1 Ô si tu déchirais les cieux, si tu descendais, que les montagnes fussent ébranlées devant toi, 2 comme le feu allume le bois mort, comme le feu fait bouillir l’eau, pour faire connaître ton nom à tes adversaires, de sorte que les nations tremblent devant toi, 3 en faisant des choses terribles, inattendues ; si tu descendais, que les montagnes fussent ébranlées devant toi ! 4 Jamais on n’a ouï ni entendu, jamais œil n’a vu un Dieu autre que toi, qui agisse en faveur de ceux qui s’attendent à lui ! 5 Tu es venu au-devant de celui qui fait avec joie ce qui est juste, de ceux qui se souviennent de toi en suivant tes voies. Voici, tu t’es courroucé, et nous étions coupables ; il en est ainsi dès longtemps…, serions-nous sauvés ? 6 Nous étions tous semblables à l’impur, et toutes nos justices pareilles à un vêtement souillé ; nous étions tous flétris comme la feuille, et nos iniquités nous emportaient comme le vent. 7 Il n’y avait personne qui invoquât ton nom, qui se réveillât pour se tenir ferme à toi ; car tu nous avais caché ta face, et tu nous laissais périr par nos iniquités. 8 Mais maintenant, ô Éternel, tu es notre père ; nous sommes l’argile, et toi, celui qui nous a formés ; nous sommes tous l’ouvrage de ta main. 9 Ne sois pas courroucé, ô Éternel, à l’excès ; et ne te souviens pas à toujours de l’iniquité ! Vois, daigne regarder : nous sommes tous ton peuple ! 10 Tes villes saintes sont devenues un désert ; Sion est devenue un désert, Jérusalem une solitude ; 11 notre maison sainte et magnifique, où nos pères t’ont loué, est devenue la proie du feu, et tout ce qui nous était cher a été dévasté. 12 En face de ces choses, te contiendras-tu, Éternel ? Te tairas-tu, et nous feras-tu souffrir à l’excès ?
Le verset 1 forme dans le texte hébreu la dernière partie du verset 19 du chapitre précédent. Mais il doit plutôt être rattaché à ce qui suit, comme l’ont déjà reconnu les anciennes versions (LXX, Vulgate, etc.). C’est pourquoi nous en faisons, avec la plupart des interprètes, le premier verset du chapitre 64.
C’est une apparition personnelle de Dieu qu’Israël réclame : il lui demande de déchirer cette voûte du ciel qui le sépare de lui et le cache à ses yeux (comparez le ciel se déchirant sur la tête de jésus à son baptême, Marc 1.10) et de descendre sur la terre pour exercer son jugement contre les ennemis de son peuple. L’apparition de Dieu est présentée, ici et ailleurs, comme produisant un ébranlement général de la nature (voir Ésaïe 13.10 ; Ésaïe 13.13 ; Ésaïe 24.18-20), de ce qu’il y a même de plus solide et de plus antique, les montagnes (comparez Juges 5.5 ; Habakuk 3.6).
Deux images pour décrire le jugement qu’accomplit Jéhova : ses ennemis sont anéantis comme de la broussaille consumée au feu, dissipés comme de l’eau qui se vaporise. Le jugement de Dieu, comparé à l’action du feu : voyez Ésaïe 10.17 ; Ésaïe 33.12 ; Ésaïe 33.14.
Ton nom : la révélation de ta sainteté dans le jugement (Ésaïe 30.27) !
En faisant des choses… : comme en Égypte (Deutéronome 4.34 ; 2 Samuel 7.23).
Comparez Deutéronome 4.32-37, 2 Samuel 7.23. C’est dans le souvenir des miraculeuses délivrances d’autrefois qu’Israël puise l’assurance avec laquelle il demande à Dieu de nouveaux miracles (versets 1 à 3).
En louant ainsi Jéhova, le prophète semble vouloir le stimuler à se montrer tel. La louange est souvent plus éloquente que la supplication.
Saint Paul applique ce passage aux merveilles de la rédemption, que Dieu prépare pour ceux qui l’aiment (1 Corinthiens 2.9).
Le prophète confesse le péché d’Israël et crie de nouveau à Dieu, se fondant uniquement sur son titre de père ; il lui met une dernière fois sous les yeux la détresse du peuple, qui est telle que la délivrance ne peut plus être différée.
Le peuple, par la bouche du prophète, se reconnaît justement puni et indigne de pardon ; il rejette loin de lui, par les expressions les plus fortes, tout sentiment de propre justice (verset 6 ; comparez Ésaïe 59.12-15).
Il en est ainsi dès longtemps, littéralement : dans ces choses (dans cet état misérable, objets de ta colère ; sous-entendu : nous sommes) dès longtemps (Ésaïe 63.19).
Serions-nous sauvés ? Ce sens interrogatif est le seul qui convienne au texte hébreu ; Reuss et d’autres changent ce texte sans motifs suffisants.
Passage capital sur l’universalité et la profondeur de la corruption humaine.
Tous… tous : comparez la confession Ésaïe 53.6.
Semblables à l’impur : à celui que la loi déclarait impur, au lépreux, qui devait crier : souillé, souillé ! afin qu’on s’écartât de lui (Lévitique 13.44-46).
Nos justices : nos œuvres justes, dont nous nous glorifiions (Ésaïe 33.15, en hébreu ; Daniel 9.18. Elles étaient pareilles à un vêtement qu’a souillé le contact d’une personne en état d’impureté lévitique (Lévitique 15.19 et suivants) ; c’est-à-dire : elles participaient à l’impureté de nos cœurs et ne pouvaient nous acquérir aucun mérite à tes yeux. Ils comprennent que (comme on l’a dit) ce qu’il y a de mieux dans nos meilleures œuvres, c’est que Dieu nous les pardonne.
Flétris comme la feuille. Comparez Ésaïe 1.30.
Nos iniquités nous emportaient… Le jugement de Dieu les a transportés en exil en raison de leurs iniquités (Ésaïe 27.8).
Tel était l’état du peuple au moment où Dieu le livrait au châtiment de la captivité. Ésaïe dépeint cet éloignement de Dieu comme tout à fait général (personne ; comparez Ésaïe 59.16) ; il ne mentionne pas les exceptions, dont il parle ailleurs (Reuss). Ces exceptions, du reste, ne pouvaient être que relatives. Les meilleurs se sont toujours identifiés, dans de telles confessions, avec la masse coupable ; voyez les prières de Daniel (chapitre 9) et d’Esdras (chapitre 9).
Caché ta face : Ésaïe 8.17.
Suprême appel à la grâce ; voyez Ésaïe 63.16.
La comparaison de l’argile exprime l’impuissance totale d’Israël à se sauver et à s’améliorer lui-même ; c’est Dieu qui l’a formé, pétri, une première fois ; lui seul aussi peut le former de nouveau, après sa déchéance et son châtiment. Même image, avec des applications différentes, Ésaïe 29.16 et Ésaïe 45.9.
Comparez avec versets 9 à 11 : Ésaïe 63.15-19.
Tous ton peuple. Ce n’est pas un salut individuel seulement, mais une restauration du peuple entier que le prophète réclame.
Exposer à Dieu le triste état de la Palestine, c’était le moyen le plus efficace d’obtenir l’exaucement ; aussi est-ce par là que se termine la prière.
Les villes de Canaan sont appelées saintes, parce que tout ce pays est la propriété de Jéhova, un territoire sacré (Ésaïe 14.25 ; Psaumes 78.54).
Notre maison… (le temple ; comparez Ésaïe 60.7) est devenue la proie du feu. C’est le point culminant du jugement. Voir, pour le fait historique, Jérémie 52.13 ; 2 Chroniques 36.19.
Ce qui nous était cher : les palais, les campagnes fertiles, etc (Ésaïe 5.9 ; Ésaïe 32.12-13).
En face d’une telle désolation, le prophète demande si l’Éternel pourra contenir encore sa pitié pour son peuple et son indignation contre les oppresseurs, se taire plus longtemps (Ésaïe 63.15 ; Ésaïe 42.14).
À l’excès. Le châtiment serait excessif, s’il aboutissait à la destruction totale et définitive. Mais une telle fin n’est pas concevable : la compassion de Jéhova doit enfin éclater, comme l’amour longtemps contenu de Joseph pour ses frères (Genèse 45.1).
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