L’origine de ce peuple est assez mal connue et à l’heure présente, ce qui le prouve, c’est que les thèses les plus opposées sont soutenues à son sujet. Il est pourtant permis de penser que les théories « régnantes » (Ed. Meyer, Clay, Dhorme) n’ont pas encore à faire place aux conclusions de Landsberger ou de Th. Bauer. Les Amoréens sont des Sémites de l’Ouest (et non des « Cananéens de l’Est »), dont, au deuxième millénaire, l’empire était bordé par la Méditerranée à l’Ouest, par l’Euphrate et le désert syrien à l’est (sur une inscription de Tiglath-Piléser, 1115-1090 avant Jésus-Christ, mention de « Ta-ad-mar qui est au pays d’Amourrou »)
Depuis longtemps on avait remarqué en Babylonie, dans les lettres et contrats de la dynastie d’Hammourabi (vers 1925), des noms d’allure sémitique qui attestaient l’existence d’un peuple non akkadien. Mais bien avant cette dynastie d’Hammourabi, dite d’Amourrou, l’influence de ce peuple ouest-sémitique est signalée en Babylonie. Le peuple des Amoréens est désigné par l’idéogramme Mar-tu qui est identique au babylonien Amurru. Ainsi Kur-Mar-tu = mât A-mur-ri = pays de l’Amoréen. Des textes divinatoires relatant l’expédition que Sargon l’Ancien fit l’an II de son règne (vers 2741 avant Jésus-Christ), disent « qu’il alla au pays d’Amourrou  ». Autre mention dans un texte trouvé à Boghaz-Keuï, qui donne le nom d’un roi du pays d’A-mur-ri, contemporain de Narâm-Sin (2669-2631 avant Jésus-Christ).
Autres mentions dans les récits des travaux de Goudéa, qui s’y approvisionne en pierres de taille. Avec la troisième dynastie d’Ur (XXIIIe-XXIIe siècle avant Jésus-Christ), le pays d’Amourrou se fait menaçant. Gimil-Sin (2221-2213) doit construire une muraille pour éloigner l’Amoréen, qui pénètre malgré tout en Caldée, s’installe même à Larsa, au moment où la troisième dynastie d’Ur s’écroule (vers 2187 avant Jésus-Christ), à Sippar et à Kish. Babylone ne lui échappera pas et ce sera la première dynastie babylonienne avec l’Amoréen Soumou-Aboum, qui réalise l’unité des deux pays de Sumer et d’Akkad (2225 avant Jésus-Christ). Jusqu’en 1760, les Amoréens sont les maîtres du pays. Ils ont senti la menace hittite (vers 1925), mais devront céder la place devant la réaction kassite (vers 1760).
Les tablettes trouvées à Tell-el-Amarna, en Égypte, sont très précieuses pour l’histoire des Amoréens. Si les rois de Babylone et les pharaons sont en bons termes, le pays de Canaan et le pays d’Amourrou (nord de la Syrie et région libanaise) s’efforcent de se débarrasser de la domination égyptienne et de ne pas indisposer la puissance hittite. Ainsi Azirou, prince d’Amourrou, intriguera si bien, qu’il abandonnera l’Égypte pour s’allier au roi hittite Subbiluliuma, devenu un voisin par trop redoutable (pillage du Mitanni, de Qatna, vers 1370). Cette distinction bien nette dans les tableau d’Él-Amarna entre pays de Canaan et, pays d’Amourrou, n’est pas conservée dans les textes bibliques. Les Amoréens y sont signalés, en général, comme étant les anciens habitants de la Palestine, contre lesquels durent lutter les Israélites, sortis d’Égypte (Juges 6.10 ; 1 Samuel 7.14 ; 1 Rois 21.26 ; 2 Rois 21.11). Parfois, le terme désigne plus spécialement les Transjordaniens, sujets de Sinon (Nombres 21 ; Deutéronome 1.4 ; Deutéronome 4.46 ; 1 Rois 4.19 ; Psaumes 135.11 ; Psaumes 136.19) et de Og (Deutéronome 8.8 ; Deutéronome 8.10 ; Deutéronome 4.4). On trouve parfois cette systématisation simpliste, que les Cananéens habitaient la région du Jourdain et du littoral méditerranéen, et les Amoréens la montagne (Nombres 13.29). Ils y sont d’ailleurs en compagnie des Hittites et des Jébusiens (habitants de Jérusalem), et une des listes de peuples, quoique tardive, semble bien avoir été établie en tenant compte de la topographie. L’énumération va en effet du nord au sud et les Amoréens y sont mentionnés entre les Hittites et les Cananéens (Josué 9.1 ; Deutéronome 20.17), ce qui répond assez exactement à ce que nous savons par les tableau d’El-Amarna. Par contre, dans la table de Genèse 10, les Amoréens sont cités comme descendants de Canaan et en compagnie de petits peuples (Genèse 10.16).
D’une manière générale, pour l’École J, les Cananéens étaient les anciens habitants du pays dont s’emparèrent les Israélites ; pour l’École E, il s’agissait d’Amoréens (Genèse 15.16 ; Genèse 48.22 etc.). On en retrouve l’écho chez les prophètes : ainsi Amos (Amos 2.9 et suivant). En rattachant Jérusalem à un père amoréen et à une mère hittite, Ézéchiel (Ézéchiel 16.3 ; Ézéchiel 16.45) semble bien garder un renseignement précieux, reflet de l’époque où le pays était aux mains des Amoréens et Jérusalem avec un gouverneur hittite, Arta-hipa. La puissance amoréenne, sévèrement maîtrisée par Ramsès III (1200 avant Jésus-Christ), reçut un nouveau coup à l’arrivée des Israélites. Elle leur résista pourtant (Juges 1.34 ; Juges 3.5 ; 1 Samuel 7.14), mais dut renoncer tout à fait à la Palestine, avec l’affermissement de la royauté. Il n’en est plus alors question que comme quelque chose de passé (1 Rois 9.20) et qui n’est plus à redouter. Voir Asianiques.
A. P.
Numérisation : Yves Petrakian