On désigne par le mot nature l’ensemble ordonné des choses qui composent la réalité de l’univers. Les notions de réalité et d’ordreconfèrent leur sens particulier au substantif nature et à l’adjectif naturel.
Le naturel est ce qui existe réellement, indépendamment de l’homme ou de toute autre influence transcendante. Le naturel s’oppose ainsi à l’artificiel d’une part (produit naturel ; produit artificiel), et au moral ou spirituel d’autre part (homme naturel ; homme spirituel).
Le naturel exprime en outre l’ordre de l’ensemble des choses, et cette notion donne aux termes nature et naturel une acception spéciale qui les oppose à exceptionnel d’une part, à surnaturel d’autre part est dit naturel ce qui arrive en conformité avec un ordre réputé invariable, exprimé par un canon de lois (lois de la nature, lois naturelles). La Nature, en quelque sorte personnifiée, est alors la puissance qui régit l’ordre du monde.
Le surnaturel, qui exprime l’effet d’une puissance d’autre essence que celle de la réalité du monde, est, en définitive, une conception exclusive du naturel, et réciproquement. Si le naturel exprime tout ce qui arrive conformément à l’ordre des lois, le surnaturel ne peut coexister avec le naturel qui tient sous sa domination la réalité tout entière. Faisant figure de contre-naturel, il s’oppose alors au naturel qui l’exclut ; mais de ce chef, il s’oppose aussi à la réalité même qui est représentée par la notion du naturel.
Le conflit demeure insoluble aussi longtemps que l’on ne précise pas très exactement la valeur du terme naturel, par une bonne définition de l’essence des lois naturelles.
Les lois naturelles ne sont pas des puissances au service d’une entité — la Nature —, mais simplement des expressions humaines de ce qui est possible dans le monde. Ainsi conçu, le naturel exprime simplement la manière dont nous pouvons connaître une réalité dont l’essence est surnaturelle, et nous devons conclure que la nature n’est pas une puissance en soi, mais seulement l’expression de la volonté divine. Admettre un monde naturel autonome, se suffisant à soi-même, se dictant sa propre loi, c’est fermer la porte à tout surnaturel.
C’est pourquoi nous devons rejeter toute tentative d’explication « naturelle » des phénomènes naturels, — par où il faut entendre, non pas qu’il puisse y avoir des phénomènes naturels ne cadrant pas avec des lois connues ou connaissables (fausse interprétation du miracle), mais que les lois naturelles se bornent à dire tout ce qui est possible, mais ne régissent pas ce qui est réel. Hors des lois, il n’est que l’arbitraire, l’absurde, l’impossible ; mais les lois n’expriment que la condition des choses, non leur existence : elles sont conditionnantes, non déterminantes. Au sein de l’immense possibilité qu’expriment les lois naturelles universelles, ce qui est réellement créé demande une détermination qui appartient à Dieu.
Le chrétien rejette toute explication naturelle du monde, comme par exemple le transformisme mécaniste, parce que de telles théories détrônent Dieu pour mettre à sa place des forces naturelles aveugles et fortuites.
S’il reconnaît la valeur des résultats obtenus par les sciences naturelles, s’il se rend à l’évidence en ce qui concerne l’évolution du monde, il se refuse à en donner une explication naturelle (sélection naturelle, action naturelle du milieu, résultat naturel du fonctionnement), et, reconnaissant la valeur relative de ces moyens secondaires, il confie la présidence de cette évolution non à la Nature, mais à Dieu. Voir Miracle. Bible. Les notions que nous venons de définir ne se rencontrent pas dans l’Ancien Testament : la royauté du Créateur y est trop incontestée pour que de semblables questions se posent.
L’apôtre Paul enseigne que Tordre de la nature, c’est-à-dire l’économie créée par Dieu, doit être respecté, et qu’il convient de se garder de toute pratique contre nature (Romains 1.26 ; 1 Corinthiens 11.14, cf. Jude 1.7).
Mais la soumission à la nature, aussi funeste que la viciation de la nature, est condamnée ; l’homme est appelé par Dieu à dépasser le monde animal pour s’élever vers le monde spirituel, à dépouiller l’homme naturel, fils d’Adam et du péché, pour revêtir l’homme spirituel participant de la nature divine (2 Pierre 1.4). Il ne doit pas s’abandonner à ses penchants naturels (2 Pierre 2.12), mais sa nature sauvage doit être greffée pour produire des fruits spirituels.
Voir (Éphésiens 2.3 ; Romains 11.24 ; Jean 15.5) Esprit. H. L.
Numérisation : Yves Petrakian