Pour les sanctuaires israélites autres que le temple de Jérusalem, voir Sanctuaires. Il s’agit uniquement, ici, du temple de Jérusalem sous ses trois formes historiques : temple de Salomon, temple de Zorobabel, temple d’Hérode. Le temple d’Ézéchiel, Voir Atlas 25 qui n’a jamais existé que comme plan idéal de reconstruction, n’entre pas en ligne de compte ; nous n’aurons à en parler que pour autant qu’on peut trouver dans la description du prophète des souvenirs précis du temple détruit en 586 ou des suggestions mises à profit lors de l’établissement du second temple après l’exil.
Nous avons à traiter successivement :
On n’hésite pas sur le lieu précis où devait se trouver le temple de Salomon. Comme le temple de Zorobabel a été élevé au même endroit et que le temple d’Hérode n’a été que la reconstruction embellie et agrandie du second temple, l’emplacement du temple d’Hérode détermine celui du temple de Salomon ; c’est la partie du Harâm-ech-Chérif où se trouve la mosquée d’Omar (voir ce mot), appelée mosquée es-Sakhra. Cette mosquée recouvre un rocher naturel avec cavité souterraine, qui a certainement été dès les temps les plus anciens un lieu sacré. Il faisait sans doute partie de l’aire d’Arauna, Jébusien, et il marque très probablement la place où David éleva un autel à l’Éternel (2 Samuel 24), autel qui devait plus tard être remplacé par celui du temple (1 Chroniques 22.1). Mais le Haram actuel n’existait pas au temps de Salomon et l’aire d’Arauna avait une tout autre configuration. La colline orientale de Jérusalem était encore telle que la nature l’avait faite. La partie méridionale seule, sur une longueur d’environ 300 mètres, était occupée par l’ancienne forteresse des Jébusiens, devenue la cité de David. Au delà, vers le nord, c’était la pure campagne dans son état primitif. Quand Salomon entreprit les grandes constructions qui sont décrites 1 Rois 6.7 (cf. 2 Chroniques 3.4), il dut commencer par aménager le terrain, quoique cela ne soit raconté nulle part. Le faîte de la colline n’avait pas la même altitude du sud au nord, et les pentes latérales à droite et à gauche ne laissaient au centre qu’un espace restreint plus ou moins arrondi, avec de nombreuses inégalités du sol. Il fallait aplanir et agrandir pour placer là tout l’ensemble des bâtiments projetés : palais du roi et temple. On éleva de grands murs de soutènement au sud, à l’est et à l’ouest, et on amena une quantité énorme de remblais pour remplir l’espace vide entre les murs et le haut des pentes de la colline, de manière à créer une grande surface plane ou plus exactement une série de surfaces d’inégale hauteur qui se succédaient du sud au nord. On n’a pas encore pu fixer, les fouilles n’étant pas permises sous le Haram actuel, l’alignement des murs de soutènement élevés par Salomon. Ils coïncidaient peut-être, ici et là, dans la partie septentrionale avec les murs du Haram, mais dans la partie méridionale ce n’était sûrement pas le cas ; le Haram est beaucoup plus grand et plus élevé que les esplanades de Salomon (voir paragraphe III). Dans l’ensemble du nivellement il ne faut pas oublier le « remplissage » de Millo (voir ce mot) entre la cité de David et la partie centrale de la colline orientale (2 Samuel 5.9 et 1 Rois 9.15).
On comprend que les énormes travaux nécessaires déjà pour la formation d’un terrain suffisant, puis pour la préparation des matériaux de construction, aient exigé un personnel considérable. Les chiffres donnés par le livre des Rois (1 Rois 5.13 ; 1 Rois 5.18) nous étonnent par leur grandeur : 30 000 nommes de corvée, 70 000 hommes qui portaient les fardeaux, 80 000 qui taillaient les pierres dans la montagne, sans compter 3 300 surveillants ; mais ils sont encore petits à côté du nombre d’hommes employés par les pharaons pour la construction des pyramides, par exemple, et, comme l’indique verset 14 pour les hommes de corvée, les ouvriers n’étaient sans doute pas tous à l’ouvrage en même temps. Bien des interprètes admettent cependant que ces chiffres sont exagérés, surtout les derniers, qui, d’après 2 Chroniques 2.17 et suivant, concernaient les Cananéens assujettis et non des Israélites. Mais si Salomon pouvait trouver dans son pays des hommes de corvée, il n’avait pas à sa disposition des artisans capables d’effectuer des constructions aussi étrangères aux anciennes coutumes israélites. Il dut recourir pour cela à Hiram, roi de Tyr, qui lui fournit des ouvriers expérimentés et en outre du bois de cèdre et de cyprès, dont il usa à profusion (cf. 1 Rois 5.1 ; 1 Rois 5.11 ; 1 Rois 9.10-14). Le maître fondeur s’appelait Huram-Abi (2 Chroniques 2.13 et suivant), Hiram dans les Rois ; le directeur général des constructions n’est pas nommé.
Trois parvis, ou cours, sont mentionnés dans 1 Rois 6 et 7 : le grand parvis (1 Rois 7.12), l’autre parvis (1 Rois 7.8), le parvis intérieur (1 Rois 6.36). Le grand parvis, ou grande cour, désigne tout l’espace, entouré d’un mur (1 Rois 7.12), dans lequel se trouvait l’ensemble des constructions salomoniennes : maison du Bois-Liban, halle des colonnes, halle du trône, palais du roi, temple. L’esplanade du temple était plus élevée que celle du palais et de ses dépendances, car on descendait du temple pour aller au palais (Jérémie 36.12 ; Jérémie 36.26:10), mais le tout rentrait dans la même grande cour. L’autre cour est celle qui entourait le palais proprement dit, séparé par un mur des autres constructions. Le parvis intérieur, également entouré d’un mur, était le parvis du temple. Le temple de Salomon n’avait pas plusieurs parvis, comme plus tard le temple d’Hérode et déjà sans doute celui de Zorobabel, pour lequel on avait suivi les prescriptions d’Ézéchiel, qui ne voulait pas que les bâtiments royaux ne fussent séparés que par un mur du temple et du parvis intérieur (Ézéchiel 43.7 ; Ézéchiel 43.9).
Le Chroniste (2 Chroniques 4.9) distingue, il est vrai, deux parvis du temple : le parvis des prêtres et le parvis du peuple qu’il appelle le grand parvis, et le Code sacerdotal attribue également deux parvis au tabernacle du désert (voir Tabernacle), mais c’est là une conception postérieure.
Pour ne pas entrer dans trop de détails, nous donnons ici (№ 2) un plan général des constructions salomoniennes (voir aussi Stade dans sa Geschichte des Volkes Israël, I, p. 314). Ce plan n’est évidemment qu’un essai, mais il permet de se rendre compte du rapport des différents parvis les uns avec les autres.
Plan № 1. Voir Atlas 22 Constructions de Salomon d’après les données bibliques de 1 Rois 6 et 7, et les restitutions de Stade, Perrot et Chipiez.
La maison de la forêt du Liban.
Galerie d’honneur.
Salle du trône (lire la description du trône dans 1 Rois 10.18-20)
La résidence du roi
Harem royal et pavillon de la fille du Pharaon.
Temple de Jéhovah.
Autel des holocaustes et cour intérieure (parvis du temple)
Barrière en bois de cèdre.
Cour du harem et du palais
Cour extérieure.
Routes par lesquelles on montait au palais et au temple.
Il est intéressant de noter que dans le seul des palais antiques de l’Orient dont le plan a pu être relevé tout entier, dans le palais de Sargon à Khorsabad, le temple confinait de même au harem (cf. Perrot et Chipiez).
Plan № 2. Voir Atlas 23 Temple de Salomon.
Nous ne connaissons pas les dimensions du parvis intérieur ou parvis du temple. Elles ne sont données nulle part. Ézéchiel qui, dans son plan de reconstruction, distingue deux parvis du temple (Ézéchiel 42), donne au parvis intérieur une longueur et une largeur de 100 coudées (Ézéchiel 40.47), soit 50 mètres (N.B. — La coudée [voir Poids et mesures] n’avait pas toujours exactement la même longueur : elle valait un peu plus ou un peu moins d’un demi-mètre ; pour ne pas compliquer, nous admettons partout en gros un demi-mètre). C’est un espace insuffisant pour le parvis du temple de Salomon, qui n’était pas exclusivement réservé aux prêtres, mais était ouvert au peuple (cf. Jérémie 26.2 ; Jérémie 35.1 ; Jérémie 36.10 etc.). Il faut admettre pour le moins une longueur triple et une largeur double. Le parvis était entouré d’un mur de trois rangées de pierres de taille et d’une rangée de poutres de cèdre (1 Rois 6.36). La porte principale était à l’est ; une porte au nord, la porte supérieure, avait été construite ou reconstruite par Jotham (2 Rois 15.35, cf. Jérémie 20.2 ; Jérémie 36.10) ; une autre porte (au sud) devait conduire de la maison du roi dans le parvis du temple ; ce pourrait être la porte mentionnée Jérémie 38.14 (cf. 2 Rois 25.18, = Jérémie 52.24) qui parle de trois gardiens du seuil. Le long des murs sud, est et nord, à l’intérieur du parvis, il y avait sans doute des locaux servant à des usages divers, comme dans le temple d’Ézéchiel (Ézéchiel 42.1 ; Ézéchiel 42.14), quoique 1 Rois 6-7 n’en parle pas. Jérémie mentionne la chambre de Guémaria, fils de Saphan, près de la porte supérieure (Jérémie 36.10), ailleurs celle des fils de Hanan, près de celle des chefs au-dessus de la chambre de Maaséja (Jérémie 35.4, cf. Jérémie 26.10), et il fallait, à côté de ces chambres réservées à des personnages spéciaux, de nombreux locaux pour y déposer les objets qui servaient au culte des sacrifices. Mais, faute de renseignements positifs, nous ne pouvons rien préciser.
Le temple proprement dit n’était pas au milieu du parvis intérieur, mais dans la partie occidentale, entre l’autel des holocaustes (sur cet autel, voir plus loin) et le mur ouest. Il n’y avait sans doute qu’un espace restreint entre ce mur et la maison, tandis qu’il était plus grand sur les côtés du temple et que l’emplacement à l’est devait être assez considérable. Le temple était sur une plateforme plus élevée que le parvis qui l’entourait. On y montait par des degrés.
La maison elle-même avait à l’intérieur 60 coudées de longueur, 20 coudées de largeur, 30 coudées de hauteur, et elle était précédée d’un vestibule (portique) qui avait 20 coudées de longueur, répondant à la largeur de la maison, et 10 coudées de profondeur (1 Rois 6.3). La hauteur du portique n’est pas indiquée dans le livre des Rois ; les Chroniques (2 Chroniques 3.4) disent 120 coudées, chiffre admis par plusieurs interprètes, mais c’est plus probablement une faute de texte ; la hauteur du portique devait être à peu près la même que celle de la maison. Les dimensions indiquées sont les dimensions intérieures ; il faut y ajouter l’épaisseur des murs de part et d’autre, puis les constructions adjacentes (voir plus loin) pour avoir tout l’aréa, c’est-à-dire l’espace occupé par le bâtiment dans son ensemble. Pour la hauteur il faut ajouter l’épaisseur du toit, probablement plat, qui était fait de poutres et de planches de cèdre (1 Rois 6.9). Pour le protéger contre les intempéries on dut le recouvrir de plaques de marbre, mais ceci n’est pas indiqué, pas plus que les moyens qu’on employa pour empêcher les poutres de s’incurver sous leur propre poids.
L’intérieur de la maison, après le portique, était partagé en deux locaux d’inégale longueur : le lieu saint (hékal) et le lieu très saint (debir). Les murs des deux locaux étaient recouverts du haut en bas de planches de cèdre, de sorte que nulle part on ne voyait la pierre, et le sol était recouvert de planches de cyprès. Le lieu saint avait une longueur de 40 coudées, et le lieu très saint de 20 coudées. Ils étaient séparés par une paroi de planches de cèdre. Mais le lieu très saint n’allait pas jusqu’au toit. Il était fermé à la hauteur de 20 coudées par un plafond, qui laissait au-dessus un espace vide de 10 coudées ; cet espace resta probablement toujours inoccupé pour sauvegarder la sainteté du lieu sur lequel il se trouvait. Le debir était ainsi un cube parfait (20 coudées dans toutes les directions), exprimant le plus haut degré de sainteté de l’édifice sacré.
Les parois du hékal et du debir étaient ornées de figurines creusées dans le bois. D’après 1 Rois 6.18, il s’agissait de coloquintes (concombres sauvages) et de guirlandes de fleurs ; d’après verset 29, de chérubins, de palmiers et de guirlandes de fleurs (cf. Ézéchiel 41.17 20). Bien des interprètes modernes, à l’exemple de Stade, envisagent comme postérieures les indications relatives à ces sculptures, et rangent dans la même catégorie de renseignements sujets à caution tous les passages qui parlent de l’or dont Salomon recouvrit les parois, les portes et même le sol de la maison (1 Rois 6.30). C’est peut-être excès de critique. Ézéchiel, il est vrai, ne parle pas d’or, et l’or sur le sol de la maison nous paraît un luxe mal placé : mais Ézéchiel mentionne les sculptures de chérubins et de palmiers, et l’on peut admettre que l’or était étendu en couches très minces sur ces figures, de manière à les faire ressortir sur l’ensemble des parois. Il n’en fallait pas beaucoup pour cet usage, et cela expliquerait que jamais il n’est question dans l’histoire, quand le temple fut maintes fois dépouillé de ses richesses, d’or arraché aux parois de l’édifice. Du reste, comme le temple a subi de nombreuses réparations au cours des siècles, il est possible que les figures rehaussées par des dorures n’aient été gravées sur les parois qu’après l’époque de Salomon.
Deux portes sont mentionnées, l’une conduisant du vestibule dans le lieu saint, l’autre conduisant du lieu saint dans le lieu très saint. Les dimensions ne sont indiquées que dans Ézéchiel (Ézéchiel 41.2 et suivant). La première devait avoir 10 coudées de large, la seconde 6 coudées. Les battants et les poteaux de la porte du lieu très saint étaient en bois d’olivier, et le linteau supérieur était remplacé par deux poutres inclinées qui se rencontraient au sommet. C’est le sens le plus probable de 1 Rois 6.31, généralement mal traduit. La porte du lieu saint, en revanche, était carrée ; les poteaux étaient de bois d’olivier, et les battants de bois de cyprès. Chaque battant était formé de deux planches dont l’une pouvait se rabattre sur l’autre, de sorte qu’il n’était pas nécessaire d’ouvrir la porte entière pour entrer dans le lieu saint. D’après 1 Rois 6.32 ; 1 Rois 6.35, les deux portes étaient comme les parois, ornées de chérubins, de palmiers et de guirlandes de fleurs, le tout recouvert d’or. D’après 2 Chroniques 3.14, il y avait un tapis devant la porte du lieu très saint ; mais ce détail, qui semble corroboré par le texte corrompu de 1 Rois 6.21, est sujet à caution.
Devant le vestibule, qui était naturellement ouvert en bonne partie du côté de l’est, étaient placées aux angles deux colonnes d’airain, fondues par Huram-Abi (1 Rois 7.15 22). Le fût de chaque colonne avait 18 coudées de hauteur et 12 coudées de circonférence ; l’épaisseur de l’airain était d’un palme (8 cm) Jérémie 52.21. Sur chaque colonne était placé un chapiteau de 5 coudées de hauteur, à forme probablement bombée, recouvert d’un treillis fondu spécialement, avec deux rangées de grenades tout autour du chapiteau. La description des chapiteaux (cf., à côté de 1 Rois 7.15 22 ; 2 Chroniques 3.15-17 ; 2 Rois 25.17 ; Jérémie 52.21 ; Jérémie 52.23) est extrêmement difficile à suivre dans tous les détails. On se demande en particulier si au-dessus de la partie bombée il y avait encore un ornement de fleurs de lis (ou de lotus) épanouies (1 Rois 7.19 ; 1 Rois 7.22). Impossible d’entrer ici dans la discussion ; nous nous bornerons à dire que les colonnes ne devaient pas servir de support aux poutres de la partie supérieure du vestibule, comme l’ont pensé quelques interprètes, mais qu’elles étaient indépendantes, placées en avant du vestibule, non pas dans l’alignement de l’entrée. Elles remplaçaient sans doute les massèbes des anciens sanctuaires (voir ce mot, 3), comme symboles de la présence divine. L’une était appelée Jakin, l’autre Boaz. On ne sait pas le sens exact de ces noms. Toutes les explications données sont problématiques. La plus souvent proposée est : Jakin = il affermira ; Boaz = en lui la force. Voir Jakin et Boaz. Plan № 3. Voir Atlas 36 Façade du Temple de Salomon (d’après Benzinger et autres). L’édifice principal, non compris le vestibule, était entouré au nord, au sud et à l’ouest d’une construction secondaire, haute de 18 coudées environ et fermée à l’extérieur par un nouveau mur. Elle contenait trois étages de chambres destinées à loger les ustensiles du temple, les offrandes en nature et, d’une manière générale, tous les objets divers nécessaires aux prêtres ou confiés à leurs soins. À l’étage inférieur, chaque chambre avait une largeur de 5 coudées ; au second étage, la largeur était de 6 coudées, au troisième de 7, parce que les poutres qui séparaient les étages ne devaient pas être engagées dans le mur du temple, mais reposaient sur des retraits du mur, qui allait ainsi en diminuant de bas en haut. Peut-être le mur extérieur de la construction secondaire avait-il aussi des retraits, mais ce n’est pas certain. Le nombre des chambres n’est pas indiqué pour le temple de Salomon. Dans le temple d’Ézéchiel il y en avait 30 par étage (Ézéchiel 41.6). Une seule entrée, placée au côté sud, conduisait dans cette construction latérale. On montait au second étage, puis au troisième par un escalier rapide dont on ignore la forme exacte (cf. 1 Rois 6.8 et les commentaires). Toutes les chambres d’un étage étaient naturellement en communication les unes avec les autres. Elles étaient sans doute éclairées par une fenêtre évasée à l’intérieur et défendue par des barreaux de bois de cèdre, mais plus petites que les fenêtres de l’édifice principal. Nous n’avons pas jusqu’ici parlé de ces dernières. Il fallait auparavant se rendre compte que, tout le bas de l’édifice étant entouré d’une construction latérale (6 coudées pour chaque étage, y compris les poutres qui les séparaient et celles qui formaient le toit), il restait 12 coudées de hauteur sur les 30 de la maison elle-même. C’est sur cet espace de 12 coudées qu’étaient pratiquées les fenêtres « solidement grillées » (texte incertain) dont parle 1 Rois 6.4 (cf. Ézéchiel 41.16). Situées très haut, à moitié occupées par des barreaux de bois, elles ne devaient donner que peu de lumière dans le lieu saint, et elles n’en donnaient point du tout dans le lieu très saint, qui n’avait que 20 coudées de hauteur. Elles servaient surtout à la ventilation, tout en rompant l’uniformité de la muraille.
Si l’on compte que les murs de la maison avaient, comme dans Ézéchiel, 6 coudées d’épaisseur, et le mur extérieur des chambres 5 coudées, la longueur totale de l’édifice ne dépassait pas 100 coudées : vestibule 10, mur oriental 6, hékal 40, paroi séparant le hékal et le debir 1, débit 20, mur occidental 6, chambres 5, leur mur extérieur 5, total : 93 coudées, auxquelles il faut ajouter quelques coudées pour le mur oriental du vestibule et la plate-forme portant les deux colonnes Jakin et Boaz. La largeur ne dépassait pas 60 coudées : mur extérieur des chambres au nord 5, chambres 5, mur nord de la maison 6, hékal 20, mur sud de la maison 6, chambres 5, leur mur extérieur au sud 5, total : 52 coudées, auxquelles on peut ajouter quelques coudées pour une plate-forme sur les deux côtés, car l’emplacement du temple était plus élevé que le parvis environnant ; d’après Ézéchiel 40.49 on montait au vestibule par des degrés (10 suivant le texte le plus probable), et Ézéchiel 41.8 précise que la différence de hauteur était de 6 coudées.
100 coudées sur 60 (environ 50 m sur 30) : ce n’est évidemment pas beaucoup ; le temple de Salomon ne pouvait pas rivaliser avec les grands temples de Thèbes ou de Babylone, et de nos jours il ferait petite figure à côté de nos cathédrales même de moyenne grandeur. À notre goût, l’apparence extérieure n’avait rien de particulièrement artistique et nous nous étonnons un peu qu’il ait paru si magnifique aux générations qui l’ont contemplé ; voir encore Aggée 2.9, cf. Esdras 3.12. Mais il faut se rappeler deux choses :
Dans le lieu très saint fut déposée l’arche de l’alliance, qui existait dès les temps mosaïques (voir Arche, et le récit 1 Rois 8.1 ; 1 Rois 8.9). Mais elle n’y était pas seule. Elle était comme protégée par deux grands chérubins en bois d’olivier recouvert d’or, ayant 10 coudées de haut ; leurs ailes étendues, de 5 coudées chacune, allaient de l’un des murs au centre du debir, où l’aile droite de l’un rencontrait l’aile gauche de l’autre au-dessus de l’arche. Les chérubins, comme l’arche, étaient des symboles matériels de la présence divine, les porteurs visibles du trône invisible de l’Éternel. Voir Chérubins.
Dans le lieu saint se trouvaient la table des pains de proposition et dix chandeliers. C’est à tort qu’on y ajoute un autel des parfums, qui est sans doute mentionné 1 Rois 7.49 et 2 Chroniques 4.19 au milieu d’une énumération d’objets divers ajoutés au récit primitif, mais qui n’a existé que beaucoup plus tard, dans la suite de l’histoire du deuxième temple (voir Tabernacle). La table des pains de proposition était par sa destination même un autel, et c’est d’elle qu’il s’agit dans les passages 1 Rois 6.20 ; 1 Rois 6.22 ; Ézéchiel 41.22, qui parlent de l’autel du lieu saint. D’après Ézéchiel 41.22, elle avait 3 coudées de haut, 2 coudées de long et de large (cf. texte des LXX), et les quatre coins étaient relevés en forme de cornes, élément ordinaire d’un autel (voir ce mot). Elle était placée devant le debir (Ézéchiel 41.23). 2 Chroniques 4.8 parle de dix tables, mais c’est évidemment une erreur. Les chandeliers (d’or) manquent dans Ézéchiel ; ils ne figurent que dans le passage tardif 1 Rois 7.48-50 et dans les Chroniques (2 Chroniques 4.7). Mais ils ne pouvaient pas taire défaut dans le hékal, insuffisamment éclairé par les fenêtres grillées placées tout au haut des murs. Y en avait-il effectivement dix, cinq d’un côté, cinq de l’autre ? C’est possible, quoique l’analogie avec le tabernacle et le temple d’Hérode fasse penser à un seul. La forme n’en est décrite nulle part.
Dans le parvis on voyait l’autel des holocaustes, la mer d’airain et les dix chariots que nos traductions appellent des bases ou des socles (sens littéral du mot hébreu). L’autel des holocaustes était situé en face de l’entrée de la maison, sur le rocher naturel dont nous avons parlé plus haut. Il n’est pas mentionné du tout dans 1 Rois 6 et 1 Rois 7 : erreur de copiste ou omission volontaire due à un réviseur postérieur ? Nous ne savons. Il figure en revanche 2 Chroniques 4.1 (cf. 1 Rois 8.64 et 2 Rois 16.10 ; 2 Rois 16.14), qui en indique les dimensions : 20 coudées de long et de large, 10 coudées de haut. Contrairement aux prescriptions de Exode 20.24 ; Exode 20.26, il était extérieurement d’airain et on y montait par des degrés du côté de l’orient (Ézéchiel 43.17). L’intérieur devait être rempli de pierres et de terre battue. Il y avait des cornes aux quatre coins (Ézéchiel 43.15). Dans le temple d’Ézéchiel il allait en se rétrécissant de bas en haut, si bien qu’au sommet la longueur et la largeur n’étaient plus que de 12 coudées. En était-il de même dans le temple de Salomon ? Nous ne pouvons l’affirmer avec certitude. On a retrouvé une profonde rigole creusée dans le rocher sous-jacent ; elle devait servir à l’écoulement du sang des victimes et de l’eau des nettoyages, dans la caverne qui se trouve au-dessous du rocher ; de là l’écoulement se faisait plus loin par des fissures naturelles ou des canaux creusés de main d’homme.
La mer d’airain était, après les colonnes Jakin et Boaz, le plus grand des travaux d’Huram-Abi. Elle était placée au sud-ouest de l’autel. C’était une grande cuve ronde, de 10 coudées de diamètre et de 5 coudées de hauteur ; les côtés étaient ornés de coloquintes (2 Chroniques 4.3 ; Ostervald et Segond disent par erreur : de figures de bœufs), posées sur deux rangs et fondues avec la mer elle-même ; l’épaisseur de l’airain était d’un palme (4 doigts = 8 cm.) et le bord supérieur s’ouvrait, comme une coupe, en forme de lis. La mer était posée sur 12 bœufs d’airain regardant 3 par 3 les 4 points cardinaux. La hauteur des bœufs n’est pas indiquée ; ils étaient sans doute à peu près de grandeur naturelle. Peut-être y avait-il derrière les bœufs un large pilier de pierre pour aider au soutien de la mer qui, pleine d’eau, avait un poids très considérable. La contenance de 2 000 baths ( environ 77 000 litres) indiquée dans 1 Rois 7.26 (2 Chroniques 4.5 dit 3 000 baths) ne correspond du reste pas aux mesures indiquées pour le diamètre et la hauteur du vase. Elle ne devait guère dépasser 40 000 litres, ce qui est déjà un beau chiffre. La mer était destinée, d’après 2 Chroniques 4.6, aux ablutions des prêtres. Le texte ne dit pas d’où venait l’eau nécessaire pour la remplir. On a supposé qu’il y avait alors une source sur la colline du temple, source qui, d’après la tradition musulmane, existerait encore à une assez grande profondeur au-dessous du Haram, et l’on cite à ce propos Ézéchiel 47.1; Joël 3.18 ; Zacharie 14.8, quoique ces passages n’aient peut-être qu’une valeur figurée. Autrement, il faut penser à un aqueduc qui amenait l’eau de plus loin, comme les aqueducs mentionnés dans les temps postérieurs.
Les dix chariots (bases, socles), servant de bassins portatifs, sont décrits (1 Rois 7.27-37, cf. 2 Chroniques 4.6) mais il est difficile de se rendre un compte exact de tous les détails. On n’arriverait même pas à bien comprendre l’ensemble, si des vases analogues avec roues n’avaient pas été retrouvés ailleurs. Ils comprenaient trois parties principales :
Les dimensions et, spécialement, la hauteur de la mer d’airain et des chariots en auraient rendu l’usage extrêmement difficile, s’ils n’avaient été pourvus à leur base de soupapes permettant d’en tirer l’eau nécessaire. Ces soupapes ne sont mentionnées nulle part, mais il faut les supposer si on ne veut pas admettre avec quelques interprètes modernes que la mer et les chariots n’avaient à l’origine qu’une valeur symbolique : la mer représentant l’océan primitif, et les chariots les nuages qui donnent la pluie, les animaux dont ils étaient décorés des êtres mythologiques en rapport étroit avec la divinité. C’est trop d’imagination. Nous notons cependant que ni la mer d’airain, ni les chariots ne sont restés intacts jusqu’à la fin de l’existence du temple, et qu’ils ne figurent pas dans le temple d’Ézéchiel. Peut-être les artistes phéniciens de Salomon avaient-ils plus que de raison suivi des conceptions étrangères.
À côté du mobilier proprement dit nous mentionnons, mais sans nous y arrêter, les ustensiles divers qui servaient aux prêtres et à leurs serviteurs dans l’exercice de leurs fonctions : voir 1 Rois 7.40 ; 2 Chroniques 4.11 ; 2 Rois 25.14 et suivant, Jérémie 52.18 et suivant ; les passages 1 Rois 7.48 ; 1 Rois 7.50 et 2 Chroniques 4.19 ; 2 Chroniques 4.22 appartiennent à la tradition postérieure. Nous notons que 1 Rois 6 et 7 et 2 Chroniques 4 ne parient que d’ustensiles d’airain ou d’or. L’argent n’est mentionné, que 2 Rois 25.15 et Jérémie 52.19.
Commencée la 4e année de Salomon, au mois de ziv (2e mois), la construction du temple fut achevée sept ans et demi plus tard, la 11e année de Salomon, au mois de bul (8e mois), d’après 1 Rois 6.37. Au lieu du 8e mois, 1 Rois 8.2 indique le 7e mois (éthanim) pour la dédicace de la maison, qui sans doute suivit immédiatement la fin de la construction. La contradiction apparente s’explique par une manière différente de placer la grande fête de l’automne (voir les commentaires).
Pour les événements dont le temple a été le témoin, voir Israël. Nous ne retenons que les passages relatifs aux réparations ou transformations qu’il a subies. La première grande réparation fut ordonnée par le roi Joas (837-804) ; cf. 2 Rois 12.1 ; 2 Rois 12.16 ; 2 Chroniques 24.1-14. Elle devait être dirigée par les prêtres ; mais ceux-ci n’ayant rien fait pendant longtemps, le roi la remit, la 23e année de son règne, à des entrepreneurs spéciaux qui eurent à leur disposition, sans compter, 10ut l’argent déposé dans un coffre placé à l’entrée du parvis. Cet argent provenait de dons volontaires ou de rachats imposés par la loi. Le texte ne mentionne aucun changement apporté aux constructions salomoniennes. On se borna sans doute à de simples réparations.
Le roi Achaz (735-720), en revanche, ne recula pas devant de sérieuses innovations, que les prêtres et le peuple semblent avoir acceptées facilement (2 Rois 16.10 ; 2 Rois 16.18). Il remplaça l’autel d’airain de Salomon par un autre autel dont il avait vu le modèle à Damas ; il ne supprima du reste pas immédiatement le premier, il se contenta de le déplacer et de le mettre au nord du nouveau. Il enleva d’autre part les bœufs qui soutenaient la mer d’airain et mit la mer sur un pavé de pierres, puis il dépouilla les chariots roulants des plaques (larges barres) d’airain qui garnissaient les côtés du socle et des bassins d’airain qu’ils portaient, et les remplaça sans doute par du métal sans aucun ornement. Tout cela « à cause du roi d’Assyrie » : il fallait faire au puissant souverain dont Achaz était devenu l’allié, ou plutôt le vassal, un cadeau digne de lui. Les changements indiqués verset 18 ne peuvent être précisés, vu l’état défectueux du texte et le manque complet de renseignements sur les lieux dont il s’agit. 2 Chroniques 28.2 ; 2 Chroniques 28.1 est un résumé exagéré de 2 Rois 16.10-18.
Ézéchias (720-692) dépouilla le temple de ses objets les plus précieux pour payer le tribut imposé par Sanchérib (2 Rois 18.15 et suivant ; voir déjà auparavant des faits semblables : 1 Rois 14.26 ; 1 Rois 15.18 ; 2 Rois 12.18 ; 2 Rois 14.11 ; 2 Rois 16.8) ; il l’avait auparavant purifié des éléments païens qui y avaient été introduits, et il avait en particulier mis en pièces le serpent d’airain (voir article), Néhustan, placé nous ne savons où, devant lequel on offrait des parfums ; mais le livre des Rois n’attribue à Ézéchias aucune installation nouvelle. Bien différent de son père, Manassé (692-630) introduisit dans le temple le culte de divinités païennes anciennes (Baal et Astarté) et nouvelles (armée des cieux), celles-ci sous l’influence de l’Assyrie dont il demeura un fidèle vassal. Il éleva des autels sur le toit de la maison (plus exactement sur le toit de la chambre haute d’Achaz, attenante au parvis, 2 Rois 23.12) et dans le parvis, soit à Baal, soit à l’armée des cieux. Il plaça même dans le temple (ou le parvis) une idole d’Astarté. Il y avait, à l’ouest de la maison (1 Chroniques 26.18), une construction nommée parbar ou parvarim (nos versions traduisent par arrière-cour [voir ce mot], faubourg), qui n’existait pas au temps de Salomon, mais avait été élevée par un de ses successeurs. Elle servait sans doute d’entrepôt ou de logis provisoire pour les animaux destinés aux sacrifices. Manassé y mit les chevaux et les chars du soleil qui figuraient dans les processions en l’honneur de l’armée des cieux. Il construisit dans le parvis des chambres spéciales destinées aux prostitués et aux prostituées. Bref, le temple devint un sanctuaire à demi-païen (cf. 2 Rois 21.2-7 ; 2 Rois 23.4 ; 2 Rois 23.6 ; 2 Rois 23.11).
Josias (639-609) entreprit, la 18e année de son règne, une complète réparation de la maison de l’Éternel. C’est alors qu’on trouva le livre de la loi (Deutéronome) et qu’à la purification du temple s’ajouta la concentration du culte à Jérusalem (2 Rois 22.3-23.27). Josias fit disparaître tout ce que Manassé avait fait et tout ce qui pouvait exister déjà auparavant d’éléments ayant quelque attache avec les cultes cananéens. Mais, après sa mort, le roi et le peuple ne tardèrent pas à revenir aux mêmes infidélités (cf. Ézéchiel 8.5 ; Ézéchiel 8.18 ; 2 Chroniques 36.14).
Lors de la première prise de Jérusalem en 597, Nébucadnetsar se contenta de dépouiller le temple de ses trésors (2 Rois 24.13) ; lors de la seconde prise (5e mois de l’année 586), le temple fut brûlé et tous les objets d’airain mis en pièces et transportés à Babylone (2 Rois 25.9 ; 2 Rois 25.13-17 ; Jérémie 52.13 ; Jérémie 52.17-23).
Numérisation : Yves Petrakian