Une dizaine de mots hébreux, souvent employés comme synonymes dans l’Ancien Testament, s’appliquent à divers engins dont la nature exacte n’est pas toujours connue aujourd’hui, et dont les traductions modernes ne peuvent pas être très rigoureuses. Il s’agit à la fois de pêche et de chasse, car les anciens se servaient de filets pour attraper oiseaux et quadrupèdes aussi bien que poissons ; d’où les termes variables de nos versions : filets, rets, lacet, piège, embûches, etc. (Amos 3.5 ; Osée 5.1 ; Ésaïe 8.14 ; Psaumes 140.5 ; Job 18.8-10 ; Siracide 9.13 etc.).
Le rêcheth est l’objet qui « saisit », filet qu’on étend ou qu’on cache, devant oiseaux (Proverbes 1.17 ; Osée 7.12), lion (Ézéchiel 19.8), monstre marin (Ézéchiel 32.3), et qui au figuré représente l’épreuve (Lamentations 1.13), le châtiment de Dieu (Ézéchiel 12.13 ; Ézéchiel 17.20), l’œuvre du méchant (Psaumes 10.9 ; Psaumes 35.7 et suivant, Proverbes 29.5).
Le pakh est surtout le filet ou le lacet de l’oiseleur (figure 86), soit au propre (Proverbes 7.23 ; Ecclésiaste 9.12), soit au figuré (Osée 9.8 ; Psaumes 91.3 ; Psaumes 124.7 ; Jérémie 18.23 ; Jérémie 48.43s etc.).
Le mokhch désigne l’appât ou piège, surtout pour oiseaux (Amos 3.5), mais aussi pour un monstre marin (Job 40.19), et représente au figuré hommes malfaisants (Exode 10.7 ; Proverbes 18.7 ; Job 34.30 etc.), idoles (Exode 23.33 etc.), même la mort (Psaumes 18.6 = 2 Samuel 22.6), etc.
Le kherém, signifiant : objet percé de trous, est le filet à poissons (Ézéchiel 26.5 ; Ézéchiel 26.14 ; Ézéchiel 47.10), employé aussi au figuré pour la séductrice (Ecclésiaste 7.26).
Le macmor, signifiant : engin couché, et autres termes parents, est destiné à la pêche (Ésaïe 19.8 ; Habakuk 1.15 et suivant) et à la chasse (Ésaïe 51.20) ; de même la metsoudâ ou met-sôda (Psaumes 66.11 ; Ecclésiaste 9.12), et la sebâkâ, signifiant : treillis, Job 18.8. Les Évangiles mentionnent surtout des filets à pêche (voir Dalman, Les itinéraires de Jésus, p. 180ss).
Le diktuon, terme général, au pluriel, est associé à la vocation des disciples au bord du lac : ce sont leurs filets qu’ils raccommodaient (Marc 1.19 ; Matthieu 4.21), lavaient (Luc 5.2), qu’ils jetèrent sur l’ordre du Maître — et ce fut la pêche miraculeuse (Luc 5.4-6), puisqu’ils laissèrent pour suivre Jésus (Marc 1.18 ; Matthieu 4.20) ; au singulier c’est le filet, peut-être plus grand, de la deuxième pêche miraculeuse (Jean 21.6 ; Jean 21.8-11.1).
L’amphiblêstron (Matthieu 4.18) est le filet qu’on « lance » (verbe amphiballeïn, Marc 1.18), encore couramment employé en Palestine et du reste tout à fait analogue à notre « épervier »: large cône au rebord circulaire lesté de poids, le sommet restant fixé à une corde ; le pêcheur se retendait sur l’épaule et sur le bras gauche et s’attachait la corde au poignet droit, puis d’un certain geste qui déployait en cercle le filet, il le lançait sur l’eau ; les poids l’enfonçaient en emprisonnant les poissons, sur lesquels il se refermait quand on le retirait avec la corde. C’était une pêche de surface ou sur fonds visibles ; Jésus pouvait avoir à la pensée l’attention et l’habileté nécessaires à son maniement quand il appela les Galiléens à devenir à sa suite des « pêcheurs d’hommes ».
La sagène, signifiant : seine ou senne, qu’en France on appelle aussi « traîne », mentionnée seulement dans Matthieu 13.47, est le long filet qu’on étendait verticalement du rivage à un bateau ou d’un bateau à un autre, et qu’on ramenait lentement sur lui-même soit en cercle fermé, soit à la côte, un bord soutenu par des flotteurs et l’autre lesté raclant le fond. Pour dégager les poids pris dans des algues ou des rochers, les pêcheurs devaient fréquemment plonger ; aussi étaient-ils parfois dévêtus (Jean 21.7). Homère connaissait ce « filet ramasse-tout » (IL, 5 487) ; les Romains l’appelaient « balai » (everriculum) ; on s’en sert encore aujourd’hui sur les fonds de sable plats (Méditerranée, Gironde, Cornouailles, etc. ; voir une description de Ch. Wagner, L’âme des choses, I).
Opération de vaste envergure, qui, après les efforts soutenus du retour à la rive, aboutit au triage indispensable des poissons comestibles, parmi les animaux et objets de toute espèce ramenés dans le filet ; ce genre de pêche fournit au Seigneur les données de la septième parabole du Royaume (Matthieu 13.47-50), parallèle à celle de l’ivraie (Matthieu 13.24-30 ; Matthieu 13.36-43), mais qui contient son enseignement particulier : alors que l’une et l’autre illustrent le mélange actuel inévitable des justes et des injustes, celle-ci insiste davantage sur la certitude de l’examen final et définitif, qui sera confié non aux pêcheurs, c’est-à-dire des hommes, mais aux anges ; tableau très approprié pour la dernière des paraboles du Royaume, où il ne faut pas plus chercher que dans celle de l’ivraie une interdiction de la discipline dans l’Église. Voir Ivraie.
Dans les épîtres, le pagis de Romains 11.9, citation de Psaumes 69.23, équivaut au pakh de ce passage ; là, comme dans Luc 21.34, il s’agit plutôt du filet du chasseur qui ailleurs est traduit « piège » (1 Timothée 3.7 etc.). Comparez la « gazelle échappée du filet » (Siracide 27.20).
Enfin, le brokhos de 1 Corinthiens 7.35 évoque les combats du cirque ou de la guerre, soit au filet du rétiaire, soit plus probablement au lacet, sorte de lasso, ou nœud coulant. Voir Pêche, Chasse, Piège.
Numérisation : Yves Petrakian