait pas dit au singulier : Où est le roi de Sépharvaïm, Ana et Ava ? Mais : Où sont les rois Ana et Ava ? De plus, au quatrième Livre des Rois (2 Rois 17.24), il est dit que le roi des Assyriens fit venir à Samarie des habitants de Cutha, d’Ara, d’Emath, etc. Ce qui fait croire à la plupart des commentateurs qu’en l’endroit que nous examinons, Ana et Ava marquent des noms de provinces au delà de l’Euphrate, et qu’apparemment ils signifient un canton d’Assyrie, nommé Diaba, Adiaba et Adiabène. Je ne voudrais pas toutefois abandonner le sentiment qui explique Ana et Ava, comme synonymes à Anamélech et à Adramélech, au soleil et à la lune.
On connaît une ville d’Ana à l’extrémité de l’Arabie déserte sur l’Euphrate. Tavernier dit qu’elle occupe les deux bords de ce fleuve, à-peu-près de même que Paris est sur les deux bords de la Seine ; mais un autre voyageur m’a écrit qu’elle n’occupe qu’un bord de l’Euphrate, et n’a qu’une rue qui est extrêmement large. Dans une île qui en est voisine, il y a une très-belle mosquée. La terre est bien cultivée à une demi-lieue autour de la ville ; mais au delà ce ne sont que déserts affreux.