Il était fils de Sénèque le père, ou le rhéteur, et frère aîné de Sénèque le philosophe, l’auteur tragique, qui fut précepteur, puis conseiller de Néron ; frère aussi de Marcus Annaeus Mêla ; ce dernier eut pour fils Lucain, l’auteur de la Pharsale, poème épique en dix livres. Gallion s’appela d’abord Lucius Annaeus Novatus, puis, après son adoption par un ami de son père, Lucius Junius Gallio, nom sous lequel il est connu dans l’histoire. Son frère, le philosophe, parle de lui en disant : « Mon seigneur ». On le désignait sous le nom de « doux Gallion ». La date de son proconsulat à Corinthe (Actes 18.12-17) peut être fixée, grâce à la découverte en 1905 de la « pierre de Delphes » qui le mentionne ; ce fut probablement de mai 51 à mai 52, l’apôtre Paul ayant été amené devant lui dès juin ou juillet 51 (Voir Chronologie du Nouveau Testament, II, 2, où sont exposées les raisons de cette conclusion.).
Pourquoi Gallion refuse-t-il de s’occuper de l’affaire portée devant lui, et renvoie-t-il les accusateurs de l’apôtre avec ces mots dans lesquels s’exprime tout le dédain du Romain pour ces Juifs méprisés : « … puisqu’il s’agit de discussions sur une doctrine, sur des noms et sur votre loi particulière, examinez cela vous-mêmes, je ne veux pas être juge de ces choses-là » ? On a supposé que l’accusation était la même qu’à Thessalonique : (Actes 17.7) « ils sont tous rebelles aux édits de César, puisqu’ils disent qu’il y a un autre roi, Jésus ». Nous ne le croyons pas : Gallion n’aurait pas pu se désintéresser d’une accusation pareille. Il s’agit sûrement de tout autre chose : l’empereur Claude s’était montré assez tolérant à l’égard des Juifs ; il ne se décide à la sévérité, en les expulsant ou en tâchant de les expulser de Rome, que quand ils deviennent insupportables par les troubles qu’ils suscitent (voir Claude) ; mais si la religion juive est licite (religio licita), c’est sous la réserve expresse que les Juifs eux-mêmes seront fidèles à leurs propres lois ; c’est à cette condition seulement qu’ils ont droit à la protection de l’autorité romaine. Or, les Juifs de Corinthe voudraient prouver que Paul, étant un mauvais Juif, prêche une religion illicite, et doit être envisagé comme rebelle aux édits de César ; en les renvoyant, Gallion les empêche de le démontrer et évite des troubles entre Juifs. C’est de la neutralité officielle, et non une faveur envers saint Paul permettant de supposer que Gallion était chrétien. Le surnom de gallioniste a parfois été donné à des indifférents en matière religieuse.
Ern. M.
Numérisation : Yves Petrakian