1 C’est pourquoi tu es inexcusable, ô homme ! Qui que tu sois, toi qui juges ; car, en jugeant autrui, tu te condamnes toi-même, puisque tu commets les mêmes choses, toi qui juges. Quel est donc l’avantage du Juif ou quelle est l’utilité de la circoncision ? 2 Or, nous savons que le jugement de Dieu contre ceux qui commettent de telles choses est conforme à la vérité ; Cet avantage est grand de toute manière : et d’abord en ce que les oracles de Dieu leur ont été confiés. 3 or penses-tu, ô homme ! Toi qui juges ceux qui commettent de telles choses et qui les fais, que tu échapperas, toi, au jugement de Dieu ? Qu’est-ce à dire, en effet, si quelques-uns n’ont pas cru ? Leur incrédulité anéantira-t-elle la fidélité de Dieu ? 4 Ou méprises-tu les richesses de sa bonté, de sa patience et de sa longanimité, ne reconnaissant pas que la bonté de Dieu te pousse à la repentance ? Non certes ! Mais plutôt, que Dieu soit reconnu véridique et tout homme menteur, selon qu’il est écrit : Afin que tu sois reconnu juste dans tes paroles et que tu triomphes quand on te juge. 5 Mais, par ton endurcissement et par ton cœur impénitent, tu t’amasses un trésor de colère pour le jour de la colère et de la révélation du juste jugement, de Dieu, Mais si notre injustice établit la justice de Dieu, que dirons-nous ? Dieu est-il injuste en donnant cours à sa colère ? (Je parle à la manière des hommes). 6 qui rendra à chacun selon ses œuvres : Non certes ! Autrement, comment Dieu jugerait-il le monde ? 7 à ceux qui, par leur persévérance dans l’œuvre bonne, cherchent la gloire, l’honneur et l’incorruptibilité, il donnera la vie éternelle ; Car, si par mon mensonge la vérité de Dieu a surabondé pour sa gloire, pourquoi, moi, suis-je encore jugé comme pécheur ? 8 mais pour ceux qui sont animés d’un esprit de dispute et qui désobéissent à la vérité, mais obéissent à l’injustice, colère et indignation ! Et que n’agissons-nous comme nous en sommes calomnieusement accusés et comme quelques-uns prétendent que nous disons : Faisons le mal, afin que le bien en résulte ? La condamnation de ces gens-là est juste. 9 Affliction et angoisse sur toute âme d’homme qui fait le mal, sur celle du Juif premièrement, puis sur celle du Grec ; 10 mais gloire et honneur et paix pour tout homme qui fait le bien, pour le Juif premièrement, puis pour le Grec, 11 car devant Dieu il n’y a pas d’acception de personnes.
12 Car tous ceux qui auront péché sans la loi périront aussi sans la loi ; et tous ceux qui auront péché ayant la loi seront jugés par la loi. 13 Car ce ne sont pas ceux qui entendent lire la loi qui sont justes devant Dieu ; mais ceux qui mettent en pratique la loi seront justifiés. 14 Car lorsque des gentils, qui n’ont pas la loi, font naturellement ce que la loi commande, ces hommes, qui n’ont point la loi, sont une loi pour eux-mêmes ; 15 ils montrent, en effet, que l’œuvre commandée par la loi est écrite dans leur cœur ; leur conscience joignant son témoignage, et leurs pensées tantôt les accusant, tantôt aussi les défendant ; 16 c’est ce qui apparaîtra le jour où Dieu jugera par Jésus-Christ les œuvres secrètes des hommes selon mon évangile.
17 Or, si toi, tu te donnes le nom de Juif et tu te reposes sur la loi et tu te glorifies de Dieu, 18 et tu connais sa volonté et tu sais discerner les cas différents, étant instruit par la loi, 19 et tu t’estimes toi-même capable d’être un conducteur d’aveugles, une lumière pour ceux qui sont dans les ténèbres, 20 un éducateur de ceux qui sont dépourvus de sens, un maître des ignorants, ayant dans la loi la formule de la connaissance et de la vérité,… 21 toi, donc, qui enseignes les autres, tu ne t’enseignes pas toi-même ! Toi qui prêches de ne pas dérober, tu dérobes ! 22 toi qui dis de ne pas commettre d’adultère, tu commets adultère ! Toi qui as en abomination les idoles, tu t’en appropries les dépouilles ! 23 toi qui te glorifies de la loi, tu déshonores Dieu par la transgression de la loi ! 24 Car le nom de Dieu est blasphémé à cause de vous parmi les gentils, comme il est écrit…
25 Car la circoncision est utile, il est vrai, si tu observes la loi ; mais si tu es transgresseur de la loi, ta circoncision devient incirconcision. 26 Si donc l’incirconcis garde les commandements de la loi, son incirconcision ne sera-t-elle pas tenue pour circoncision ? 27 Et celui qui, demeuré dans son incirconcision naturelle, accomplit la loi, te jugera, toi qui, tout en possédant la lettre de la loi et la circoncision, es transgresseur de la loi. 28 Car celui-là n’est pas Juif qui se montre extérieurement tel, et la circoncision n’est pas celle qui se montre extérieurement dans la chair ; 29 mais le vrai Juif, c’est celui qui l’est dans l’être caché, et la vraie circoncision est celle du cœur, selon l’Esprit et non selon la lettre ; sa louange ne vient pas des hommes, mais de Dieu.
Les principes du jugement de Dieu
Application de ces principes à la conduite des Juifs
Réponse à une double objection
Romains 2.1 à 3.8 Les Juifs.
En introduisant la suite de son argumentation par c’est pourquoi, Paul déduit du jugement qu’il vient de formuler sur les païens (Romains 1.32), la culpabilité sans excuses des Juifs.
Si les païens ne peuvent invoquer comme circonstance atténuante leur ignorance, puisqu’ils connaissent la sentence de mort prononcée par Dieu sur les pécheurs, le Juif, bien mieux instruit de la volonté divine, est, à plus forte raison, inexcusable quand il désobéit à cette volonté et commet les mêmes choses qu’il condamne chez les païens.
L’apôtre ne désigne pas encore les Juifs par leur nom, il veut ménager leurs préjugés et leur susceptibilité ; aussi ne sont-ils nommés qu’en verset 9, bien que dès cette première apostrophe il s’adresse à eux et non, comme on l’a prétendu, à des païens exempts des vices énumérés dans Romains 1.24-32 et portés à condamner ceux qui s’y adonnaient.
Les Juifs, en effet n’en étaient pas venus à approuver les péchés des païens (Romains 1.32) ; ils les jugeaient au contraire dans leur orgueil pharisaïque ; mais en jugeant autrui, ils se condamnaient eux-mêmes, puisqu’ils commettaient les mêmes péchés (Matthieu 7.1).
Codex Sinaiticus, C portent : car, au lieu de or (ou mais).
Nous savons… Paul en appelle à la conscience de tout homme.
Le jugement de Dieu est selon la vérité ; il est conforme à la conduite de l’homme il n’admet pas les dispenses et les privilèges sur lesquels les Juifs comptaient comme membres du peuple élu. Dieu regarde au cœur ; il ne fait pas acception de personnes.
D’autres traduisent : « Le jugement de Dieu atteint vraiment, infailliblement, ceux qui commettent de telles choses ».
Si le Juif, qui appartient au peuple de l’Alliance et qui est, comme tel, l’objet particulier de la patience de Dieu, s’endurcit dans le péché et refuse de se convertir, loin d’échapper au jugement de Dieu, il encourra une condamnation plus certaine.
La bonté de Dieu s’est manifestée par tous ses bienfaits envers Israël ; son support, par la patience dont il a usé envers ce peuple rebelle ; sa longanimité, par le délai de ses châtiments, spécialement après que les Juifs eurent crucifié son Fils.
Les Juifs se vantaient d’avoir été les objets de la bonté, du support, de la longanimité de Dieu.
Paul reconnaît qu’il en a été ainsi ; mais au lieu de voir dans ce fait un gage de la faveur immuable de Dieu, il le présente à son peuple comme un suprême appel à la repentance.
Malheur au Juif qui méconnaîtrait plus longtemps l’intention miséricordieuse de Dieu et ne se sentirait pas poussé à la repentance par la bonté même que Dieu montre à son égard.
Au lieu de repentance, on pourrait traduire conversion ; le terme grec désigne un changement d’esprit, de dispositions morales.
Ce jugement de Dieu est voilé aux yeux de la plupart des hommes.
La justice divine semble incomplète et souvent il est impossible de la discerner dans la destinée actuelle des peuples comme des individus.
Au jour de la révélation du juste jugement de Dieu, tout voile sera ôté, tout nuage dissipé.
Comparer : Romains 14.12 ; 2 Corinthiens 5.10 ; Galates 6.7 ; Matthieu 12.36-37 ; Jean 5.28-29.
La destinée finale de l’homme dépendra de sa valeur morale. Cette redoutable vérité n’est pas en contradiction avec la justification par la foi seule, car celle-ci conduit à la sanctification (voir la note suivante et celle du verset 13).
Les versets 7-10 sont destinés à développer le principe que Paul a exprimé au verset 2 : le jugement de Dieu est pour tous, Juifs ou Grecs, « selon la vérité » et qu’il confirme au verset 11 en disant : « devant Dieu il n’y a pas d’acception de personnes ».
Il ne s’agit encore que du principe universel de la justice de Dieu et de la responsabilité de l’homme et nullement du moyen par lequel l’homme peut arriver à un état de justice et de sainteté, qui lui permette de subsister devant Dieu.
L’apôtre, à moins de se mettre en contradiction avec tout son enseignement et en particulier avec ce qu’il expose plus loin dans cette épître, ne peut vouloir dire qu’il y a des hommes qui, sans l’Évangile et en s’appliquant par leurs propres forces à la pratique des bonnes œuvres, parviennent à la vie éternelle.
Il déclare seulement que de l’état moral de l’homme qu’il soit Juif ou Grec de race, dépendra la sentence prononcée sur lui au jour du jugement. Plus loin, il dira ce que Dieu a fait dans sa grâce Pour rendre l’homme pécheur acceptable devant lui.
En attendant, il oppose à l’esprit de dispute, au stérile savoir théologique, au désir d’avoir toujours raison, à l’orgueilleuse propre justice de ces Juifs qui se croyaient assurés de leur salut, alors qu’ils désobéissaient à la vérité et obéissaient à l’injustice (Romains 1.18 ; 1 Pierre 4.17), une invariable persévérance dans le bien, comme condition indispensable pour obtenir la récompense céleste et avoir part à la vie éternelle (1 Corinthiens 6.9-10).
C’est aussi ce que fait Jacques (Jacques 1.22-27 ; Jacques 2.14-26), et le Sauveur lui-même (Matthieu 19.16 et suivants ; Luc 10.25 et suivants).
Grec : Par (ou en) persévérance de bonne œuvre. La persévérance dans le bien (Romains 15.4 ; 1 Thessaloniciens 1.3 ; 2 Corinthiens 1.6) est opposée à ces élans passagers dont les plus mauvais sont capables, mais qui s’arrêtent bientôt et ne portent pas de fruits.
L’œuvre bonne n’est pas seulement une œuvre conforme à la loi, mais une œuvre dont les motifs sont purs et qui est inspirée par la foi, sans laquelle il n’est pas possible d’être agréable à Dieu (Hébreux 11.6).
Quand l’apôtre dit que les fidèles, en persévérant en bonnes œuvres, cherchent gloire et honneur, il n’entend pas qu’ils aient pour leur but autre chose sinon le Seigneur, ou qu’ils désirent quelque chose plus haute et plus excellente que lui. Mais ils ne peuvent pas le chercher, que quant et quant ils ne prétendent et s’efforcent de parvenir à la béatitude de son royaume, de laquelle les mots ici mis contiennent une description.
Paul, comme Jésus lui-même (Jean 5.44), oppose à la recherche de la vaine gloire qui vient des hommes, cette idole du pharisaïsme, la recherche de la gloire qui vient de Dieu seul.
Dans la locution : « affliction et angoisse sur toute âme d’homme qui fait le mal », l’âme serait spécialement mentionnée, suivant les uns, comme siège de la sensibilité ou comme base de la personnalité ; suivant d’autres, toute âme d’homme serait un hébraïsme équivalant à « tout homme ».
Le châtiment et la récompense sont destinés au Juif premièrement, puis au Grec, de même que la prédication de l’Évangile du salut (Romains 1.16).
Le Juif jouit d’une prérogative comme membre du peuple élu, mais il encourt aussi une plus lourde responsabilité en vertu du principe posé par Jésus dans Luc 12.47-48 (Comparer Amos 3.2).
Comparer : Deutéronome 10.17 ; 1 Samuel 16.7 ; 2 Chroniques 19.7 ; Job 34.19 ; Actes 10.34 ; Galates 2.6 ; Éphésiens 6.9 ; Colossiens 3.25 ; 1 Pierre 1.17.
Ceux qui auront péché (grec) sans loi, c’est-à-dire sans avoir de loi écrite.
L’apôtre pense à la loi mosaïque, car les Juifs ont été seuls parmi les peuples à avoir la loi de Dieu par écrit et réunie en un code. Comme cette loi n’a pas été confiée aux gentils, ceux-ci ne pourront être jugés d’après elle.
Mais ils ont une autre loi, celle de la conscience (versets 14 et 15), et Dieu s’est révélé à eux dans ses œuvres (Romains 1.19-21).
Leur endurcissement dans le péché, en présence de tels moyens de connaître Dieu, sera la cause de leur condamnation : ils périront.
L’apôtre ne dit pas qu’ils « seront jugés », parce que leur perdition ne sera pas l’effet d’une sentence directe prononcée d’après une loi positive. Mais, en toutes circonstances le salaire du péché, c’est la mort.
En admettant cette dure vérité que l’expérience confirme, il ne faut pas oublier toutefois qu’il y a devant Dieu divers degrés de culpabilité, dont il sera tenu compte au jour du jugement (comparez Matthieu 11.20-24 ; Luc 12.47-48).
Ceux qui auront péché en ayant la loi, grec en loi, c’est-à-dire sous le régime de la loi, seront jugés par la loi, précisément par cette loi de Moïse dont les Juifs se glorifiaient (comparez versets 17-20), s’imaginant qu’il suffisait de la posséder et de la connaître pour être juste devant Dieu (verset 13).
Le même apôtre qui enseigne avec tant d’insistance que nul ne sera justifié par les œuvres de la loi affirme avec non moins d’énergie l’obligation absolue pour l’homme de mener une vie conforme aux préceptes de cette loi dont il relève à tout propos la sainteté inviolable (comparez Matthieu 5.17-19).
Grec : Les auditeurs… les faiseurs de la loi…
Les Juifs, dans leurs synagogues, entendaient lire la loi chaque sabbat, mais cela ne suffisait pas pour qu’ils fussent justifiés.
L’homme qui aurait observé, dans toute sa sainteté, la loi divine qui condamne jusqu’aux pensées et aux mouvements coupables du cœur, serait sans doute juste devant Dieu, mais cet homme, où est-il ? L’apôtre répond à cette question à Romains 3.9-10.
En se contentant d’entendre lire la loi, en la dépouillant de ses exigences les plus hautes, en la réduisant à quelques préceptes de morale vulgaire, les Juifs ont pu s’imaginer qu’ils seraient justifiés par les œuvres de la loi ; et beaucoup de chrétiens ont partagé la même illusion (Galates 3.10 et suivants).
D’autres interprètes n’admettent pas que Paul fasse une supposition irréalisable quand il dit : ceux qui mettent en pratique la loi seront justifiés. Ils remarquent que l’apôtre emploie le futur et non le conditionnel. Ils voient donc ici la prédiction d’un fait qui se produira au jour du jugement.
La justice imputée au croyant en vertu de sa foi est le point de départ et la base de l’œuvre du salut ; mais la sainteté réalisée en doit être le terme et le couronnement : l’une est la porte d’entrée dans l’état de grâce ; l’autre est la condition du passage de l’état de grâce à l’état de Gloire.
Mais l’Évangile ne proclame-t-il pas l’entière gratuité du salut final lui-même ? S’il fallait avoir mis en pratique la loi pour être justifié, ceux qui acceptent la grâce à la onzième heure pourraient-ils avoir l’assurance de leur salut ? Et d’autre part, la sainteté parfaite, que suppose la mise en pratique de la loi tout entière, est-elle réalisable ici-bas (Comparer versets 6-10, notes) ?
Les interprètes sont divisés sur la manière dont on doit rattacher verset 14 à ce qui précède.
Calvin et beaucoup d’autres pensent que les versests versets 14-16 sont destinés à prouver l’assertion du verset 12 « Ceux qui auront péché sans la loi périront aussi sans la loi ».
Paul voudrait justifier cette sentence prononcée sur ceux à qui la volonté de Dieu n’avait pas été spécialement révélée. Il fonde la responsabilité des païens sur les avertissements de leur conscience, comme il l’avait fondée déjà (Romains 1.18-21) sur la connaissance qu’ils pouvaient acquérir de Dieu au moyen de ses œuvres.
La plupart des interprètes modernes relient les versets 14-16 au verset 13, les uns à la première affirmation de ce verset, les autres à la seconde, d’autres enfin à toutes les deux : il ne suffit pas de posséder la loi, il faut la pratiquer, pour être justifié ; c’est ce que prouve l’exemple des païens qui pratiquent naturellement la loi, ils l’ont donc écrite dans le cœur et ils seraient justes devant Dieu, si la seule possession de la loi donnait la justice, au contraire, ils sont jugés par leur conscience suivant qu’ils ont ou non accompli la loi.
Que signifieraient ces jugements intérieurs, s’il suffisait de connaître ou de posséder la loi pour être sauvé ?
La conjonction que nous traduisons par lorsque implique en grec une nuance que l’on pourrait exprimer par : « à supposer que cela arrive ».
Paul ne dit pas : les gentils, mais des gentils. Enfin, il ne dit pas qu’ils pratiquent « la loi » (comme au verset 27, voir la note), mais (grec) les choses de la loi, ce qui peut s’entendre d’un accomplissement partiel.
Ils les font naturellement (grec par nature), c’est-à-dire spontanément, sans commandement écrit. Ils montrent ainsi qu’ils ont au-dedans d’eux le sentiment du juste et de l’injuste, mais cela ne veut pas dire qu’ils remplissent parfaitement et toujours les ordres de la voix intérieure.
Néanmoins, puisqu’ils lui obéissent, ces hommes qui n’ont point la loi, sont eux-mêmes leur propre loi, grec ceux-là, n’ayant pas de loi, sont loi pour eux-mêmes.
Ils montrent en effet… Il y a en grec un pronom relatif qu’on pourrait traduire : « eux, qui montrent… »
L’œuvre de la loi, c’est le contenu de la loi dans son unité, toute la conduite que la loi prescrit, tandis que « les choses de la loi » (verset 14), c’étaient les préceptes de la loi dans leur multiplicité.
Grec : Leur conscience rendant témoignage avec (de ce qui est juste ou injuste) et leurs pensées (ou réflexions) accusant ou aussi défendant entre elles.
La conscience est cette voix intérieure qui ne cesse jamais entièrement de témoigner en faveur de la vérité et de la justice, alors même que l’homme parvient à l’affaiblir, à l’obscurcir, en lui résistant et à la fausser par ses sophismes.
Elle rend témoignage avec, c’est-à-dire : son témoignage est d’accord avec le fait que le gentil accomplit les préceptes de la loi ; elle concourt avec lui à prouver que l’œuvre de la loi est écrite dans son cœur.
Les pensées sont les conclusions que la raison tire des avertissements de la conscience ; par elles, l’homme en tantôt accusé, tantôt aussi, mais plus rarement disculpé, quand il juge ses actes.
Paul en appelle à ces discussions dont le cœur du païen lui-même est le théâtre et qui ont pour objet ses propres actes… Ses pensées elles-mêmes débattent entre elles sur la valeur morale des actes et de leur auteur. Il y a là, dans le cœur, un tribunal dressé, un avocat qui accuse, un autre qui répond, tout cela au nom d’un code lu, compris et appliqué comme le texte de la loi dans les débats des rabbins.
D’autres entendent les expressions dont se sert l’apôtre non d’un débat intérieur, mais d’entretiens dans lesquels les païens discutaient entre eux la valeur morale de leurs actes.
Entre verset 15 et verset 16 la construction est brisée, en sorte qu’il est difficile de savoir à quoi l’on doit relier verset 16.
Plusieurs interprètes font des versets 14 et 15 une parenthèse et rattachent verset 16 au verset 13, ou aux dernières paroles du verset 12.
Nous pensons plutôt que la mention du jour où Dieu jugera, accompagnée de l’indication spéciale que ce Jugement portera sur les œuvres secrètes (grec choses cachées) des hommes, est en relation dans la pensée de l’apôtre, avec le tableau de la lutte que se livrent dans le cœur du païen les pensées qui, tour à tour, l’inculpent et le disculpent (verset 15).
Actuellement, cette lutte n’apparaît pas aux regards. Mais au jour du jugement, quand tous les secrets seront découverts, on verra combien elle a été réelle et suffisante pour établir la responsabilité des païens.
Nous indiquons ce rapport en introduisant dans la traduction les mots : c’est ce qui apparaîtra, qui ne sont pas dans le texte.
En énonçant les idées qui se pressent dans son esprit, Paul a omis ce membre de phrase, l’ellipse ne nous paraît pas trop forte pour être admissible.
D’autres interprètes établissent la relation entre verset 15 et verset 16 en affirmant qu’il ne s’agit pas, au verset 16, du jugement dernier, mais du Jugement moral exercé dans les cœurs par la prédication de l’Évangile, quand elle trouve de l’écho dans les consciences et y provoque ce débat entre les pensées que décrit verset 15.
Ils invoquent deux raisons en faveur de leur explication :
Ce qui s’oppose à cette explication, c’est que le terme : « le jour » désigne toujours chez Paul le grand jour du jugement dernier ; l’omission de l’article ne lui ôte pas ce sens technique (1 Corinthiens 5.5 ; 1 Corinthiens 4.3-5 ; 1 Corinthiens 1.8 ; 1 Corinthiens 3.13 ; 1 Thessaloniciens 5.4 ; 2 Thessaloniciens 1.10 ; comparez Actes 17.31).
Le complément selon mon Évangile (comparez Galates 1.6-12 ; Galates 2.2) se rapporte aux mots qui précèdent immédiatement : les choses cachées des hommes.
L’enseignement de Paul, en abolissant la circoncision et les pratiques rituelles, qui étaient un élément essentiel de la justice légale des Juifs, faisait porter le jugement de Dieu uniquement sur les dispositions du cœur, sur les faits de la vie morale.
Si l’on relie le complément selon mon Évangile soit à : Dieu jugera, soit à : par Jésus-Christ, il faut donner à l’expression mon Évangile un sens plus général : l’Évangile que je prêche en qualité d’apôtre et qui est aussi celui des autres apôtres. Car l’idée que Dieu jugera le monde par Jésus-Christ était une croyance commune aux chrétiens d’origine juive et aux disciples de Paul.
Mais le sens spécial que Paul donne ailleurs à l’expression : mon Évangile, peut amener à penser qu’il oppose au légalisme formaliste des Juifs, qui se glorifiaient de leur loi et de leurs pratiques extérieures (verset 17 et suivants), cette affirmation, qui est bien un trait essentiel de sa conception du salut : Dieu regarde au cœur. Il jugera les œuvres secrètes des hommes.
Cette application nous paraît recommandée par l’ordre des mots, dans le texte grec et par le rapport que nous avons cru pouvoir constater entre verset 16 et verset 15.
La construction de la phrase qui comprend les versets 17-24 est irrégulière : il n’y a pas de proposition principale qui réponde à la subordonnée introduite par : or, si.
D’après quelques interprètes, Paul aurait formulé cette proposition principale dans verset 21 et suivants et l’aurait introduite par donc, en oubliant qu’il avait commencé la phrase par or, si.
Il nous semble plutôt que les versets 21-24 expriment encore les prémisses du raisonnement et que la conclusion est sous-entendue après verset 24.
Cette conclusion, que Paul juge oiseux de formuler, est : « Tu seras condamné, au jour du jugement, aussi bien que le païen ».
Les prémisses de la conclusion sont constituées par une double énumération, celle des privilèges dont se glorifie le Juif (versets 17-20) et celle des contrastes qu’il y a entre ses prétentions et sa conduite (versets 21-24).
Ces versets 17-24 développent le principe énoncé au verset 13, dans son application spéciale aux Juifs.
Au verset 17, Paul énumère les dons que le Juif a reçus : son nom glorieux de Juif ; la loi, signe manifeste de la faveur divine, sur laquelle il croit pouvoir se reposer ; Dieu enfin, dont il se glorifie, s’enorgueillissant dans la pensée que le Dieu qu’il invoque est le seul vrai Dieu.
À la gradation des trois substantifs, Juif, loi, Dieu, correspond celle des trois verbes : se nommer, se reposer, se glorifier.
Aux privilèges énumérés au verset 17, le Juif joint une supériorité de connaissance, qui en est la conséquence : tu connais la volonté de Dieu et (grec) tu éprouves les choses différentes, c’est-à-dire les choses qui diffèrent, les questions controversées de doctrine ou de morale, les partis qu’il faut prendre pour rester dans l’obéissance à Dieu, etc.
D’autres traduisent : « tu apprécies les choses les meilleures ». Comparer Philippiens 1.10, où le même terme se retrouve.
Tel est le rôle que le Juif s’arroge en vertu de ses avantages et notamment parce qu’il prétend avoir dans la loi la formule (grec la formulation) de la connaissance et de la vérité, c’est-à-dire posséder la connaissance et la vérité formulées parfaitement, revêtues de leur forme définitive.
Le verbe que nous traduisons par s’approprier les dépouilles des idoles signifie proprement : « piller le temple ».
Quelques commentateurs l’appliquent au culte que les Juifs célébraient dans le temple de Jérusalem et l’entendent soit des trafics illicites que les prêtres autorisaient par amour de l’argent (Matthieu 21.12-13), soit des fraudes pieuses que le peuple commettait dans ses offrandes (Malachie 2.8 ; Malachie 2.12-14 ; Malachie 3.8).
Mais ces infidélités dans le service de Dieu pouvaient fort bien se concilier avec l’horreur des idoles. Or l’apôtre oppose celle-ci à la pratique qu’il reproche aux Juifs.
Les temples dépouillés doivent donc être ceux des faux dieux. Les uns pensent qu’il s’agit d’attentats directs contre les sanctuaires païens (comparez Actes 19.37) d’autres estiment qu’il n’est pas prouvé que les Juifs commissent de tels attentats, qu’en tout cas ils devaient être rares et que d’ailleurs ils étaient inspirés précisément par la haine des idoles.
Paul fait donc probablement allusion au brocantage et aux manœuvres, plus ou moins frauduleuses, par lesquelles les Juifs entraient en possession d’objets provenant des temples païens. Leur horreur des idoles ne les empêchait pas de considérer comme de bonne prise les objets précieux qui leur étaient consacrés.
Ésaïe 52.5. Dans le texte hébreu, ce sont les princes païens qui blasphèment le nom de l’Éternel en voyant son peuple exilé et captif.
D’après la version des Septante, c’est la conduite des Juifs en exil qui provoque les blasphèmes des païens. Paul adopte ce dernier sens dans l’application qu’il fait ici de cette parole.
Le nom de Dieu est blasphémé parmi les païens, parce qu’ils croient que Dieu approuve les abominations commises par les Juifs (Ézéchiel 36.20-23).
Redoutable conséquence des infidélités des croyants ! Que ce fait serve d’avertissement aux chrétiens (Romains 14.13 ; 1 Timothée 6.1 ; 1 Timothée 2.5) !
Les efforts des ennemis de Dieu nuisent moins à la cause de son règne que les fautes de ses serviteurs.
Après verset 24, il faut sous-entendre : « Tu seras condamné au jour du jugement ». Comparer verset 17, note.
À cette conclusion se rapporte le car du verset 25 : la condamnation du Juif est certaine et justifiée, car, si la possession de la loi est impuissante à le sauver (versets 17-24), la circoncision, cette autre prérogative dont il s’enorgueillit, ne peut non plus lui garantir le salut (versets 25-29).
Elle est utile, il est vrai, si tu observes la loi (Galates 5.3), comme un signe de l’alliance de grâce (Genèse 17.10-14).
Mais si tu es transgresseur de la loi (grec), ta circoncision est devenue prépuce. Le Juif devient pareil au païen, bien qu’il porte le signe extérieur de l’alliance (Jérémie 9.25-26).
Grec : Si donc l’incirconcision observe… Et l’incirconcision par nature accomplissant la loi te jugera, toi le transgresseur de la loi avec (ou à travers) la lettre et la circoncision.
Paul emploie le terme abstrait l’incirconcision, au lieu de l’incirconcis, parce qu’il énonce un principe. Il ajoute : par nature, parce que l’incirconcision a son excuse dans le fait qu’elle est l’état naturel.
Le verbe au futur : te jugera, ne doit pas s’entendre du jugement dernier ; c’est un futur logique : s’il remplit la condition indiquée, l’incirconcis te jugera, c’est-à-dire : en la remplissant, il affirmera sa supériorité morale, qui pourra recevoir sa confirmation éclatante au jour du jugement dernier (comparez Matthieu 12.41-42).
La supposition que fait l’apôtre, de gentils qui, sans être circoncis, gardent les ordonnances de la loi (comparez versets 14 et 15), a été réalisée par un Corneille (Actes 10) et d’autres pieux prosélytes, puis surtout par les païens convertis à l’Évangile (verset 29), comparer : Philippiens 3.3 ; Matthieu 8.11 ; Matthieu 8.12.
C’est eux que l’apôtre a ici en vue et non plus seulement, comme au verset 14, l’élite des gentils.
Le sens général de la pensée de l’apôtre est : la circoncision ou l’incirconcision, en ellesmêmes, ne sont rien ; l’obéissance aux commandements de Dieu est tout (1 Corinthiens 7.19 ; Galates 5.6).
L’homme s’obstine à placer l’essence de la religion dans les œuvres extérieures tous les enseignements de l’Écriture le ramènent au dedans, à l’être plutôt qu’au faire, parce que le premier produit toujours le dernier, mais non l’inverse.
Grec : Mais celui-là est Juif qui l’est dans le secret et la circoncision est en esprit, non en lettre.
Sur la circoncision du cœur, comparez dans l’Ancien Testament déjà : Deutéronome 30.6 ; Jérémie 4.14 ; Ézéchiel 44.7 ; Lévitique 26.41.
Cette circoncision intérieure est (grec) dans l’Esprit et non dans la lettre, c’est-à-dire : sous le règne et par l’action de l’Esprit, qui caractérise la nouvelle alliance et non sous le règne de la lettre, qui est celui de l’ancienne alliance.
D’autres interprètes pensent que Paul parle de l’esprit de l’homme comme du domaine dans lequel se fait la circoncision. Mais, avec ce sens, l’esprit ne ferait pas antithèse à la lettre et Paul répéterait simplement l’idée exprimée par les mots : la circoncision du cœur.
D’autres encore estiment qu’il veut dire : « Selon l’esprit de la loi et non selon sa lettre ».
Ce qui se fait par l’Esprit, c’est tout ce que Dieu opère en l’homme d’une manière surnaturelle ; ce qui se produit selon la lettre, c’est toute œuvre d’homme, accomplie par la nature, sans l’Esprit de Dieu.
Ce contraste absolu : chercher la louange des hommes ou celle de Dieu, indique l’exacte mesure de ce qui est extérieur ou intérieur, vrai ou faux, vivant ou mort dans les œuvres d’un homme (Jean 5.44 ; Jean 12.43 ; 1 Corinthiens 1.31 ; 2 Corinthiens 10.18).
La louange de Dieu deviendra manifeste au jour du jugement (1 Corinthiens 4.5).
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