1 Cantique des pèlerinages. De Salomon.
Si l’Éternel ne bâtit la maison,
Ceux qui la bâtissent se fatiguent en vain ;
Si l’Éternel ne garde la ville,
La garde veille en vain. 2 En vain vous vous levez matin,
Vous vous couchez tard,
Vous mangez un pain de labeur !
Il en donne tout autant à son bien-aimé pendant son sommeil ! 3 Voici, des fils sont un héritage de l’Éternel,
Le fruit du sein maternel est une récompense. 4 Comme des flèches dans la main d’un homme fort,
Tels sont les fils de la jeunesse ; 5 Heureux l’homme qui en a plein son carquois !
Ils ne seront pas confus,
Quand ils parleront avec des ennemis à la porte.
Les Psaumes 127 et 128, fort semblables entre eux, diffèrent notablement des autres cantiques des Maaloth. Ce sont des chants de famille et de vie domestique, intercalés, comme une parenthèse, au milieu de cantiques destinés au culte.
Cette parenthèse, ouverte à dessein au centre du groupe, correspond aux interruptions qu’apportaient de petites fêtes familières à la célébration des cultes auxquels prenaient part les pèlerins. Nous pouvons, à la lecture de ces deux petits poèmes, nous représenter l’accueil que recevaient chez les habitants de la capitale les fidèles venus du dehors. La famille est réunie pour un repas avec ses invités. Cette hospitalité ne pourrait s’exercer, si Dieu n’avait pas béni la maison qui l’offre si généreusement. C’est de ces bénédictions domestiques que traitent nos deux cantiques et ils le font en présentant les deux aspects d’une même vérité. Le premier relève exclusivement, dans le bonheur de la maison, la part de la grâce divine, il a tout naturellement sa place dans la bouche du père de famille ; le second, qui rappelle que Dieu ne bénit pas indifféremment chacun, mais qu’il aime ceux qui le craignent, semble être la réponse des pèlerins aux paroles de leur hôte (voir Bovet, Psaumes des Maaloth, pages 119 et 122).
Les deux psaumes sont de même longueur. Ils commencent tous deux par une sentence générale, pour continuer, comme la plupart des cantiques des pèlerins, par des descriptions qui sont de vrais tableaux.
Le Psaume 127 est attribué à Salomon par tous les manuscrits hébreux et par les anciennes versions, sauf les Septante. Il est en effet tout entier comme le développement de cette parole des Proverbes : C’est la bénédiction de l’Éternel qui enrichit et il n’y ajoute aucun travail (Proverbes 10.22) et sa première strophe, sentencieuse comme les Proverbes eux-mêmes, résume bien l’expérience de Salomon, enrichi par la faveur de l’Éternel (1 Rois 3.13). Cependant le genre de composition et de poésie du psaume est bien celui d’autres cantiques des Maaloth datant d’après la captivité. Il est donc possible qu’un auteur de cette dernière époque ait composé ce poème sur un fonds de pensées et même de sentences appartenant à Salomon.
Si l’Éternel ne bâtit la maison… L’expression : bâtir une maison, est prise sans doute ici au sens propre, mais elle prépare néanmoins le reste du psaume, y compris la seconde strophe, parce qu’elle signifie aussi : faire prospérer la maison (Proverbes 14.1) et même : fonder une famille (2 Samuel 7.11).
En vain. La triple répétition de ce mot (versets 1 et 2) est bien dans le genre propre aux cantiques des Maaloth. Comparez les alors de Psaumes 124.3-5 ; Psaumes 126.2.
Vous -vous couchez… Le mot hébreu signifie s’asseoir, mais s’asseoir pour se reposer, de même que le terme se lever signifie : se lever pour le travail. C’est donc à tort que quelques-uns ont traduit : Vous restez assis bien tard (pour le travail).
Son bien-aimé, ou son favori, hébreu : jadid. Ce nom a servi à former le nom de Jédidja, donné à Salomon (2 Samuel 12.25). Comme il est peu employé, il est bien probable qu’il y a ici allusion à ce roi et au songe dans lequel l’Éternel lui promit les richesses et la gloire qu’il n’avait pas demandées (1 Rois 3.13).
Pendant son sommeil. Après avoir dit que le travail est inutile, si l’Éternel n’y joint sa bénédiction, le psalmiste affirme ici, par une image qui dit tout, que cette bénédiction peut se passer même, au besoin, du travail humain. Comparez Psaumes 33.16 ; Psaumes 37.5 ; Proverbes 10.22. Dans le même ordre de pensées, le Seigneur interdit aux siens l’agitation et l’inquiétude (Matthieu 6.25-34). Dieu pourvoit aux besoins des siens par le travail même qu’il leur impose ; mais il peut, s’il le juge bon, les bénir indépendamment de ce travail.
Il en donne tout autant…
C’est le chef de la maison, ainsi que nous l’avons supposé, qui s’adresse dans ce psaume à ses hôtes. Peut-être répond-il aux remerciements qu’ils lui ont adressés. Il le fait avec modestie, rappelant que tout bien-être est un don gratuit de l’Éternel. Dans cette supposition, le mot kên (ainsi), qui a quelquefois embarrassé les commentateurs et que nous avons rendu par tout autant, s’expliquerait à merveille ; il signifierait tout cela, tout ce que vous voyez là… Il en serait de même du voici (verset 3) : Voici, des fils (tels que ceux que vous voyez-là), etc.
Des fils : voir verset 1, note.
Un héritage : un bien que l’homme n’acquiert pas par son travail, mais que l’Éternel accorde ou refuse comme il lui plaît.
Une récompense : non point un salaire dû, mais un signe de bienveillance.
Des flèches… Cette image guerrière correspond bien aux préoccupations d’une époque où Israël avait à renaître comme peuple capable de reconquérir son indépendance.
Les fils de la jeunesse : nés dans la jeunesse de leur père, de telle sorte que, quand ils seront en âge de porter les armes, le père lui-même sera encore un homme fort.
Plein son carquois. On redoute d’attaquer un guerrier bien armé. Ainsi les gens mal intentionnés y regardent à deux fois, avant de s’attaquer à un homme accompagné de nombreux fils.
À la porte, où se traitent (en Orient) les affaires, où s’administre la justice et où toute la vie sociale a son siège, et cela, par le fait que c’est près des portes seulement, dans la généralité des cas, que se trouvent des places d’une certaine étendue.
Le cas contraire à celui dont parle notre verset est indiqué Job 5.4.
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