1 Et j’ai dit : Écoutez donc, chefs de Jacob et magistrats de la maison d’Israël ! N’est-ce pas à vous de connaître le droit ? 2 Vous qui haïssez le bien et aimez le mal ; qui leur arrachez la peau du corps et la chair de dessus leurs os ! 3 Ils dévorent la chair de mon peuple et lui arrachent la peau du corps et brisent ses os et les mettent en pièces comme ce qu’on cuit dans la marmite, comme de la viande dans la chaudière ! 4 Alors ils crieront à l’Éternel, et il ne les exaucera point, et il leur cachera sa face en ce temps-là, parce qu’ils ont fait des actions mauvaises. 5 Voici ce que dit l’Éternel des prophètes qui égarent mon peuple, qui crient : Paix ! Quand leurs dents ont de quoi mordre, et qui déclarent la guerre à quiconque ne leur met rien dans la bouche ! 6 C’est pourquoi, pour vous la nuit au lieu de visions, et les ténèbres au lieu de divination ! Le soleil se couchera pour les prophètes, et le jour s’obscurcira sur eux. 7 Les voyants seront confus et les devins rougiront de honte ; tous ils se couvriront la barbe, car il n’y aura pas de réponse de Dieu. 8 Mais moi, je suis rempli de force, de l’Esprit de l’Éternel, de jugement et de vaillance, pour dénoncer à Jacob son crime et à Israël son péché. 9 Écoutez donc ceci, chefs de la maison de Jacob et magistrats de la maison d’Israël, qui avez la justice en horreur et qui pervertissez tout ce qui est droit, 10 bâtissant Sion avec le sang et Jérusalem avec le crime ! 11 Ses chefs jugent pour des présents, ses sacrificateurs enseignent pour un salaire, et ses prophètes prédisent pour de l’argent. Et ils s’appuient sur l’Éternel, en disant : L’Éternel n’est-il pas au milieu de nous ? Le mal ne viendra pas sur nous ! 12 C’est pourquoi, à cause de vous, Sion sera un champ qu’on laboure, Jérusalem un monceau de pierres, et la montagne du temple deviendra une hauteur boisée !
Les crimes des chefs du peuple, cause de la totale destruction de Jérusalem et du temple.
Ce discours est spécialement dirigé contre les chefs du peuple, que le prophète a déjà censurés au chapitre 2 et dont il énumère ici les différentes classes. Trois strophes, chacune de quatre versets, dirigées, la première, contre les princes et magistrats qui oppriment le peuple, versets 1 à 4, la seconde, contre les faux prophètes qui l’égarent et le confirment dans son péché, par leurs promesses mensongères, versets 5 à 8 ; la troisième, contre les princes, les prophètes et les sacrificateurs auxquels Michée annonce sans ambages l’entière destruction de Jérusalem et du temple, juste punition de leurs crimes, versets 9 à 12.
Les mots : Et j’ai dit, marquent que ce discours est la continuation ou la reprise du précédent. Le prophète précise ici les censures et les menaces déjà énoncées. Il ne pourra développer la promesse brièvement indiquée Michée 2.12-13, comme il le fera aux chapitres 4 et 5, qu’après qu’il aura d’abord mis à nu, dans tout ce qu’elle a d’odieux, l’iniquité d’Israël et annoncé, avec une impitoyable précision le châtiment dont il a parlé jusqu’ici en termes généraux, chapitres 1 et 2.
Chefs, magistrats : les autorités politiques et judiciaires ; les chefs de tribu et de famille auxquels incombait, concurremment avec les prêtres nommés plus bas (verset 11), l’office de rendre la justice (Deutéronome 17.8 et suivants, 2 Chroniques 19.8 et suivants). Le terme traduit par magistrats répond à l’arabe kadi, juge.
Connaître : pratiquement, dans leurs décisions. Si eux, chargés de faire respecter le droit, ne se conforment pas, qui le fera ?
Leur conduite est exactement le contraire du respect du droit.
Leur : à mon peuple.
Leur arrachez la peau : image en rapport avec celle des brebis, sous laquelle le prophète vient de présenter Israël (Michée 2.12). Michée désigne par là non seulement les injustices légales des juges, mais aussi les injustices privées des grands, les actes de violence sur les faibles, les procès ruineux intentés aux pauvres, l’usure, etc. Comparez Michée 2.8-9 ; Amos 2.6-8 ; Ésaïe 1.23 ; Ésaïe 10.1-2 et pour l’image Proverbes 30.14.
Développement de l’image du verset 2 le peuple est traité comme un animal qu’on apprête pour le repas. Comparez Psaumes 14.4.
Dieu n’aura pas plus pitié d’eux qu’ils n’ont en pitié de son peuple.
Alors : au temps de la calamité déjà annoncée Michée 2.3-4.
Il ne les exaucera point… Comparez Ésaïe 1.15 ; Jérémie 11.11 ; Proverbes 1.28. Contre les faux prophètes, séducteurs du peuple. Michée décrit en opposition l’activité des vrais prophètes, dont il est le représentant (verset 8).
Développement de ce qui a été déjà dit des faux prophètes, Michée 2.6 ; Michée 2.11.
Qui égarent : en promettant, pourvu qu’on les paie, paix et prospérité aux particuliers ou au peuple, au lieu de leur dénoncer, comme le vrai serviteur de Dieu, leurs péchés (verset 8). Comparez Ésaïe 9.13-15, notes ; Ézéchiel 13.8-10 ; Jérémie 23.16-17.
Quand leurs dents… Ces mots expriment l’avidité de ces gens, toujours prêts à parler selon le vœu des grands qui les nourrissent.
Déclarent la guerre : annoncent la vengeance de Dieu à quiconque est trop pauvre ou trop intègre pour les acheter.
La nuit dont les faux prophètes sont menacés est le symbole du châtiment, comme la lumière est celui du salut ; le soleil qui se couche est celui de leur bonheur (Jérémie 15.9) et le jour qui s’obscurcit pour eux est le jour du jugement, qui est ténèbres et non lumière (Amos 5.18). Rétribution des mensonges par lesquels ils ont obscurci le conseil de Dieu.
Confus… parce qu’à cette heure leurs prophéties antérieures seront démontrées fausses et qu’aucune révélation ne leur sera accordée de Dieu en ce jour de détresse.
Se couvrir la barbe : se voiler le visage jusqu’au nez est un signe de deuil ou de honte (Lévitique 13.45, Ézéchiel 24.17).
Aux prophètes menteurs lâchement vendus aux grands, Michée, dans la juste, conscience de sa mission, oppose le ministère du vrai prophète, tel qu’il le remplit lui-même. Il le fait, revêtu d’une force supérieure : l’Esprit de Dieu lui communique le jugement (le sens du juste et de l’injuste) et la vaillance (le courage moral) qui manquent à ceux qui prophétisent de leur propre fonds (Ézéchiel 13.2-3). Seul le vrai prophète est capable de dévoiler à Israël ses vices, sans erreur comme sans faiblesse et quelles que soient les dispositions du peuple ; ce qui est l’unique moyen de travailler à son salut. Le faux prophète en est incapable : l’intelligence du bien et la fermeté du caractère lui manquent également pour cela.
Michée leur annonce qu’en punition de leurs crimes, Jérusalem sera et détruite et la montagne du temple réduite en une solitude inhabitée.
Avant d’en venir au châtiment, qu’il va énoncer avec plus de précision qu’il ne l’a fait auparavant, le prophète rappelle encore une fois en quelques traits la conduite impie des chefs du peuple.
Écoutez ceci : le résumé de vos crimes (versets 9 à 11) et le châtiment qui s’ensuivra, verset 12).
Comparez pour la fin du verset : Ésaïe 5.20.
Bâtissant… avec le sang… Le sang de ceux qu’on assassine, comme Naboth (1 Rois 21.1-15), pour s’emparer de leurs biens, est pour ainsi dire le mortier avec lequel ils bâtissent. C’est du fruit de leurs injustices et de leurs violences qu’ils prennent de quoi orner Jérusalem de somptueux édifices. Comparez Ésaïe 1.15 ; Ésaïe 1.21.
Les sacrificateurs enseignent… Dépositaires de la loi, ils avaient mission d’en instruire le peuple, et cela, paraît-il, gratuitement. Lévitique 10.11 ; Deutéronome 17.11 ; Jérémie 11.8) ; mais ils ont fait de cet enseignement une source de lucre.
Pour la fin du verset, voir Jérémie 5.12 ; Jérémie 7.4-10.
Comparez le sort semblable prédit à Samarie Michée 1.6.
Sion : la partie de la ville où se trouvait la citadelle royale ; Jérusalem : le reste de la ville.
La montagne du temple est encore spécialement mentionnée, à cause de l’orgueil et de la sécurité que leur inspirait le sanctuaire (Jérémie 7.4).
Deviendra une hauteur boisée. Déchue de sa dignité de sainte montagne de l’Éternel, elle ne sera plus qu’une colline pareille à toute autre et couronnée d’une forêt solitaire. Comparez Ésaïe 32.13-14.
L’accomplissement de cette prophétie, partiel lors de la destruction par les Chaldéens et pendant l’époque malheureuse des Maccabées (voir 1 Maccabées 4.8), a été complet et littéral dans la destruction de Jérusalem par les Romains. Titus fit passer la charrue sur le sol de la ville sainte.
On se rappelle que ce passage servit de justification à Jérémie, accusé de trahison pour avoir prédit la chute de sa patrie (Jérémie 26.18). La traduction que nous donnons ici, nous paraît à la fois plus poétique et plus littérale que celle que nous avions adoptée dans Jérémie. Ce même passage de Jérémie (verset 19) nous apprend quelle impression profonde la prédiction de Michée fit sur le roi Ézéchias : Il craignit et supplia l’Éternel ; et l’Éternel se repentit de ce qu’il avait prononcé contre eux. En d’autres termes, notre prophétie ne fut pas étrangère à la grande réforme entreprise un peu plus tard par ce prince et qui eut pour effet de retarder de plus d’un siècle l’exécution des jugements de Dieu sur Juda.
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