Les Israélites furent d’abord nomades et surtout éleveurs de bétail ; ils devinrent agriculteurs, par suite de leur établissement en Canaan et de leur contact avec ses habitants. Pour les Cananéens, la culture dépendait étroitement du culte de Baal (voir ce mot) ; les prophètes apprirent à Israël qu’il appartenait à Jéhovah aussi bien pour sa vie économique que pour son existence politique (Élie : 1 Rois 18 ; Ésaïe 28.24-29, cf. Genèse 27.28 ; Genèse 49.25 ; Deutéronome 33.13 et suivants). Une mention spéciale relative au roi Ozias lui attribue un grand développement de l’agriculture et de l’élevage (2 Chroniques 26.10).
Une partie seulement du territoire était cultivée, en dehors des landes ou des rocs arides et des crêtes boisées (Josué 17.15 et suivants). Les champs (voir ce mot) étaient parfois limités par des bornes (Osée 5.10 ; Deutéronome 19.14 ; Deutéronome 27.17 ; Proverbes 22.28). L’unité de mesure de surface était le « joug », ou espace qu’une paire de bœufs pouvait labourer en un jour (1 Samuel 14.14 ; Ésaïe 5.10) ; on l’estimait aussi en quantité de semence (Lévitique 27.16 ; 1 Rois 18.32). Le sol n’était pas irrigué (Deutéronome 11.10). Il n’est pas sûr qu’on fumât généralement les terres (voir Fumier) ; les déchets d’animaux servaient de combustible (Ézéchiel 4.15), et l’on fertilisait parfois en brûlant chaume et buissons (Exode 15.7 ; Ésaïe 5.24 ; Ésaïe 47.14). La prescription jubilaire (laisser reposer la terre tous les sept ans) semble prouver la fertilité du sol cultivable (Exode 23.10) ; la parabole du semeur (Matthieu 13) en est une autre preuve, les rendements (exceptionnels il est vrai) pouvant être de 100, 50 ou 30 pour 1 ; la moyenne était de 6 ou 7 pour 1.
La réglementation agricole peut se résumer ainsi : indemnité de pâture dans les champs (Exode 22.5), droit de glaner (Lévitique 19.9), autorisation de cueillir des épis en cas de faim (Deutéronome 23.25), respect des bornes (Deutéronome 19.14), interdiction de mélanger les semences (Lévitique 19.19), observation de l’année sabbatique (Exode 23.11 ; Lévitique 25.4) et de l’année jubilaire (Lévitique 25.28), ces deux dernières prescriptions représentant sans doute un idéal plutôt qu’un usage réel.
Un calendrier agricole découvert à Guézer, datant du VIe siècle environ avant Jésus-Christ, note ainsi le rythme des saisons et des travaux, en commençant en automne : 2 mois, rentrée des récoltes ; 2 mois, semailles ; 2 mois, semailles tardives ; 1 mois, récolte de lin ; 1 mois, moisson d’orge ; 1 mois, les autres moissons ; 2 mois, vendange ; 1 mois, récolte sur les arbres fruitiers. L’automne était en effet l’époque où les premières pluies amollissaient le sol, durci par le soleil d’été. On remuait la terre à la pioche, bêche ou hoyau (1 Samuel 13.20 ; Ésaïe 7.25) mais surtout à la charrue (Luc 9.62), qu’on tenait d’une main, l’autre maniant l’aiguillon, et que tirait une paire de bœufs (Amos 6.12), vaches ou génisses (1 Samuel 6.7 ; Deutéronome 21.3), ou bien d’ânes (Ésaïe 30.24), réunis sous le joug (Lévitique 26.13) ; mais la loi interdisait d’accoupler bœuf et âne (Deutéronome 22.10), soit pour épargner l’animal le plus faible, soit plutôt par une extension de la crainte de tout métissage, considéré comme odieux à Jéhovah. On semait le grain (voir ce mot) à la main, le plus près possible de la charrue, pour enfouir immédiatement la semence, à l’abri du dessèchement, des oiseaux et des insectes : Ésaïe 28.25 fait sans doute allusion à un procédé d’ensemencement, avec un entonnoir fixé à la charrue et laissant tomber les grains derrière le soc. La moisson se faisait entre la Pâque et la Pentecôte, les terres chaudes des vallées avançant de deux semaines sur les hauts plateaux ; c’est pourquoi la fête des Tabernacles, qui célébrait la fin des récoltes, se faisait le 7e mois en Juda (Lévitique 23.14) et le 8e dans le nord (1 Rois 12.32). On coupait les tiges à la faucille (Deutéronome 16.9), comme encore aujourd’hui, en en prenant une poignée d’une main (Ésaïe 17.5 ; Psaumes 129.7) et en les tranchant de l’autre à quelque distance du sol ; les tas fauchés, tombés derrière le moissonneur, étaient liés en gerbes, plus ou moins groupées elles-mêmes en meules primitives (Genèse 37.7 ; Exode 22.6 ; Lévitique 23.10 ; Juges 15.5 ; Job 5.26) ; de même les mauvaises herbes pouvaient être liées en bottes destinées au feu (Matthieu 13.30). Le moissonneur laissait intacts les angles des champs et la matière à glaner par le pauvre et l’étranger (Lévitique 19.9 ; Deutéronome 24.19 ; Ruth 2.2 et suivants). Le battage se faisait, soit sur place au fléau (Ruth 2.17 ; Juges 6.11), soit plus souvent sur l’aire du village : (Jérémie 51.33) un chariot y apportait les gerbes (Amos 2.13), qu’on disposait en tapis épais et qu’on faisait fouler par le bétail ; il était interdit de le museler (Deutéronome 25.4), par égard pour l’animal. On se servait aussi du traîneau à battre, ou du rouleau, formé de plusieurs cylindres garnis de disques ; tous deux sont mentionnés dans Ésaïe 28.27. Pour vanner, on attendait la brise du soir, l’aire étant disposée dans un lieu bien éventé (ce qui en faisait un point vulnérable en temps de guerre : 1 Samuel 23.1) ; on jetait en l’air, au moyen de grandes pelles ou fourchettes, les épis hachés, la balle (voir ce mot) étant emportée au loin, la paille déviée, et le grain tombant aux pieds du vanneur (cf. Ésaïe 30.24). Après l’avoir passé au crible (Amos 9.9), on le ramassait à la pelle pour le déposer dans des fosses ou des citernes, qui servirent d’abord de greniers (Jérémie 41.8), plus tard dans de véritables granges et magasins (2 Chroniques 32.28 ; Proverbes 3.10; Joël 1.17 ; Matthieu 6.26; Luc 12.18).
Les instruments agricoles (figure 4) étaient donc : la charrue (voir Labour), composée de pièces de bois grossièrement équarries et assemblées, le soc, très réduit, étant la seule partie en fer. L’aiguillon (voir ce mot), muni d’une pointe en fer à un bout, et quelquefois à l’autre d’une petite pelle pour décrasser la charrue. Le joug (voir ce mot), formé, pour le bétail foulant le grain, de quelques légères pièces de bois recourbées, et d’une forte barre, fixée aux têtes ou aux cornes pour le bétail au labour. La faucille (Deutéronome 16.9), légère et mince, très économe de métal (des faucilles de silex ont été retrouvées à Guérar près Gaza, lieu des magnifiques récoltes d’Isaac : Genèse 26.6 ; Genèse 26.12). Le traîneau à battre, composé de quelques planches assemblées (2 m de long sur 1 m de large) et armé en dessous de pierres aiguës, ou de clous et de lames de fer ; le conducteur se tenait debout dessus pour l’alourdir ; il s’usait vite, d’où l’image de Ésaïe 41.15 : « Je fais de toi un traîneau tout neuf ». Les fourchettes et pelles à vanner et à ramasser le grain étaient en bois ; leur forme, ainsi que celle des divers tamis ou cribles (voir ce mot), n’a jamais beaucoup varié. La moisson était exposée à divers dangers : vents d’est torrides, en mars et avril (lekhamsîn d’Égypte : Genèse 41.6), sécheresse par manque de pluies « tardives » du printemps (Amos 4.9), grêle (Aggée 2.17), oiseaux (Matthieu 13.4), plantes parasites (Jérémie 12.13), maladies, rouille, nielle et en général toutes les plaies décrites dans Deutéronome 28.21-44 et Amos 4.9. L’importance de l’agriculture dans la vie d’Israël explique le très grand nombre d’illustrations que lui ont empruntées bien des prophètes, en particulier le pâtre Amos, et surtout les paraboles de Jésus-Christ ; l’apôtre Paul lui-même y a parfois recours (1 Corinthiens 15.36 et suivants). Sur les autres cultures spécialisées, voir article : Vigne, Figuier, Olivier, etc. Voir Bertholet, Histoire de la civilisation d’Israël, pages 222ss.
Numérisation : Yves Petrakian