La Bible nous apprend que la guerre est fille de la Chute (voir ce mot). Sitôt que la créature fut, par sa faute, isolée de son Créateur, la lutte fratricide commença (Genèse 4.8). Jésus appelle Satan : « le Meurtrier initial » (Jean 8.44). « D’où viennent les guerres ? » dit saint Jacques : « de vos passions » (Jacques 4.1). La guerre doit donc être envisagée par le chrétien comme une des manifestations les plus évidentes de la déchéance humaine. C’est cette déchéance qu’il faut condamner, c’est d’elle qu’il faut relever l’humanité. Quant à la guerre, elle apparaît dans l’humanité animale comme un accident inévitable, un mal qu’on ne saurait extirper sans en éliminer d’abord le principe, qui est la séparation d’avec Dieu. D’ailleurs, pour être équitable ici, les distinctions s’imposent. Tant que la notion du juste et du bien n’est pas restaurée dans la nature humaine, livrée — tout au moins pour les masses — à ses appétits, la guerre, c’est-à-dire l’emploi de la force brutale pour faire triompher une cause, se présente sous des jours fort divers : tantôt un fléau, tantôt une nécessité, tantôt un facteur de la civilisation. L’antiquité a connu la guerre de proie, qui a fixé son type dans les mœurs de l’empire assyrien (figure 104 à 108) ; mais elle a connu aussi la guerre d’invasion, provoquée souvent par des raisons économiques, des besoins de libération, des poussées irrésistibles de peuples, telles les guerres qui ont précipité les hordes asiatiques vers les rives fécondes de l’Euphrate et du Nil. À la guerre d’invasion répondait la guerre défensive : à toute inondation, si l’on ne veut pas être emporté, il faut opposer une digue. Condamnera-t-on la digue en même temps que l’inondation ? Nous touchons ici à la guerre facteur de progrès. Si les républiques de Sparte, d’Athènes et de Rome n’avaient pas été fortement armées, si Marius n’avait pas brisé le flot des barbares Cimbres et Teutons, la civilisation gréco-latine n’aurait pas brillé sur l’Occident. Il est même des guerres de conquêtes dont le rôle providentiel ne peut échapper à l’attention de l’historien. Sans les victoires de David, le Messie n’aurait pas eu son berceau ; sans les victoires d’Alexandre, l’Évangile n’aurait pas eu sa langue mondiale ; sans les victoires de César, la pax romana n’aurait pas assuré à saint Paul les routes de la mission. Il faut méditer à ce point de vue le livre des Actes. Par la guerre s’est en partie réalisée dans le monde la sanction du Paradis perdu : « Tu enfanteras avec douleur ». Tout ceci nous fait voir que la condamnation de notre jugement, s’il est bien averti, doit porter non sur la guerre qui n’est que la manifestation d’un état, mais sur la chute qui est l’état lui-même, la source originelle de l’égoïsme, de l’orgueil, de la convoitise, de la violence, qui engendrent dans la société humaine, à toutes les pages de son histoire, les conflits sanglants. Ancien Testament. Dieu, qui n’abandonne pas sa créature dont il respecte la liberté, tire le bien du mal et, dans l’humanité charnelle, fait concourir les armes de la chair à l’éducation du peuple par lequel il veut sauver le monde. Arguer de la loi du Sinaï que Dieu interdit toute guerre, c’est mettre Jéhovah lui-même en fâcheuse posture. N’est-ce pas au moment même où il promulgue : « Tu ne convoiteras point, tu ne déroberas point, tu ne tueras point », qu’il fait luire aux yeux des tribus affamées la luxuriance de Canaan et qu’il donne pour programme à son peuple de déposséder les Cananéens et de s’installer à leur place ? L’histoire d’Israël n’est qu’une longue et tragique bataille, où l’on voit même Jéhovah prendre à son compte les victoires de terribles conquérants ; tel l’Assyrien : « verge de ma colère » (Ésaïe 10.6), le Caldéen : « voici, je vais susciter un peuple furibond et impétueux » (Habakuk 1.6), le Perse… : il appelle Cyrus son « oint » et son « pasteur » (Ésaïe 44 et Ésaïe 45). Tantôt pour châtier, tantôt pour délivrer son peuple ou pour l’élever à ses expériences nouvelles, Dieu, parmi ses moyens pédagogiques, se sert de la guerre. Ce n’est pas qu’il la légitime, mais en se servant d’elle dans les débats d’un monde où s’étale insolemment le culte de la force, il traite l’homme rebelle selon sa folie, le paie de sa propre monnaie et lui fait expier la laideur des institutions qu’il s’est données, en même temps qu’il lui révèle que, suivant la parole de Jésus, celui qui « tue le corps » est moins redoutable que celui qui peut « faire périr l’âme » en laissant se multiplier et dominer ici-bas les ferments de la corruption.
Le but de Dieu, tel qu’il nous apparaît dans l’Ancien Testament par la voix des prophètes, était d’amorcer le salut de l’humanité par le moyen d’un peuple qui le représentât sur la terre, y accomplît sa volonté, s’y manifestât la première cellule de vie spirituelle. C’est pour l’intérieur de ce peuple qu’il promulgue sa loi du Sinaï, et cette loi exclut la guerre (proprement le| meurtre fratricide), la guerre entre Israélites, la guerre entre enfants de Dieu. L’erreur d’un certain pacifisme est de transposer dans le plan temporel les lois du monde spirituel et de s’imaginer généreusement qu’on peut supprimer la guerre dans une société d’où l’on n’a point extirpé la convoitise, l’égoïsme, la colère, les sentiments animaux, qui engendrent les conflits sociaux ; qu’on peut verser le vin nouveau dans de vieilles outres, qu’on peut avec la chair faire l’œuvre de l’Esprit. Cette erreur, l’Ancien Testament ne la commet pas. Il résume tout son espoir de paix dans le cri de ses voyants : « Convertissez-vous et vous vivrez » (Deutéronome 30.19 ; Ézéchiel 18.32 etc.), cri auquel répond la promesse de Jéhovah : « Voici, je vais créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre où la justice habitera » (Ésaïe 65.17-25, cf. 2 Pierre 3.13). L’ère de paix, les prophètes ne l’ont pas annoncée dans une phraséologie idéaliste ; ils ne l’ont pas présentée comme devant être le fruit du progrès moral ou de la science économique des hommes, ils la prédisent comme une initiative divine (Ésaïe 9.5 et suivant, Michée 4.3 ; Michée 5.13 ; Zacharie 9.9, etc.), et voient en elle la conséquence d’un fait nouveau introduit dans l’histoire : la venue d’un Messie réconciliant l’humanité avec son Père céleste et lui rendant l’Esprit régénérateur. Nouveau Testament. La prédiction des prophètes s’est réalisée. Jésus est venu, il a accompli l’œuvre messianique et fondé le Royaume de Dieu sur la terre. De ce royaume des enfants de Dieu, où tous les hommes sont frères, la guerre est exclue. Le règne de l’Esprit est le règne des pacifiques et des pacificateurs (Matthieu 5.5 ; Matthieu 5.9). La guerre entre chrétiens est un attentat à l’honneur de Dieu en ce qu’elle ramène dans son Royaume les mœurs du monde où sévit l’inspiration de Satan. Le règne de l’Esprit triomphera, mais à condition qu’on n’y associe point à l’œuvre de l’Esprit la force brutale (Luc 9.54 s). « Nos armes ne sont point charnelles », dira saint Paul (2 Corinthiens 10.4). C’est au nom de ce principe que Jésus a dit à Pierre : « Remets ton épée au fourreau » (Jean 18.11).
Mais quand il s’agit des royaumes de ce monde et des conflits où sont jetés les hommes par toutes les offensives du Malin, Jésus prêche-t-il la non-résistance ? Nous le voyons, au contraire, émettre comme un jugement de bon sens que lorsqu’un homme fort est bien armé, il ne laisse pas piller sa maison (Luc 11.21), ou bien qu’un roi n’entre en guerre avec un autre roi qu’après avoir calculé si ses forces militaires lui permettent de tenir campagne (Luc 14.31). À Pilate, il déclare : « Si mon royaume était de ce monde, mes gens combattraient pour que je ne fusse pas livré » (Jean 18.36). Quand il chasse les vendeurs du Temple avec un fouet de cordes, il montre que l’intransigeance morale peut à l’occasion s’accompagner d’un geste de force (Jean 2.15). Aux Juifs qui viennent l’arrêter, il reproche, non d’avoir des épées et des bâtons, mais de les employer contre lui comme s’il s’agissait d’un brigand (Luc 22.62). Enfin, il tolère auprès de lui, chez ses intimes, jusqu’en Gethsémané, le port de l’épée (Luc 22.38 ; Jean 18.10). Supposons que le voyageur du chemin de Jérico dont parle Jésus dans sa parabole (Luc 10) fût arrivé sur le théâtre du crime pendant que la malheureuse victime se débattait contre ses assassins, se représente-t-on que Jésus aurait exigé du bon Samaritain qu’il restât spectateur passif de l’attentat et n’intervînt qu’après le départ des brigands ?
On voit assez par ces divers exemples avec quelle sagesse divine Jésus distingue les deux ordres dont le conflit le tue : l’ordre temporel où règne le Prince de ce monde, et l’ordre spirituel où doit s’affirmer le triomphe de Dieu. Dans l’ordre temporel, au cours du douloureux enfantement de la civilisation naturelle, dans l’humanité de la chute, tout homme doit employer les ressources que la nature lui donne, avec tout son courage et toute sa noblesse d’âme, contre les empiétements de Satan. C’est la lutte terrestre du bien contre le mal, de la justice contre l’injustice, de la vie contre la mort. Partout, tout être humain, par le seul fait qu’il est homme, doit opposer une digue au flot débordant des puissances démoniaques qui feraient, si on leur laissait le champ libre, de la terre un enfer (Psaumes 12.8). Mais ce n’est ici que l’ordre inférieur, le travail préparatoire pour permettre, au sein d’un monde « plongé dans le mal » (1 Jean 5.19), l’entreprise rédemptrice du Messie. Dès qu’il s’agit de cette entreprise elle-même et de l’ordre supérieur où, sur le plan spirituel, se réalise l’enfantement de l’humanité filiale à Dieu, c’est Dieu seul qui commande et, dans l’intérieur de son Royaume, les seules armes licites sont celles qui participent à sa nature : « Soyez parfaits, comme votre Père céleste est parfait » (Matthieu 5.43-48).
On dit souvent que Jésus lui-même a prédit que les guerres étaient inévitables et qu’elles iraient s’intensifiant en horreur et s’exaspérant jusqu’à la fin du monde. C’est vrai. Mais qui ne croirait blasphémer en interprétant ainsi les paroles de Jésus dans Matthieu 24.6-14 : « Vous entendrez parler de guerres et de bruits de guerres, mes disciples se jetteront les uns contre les autres, se haïront, s’entr’égorgeront dans la fureur de leur violence, ils désoleront les foyers, ruineront mes sanctuaires, et puis viendra la fin » ? C’est pourtant là le spectacle que donnent les guerres européennes, montrant en cela que la plupart des chrétiens ne sont pas arrivés à la majorité spirituelle, et que les églises sont loin de réaliser le Royaume de Dieu. Mais Jésus, dans Matthieu 24, parle de guerres entre « les nations », c’est-à-dire entre les peuples païens ; quand l’homme est chair, il accomplit les œuvres de la chair (Romains 8.5-8). Jésus va plus loin, il annonce à ses disciples que parmi ceux qui croient en Dieu, mais qui ont repoussé les principes de son Évangile, il en est qui provoqueront des persécutions de toutes sortes : en faisant « la guerre à Dieu » ; (cf. Actes 5.39) par la torture et le massacre de chrétiens, ils croiront rendre « un culte à Dieu » (Jean 16.2, cf. Matthieu 10.16-39). Jésus va plus loin encore : il prophétise que, sous le coup de l’épreuve, beaucoup de chrétiens succomberont, abandonneront la foi, trahiront leurs frères et seront par leur apostasie une nouvelle source de guerre et de tuerie (Matthieu 24.10). Ainsi se perpétueront et s’achèveront parmi les enfants du Royaume les souffrances du Roi. Mais quant à ces enfants eux-mêmes, petit troupeau auquel le Père a donné le Royaume (Luc 12.32), ils sont présentés par Jésus non comme les acteurs, mais comme les victimes de ces guerres menées par les puissances de Satan contre les puissances de l’Esprit ; (cf. Luc 22.31 ; Jean 16.33) victimes triomphantes dont le triomphe s’accomplira non par l’emploi de la force, mais par la pratique du dépouillement volontaire et de l’active charité énoncés pour eux comme la charte du Royaume de Dieu dans le Sermon sur la montagne (Matthieu 5.20-6.12).
C’est dans la lumière de cette charte qu’il faut maintenir le principe de non-résistance (Matthieu 5.39), si l’on veut comprendre ce que Jésus entend par lui et mesurer l’héroïsme des renoncements personnels qu’il suppose. On ne peut, sans le dénaturer, le transporter sur le terrain des rapports entre nations et voir en lui le moyen de supprimer les guerres. Cette interprétation était si loin de la pensée de Jésus que lui-même, le non-résistant par excellence (Actes 8.32 ; 1 Pierre 2.23), a attiré sur ses compatriotes, par sa non-résistance même, un des actes de guerre les plus effroyables qu’ait enregistrés l’histoire : la prise et la ruine de Jérusalem. Non seulement Jésus prévoit cette conséquense de sa non-résistance, mais il l’annonce en termes vigoureux, comme une juste sanction : « Jérusalem, tueuse de prophètes… si tu avais reconnu ce qui pouvait te donner la paix… vous ne l’avez pas voulu… maintenant, des jours viendront sur toi où tes ennemis t’environneront de tranchées, t’encercleront, te détruiront entièrement, toi et tes enfants au milieu de toi, et ils ne te laisseront pas pierre sur pierre, parce que tu n’as pas reconnu le temps où tu as été visitée ! » (Matthieu 23.37; Luc 19.42-44, cf. Luc 20.1-16 ; Luc 23.28-31). Tant il est vrai que pour Jésus, dans la grande lutte engagée ici-bas pour la rédemption du monde, la grande affaire n’est pas que l’homme vive : ce qui importe, ce sont ses raisons de vivre et la cause pour laquelle il meurt. Les disciples de Jésus ne sont, pas plus que lui, partisans de la paix à tout prix. C’est ainsi que Paul compare la vie chrétienne à un train de guerre, l’apôtre à un soldat, les vertus évangéliques à une armure (2 Timothée 2.3 ; Éphésiens 6.10 ; Éphésiens 6.17), et qu’il énonce la relativité de la paix dans laquelle l’enfant de Dieu est invité à vivre avec tous les hommes (Romains 12.18). Et c’est pourquoi aussi l’Apocalypse est toute vibrante des éclats de la trompette vengeresse annonçant que les rétributions suprêmes s’accompliront dans l’effroi de guerres où les éléments eux-mêmes seront mêlés et où, dans l’angoisse universelle, les hommes rendront l’âme de terreur (Apocalypse 8 et suivants ; comparez Luc 21.26).
La vérité est que nulle part et sous aucune forme la Bible n’annonce la paix à l’humanité en état de chute (Ésaïe 48.22 ; Ésaïe 57.21 ; Jérémie 6.14 ; Ézéchiel 13.10 etc.). Le Nouveau Testament, malgré sa douceur évangélique, ne le fait pas plus que l’Ancien, car le Christ qu’il présente comme le prince de la paix, et qui donne sa vie sur la croix pour sauver le monde, ne promet ce salut générateur de la paix qu’à ceux qui acceptent par lui de naître de nouveau (Luc 13.1-6 ; Luc 19.42 ; Jean 16.33 ; Romains 5.1 ; Romains 8.6 ; Éphésiens 2.14 ; Éphésiens 2.17 etc.). L’attitude du chrétien qui veut rester fidèle à l’enseignement de la Bible et à l’exemple de son Sauveur, doit donc être de stigmatiser la guerre comme une des plus monstrueuses manifestations de la déchéance humaine et de coopérer de toutes ses forces aux entreprises pacifiques, d’où qu’elles viennent, pourvu qu’elles ne soient pas une abdication morale, une dérogation à la loi de souffrance expiatoire qui veut que l’homme, chassé du paradis par sa faute, arrache à la sueur de son front les épines qui courent le risque de stériliser les sillons de Dieu sur la terre. Le pire serait ici-bas une humanité qui, par l’ingéniosité de son organisation sociale, parviendrait à vivre en paix dans l’iniquité. Une telle paix serait, bien plus encore que la guerre, une victoire de Satan sur Dieu. Le suprême hommage que le croyant puisse rendre à la Bible, c’est de proclamer par ses paroles et par ses actes que l’établissement de la paix entre les frères sur la terre est fonction de leur repentir et de leur conversion au Père qui est dans les cieux. Apôtre de cette paix-là, il pourra bien attirer sur lui la colère des hommes… c’est alors qu’il aura à pratiquer, à la suite de son Maître, la non-résistance, la vraie, la seule évangélique, celle où l’on se sacrifie soi-même à la cause de tous (Luc 9.24 et suivant, Jean 15.20 ; Matthieu 16.24 et suivant). Et c’est par ce sacrifice que viendra le Royaume de Dieu sur la terre (Jean 16.33).
Alexandre Westphal
Il y a loin du temps où des bandes de Sémites nomades guerroyaient et razziaient aux confins du désert, au temps où les armées des grands empires antiques se heurtaient en d’immenses batailles. Ou plutôt, Israël connut dans son histoire cette évolution, lui qui, entré avec les rois seulement dans le concert des nations centralisées, participa du second genre de guerre après avoir participé du premier. Pour tirer vengeance d’injures faites à leur famille, Abraham et Gédéon mènent à la bataille leurs serviteurs ou leur clan (Genèse 14.14 ; Juges 6.34). 600 hommes « de la famille » de Dan partent pour se conquérir une nouvelle résidence (Juges 18.11 ; Juges 18.27). Il est vrai que quelquefois déjà des guerriers de différentes tribus se réunissent, par exemple dans la lutte contre Sisera (Juges 5.14 ; Juges 5.16). Et si Saül ne fut au début le chef que d’une petite armée (1 Samuel 13.2 ; 1 Samuel 13.16), la longue lutte avec les Philistins fit bientôt de lui et de ses successeurs les chefs d’une armée nationale, permanente pour une part, et qui pendant des siècles et jusqu’aux Macchabées mena avec des fortunes diverses maintes guerres nationales de défense ou de conquête (voir Armée).
La pratique du service des renseignements, en vue d’une conquête ou au cours d’hostilités, doit avoir été très fréquente. Assez nombreuses sont les allusions de l’Ancien Testament aux espions (Josué 2.1 ; Juges 1.23-26 ; 1 Samuel 26.4), ou émissaires (2 Samuel 15.10), chargés d’explorer (Juges 18.3 ; 2 Samuel 10.3) ou de reconnaître un pays (Genèse 42.9 ; Genèse 42.14 ; Genèse 42.34 ; Nombres 21.32, 1 Macchabées 5.38 ; 1 Macchabées 12.26), d’épierun camp (Juges 7.10-15) et de rapporter autant d’informations que possible. Les plus célèbres sont les douze espions envoyés par Moïse en Canaan vers la fin du voyage au désert (Nombres 13 ; Deutéronome 1.22 et suivants, Hébreux 11.31), et qui seraient plus exactement appelés éclaireurs ou explorateurs (Par contre, dans le Nouveau Testament apparaît deux fois l’espionnage au point de vue moral, dans les hostilités contre Jésus (Luc 20.20) et contre Paul). Les (Galates 2.4) guerres, d’habitude, débutaient au printemps, « saison où les rois se mettent en campagne » (2 Samuel 11.1, cf. 1 Rois 20.22), et à l’automne on arrêtait les hostilités. Le signal était donné par des messagers (Juges 6.35 ; Juges 7.24), ou par la trompette, qui résonnait de sommet en sommet (Juges 3.27 ; 2 Samuel 20.1 ; Jérémie 42.14). À cette convocation, Deutéronome 20.5-8 apporte certaines exemptions (avoir bâti, ou planté une vigne ; être jeune marié ; avoir peur ; cf. Juges 7.3, 1 Macchabées 3.56). En marche, l’armée pratiquait pour sa sécurité l’envoi d’éclaireurs et cherchait les renseignements au moyen d’espions (Josué 2.1 ; Juges 1.23 ; 1 Samuel 26.4, 1 Macchabées 5.38). En station, elle établissait un camp, circulaire semble-t-il, et fait de tentes, autour duquel veillaient les sentinelles (Juges 7.19 ; 1 Samuel 26.5 ; 2 Samuel 11.11). Pour les sièges, voir Fortifications.
Elle consistait essentiellement dans le choc, un peu confus, et quelques fois longtemps retardé, des deux armées rangées face à face en ordre de bataille (1 Samuel 13.18). On se battait corps à corps, chacun cherchant à frapper les chefs (1 Rois 22.31 ; 1 Rois 22.35). Cris de guerre et sons de trompettes dominaient la lutte (Job 39.28 ; Amos 1.14 ; 1 Corinthiens 14.8). Au premier rang devaient être les hommes armés de l’épée ; plus en arrière, les archers et les porteurs de fronde ; ce n’est qu’à partir de Salomon qu’il y eut en Israël une cavalerie et des chariots (1 Rois 10.26-29 ; Proverbes 21.31 ; Jérémie 8.6). Le combat était quelques fois remplacé ou précédé par des duels entre des guerriers célèbres de l’un et l’autre partis (1 Samuel 17 ; 2 Samuel 2.14 ; 2 Samuel 2.16). La division habituelle de l’armée en deux corps (1 Samuel 13.2 ; 2 Samuel 10.9-11), ou en trois (Juges 7.16 ; 1 Samuel 11.11 ; 1 Samuel 13.17), permettait au chef de concevoir certaines manœuvres élémentaires : l’embuscade, fréquemment employée (Josué 8.3 ; Josué 8.7 ; Juges 9.34 ; Juges 20.29-35 ; 2 Chroniques 13.13 ; 2 Chroniques 13.14), le mouvement tournant (2 Samuel 5.23). On connaissait les avantages d’une attaque nocturne ou menée sous le couvert des bois (Juges 7.19 ; 2 Samuel 18.6-8, 1 Macchabées 4.1-6). La mort du chef entraînait souvent la débandade (1 Samuel 31.7) ; d’ordinaire, on était rappelé, le combat fini, par la trompette ou par des cris (2 Samuel 2.28 ; 1 Rois 22.36). La subsistance des troupes en campagne, en dehors du procédé de Juges 20.10, était assurée par les ressources du pays, par des dons volontaires, et par les envois des familles (1 Samuel 17.17 ; 1 Samuel 25.18 ; 1 Samuel 25.27 ; 2 Samuel 17.27-29).
Le premier devoir était d’ensevelir les morts (1 Rois 11.15) et de rendre honneur aux chefs disparus en en portant le deuil (complaintes sur Saül et sur Abner, 2 Samuel 1 et 2 Samuel 3.31 ; 2 Samuel 3.36). Victorieux, on traitait durement le vaincu (figure 104 à 108) : mise à mort des chefs, mutilations, violences sur les femmes et les enfants étaient choses courantes (Juges 1.6 ; Juges 7.25 ; Juges 8.20 ; Juges 8.21 ; 2 Rois 15.16 ; Psaumes 137.9 ; Ésaïe 13.16). Beaucoup étaient réduits en esclavage (Amos 1.6 ; Amos 1.9). On imposait de lourds tributs (2 Rois 15.19 ; 2 Rois 23.33). Le butin, où la part du chef était réservée (Juges 8.24 ; Juges 8.27), était réparti entre tous, et la coutume s’établit d’en faire profiter ceux qui n’avaient pas combattu (Juges 5.30 ; 1 Samuel 30.21-25, cf. Nombres 31.27) ; il était parfois très abondant (Josué 22.8 ; 2 Chroniques 20.25). Les vainqueurs étaient accueillis triomphalement au retour par des chants et par des danses (Exode 15.20 ; Juges 11.34 : la fille de Jephté ; 1 Samuel 18.6 et suivant : popularité de David). Les héros recevaient les récompenses promises.
Voir (Josué 15.16 ; 1 Samuel 17.26 ; 1 Chroniques 11.6 ; Bertholet, Histoire de la civilisation d’Israël, page 282 et suivantes).
Jean Riv.
Numérisation : Yves Petrakian